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Gaza

Permis de tuer (3)
L'Europe est coupable
Première partie
Nabil El-Haggar


Photo Unicef

Jeudi 26 février 2009

Quand la vérité n’est pas libre, la liberté n’est pas vraie
Prévert

                Le massacre de 22 jours et nuits est suspendu dans l’attente de l’arrivée de la nouvelle équipe gouvernementale israélienne.
Les heureux survivants sont toujours punis d’un blocus total. Ils respirent encore du Phosphore blanc mélangé à la poudre noire. Ils sont menacés par des tonnes de déchets, des matières toxiques et des munitions non-opérées qui peuvent mettre en péril leur vie à chaque instant.
Ils n’ont pas encore fini de ramasser les corps et ce qu’il en reste, d’un fils ou d’une fille, d’un mari ou d’un cousin recouverts par les décombres.
Ils sont des milliers à devoir survivre sous une tente pour la deuxième fois, soixante ans après avoir étés expulsés par les milices sionistes et avoir étés réduits à la condition de réfugiés à Gaza.

            Les survivants de Gaza et tous les Palestiniens du monde cherchent à comprendre pourquoi le monde a laissé le monstre nommé Israël faire ce qu’il voulait d’eux pendant plus de 22 jours. Pourquoi la Civilisation a laissé faire, alors qu’elle a été informée du massacre en préparation par l’exécuteur, lui-même membre prestigieux du club  des « civilisés ». 

Nous savons que le voyou est protégé et considéré comme une exception par ceux qui l’ont fabriqué. Nous savons qu’il n’a pas pour habitude de demander autorisation. Il décide, informe, exécute sa décision et exige la bénédiction de la famille nommée Europe, laquelle a toujours pensé avoir pour obligation de le cautionner. C’est ainsi que l’Europe se rend complice du monstre depuis soixante ans. L’Europe est deux fois coupable : d’abord par cette complicité, ensuite, ce qui est plus grave, parce qu’elle a trahi ce qu’elle incarnait aux yeux des Palestiniens, le seul espoir qui restait pour eux de voir un monde plus juste ! Un monde qui soit capable d’arrêter le crime qu’ils subissent depuis 60 ans!
L’Europe est définitivement deux fois coupable !

D’abord, afficher le ton

            Dès le 29 décembre Le Monde[1]  affiche, à sa une, le ton qui sera celui des médias et des Etats européens : « Israël s’apprête à intervenir militairement dans la bande de Gaza »… « Même l’écrivain Amos Oz, connu pour ses idées pacifistes, estime que les souffrances des civils vivant à la périphérie de la bande de Gaza ne peuvent plus continuer ». 

Ne doit-on pas comprendre qu’Israël doit se défendre, parce que c’est lui qui est agressé ?
Le Monde ajoute : « une intervention de Tsahel n’est pas sans risque, la population civile risque d’en être la première victime ».
Le ton est donné, le massacre aura lieu ! mais il ne devra ni ne sera appelé par son nom. On dira « Offensive », « intervention », « riposte », « actions anti-terroristes » que l’enfant prodige nommé le Tsahel mènera en notre nom à nous tous !
Quelle est sympathique cette proximité qu’éprouvent les médias européens, comme la grande majorité de la classe politique européenne, avec cette « chose » qui porte une si jolie appellation : Tsahel !

C’est si mignon de s’appeler Tsahel que l’on en oublie qu’il s’agit de la cinquième puissance militaire du monde, ayant en sa possession 200 têtes nucléaires opérationnelles. 

Le lundi 29 décembre, le Quai d’Orsay décline la position officielle de la France en trois points : 1- « La priorité », selon Paris, est « la fin des hostilités  et le retour de la trêve ».
2- La France estime, ensuite, que « l’urgence est aussi humanitaire » et propose « une aide médicale et alimentaire supplémentaire à la population de Gaza ».
3- Enfin, à moyen terme, « dans la perspective d’une trêve renouvelée qui permettrait de réexaminer les modalités du bouclage de Gaza par Israël, la France a fait part de la disponibilité européenne pour reprendre un rôle « dans l’assistance aux points de passage de Gaza qui doivent rester ouverts »[2].

A la lecture de ce communiqué au nom de la République, on pourrait croire qu’il s’agit d’une crise humanitaire : on parle d’hostilités que l’on ne juge pas. Il y a des victimes que l’on doit aider, sans jamais en désigner les responsables. Pas un mot sur l’occupation, encore moins sur la colonisation, une acceptation du blocus de Gaza que l’on pourrait améliorer…

Mardi 30 décembre, les ministres européens se réunissent à Paris. « En dépit de leurs divergences sur l’opération – jugée légitime par les uns, disproportionnée par les autres – les Européens sont parvenus à une déclaration commune réitérant les appels au cessez-le-feu. »
Voilà tout ce dont, après une longue discussion, les responsables européens ont été capables pour tenter de sauver les centaines et les milliers de palestiniens dont le sort avait déjà été scellé ! 

Le premier janvier le président français reçoit la ministre israélienne des affaires étrangères. Il demande un cessez-le-feu qui lui sera refusé ! Depuis le premier janvier, les Européens n’ont fait que des allers retours entre l’Europe et le Moyen-Orient pour l’obtention d’une trêve !
La vérité est que pendant ce temps, ils laissaient sciemment le temps à Israël pour continuer sa sale besogne. 

Selon des médecins français, La diplomatie de notre pays a refusé l’autorisation de faire venir en France des jeunes palestiniens atteints des blessures graves !
Pourquoi ce refus, qui semble étonnant, étant donné que la France a beaucoup insisté sur l’humanitaire ? La seule réponse convaincante est que notre diplomatie a cédé aux pressions d’Israël qui ne voulait pas de témoins de sa barbarie sur le territoire français. 

Le temps du massacre est passé ! Dernier geste « symbolique » : celui d’envoyer en mission la frégate française "Germinal", qui a procédé pendant deux semaines à des actions de surveillance dans les eaux internationales au large de la Bande de Gaza. Ce bâtiment agissait "en appui aux actions menées par l'Egypte et Israël contre la contrebande d'armes à destination de Gaza", précise la présidence française dans un communiqué. Le symbole est fort : La France se considère comme militairement alliée à Israël. C’est ainsi que pour la première fois depuis la guerre de Suez de 1956 elle participe à une opération militaire au profit d’Israël. Le symbole est aussi fort car il indique sans ambiguïté une position politique appuyée par une participation armée au côté d’Israël. Ce soutien solennel à Israël fait définitivement tomber les masques ! Selon l’Europe, l’agressé c’est Israël, les agresseurs sont les Palestiniens. Ces agresseurs doivent être traités comme des bandes armées, qu’il faut empêcher de s’équiper. Par là même, l’Europe dénie aux Palestiniens le droit à la résistance.
Quant à Israël, bien sûr, on trouve naturel qu’il continue à développer son impitoyable et meurtrière machine de guerre. L’Europe est coupable !

Deux mondes, deux mesures

            Alors que le blocus barbare affamait et tuait les Palestiniens à Gaza et que le mur de l’apartheid comme les centaines de barrages continuent à pourrir quotidiennement la vie à des centaines de milliers de Palestiniens en Cisjordanie, alors qu’Israël continue la colonisation de la Cisjordanie à un rythme effréné, alors que plus de onze mille Palestiniens croupissent dans les prisons israéliennes depuis de longues années sans jugement, sous la torture et souvent pour de raisons de résistance politique, l’Europe sous présidence française a décidé de rehausser ses relations avec Israël. Ce qui est contraire à la charte européenne.

L’Europe est coupable !

Le cas du soldat Gilad Shalit, capturé en juin 2006 par le Hamas est instructif. Le Hamas, rappelons-le n’est pas un Etat mais un groupe armé de résistance. La capture de Shalit a mobilisé les autorités françaises, alors que celui-ci est caporal dans l’armée israélienne, il s’est fait capturer en uniforme dans une mission de guerre (Israël est en guerre permanente contre « le terrorisme »). Il n’a pas été à Gaza dans une mission politique et encore moins humanitaire ! La famille du soldat a été reçue trois fois par le président de la République !
Le 16 décembre 2008, le Conseil de Paris a décidé d’attribuer le titre de Citoyen d’Honneur de la Ville de Paris à Gilad Shalit, en signe de solidarité de l’ensemble des Parisiens envers ce jeune franco-israélien de 22 ans. Faut-il en déduire que le Maire de Paris et son conseil considèrent que la guerre que mène Israël contre les Palestiniens est une guerre franco israélienne ? Serait-elle une guerre dont les intérêts sont liées à ceux de la France et des Français?  

Dans l’autre monde, Salah Hamouri, un jeune Français citoyen ordinaire de père palestinien, qui aura 24 ans en avril prochain, va entamer sa 5e année d'emprisonnement en Israël. Condamné à 7 ans de prison par un tribunal militaire israélien le 17 avril 2008, il a été jugé et condamné sans preuves ni aveux et sans que sa défense puisse être assurée selon les règles fondamentales du droit de la défense. Ce que les autorités israéliennes appellent « une punition préventive ». Son arrestation, comme sa condamnation et son emprisonnement, sont illégaux au regard du droit international (car réalisés en territoire occupé par une puissance occupante).
Aucune autorité française, ni l’Etat ni « saint Kouchner », ni le Maire de Paris n’ont été émus d’une telle injustice à l’encontre d’un citoyen français qui n’a rien fait de répréhensible.
Plus grave, ils ne semblent pas plus que l’ensemble des autorités européennes, être scandalisés des pratiques israéliennes vieilles de 60 ans telle que « la punition collective », « la punition préventive » et « l’assassinat préventif ». Autrement, comment comprendre que les autorités de notre pays n’ont pas cherché à obtenir au moins, les preuves d’accusation fournies par le tribunal d’un Etat très ami ! Pourquoi rien n’a-t-il été fait pour libérer ce jeune homme ?

Les exemples qui attestent une permanente complicité de la France et de l’Europe avec Israël sont trop nombreux pour êtres tous cités.  Cette complicité européenne est bien grave pour l’Europe elle- même pour au moins deux raisons :

La première est que le massacre de Gaza engendre naturellement une facture  à acquitter dont une part non négligeable devra être acquittée par l’Europe. La deuxième raison est que cette complicité éthiquement et politiquement scandaleuse donnerait raison à Henry Kissinger qui disait : « Les grandes puissances n’ont pas de principes, elles n’ont que des intérêts ».

 

Nabil El-Haggar
Université de Lille

A suivre :

L’Europe coupable, deuxième partie

 

[1] Pour information, le Monde a toujours refusé de publier mes textes sur la Palestine et notamment «Accompagnez moi à Gaza »,  «permis de tuer» et «permis de tuer (2), les pays arabes».

[2] Le Monde, 31 décembre, 2008, p5



Source : Nabil El-Haggar


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