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La fonction publique était en grève
hier et appelle à "un changement urgent"
Vive tension
sociale au Maroc
Merzak Tigrine
Manifestation à Rabat - Rafael Marchante/Reuters
Jeudi 10 février 2011
Outre
l’appel, sur Facebook, à une grande marche pour le 20
février prochain, suivi par celui de l’association Justice
et Bienfaisance, pour un “changement urgent”, le
Maroc a été secoué, hier, par une grève des personnels des
différents départements ministériels, des collectivités
locales et autres établissements publics. Des avertissements
à accélérer les réformes promises.
Pour protester
contre la dégradation du pouvoir d'achat, l'échec du
dialogue social depuis 2008 et les tergiversations du
gouvernement dans l'application de ses engagements relatifs
à la suppression des échelles de un à quatre, les personnels
de différents départements ministériels, les collectivités
locales et les établissements publics marocains soumis au
statut de la Fonction publique, ont observé, hier, une grève
qui a été suivie d’un sit-in devant le siège du ministère de
la Modernisation des secteurs publics. C’est à l’appel de
l’Union syndicale des fonctionnaires, affiliée à l’Union
marocaine du travail (UMT) que cette action a été décidée.
Elle revendique notamment une augmentation générale des
salaires, la suppression des échelles de 1 à 4 dans les
collectivités locales et les établissements publics et une
promotion exceptionnelle des fonctionnaires depuis 2003.
Elle réclame aussi le respect des libertés syndicales.
Pour rappel, les fonctionnaires des collectivités locales
marocaines avaient observé, fin janvier, une grève de 24
heures en signe de rejet d’une décision unilatérale prise
par le ministère de tutelle de promulguer des décrets
relatifs aux statuts spéciaux pour certaines
catégories de fonctionnaires. Dans cette ambiance de
protestation sociale, le mouvement islamiste Justice et
bienfaisance, considéré comme l'un des plus importants du
Maroc, avait appelé lundi à un “changement démocratique
urgent” et à “l'établissement de mécanismes mettant fin à
l'autocratie”. Cet appel intervient après celui du
“mouvement du 20 février, le peuple veut le changement” et
du “Mouvement de liberté et démocratie maintenant”, ainsi
que d’autres groupes qui opèrent de façon similaire à ceux
des internautes tunisiens et égyptiens avec les conséquences
que tout un chacun connaît. “Nous appelons tous les
Marocains à manifester le 20 février pour la dignité du
peuple et pour des réformes démocratiques”, indique la
“plate-forme” de ce groupe créé sur Facebook.
Quant au texte publié par l’association Justice et
Bienfaisance, sur son site internet, il “salue les
manifestations en Tunisie et en Égypte” et appelle “à un
changement fondamental démocratique urgent (...) afin
d'instaurer une véritable séparation des pouvoirs”. “Des
millions de Marocains souffrent de la pauvreté et du manque.
Il est injuste que la richesse du pays soit accaparée par
une minorité”, souligne le mouvement. “Nous demandons aux
autorités de mettre un terme à la “benalisation” que connaît
le Maroc et à crédibiliser les institutions
constitutionnelles”, précise encore Justice et Bienfaisance.
Dans le même ordre d’idées, le commissaire européen chargé
de l'Élargissement, Stefan Füle, a estimé que le Maroc doit
veiller à ce que les bénéfices du développement économique
“soient partagés par tout le peuple marocain”, en évoquant
les “leçons” des événements de Tunisie et d'Égypte.
Soulignant que sa visite au Maroc intervenait quelques
semaines après la révolte tunisienne qui a chassé
l'ex-président Ben Ali et tourné l'attention sur la région
du Maghreb, Füle a souhaité que les autorités marocaines
“avancent davantage” sur la voie des réformes qu'elles ont
engagées. Il a notamment cité les domaines de “l'éradication
de la pauvreté, du développement social (...) des réformes
démocratiques, de la liberté d'expression et de la réforme
de la justice”, lors d'un point de presse commun avec le
chef de la diplomatie marocaine Taieb Fassi Fihri.
Évoquant les “leçons à tirer” de ce qui vient de se passer
en Tunisie, M. Füle a souligné que le “développement ne
devrait jamais sous-estimer les aspirations légitimes des
jeunes à accéder au travail et à la liberté d'expression”.
Il a aussi insisté sur l'importance d'éviter un écart trop
important entre développement économique et développement
humain et social. Le commissaire européen a indiqué avoir
souligné, lors de ses entretiens à Rabat, “l'importance de
veiller à ce que les bénéfices du processus de réforme
soient partagés par tout le peuple marocain”.
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Publié le 10 février 2011 avec l'aimable autorisation de
Liberté.
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