Analyse
A propos de la bombe
nucléaire de l'Iran
Esquisse d'une théorie générale
de l'inconscient religieux du cerveau des démocraties
Manuel de Diéguez
Manuel de Diéguez
Lundi 21 septembre 2009
Le Général de Gaulle
usait souvent de l'expression: "Tout est simple et clair".
Ce qui se révèle le plus simple et le plus clair aujourd'hui,
c'est que l'empire américain est nécessairement illégitime et
qu'il ne pourra jamais se fonder sur le droit international
public précisément pour la raison la plus évidente du monde, à
savoir que les principes démocratiques proclament la
souveraineté des Etats et la liberté entière des peuples à
disposer d'eux-mêmes sur le théâtre du monde. Aucune nation
démocratique n'est autorisée à engranger les bénéfices d'une
guerre victorieuse, même si son trophée est mondial. C'est cela
que toute la décolonisation a entériné.
Mais si l'existence
même d'un empire américain qui étend désormais sa puissance
militaire à toute la terre habitée et qui enserre notre
astéroïde dans le réseau omniprésent de ses garnisons, si cette
réalité, dis-je est étrangère au jus gentium actuel,
qu'appartenait-il à la France seule d'entreprendre? Comme aucune
nation ne peut aller camper de ce pas sur une autre planète, le
Général de Gaulle a choisi la solution la plus cartésienne,
celle qui, selon le Discours de la méthode, n'est
autre que la voix du bon sens. La nation de 1789 avait le devoir
de donner au monde un exemple mémorable de l'exemplarité de sa
destinée. Pour cela il lui suffisait de rester fièrement debout
sur son pré carré et d'entretenir avec l'empire triomphant des
relations de souverain à souverain ; et dût cet exploit durer un
siècle entier, quelle victoire que d'écrire la vraie histoire du
monde, celle de vivre avec soi-même, le secum vivere des
Romains!
Pourquoi avons-nous
fini par nous ranger sous le sceptre et la tiare de l'empire
américain à l'heure même de l'agonie de sa puissance, pourquoi
avons-nous oublié que les lauriers artificiels que la raison
pratique s'achète sur les marchés se flétrissent bientôt ,
pourquoi avons-nous oublié que seule la grandeur et la droiture
de l'intelligence politique des peuples leur donne une mémoire?
Et pourtant, nous ne
figurons pas encore parmi les peuples rangés à la queue leu leu
sous le commandement de la nouvelle Rome, nous n'avons pas notre
place aux côtés d'une Allemagne occupée par deux cents
puissantes places fortes de l'étranger incrustées à jamais sur
son territoire, nous n'avons que faire du voisinage d'une Italie
quadrillée par les cent trente sept forteresses inexpugnables de
son vainqueur depuis 1944 et nous ouvrons un œil attentif sur le
Japon qui commence seulement de sortir de son sommeil et qui
tente vainement de retirer son garrot avec la permission de son
tenace protecteur. Mais la vanité des vaincus leur fait réclamer
hochets et grelots de leur vainqueur. Nous sommes flattés de ce
qu'un général français vienne de se voir placé sous les ordres
de notre maître à la tête de l'armée des enrubannés de l'OTAN.
Non seulement notre nation n'aura pas sauvé l'honneur de
l'Europe asservie, mais la postérité dira qu'elle s'est mise
dans les fers d'une puissance à l'agonie, tellement
l'effondrement du dollar est imminent. Même si M. Barack Obama
parvenait à faire adopter à la longue la loi sur la santé qui
pousse la générosité démocratique jusqu'à accorder des soins
médicaux aux pauvres de son pays, il n'en aura pas moins été
démontré à la face de toutes les nations que ce ne sont ni le
peuple américain, ni le congrès qui font la loi en Amérique,
mais de puissants groupes financiers. Le prestige de l'empire en
restera irrémédiablement altéré.
Mais la défaite
militaire imminente en Afghanistan et en Irak fera dévaler la
vraie crise économique sur le monde, celle qui ne sera ni le
fruit du nouveau gangstérisme international des banques, ni de
l'étranglement du marché mondial du travail, ni de la révolte
sociale sur les cinq continents, mais de la dette de cinquante
mille milliards de dollars - je dis bien, cinquante mille
milliards de dollars - accumulée en trois-quarts de siècle par
une occupation militaire du monde trop titanesque pour qu'aucun
Hercule n'ait les épaules pour la porter.
Rome est proche de
s'effondrer comme un château de cartes sous le poids de mille
deux-cents légions barricadées sur un astéroïde qui défie leur
taille, la nouvelle Rome est proche de laisser le souvenir d'une
puissance tellement éphémère qu'un siècle aura suffi à anéantir
son délire, tout simplement parce que, dirait le Général, il est
clair qu'un édifice qui repose sur une monnaie fictive et
fantasmatique par nature. Demain, la Chine, la Russie, l'Inde,
l'Amérique du Sud vont jeter dans la poussière la relique
tétanisante qu'on appelait le dollar.
Nous voici ramenés à
la question de fond: si les principes de la démocratie ne
permettent pas de légitimer des empires, la preuve ne pourra en
être apportée qu'à l'écoute des leçons d'une critique
anthropologique des relations que la politique entretient avec
le sacré depuis les origines parce que tout empire est
théocratique et inquisitorial par nature, de sorte qu'il faut
observer les deux théologies armées jusqu'aux dents que
confessent les démocraties. L'une tente d'imposer sa loi sous le
vêtement du nouveau Golgotha d'Israël à la Palestine, l'autre
voudrait citer l'Iran à comparaître devant le tribunal de
l'inquisition anti-nucléaire.
Le 28 septembre, je
mettrai en ligne une psychanalyse anthropologique parallèle à
celle d'aujourd'hui, car Israël voudrait imposer sa Jérusalem
céleste à une Palestine rebelle à se coucher sur le divan de
Jahvé. Les deux études tenteront d'éclairer des lumières d'une
psychobiologie du cerveau simiohumain, l'interdiction adressée
aux démocraties depuis Périclès de fonder des empires viables,
mais seulement des dictatures religieuses cachées sous leurs
chasubles.
1
- Qu'est-ce qu'une religion simiohumaine ?
2
- Notre rendez-vous cérébral avec l'Iran
3
- L'inquisition démocratique
4
- L'hérésie d'aujourd'hui
5
- Le soutien des " suppôts de l'hérésie "
6
- La politique du tribut et la démocratie
7
- Qui dispose du sacré démocratique?
8
- La psychanalyse de la politique
9-
L'avenir de la psychanalyse de l'histoire
10-
L'éternel Gogotha
1 - Qu'est-ce qu'une religion
simiohumaine ?
Deux siècles après
la parution du célèbre Essai sur l'entendement humain
de David Hume, quelle révolution de notre connaissance du
fonctionnement de notre boîte osseuse ! Nous savons désormais
que notre encéphale schizoïde nous installe à des degrés divers
et changeants dans des mondes oniriques et que notre espèce se
réfère à des réseaux de signifiants fabuleux par définition.
Nous vivons tout enveloppés dans les songes sacrés que nous
tisse notre imagination en folie.
Hume se doutait déjà
que nous sommes le seul animal dont le domicile mental est
fantasmatique et qui se localise dans un vide fictivement habité
par des dieux; mais il ignorait pourquoi nous sommes livrés de
naissance à un théâtre cérébral dément et qui nous met en
porte-à-faux entre deux univers inconciliables, celui, limité,
de nos sens et celui, illimité, qui nous détache du visible - et
d'abord de notre propre corps - pour nous livrer pieds et poings
liés à des représentations délirantes du cosmos. Le grand
Anglais ignorait également que nous nous forgeons des relais
mentaux afin de nous connecter à l'insaisissable. S'il avait su
que nous trouvons notre assise psychique dans l'arène de nos
présupposés mythologiques et qu'un surnaturel acquis ou admis
sans examen nous permet de dresser les piliers du surréel qui
nous arrimera à notre condition d'animal déhanché dans
l'immensité, sans doute aurait-il reculé d'effroi devant la
trappe dans laquelle nous sommes tombés. Le malheureux est mort
en 1776. Depuis lors, nous nous essayons à décoder le capital
psychobiologique qui nous élève un peu au-dessus du sol et nous
transporte inexorablement dans un fantastique religieux ou
idéologique.
Cependant, l'homme
qui avait un siècle d'avance sur Kant demeure actuel en ce qu'il
confirme que ce sont fatalement nos théologies qui se présentent
en témoins assermentés de notre déphasage natif et de notre
multipolarité incontrôlable: car sitôt qu'une plateforme de
référence de type cosmologique s'est installée dans la boîte
osseuse de notre espèce, notre encéphale commence de penser,
donc de raisonner avec fougue, détermination et conviction. Pour
cela, nous enchaînons des arguments dont la logique interne
ignore que leur fondement est fantomal par définition et ne nous
fournit jamais que des constellations mentales livrées aux
joutes retentissantes auxquelles notre langage prête ses
tambours.
Nous avons appris
depuis lors que la fonction principale à laquelle s'exercent nos
religions - celle de nous bâtir des édifices impérissables et
que nous qualifions de rationnels - ne nous livre jamais que des
représentations éphémères du cosmos et qui ne servent que pour
quelques générations d'habitacles cérébraux et de focalisateurs
sociaux et héréditaires aux aliénés d'un asile. C'est ainsi que
le christianisme s'est fissuré à présupposer qu'il existerait un
géniteur solitaire de l'univers à l'égard duquel ses créatures
se seraient rendues coupables du péché ineffaçable de
désobéissance, mais que leur châtiment éternel aurait pourtant
pris fin ou se serait du moins trouvé momentanément suspendu
grâce à l'intervention énergique du fils unique du monstre
céleste. Car sa progéniture se serait donné librement à occire
sous le couteau de boucher de son grand sacrificateur de père
afin d'acheter son pardon au prix de son cadavre très précieux.
Une réflexion sérieuse sur la cruauté du mythe nous conduirait à
une analyse critique du marché multiséculaire des offrandes de
notre vie à une idole insatiable et sauvage. Dans ce commerce
coûteux, les montants respectifs de notre dette et de notre
crédit auraient été âprement négociés afin de convaincre les
nations de la nécessité de verser à leur maître céleste un
tribut perpétuel et impossible à chiffrer afin de discipliner en
permanence une espèce indocile ou franchement rebelle.
2 - Notre rendez-vous cérébral
avec l'Iran
Mais, depuis les
origines, ce n'est jamais ce débat central qui nourrit la
controverse; l'argumentation des disputeurs s'alimente seulement
d'aménagements marginaux de la fable. A partir du XVIe siècle,
il s'est exclusivement agi de savoir si le fils de la bête
féroce ci-dessus évoquée se trouve depuis lors physiquement
immolé tous les jours "que Dieu fait" sur ses autels et dans le
monde entier, parce que l'idole réclame inlassablement la
monnaie d'échange saignante du "rachat" d'une valeur
incalculable qu'il a consenti à octroyer au pécheur, mais sur le
mode acharné et répétitif jusqu'à l'obsession. Il s'agit donc de
savoir si la victime torturée et hors de prix se trouve exposée
en chair et en os sur l'offertoire ou seulement à titre
symbolique. Il est saisissant que la pesée de la notion même de
sacrifice religieux, qu'il soit physique ou figuré se trouve
écartée d'office du débat au profit d'une simple annexe du
meurtre sacré.
Pourquoi l'examen
paniqué de l'enjeu anthropologique et politique de ce gibet se
trouve-t-il soustrait d'autorité à l'analyse? La pesée de ce
type de comportement angoissé de notre cerveau paraîtrait
anachronique ou résiduel si son universalité psycho politique ne
donnait à la simianthropologie critique son principal champ
d'observation de l'histoire d'hier, d'aujourd'hui et de demain.
En effet, le premier
coup de force des civilisations de l'effroi est toujours celui
qui permet à la puissance politique dominante du moment
d'imposer dans l'arène des siècles l'échiquier mental
secrètement tremblant auquel le débat sera condamné à se
cantonner et qu'il lui sera interdit de quitter seulement d'un
pouce. Mais le problème prétendument cerné d'avance par
l'axiomatique matamoresque de la religion de la potence chargée
de le prédéfinir et de le situer d'autorité dans l'enceinte
guerrière de la révélation religieuse ressortira, en réalité, à
une orthodoxie toute partielle et délimitera si peu la question
réellement posée aux Etats et à leurs dirigeants que la vraie
difficulté se trouvera tout entière située hors du territoire
confessionnel et dûment imposée aux gouvernements par le maître
du jeu - le souverain des nues.
L'exemple de la
controverse faussée et biaisée sur la dangerosité de la future
bombe nucléaire iranienne en fournit une illustration
théologique donc anthropologique particulièrement saisissante.
Car la vraie problématique qui débattrait de la légitimité de la
communauté internationale à imposer à la Perse d'aujourd'hui
l'axiomatique théologique préforgée selon laquelle seul son
armement nucléaire à elle serait illégitime par nature et par
définition, tandis que celui de la Chine, de la Russie, du
Pakistan, de l'Amérique, de l'Angleterre, de la France et
surtout d'Israël serait conforme à l'orthodoxie politique admise
d'avance par le monde entier de la Liberté et de la Justice.
Mais la puissance
immense d'imposer à l'humanité entière un échiquier cérébral
déterminé alors que, de toute évidence, la question déborde une
problématique délibérément rétrécie et qui la rend
spectaculairement partielle, cette puissance, dis-je, puise le
pouvoir de convaincre attaché à l' arbitraire qui l'inspire dans
la mentalité demeurée théologique par nature des démocraties
modernes. De même que l'Eglise actuelle dicte encore au
théologien et au croyant son propre épicentre mental, donc le
territoire restreint sur lequel il sera permis aux fidèles de
débattre seulement de la substance sanglante ou figurée de la
victime trucidée sur l'autel du sacrifice et jamais de
l'économie entière des mythes religieux de type sacrificiel, de
même les Etats-Unis et leur fils unique, Israël, définissent le
péché originel de désobéissance de la planète à une orthodoxie
nucléaire chargée de localiser le seul sacrilège réputé réel,
celui de l'Iran.
3 - L'inquisition démocratique
Comment se fait-il
que le comportement du cerveau simiohumain soit le même dans la
confession religieuse que dans la confession démocratique ?
Comment se fait-il que le monde entier tienne pour établi par
une annonciation indiscutable que la question n'est nullement de
savoir si Téhéran est autorisé ou non à désobéir au père éternel
et à croquer la même pomme dans l'Eden que les autres nations
nucléaires, parce que le débat a été tranché d'avance par la
voix du souverain du monde ? Si le pécheur désobéit à l'oracle
caché derrière les décors, il se rend coupable par nature et par
définition de briser l'interdit théologique absolu du moment.
Mais la focalisation du débat sur un point du mythe soustrait
d'autorité à la contestation permet précisément à
l'anthropologie critique d'observer le lien serré qui relie
fatalement l'apologie d'une orthodoxie impérieuse et tenue pour
irréfutable à la mise en place des mentalités inquisitoriales
modernes. Quelle et la logique interne qui commande le joug
cérébral auquel toutes les orthodoxies sont soumises et dont
elles se révèlent viscéralement tributaires?
Quand l'Eglise
condamnait une hérésie, il n'était jamais question de débattre
de son contenu moral, intellectuel ou politique, mais
exclusivement de savoir si l'hérésiarque allait persévérer dans
son erreur diabolique ou s'il était prêt à se rétracter
solennellement sous une contrainte toujours crûment formulée -
c'est-à-dire, rien de moins que la peur de la mort, metus
mortis. Peu importait que le renoncement à une déviation
coupable ne fût pas argumenté pour un sou - il aurait été jugé
oiseux de perdre son temps dans un débat sacrilège par
définition et sur un point de doctrine inébranlable par nature,
donc substantifiquement blasphématoire. Seule comptait la
confession du retour du pécheur à une vérité religieuse imposée
par l'autorité ecclésiale habilitée à remplir cet office sans
sourciller.
Or les modalités
qu'emprunte carrément et sans se cacher l'inquisition politique
qu'exercent désormais les démocraties modernes illustre tout
pareillement l'inaltérabilité catéchétique de la menace
théologique mal cachée sous des déguisements d'apparence
charitable. On lira dans la presse (Le Monde, 11
septembre 2009) : "Alors que la pression s'accroît sur l'Iran
à l'approche de l'échéance (fin septembre) que lui a fixée
l'administration américaine pour engager un dialogue sur ses
activités nucléaires, Téhéran a transmis, mercredi 9 septembre,
un texte de "propositions" aux grandes puissances. "
4 - L'hérésie d'aujourd'hui
Que se serait-il
passé si Luther avait candidement soumis à la bienveillance de
Rome les "propositions" qu'il a dû se résigner à
afficher sur les portes de l'Eglise de Wittenberg? Sans doute le
Saint Siège lui aurait-il tenu à peu près ce langage: "Les
Etats-Unis se sont déclarés prêts à en "étudier attentivement"
le contenu. Mais ils ont aussi pris soin de conférer un nouveau
sentiment d'urgence au dossier nucléaire. Selon Washington, la
République islamique serait en mesure de basculer, si elle le
décidait, vers la production de matière fissile pour une arme
atomique." (Ibid.)
On voit que "l'étude
attentive" de l'hérésie par le tribunal qui la proclame
luciférienne s'accompagne fatalement d'une menace à peine
dissimulée: Luther pourrait passer à l'action profanatrice, mais
si l'on parvenait à le convaincre de "l'urgence" de se
repentir avant qu'il ne franchisse le pas de l'excommunication
majeure et et qu'il ne bascule irrémédiablement dans la
damnation, une capitulation préventive du pécheur peut encore
être espérée de tous les dévots.
C'est pourquoi le
Saint Siège des modernes tarde un instant à lancer la foudre
ultime: "Cette mise en garde semblait destinée à rallier des
soutiens en vue d'éventuelles sanctions internationales
nouvelles contre l'Iran - un scénario auquel la Russie et la
Chine s'opposent, pour l'heure, de la manière la plus ferme."
Mais Luther ne cède
pas d'un pouce : "Selon nos informations, le contenu du texte
iranien n'apporte rien de consistant ni de nouveau concernant le
sujet de fond, à savoir le programme nucléaire et les demandes
faites à l'Iran par le Conseil de sécurité de l'ONU depuis 2006.
Il y est question de "diverses questions mondiales", a seulement
précisé Téhéran. " (Ibid.)
On voit bien que
l'hérésiarque est réputé coupable de poser les vraies questions
et que c'est de dévier du sujet de fond prédéfini par
l'inquisiteur qu'il se refuse. Que dit-il? Il revendique rien de
moins que le droit de Téhéran d'ébranler le sceptre atomique
d'Israël dans la région : "Mahmoud Ahmadinejad, avait réitéré
une position exprimée depuis longtemps par l'Iran : le dossier
nucléaire est "clos" et le pays ne renoncera pas à la
technologie dont il s'est doté selon son "droit inaliénable". Ce
qui semblait exclure, une fois de plus, un scénario de
rapprochement, même si M. Ahmadinejad se disait par ailleurs
prêt à un "débat public" avec M. Obama. " (Ibid.)
On voit que les "hérésies"
sont mises en évidence par les guillemets qui les signalent à
l'attention du tribunal. Mais sur quoi porterait le "débat
public" entre Luther et le Saint Siège? Sur le fait
qu'Israël feint de trouver "lourde de dangers" la
progression sacrilège des recherches nucléaires de l'Iran. Mais,
dans ce cas, il y aurait un débat anthropologique sur le
voilement de face qui interdit de se demander ce qu'il advient
du sacrifice de l'autel quand plusieurs dieux, tous uniques, se
partagent une seule et même foudre et que non seulement leurs
apocalypses se neutralisent réciproquement, mais se voient
toutes condamnées au ridicule de faire long feu dans le vide de
l'immensité.
Du coup, l'étude
scientifique de la structure mentale et de la finalité politique
des sacrifices simiohumains en général, puis du fondement de la
piété prétendument universelle, puis du culte de la liberté et
de la justice imposerait une problématique plus profonde au
débat demeuré si superficiel dont les démocraties dites
rationnelles se contentent. Mais la Rome nouvelle est devenue
acéphale en diable : comme l'ancienne, elle est tenue de donner
des preuves de sa fermeté doctrinale à la droite orthodoxe de la
Maison Blanche : "Parallèlement, à Washington, M.Obama sait
qu'il doit éviter d'apparaître "carterisé", comme le disent
certains diplomates, en référence à l'ancien président Jimmy
Carter qui, en 1979-1980, avait gagné la réputation d'être trop
faible face aux Iraniens. "(Ibid.)
5 - Le soutien des "suppôts de
l'hérésie"
De même que Luther
avait l'appui de l'Electeur de Saxe, Frédéric le Sage, qui l'a
caché après son excommunication par Rome le 15 juin 1520 - le
pape Léon X l'avait condamné par la bulle Exsurge Domine et
ordonné qu'on brulât en public ses quatre-vingt quinze thèses -
Téhéran jouit d'appuis non négligeables: "Pendant ce temps,
les signaux envoyés par la Russie et la Chine vont nettement à
l'encontre des desiderata américains et européens. Le 2
septembre, à Francfort, lors d'une réunion des Six, les
émissaires russe et chinois ont catégoriquement refusé que des
sanctions soient discutées fin septembre au niveau de
responsabilité des ministres et en marge de l'Assemblée générale
de l'ONU. Ils ont même suggéré que les "gestes" de l'Iran soient
salués dans un texte commun. Une initiative que les Occidentaux
ont aussitôt rejetée. "(Ibid.)
Pis que cela : "Moscou
a clairement signalé, ce mois-ci, son opposition à toute
politique de sanctions accrues contre l'Iran, même si ce pays ne
répond pas aux demandes formulées par le Conseil de sécurité de
l'ONU (suspension de l'enrichissement d'uranium, et transparence
sur les prépâratifs nucléaires).(…) Ainsi, comme cela a été le
cas depuis le transfert du dossier nucléaire iranien au Conseil
de sécurité de l'ONU en 2006, Moscou actionne de puissants
freins pour alléger la pression sur Téhéran. Le problème est que
la nouvelle donne instaurée par l'équipe Obama était censée
attirer la Russie. Celle-ci consiste toujours, comme l'a répété
Vladimir Poutine, le premier ministre, à démentir qu'il y ait
une dimension militaire aux travaux nucléaires iraniens. En
privé, les Russes ne croient pas que l'Iran décidera de franchir
l'étape de fabrication de l'arme suprême, même s'il se dote des
moyens pour y parvenir. " (Le Monde , 16 septembre
2009)
Ce point est
important du point de vue anthropologique : il démontre que la
puissance de l'hérésie est si grande que la Russie ne saurait
rappeler ni le caractère obsolète de l'arme nucléaire, dont
l'inanité militaire est reconnue par tous les experts
internationaux depuis trente ans, ni que M. Ahmadinejad, qui
n'est pas un sot, l'a souligné lui-même depuis longtemps. Mais
de même que la prétendue présence physique de la chair et du
sang de la victime sur l'autel des chrétiens frappe les
imaginations et présente, de ce seul fait, une grande puissance
politique, de même le mythe de l'atome guerrier impressionne le
cerveau simiohumain. C'est pourquoi Luther lui-même n'a pas osé
nier la "présence réelle" du crucifié sur les offertoires
- il y a fallu l'audace intellectuelle de Calvin, et encore
celui-ci n'a-t-il pas réfuté le mythe central du "rachat"
par le meurtre d'un innocent, donc du salut par la potence,
tellement le simianthrope n'entend que la voix du sang de
l'histoire et de la politique.
6 - La politique du tribut de
l'autel et la démocratie
Le cerveau
simiohumain se libère ou s'auto-vassalise toujours et en tous
lieux à l'école des souverains de sa boîte osseuse. Luther s'est
contenté de faire exploser l'échiquier de la théologie ecclésio-centriste
de son temps par la substitution de l' "inspiration
spirituelle" qu'il recevait des Saintes Ecritures à
celle, toute pratique et platement catéchétique que professait
la hiérarchie romaine. Mais l'encéphale des semi évadés de la
zoologie n'a pas changé de nature : tantôt il s'identifie à
l'identité psycho-cérébrale qu'impose à une société une
orthodoxie hyper attentive à confiner dans les marges et à
invalider la contestation d'une doctrine dont la clôture sur
elle-même se veut infranchissable, tantôt il ouvre des brèches
partielles dans les murailles de la forteresse et escalade les
remparts pour étendre son regard à un paysage un peu plus
étendu. Mais les deux attitudes répondent à l'identité close ou
ouverte d'une espèce qui n'habite jamais que des mondes
oniriques inégalement et différemment cadenassés. C'est dire que
la vraie liberté est un apanage de l'intelligence et d'elle
seule ; c'est redire, avec Socrate, qu'il n'y a d'autre courage
et d'autre frayeur des évadés de la nuit animale que de briser
leurs geôles cérébrales.
Mais c'est dire
également que le cœur battant de la politique tient au pouvoir
d'imposer à l'adversaire la problématique dans laquelle il sera
contraint de s'enfermer à double tour. Cicéron modifie le
fonctionnement de l'encéphale romain - donc le champ visuel des
Sénateurs de son temps - à jeter par terre toute la
problématique juridique de la définition du meurtre fondée sur
la loi des Douze Tables - il leur impose la notion
extraordinaire de légitime défense. De même, il livre au
désordre la tête des Sénateurs en apostrophant le sénateur
Catilina en pleine séance. De même encore, le Général de Gaulle
change l'éclairage que la République avait adopté pour
interpréter son histoire au sein de ses régimes tantôt
démocratiques, tantôt monarchiques depuis 1789. De même encore,
M. Barack Obama a tenté de modifier le paysage mondial du
politique à changer le regard que l'Amérique porte sur le monde
musulman tout entier.
Une anthropologie
critique en mesure de rendre compte du fonctionnement
théologique inné de la politique et de l'histoire observera donc
qu'Israël reproduit le modèle chrétien du sacrifice au bénéfice
d'une idole désormais nantie d'une rente de situation. La dette
qui lui est due est réputée inépuisable. Elle répare à haut prix
une grave offense qu'elle a subie dans le passé, mais et dont
les dividendes se transmettent désormais de génération en
génération et se veulent intarissables.
Les Grecs achetaient
encore leurs dieux au coup par coup. Certes, il existait des
cérémonies d'expiation prévues par le calendrier. Mais quand la
cité livrait son destin aux périls d'une guerre, on prenait soin
de s'assurer du mieux possible un concours particulier et
exceptionnel des dieux par l'offrande de sacrifices
considérables d'animaux sur leurs autels. En revanche, le
christianisme a mis le fidèle en position de débiteur perpétuel:
le Golgotha est censé avoir effacé une fois pour toutes une
culpabilité originelle qui passait pour aussi ineffaçable que la
tache de sang sur les mains de Lady Macbeth. Mais, en réalité,
ce lavage définitif n'est jamais qu'un leurre pieux: il faudra
maintenant nettoyer la tache sa vie durant et du matin au soir.
Les actes de contrition du malheureux ne prendront fin qu'avec
son dernier souffle.
7 - Qui dispose du sacré
démocratique?
Puisque la piété se
tue à la tâche et jusqu'au lit de mort des "sauvés " et
des "rachetés", on comprend qu'une religion de la
repentance perpétuelle se révèlera hautement exploitable dans
l'ordre politique. Quel est le dieu nouveau que l'univers
offense désormais mortellement? Israël. A qui faut-il présenter
à jamais ses dévotions? A Israël. Comment se fait-il que le
péché commis à son égard il y a soixante ans soit devenu
universel, héréditaire et irrémissible, donc condamné, comme
celui de la Croix, au titre d'un meurtre appelé à provoquer la
rechute du coupable? Israël a compris le christianisme comme
personne: de même que c'est à l'école de l'agenouillement des
siècles chrétiens sur les parvis du Saint Siège que Rome s'est
étendu territorialement durant deux millénaires, de même Israël
s'étend implacablement en Cisjordanie à brandir sa crucifixion
sur un Golgotha aux intérêts de retard incalculables.
Il se trouve que le
degré d'immersion du sujet dans le monde physique et le
pourcentage de son appartenance au monde religieux diffère
grandement non seulement d'un individu à l'autre, mais surtout
d'une époque à la suivante, de sorte que l'identité simiohumaine
s'observe dans son universalité par l'examen des divers lieux de
passage de la frontière entre le pragmatisme et le sacré.
Jean-Paul II ne séparait pas le théologique du politique à la
lumière des mêmes lignes de démarcation que son successeur. Mais
l'enjeu anthropologique se révèle identique dans les deux
univers qu'habite notre espèce, de sorte que l'inquisition
fonctionne sur un modèle parallèle dans les deux comportements
de l'encéphale simiohumain : un pape réaliste combattra
l'hérésie pour le motif qu'elle lui paraîtra ébranler l'édifice
politique auquel la doctrine doit servir de poutre de
soutènement, un pape relativement mystique se demandera si, sur
le long terme, le souffle et l'élan de l'inspiration évangélique
ne sont pas plus précieux à préserver que la gestion
administrative et au quotidien des soucis de la Curie.
Cette problématique
de la "possession" du croyant par le dieu remonte à
Homère. Elle s'offre à l'observation anthropologique en Israël,
où les partis religieux se divisent entre les défenseurs des
intérêts étroitement confondus de la Jérusalem terrestre et de
la Jérusalem spirituelle, d'une part, et les esprits qui
séparent radicalement les deux "cités de Jahvé", d'autre
part. Cette dichotomie cérébrale a régné tout au long de
l'histoire schizoïde du christianisme, et cela avec une telle
intensité qu'elle a rendu la foi enivrée incompatible avec la
foi ritualisée: pendant des siècles, l'Europe du ciel a offert
le spectacle des cerveaux monophasés, qui se réfugiaient en
masse dans les monastères et des encéphales bipolaires, qui
s'accommodaient d'une coexistence difficile du monde et du mythe
dans leur tête. La nature bifide du cerveau simiohumain se
trouve encore officiellement légitimée de nos jours et jusqu'au
sein des Etats laïcs, puisque la Vè République admet l'objection
de conscience, même quand une guerre oppose les devoirs du
patriote à ceux du croyant.
Mais quand la raison
transreligieuse accède à une étape de notre évolution cérébrale
où elle se met en mesure d'observer la politique terrestre de la
dérobade à laquelle se livre une idole dûment enveloppée dans
les vêtements séraphiques de son mythe, le champ de
l'intelligibilité de l'histoire et de la politique de notre
espèce subit une mutation de sa problématique interne qui
l'ouvre à un approfondissement décisif de la réflexion sur la
cité, parce que les instruments nouveaux qu'une anthropologie
distanciée du sacré fournit à la raison scientifique permettent
de peser les évènements sur une tout autre balance de leur
signification. C'est ainsi que les entreprises résolues de la
Jérusalem terrestre présentent un contraste si violent avec
l'eschatologie réputée leur donner leur armure religieuse que la
raison moderne introduit un coin aussi redoutable
entre les deux lobes cérébraux du simianthrope qu'à l'heure de
la querelle du XIIe siècle entre l'empereur d'Allemagne et le
Saint Siège, qui a abouti à la séparation radicale de
l'investiture temporelle des évêques par l'empereur
exclusivement et de leur investiture spirituelle par le
successeur de Saint Pierre. Aujourd'hui, l'investiture politique
des démocraties et celle théologique de Jahvé se disputent le
monopole de la légitimation divino-humaine d'Israël.
8 - La psychanalyse de la politique
Mais, du coup, la
foudre nucléaire devient le "signe de contradiction"
entre les deux autorités qu'évoquent les Ecritures des
chrétiens, parce qu'il est impossible de légitimer ensemble et
parallèlement la souveraineté terrestre de l'Iran et la
souveraineté biblique d'Israël, puisque le peuple juif réclame
pour lui seul la possession de l'apocalypse sacrée et temporelle
confondues et refuse d'en partager la "sainteté". La
géopolitique contemporaine a donc le plus grand intérêt à
disposer d'une science anthropologique de la théopolitique, donc
du fonctionnement mythologique de l'encéphale scindé de
naissance entre le réel et le sacré dont notre espèce fait
encore usage de nos jours et à l'échelle internationale, parce
que le sceptre temporel d'Israël est plus difficile à arracher
des mains de cet Etat réputé intemporel que de celles de
Grégoire VII.
C'est dire que le Moyen
Orient est devenu le théâtre de la guerre entre les deux lobes
de l'encéphale du simianthrope. La fraction réaliste et la
fraction onirique de la boîte osseuse des évadés de la zoologie
se disputent la même proie, et cela sur le même champ de
bataille qu'aux XIe et XIIe siècles en Europe, mais à cette
différence près que l'Amérique et Israël s'y voient
nécessairement contraints de mettre en place le mode
inquisitorial d'accouchement de la sainte "vérité historique"
que brandissent les démocraties de la "justice" et de la
"vérité". D'un côté, le monde entier est appelé à
fonctionner sur le modèle de la repentance perpétuelle de
l'humanité à l'égard de la victime de la Shoah, de l'autre, la
culpabilité inépuisable qui frappe notre espèce permet à un
souverain du temporel - l'Amérique - de mettre à profit notre
capitulation religieuse devant Israël, ce qui permet à
l'anthropologie scientifique du IIIe millénaire de placer sous
la lentille de son microscope tout le réseau des tractations
cérébrales du simianthrope.
Il se trouve que le
sacrifice est au cœur du religieux et au cœur du politique, de
sorte qu'une psychanalyse freudienne qui ne rend pas compte du
meurtre de l'autel d'Iphigénie à nos jours a manqué son
branchement sur l'histoire ; et si ni Jung, ni Fromm, ni Lacan,
ne rendent compte du sacrifice, toute la science actuelle de
l'inconscient demeure en attente de son véritable avenir, le
seul auquel elle est appelée par sa vocation d'accéder à
l'universalité et à la profondeur.
9 - L'avenir de la psychanalyse de
l'histoire
Voyez comme
l'inquisition prend enfin toute sa signification politique et
historique à se révéler le champ d'observation privilégié du
management religieux de la boîte osseuse de notre espèce ; car
il s'agit d'imposer la problématique du sacré des démocraties du
salut à toute la société civile de notre temps. Dans cette
guerre des Titans de la rédemption des modernes, la politique
des songes bibliques d'Israël devient le cœur de la pensée
critique : il s'agit de donner à Henry IV d'Allemagne le pas sur
Grégoire VII dans l'investiture atomique de l'Iran.
Mais alors,
l'analyse simianthropologique de la double face du sacrifice
chrétien commence d'éclairer la politique mondiale d'une lumière
trans-freudienne, parce qu'il s'agit maintenant d'expliquer
pourquoi l'immolation réputée physique de la victime sur l'autel
se veut à la fois rédemptrice et punitive. Car le Golgotha
éternise la mémoire d'un meurtre à châtier sans fin - un déicide
- et, dans le même temps, ce meurtre se révèle paradoxalement
providentiel à l'échelle internationale, si je puis dire,
puisqu'il se veut indispensable au "rachat" du péché par
la bienveillance tardive dont un géniteur mythique du cosmos
s'est décidé à faire preuve in extremis. Pourquoi cela, sinon
parce que l'assassinat sacré fournit tardivement à l'idole le
tribut "satisfactoire", donc indispensable à sa renommée,
puisqu'il satisfait le prestige politique de la divinité et
conditionne seul son consentement inespéré à l'effacement
définitif de la macule originelle.
Si la trucidation
censée se trouver effectivement perpétrée sur l'autel de la
rédemption par un effet magique des paroles rituelles prononcées
par le prêtre et qu'on appelle les paroles de la consécration,
si cette trucidation, dis-je, n'était pas condamnable en tant
que meurtre, elle ne saurait alimenter la repentance et la
contrition éternelles du simianthrope ; mais sans la pénitence
réputée libératoire du coupable, le pouvoir politique de "Dieu"
demeurerait branlant, faute de l'assise de la contrition
éternelle que manifeste précisément le paiement inlassable d'un
tribut hautement profitable. Il faut donc que l'immolation
dédoublée - à la fois pécheresse et gratifiante - du Golgotha se
trouve magnifiée par l'attitude exemplairement obédientielle de
la victime à l'égard du père tueur. C'est pourquoi la piété se
fonde à la fois sur la jubilation face à la rentabilité
extraordinaire de la victime et sur la sainteté des macérations
du monde, qui sont allées jusqu'à la sacralisation du suicide
religieux de masse dans les monastères.
On sait que
L'introduction à la vie dévote de Jean-François de Sales
glorifie l'auto-immolation des chrétiens dans les couvents afin
que le clouage de la victime sur une potence soit somptueusement
rémunéré par l'accès à la vie éternelle. L'émulation
sacrificielle récompensée par l'immortalité a été illustrée par
l'apologie de L'Imitation de Jésus-Christ - mais
le double volet du meurtre rédempteur est également la clé de
toute la politique : si la shoah n'était pas la source à la fois
pénitentielle et prébendée à jamais de l'histoire mondiale
depuis 1945, elle ne nantirait pas Israël de l'autel
commémoratif de son resourcement perpétuel dans le sang
libérateur du "salut", donc de la rédemption démocratique
pieusement achetée par la mort de la victime. Jahvé y trouve
l'aliment du renouvellement inlassable de ses bienfaits au
peuple élu. C'est pourquoi la psychanalyse de la théopolitique
juive et chrétienne de l'éternité se révèle à la fois la clé de
l'intelligibilité anthropologique de l'histoire contemporaine et
la clé de l'avenir mondial des sciences de l'inconscient, donc
du scannage de la condition simiohumaine.
10 - L'éternel Golgotha
Si la mutation de la
problématique politique qu'appelle un regard tout autre sur le
nucléaire que celui dont l'idéologie israélo-américaine avait
taillé le miroir, si cette mutation, dis-je, impose l'examen au
microscope des entrailles du sacrifice de l'autel, c'est que
l'idole vengeait, en réalité, son ambition bafouée; et c'était à
ce titre qu'elle prétendait "racheter" sa créature, donc
lui accorder son pardon au prix de l'immolation théologiquement
ciselée de son propre fils. C'est donc en signe de soumission
absolue à sa propre autorité de sacrificateur suprême qu'Israël
demande maintenant à l'Iran le paiement éternel du tribut "sacré"
et "rédempteur" de la repentance du monde à son égard,
celui du renoncement perpétuel de la Perse à sa souveraineté
pécheresse. Mais de même que le Dieu du Déluge imposait sa
problématique de la mort au pécheur coupable d'un désobéissance
impardonnable - donc, en réalité, du péché de contestation de
son monopole absolu de la connaissance dans le jardin d'Eden -
de même la démocratie américano-israélienne voudrait imposer à
toute la planète de la repentance la damnation irrémissible
qu'entraîne le péché d'intelligence.
Quelle intelligence ? Celle qui observe désormais le personnage
ambigu caché sous l'autel retors de la "Liberté". Ce
questionneur décidément démoniaque demande à l'idole: "De quel
pouvoir politique réclames-tu le sceptre? Tu entends interdire à
l'Iran de manger le fruit de l'arbre de la connaissance. Quel
est le sens secret du tribut dont tu réclames le paiement à te
cacher sous ton tabernacle? Voici qu'Adam a mangé le fruit du
savoir dans de jardin d'innocence de la Démocratie; et voici
qu'il aperçoit l'idole tapie sous l'offertoire ; et voici qu'il
change toute la problématique des propitiatoires de la
politique. C'est cela, la guerre de l'intelligence; c'est cela,
la guerre d'Ulysse au Cyclope ; c'est cela, la guerre de la
philosophie à l'animalité de l'histoire; mais c'est aussi cela,
l'avenir mondial et transfreudien des sciences de
l'inconscient."
Publié le 21
septembre 2009 avec l'aimable autorisation de Manuel de Diéguez
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