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Bahreïn-États-Unis (et Italie) :
Stratégie du « verre à moitié plein »

Manlio Dinucci


La secrétaire d’Etat Hillary Clinton reçue à l'aéroport par Ahmed bin Mohammed Al Khalifa,
ministre des Affaires étrangères de Bahreïn, le 2 décembre 2010.
Source :
ministère des Affaires étrangères de Bahreïn

Lundi 21 février 2011

Dans une rencontre au Bahrein il y a deux mois - selon le News York Times, 19 février-  un membre du parlement a demandé à la secrétaire d’Etat Hillary Clinton ce qu’elle pensait de la vague d’arrestations d’avocats et militants des droits de l’homme. Mais il a été interrompu par le modérateur. Clinton a de toutes façons répondu qu’à ses yeux,  « le verre est à moitié plein : les changements au Bahrein sont beaucoup plus grands que ceux des autres pays de la région ». A la lumière de la sanglante répression des manifestants opérée par  l’armée -commente le News York Times - l’évaluation toute rose de Clinton montre à quel point le gouvernement des Etats-Unis a négligé les violations des droits de l’homme dans un royaume qui constitue un hub économique et militaire dans le Golfe persique.

Le Bahrein est un minuscule Etat (à peine 700 km2), formé de l’île homonyme et d’une trentaine d’îles mineures, avec environ un million d’habitants. Mais il est situé dans le Golfe persique, face aux côtes saoudiennes et à 200 Kms seulement des côtes iraniennes : donc dans une position géostratégique de première importance.  Pour cette raison, depuis qu’il est devenu indépendant de la Grande-Bretagne en 1971, les Etats-Unis l’ont utilisé comme base de leurs propres forces navales dans le Golfe. En 1995, s’est installé à Manama le quartier général des forces navales du Commandement central, comprenant la 5ème flotte, dont l’aire d’opérations inclut le Golfe persique, la Mer Rouge, la Mer d’Arabie et d’autres parties de l’Océan indien.  Dans la configuration classique, ces forces navales comprennent un porte-avions avec son groupe de bataille et un groupe d’expédition d’attaque, avec 25mille hommes à bord, plus 3 mille du personnel à terre. C’est du quartier général du Bahrein qu’ont été conduites les opérations navales contre l’Irak et, avec l’aviation des porte-avions, que sont effectués les raids sur l’Afghanistan.

Le principal garant des intérêts des Etats-Unis au Bahrein est Sa Majesté le Roi Hamad bin Isa Al Khalifa. Il a été formé au début des années 70 à l’académie militaire de l’armée états-unienne de Fort Leavenworth (Kansas), où il a été diplômé avec une mention d’honneur. Titre mérité : il n’aurait pas pu faire plus pour les Etats-Unis. Quand en mai 2009 il a rencontré le général David Petraeus, il a déclaré (comme il résulte d’un câblogramme de l’ambassade états-unienne :) « Quoi que vous vouliez sur terre, sur mer ou dans les airs, nous pouvons, nous, le faire ». En échange les Etats-Unis ont armé et entraîné les forces armées et de police du Bahrein, en les dotant de chars d’assaut M60, de chasseurs-bombardiers F-16, d’hélicoptères Cobra et autres armements modernes. Ceux-là même qui ont été utilisés pour réprimer dans le sang les manifestations pacifiques pour les droits de l’homme.

Et pourtant la monarchie héréditaire du Bahrein devrait être « constitutionnelle », comme le proclame la nouvelle Constitution de 2002. C’est toujours le souverain, cependant, qui exerce la fonction de chef d’Etat, nomme le premier ministre (qui est le même depuis 40 ans), le conseil des ministres et les 40 membres de la chambre haute du parlement. Les autres 40 membres, de la chambre basse, sont élus tous les quatre ans (sans que soient présents des observateurs internationaux), mais les pouvoirs du parlement sont pratiquement nuls et les partis hors la loi. Les autres charges, comme celle de chef des forces armées attribuée de droit au prince héritier, sont quasiment toutes distribuées à l’intérieur de la famille royale, qui appartient à la minorité musulmane sunnite, représentant 30% de la population tandis que 70% est chiite.

C’est cette même famille royale qui se partage le gros des profits dérivant de l’exportation du pétrole et du gaz naturel, d’où proviennent 75% des entrées gouvernementales, et qui bénéficie de la présence au Bahrein de plus de 370 banques offshore et de 65 multinationales états-uniennes. Le revenu national dépasse les 25mille dollars par habitant, mais sa distribution est extrêmement inégale. S’y ajoute le fait que, sur une population d’environ un million d’habitants, quasiment la moitié est composée de travailleurs étrangers qui n’ont pas la citoyenneté.

Avec ce régime dictatorial soutenu par les Etats-Unis, l’Italie a tissé des rapports croissants d’amitié, depuis l’époque du gouvernement Prodi, quand, en 2006, la ministre Emma Bonino a accompli une « intense visite de travail » au Bahrein, au cours de laquelle elle a rencontré le premier ministre et signé un accord économique.  Et en juillet 2008 s’est déroulée la première visite officielle en Italie du roi du Bahrein, qui a rencontré le président de la république Giorgio Napolitano et le président du conseil Silvio Berlusconi. « Cette visite - a-t-on déclaré- a confirmé la concordance de vues entre les deux gouvernements sur de nombreux thèmes et scénarios de l’actualité internationale ».  Comme celle de l’attaque armée, ordonnée par le roi du Bahrein,  contre des citoyens sans armes qui revendiquent les plus élémentaires droits humains.

 

Edition de dimanche 20 février de il manifesto
http://www.ilmanifesto.it/il-manifesto/in-edicola/numero/20110220/pagina/06/pezzo/297647/  

Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio


Manlio Dinucci est géographe.

© Droits d'auteurs Manlio Dinucci, Il manifesto, 2011
Publié le 21 février 2011

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Source : Mondialisation.ca
http://www.mondialisation.ca/...


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