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Al Manar
Collaborateurs libanais en « Israël » :
Piètres remords
Leila Mazboudi
Photo: Al-Manar TV
Mercredi 12 mai 2010
Dévorés par les remords, c’est
ainsi que sont présentés les anciens collaborateurs libanais de
la milice du général Lahad, chaque fois que les médias
israéliens vont les rencontrer pour scruter les conditions dans
lesquelles ils vivent en « Israël » et leur état d’âme. Pourtant
dix années sont passées depuis le retrait forcé des troupes
israéliennes du Liban, en l’an 2000, après une vingtaine
d’années d’occupation ponctuées d’opérations de résistance qui
n’ont cessé, au fil des ans, de doubler d’intensité et
d’efficacité.
Après la récente proposition du chef des services de
renseignements israéliens, Amos Yadlin, ils devraient l’être
encore plus. Soupçonnant leur loyauté envers Israël ainsi que
celle de leur famille, il a suggéré de tous les expulser, ainsi
que leurs confrères palestiniens.
Quelques jours après ces déclarations, les ex-agents libanais
ne cachent pas leur amertume devant la caméra de la deuxième
chaîne israélienne.
Elle semble revenir aux premières heures du retrait israélien en
catimini. Personne ne les avait mis au courant que le retrait
avait été amorcé. Même leur chef, le général Antoine Lahad,
avait été gardé dans la plus grande ignorance.
« On m’a appris que toutes les positions israéliennes étaient
tombées et que l’armée israélienne avait pris la fuite vers
Israël. Je leur ai alors demandé ce qu’ils étaient en train de
faire, ce qu’ils allaient faire de nous, de nos familles, de nos
voitures. Ils nous ont dit qu’ils allaient se charger de tout.
Comme j’étais idiot quand je les ai crus » se souvient Nassif
Haddad qui a fait partie des 6.000 collaborateurs, qui ont pris
la fuite, mais ont été bloqués au Liban. Les militaires
israéliens qui avaient pris soin de bien fermer la porte de
Fatima, seule issue de sortie, les empêchaient de rentrer en
Palestine occupée. Ce n’est que grâce à la complaisance de
résistance libanaise qui avait pris la décision de ne pas les
liquider et de les livrer, et après de longues journées durant
lesquelles ils étaient entassés avec mépris tout au long de la
frontière, sous les caméras des télévisions du monde, (surtout
celle du Hezbollah, Al-Manar qui n’a pas manqué de filmer leur
humiliation et leur déchéance), qu’ils furent autorisés à passer
de l’autre côté.
Mais ce n’en était pas encore fini.
En Israël, leur condition s’est avérée être lamentable. En
comparaison avec le train de vie qu’ils menaient au Liban : «
Israël ne m’a rien offert ! » poursuit Nassif, toujours selon la
deuxième chaîne de la télévision israélienne. « Ils m’ont
livré une carte comme quoi j’étais un membre de l’Armée du Liban
Sud (ALS) qui ne me sert à rien. Alors que je vivais dans une
grande maison au Liban, me voilà entassé dans un appartement de
60 mètres carrés avec ma femme et mes quatre enfants »
précise-t-il avec amertume. Et de poursuivre : « pourquoi
faut-il que mon fils vive ainsi. Je crains qu’il ne vienne un
jour me demander des comptes sur ce que je lui ai fait, et me
marteler que l’état que j’ai aidé m’a jeté aux ordures !! »
Un autre libanais, Antony Haddad, dont la collaboration pour le
compte de l’entité sioniste semble être une affaire de famille
ne cache pas son désarroi pour le traitement qui a été réservé à
sa famille : « Quand on parle aux Arabes, ils nous
traitent de traîtres. Quand on parle aux Juifs, ils disent que
nous sommes des Arabes. Mon grand-père et mon père ont toujours
combattu pour vous, et vous ont défendus, sans avoir obtenu en
contrepartie un mot de remerciement », clame-t-il au
correspondant israélien.
Quand à Paul Abou Hamed, également fils d’un collaborateur, sa
position est bien tranchée : « jamais je ne rejoindrai
l’armée israélienne après la traitrise qu’elle a commis, en
abandonnant l’ALS à son sort ; je crains qu’ils ne me trahissent
comme ils ont trahi mon père », assure-t-il.
Interrogé sur l’éventualité que les collaborateurs retournent au
Liban : « jamais de notre vivant », reprend Nassif, qui, (
vu les crimes qu’il a du commettre) n’a pu faire partie des
3.400 collaborateurs, (les moins impliqués dans des actes de
violence) et les membres de leurs familles qui sont rentrés au
Liban, où ils ont été condamnés à des peines de prison.
« Oui, après notre mort, dans des cercueils » espère-t-il.
« Car il n’y a pas de cimetière pour nous dans ce pays.
Même les cimetières chrétiens ne sont pas prêts à nous
accueillir. Ils ne veulent pas de nos cadavres », regrette-t-il.
Et de conclure, d’une vois étranglée : « Nous
n’appartenons en rien à cet Etat, pas même à notre mort ».
Confessions mordantes peut-être. Mais trop tardives certes.
« Les collaborateurs n’appartiennent à aucune partie »
avait lancé une fois, le commandant de la résistance , Sayed
Hassan Nasrallah.
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Publié le 13 mai 2010
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