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Opinion

En ternir une couche
Koffi Cadjehoun

 

Mardi 31 juillet 2012

"J'ai fait cette remarque plus d'une fois : lorsque des amis français parlaient mal de leur Président, Sarkozy, lorsque moi, un Africain, je voulais en rajouter une, la gêne était perceptible. Ils ne voulaient pas laver le linge sale hors de la famille. Parce que dans le monde entier, on sait que chaque peuple n'a que le dirigeant qu'il mérite. A leur yeux, si je disais que leur président Sarkozy était un con, c'est en quelque sorte eux et tous les Français que j'insultais de cons. Lorsqu'un Africain invoque la CPI ou le TPI pour éliminer un président africain du jeu politique, il doit se demander au préalable pourquoi les dirigeants européens ne le font pas pour Lucachenko en Biélorussie. Et peut-être comprendra-t-il un peu de Géostratégie, beaucoup mieux que de la simple stratégie."
Jean-Paul Pougala.

Je reprends cette citations drolatique et récente du géostratège camerounais Pougala, qui contraste avec l'affirmation, tant de fois lancée par des Français (comme par hasard relevant une fois sur trois de catégories faibles intellectuellement et socialement) se piquant de dépolitisation, selon laquelle on ne peut rien faire contre les comportements dévoyés de nos dirigeants. Il existerait une coupure essentielle (sociale? ontologique? confusionnelle?) entre les élites et le peuple, qui rendrait le peuple bon, mais impuissant; tandis que les élites seraient mauvaises, mais toutes-puissantes :

"Parce que dans le monde entier, on sait que chaque peuple n'a que le dirigeant qu'il mérite. A leur yeux, si je disais que leur président Sarkozy était un con, c'est en quelque sorte eux et tous les Français que j'insultais de cons."

La dissociation entre les élites et le peuple est-elle justifiée? Je crains que ce ne soit un commode moyen pour les dépolitisés se prenant pour le peuple de se déculpabiliser, quand on préfère les plaisirs à l'exercice de la citoyenneté. L'argutie ressortit du registre poujadiste, à ceci près que le poujadisme découlait de revendications commerçantes, tandis que ce sont les classes défavorisées qui se montrent les plus empressées à se désengager, contre leurs intérêts, comme si le propre de la bêtise consistait à s'autodétruire avec délectation.

Chaque peuple n'a que le dirigent qu'il mérite. Cette sentence réunit les différentes couches sociales formant le peuple avec les élites, soit de rassembler le corps social et de former la volonté générale. Quand vous entendez un 2.0, plus proche du plouc que de son parent rejeté, déclarer que da sa situation d'exploité consentant, il subit les malversations de ses élites, il répercute de manière imbécile le discours de la dépolitisation, que peuvent tenir les bobos dans un autre registre, plus intelligent et intéressé (le bobo ayant accès à la culture, il a les moyens de se dépolitiser sans y perdre socialement, lui qui a financièrement les moyens, relatifs, de sa dépolitisation).

La dépolitisation signifie la nullité de ses promoteurs, au sens où la médiocrité relève de la déresponsabilisation. Le mensonge devient la règle du jeu, le fonctionnement social est apparenté à un jeu puéril. Mentir exprime l'absence de responsabilité, de sens politique, la disparition de la vérité. Est-ce de la perversion volontaire - ou la conséquence d'une dégénérescence intellectuelle si forte que les repères moraux s'en trouvent estompés? Je crains que la confusion dans laquelle s'ébattent les tenants de la dépolitisation tienne au morcèlement mental, qui correspond à leur représentation sociale. La dissociation hallucinatoire entre les élites malfaisantes et le peuple impuissant trouve son explication dans la dislocation de cette mentalité rabougrie.

Quand les faibles forment le soutien de la dépolitisation, les victimes soutiennent la mentalité qui les oppriment en prétendant s'y opposer. Ils reproduisent l'état qui les désavantage sans prendre la mesure de la cause : leur morcèlement aboutit à détruire la cohésion, dont ils seraient les premiers bénéficiaires. La revendication de dépolitisation au nom de la toute-puissance des élites est pathétique : les dépolitisés faibles sont les premiers responsables de leur état et de celui de leurs élites.
Ce sont les classes les plus populaires qui soutiennent les élites dont elles héritent et dont elles font mine de se désolidariser pour se déculpabiliser. Si l'Afrique va si mal, c'est que les peuples y ont entériné le colonialisme et constituent les principaux auteurs de leur malheur. L'argutie selon laquelle on ne peut rien faire pour changer l'état d'un système (comme l'oligarchie) est un mensonge qui permet à peu de frais aux opprimés de se défausser de leur responsabilité, a fortiori en démocratie. Les peuples ont les représentants qu'ils méritent. Le peuple français voit en Sarkozy le néo-conservateur ou en Hollande le libéral-démocrate l'exacte réplique de son état.
Le constat, implacable, permet de mesurer à quel point l'interprétation du morcèlement social est dangereuse - plus que déculpabilisante. Si les opprimés se trompent plus qu'ils ne se montrent irresponsables, c'est que leur erreur provient de la contradiction initiale. L'irresponsabilité (s'amuser quand les rêves de fête s'effondrent) en découle comme d'une réaction dont l'adéquation se révèle impossible : la réaction demeurera contradictoire quels que soient les efforts pour s'y opposer.
Pour en sortir, il conviendrait de remplacer le morcellement et la multiplicité par l'unité. Le plus difficile en application est le plus facile en théorie : la dichotomie entre le possible et l'être s'explique par l'unité entre ce qui est et ce qui peut. La réconciliation est ardue pour ces classes engoncées dans la mentalité oligarchique contre leurs intérêts mal compris, qui entérinent l'effectivité de la différence sociale. Que l'oligarque acquiesce à cet essentialisme fallacieux peut se comprendre : il en est le bénéficiaire.
Que l'opprimé le rejoigne dans le soutien, d'autant plus prégnant qu'il est inconscient, inculqué par mimétisme, s'explique par le fait que le simplisme frustre ramène à la contradiction et que la violence sociale détruit les possibilités de créativité. Si l'opprimé valide le différentialisme social, le problème est qu'il est le premier responsable de son irresponsabilité revendiquée, et de l'oppression qu'il subit. Il ne saurait en changer, puisque lui-même est persuadé du l'inéluctabilité de sa condition. Je suis un imbécile, je me dis différent. Qui revendique l'essentialisme des couches sociales, bientôt transformées en castes?
Que dit le spécialiste de l'histoire indienne? Que les intouchables sont les plus fervents soutiens du système des castes qui les défavorise. Loin de condamner cet état, il le justifiera pour des raisons de différence culturelle travestie en tolérance. Mais cette différence porte en son sein vénéneux le refus de l'universalisme. On voit qui était l'ethnologue Lévy-Strauss, une fois qu'on aura évacuer (ou presque) les fariboles de sa théorie structuraliste d'héritage positiviste.
On voit surtout quelle mentalité meut ces Indiens qu'il étudie, tel l'impérialiste ses bons sauvages (dont le matérialiste Diderot ou l'Infâme Voltaire) : si on leur donnait vraiment la parole, plus que l'attachement réactionnaire à leurs traditions, comme si elles étaient éternelles et indéboulonnables, nos Indiens d'Amérique reprendraient la rengaine défrisante des opprimés de nos sociétés libérales en crise, dans lesquelles croissent de plus en plus les serfs de la ploucitude. Ils plaideraient qu'on ne peut rien contre les élites, en l'occurrence étrangères ou collaboratrices, et qu'il convient de se résigner à son triste sort, en attendant la disparition.

 

 

   

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Source : Koffi Cadjehoun
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