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Analyse
Abbas est inapte à
diriger le peuple palestinien
Khaled Amayreh
Jeudi 30 septembre 2010
La réaction du Président de l’Autorité
palestinienne Mahmoud Abbas à la dernière provocation sioniste,
à savoir l’expansion tous azimuts de la colonisation en
Cisjordanie, a été désastreuse et calamiteuse. Abbas a fait une
pléthore de déclarations contradictoires, certaines signalant sa
volonté de rester engagé au soi-disant « processus de paix »
avec Israël, en dépit du fait qu’Israël continue à piétiner ce
maudit processus de paix dévoyé en s’embarquant dans davantage
de constructions coloniales et davantage de vols des terres aux
dépens des Palestiniens.
Ce n’est pas une question mineure. Les territoires occupés sont
le morceau de fromage « disputé » du proverbe qu’Israël continue
de dévorer nuit et jour à un point tel que la plupart des
Palestiniens peuvent craindre, à juste titre, qu’il ne restera
aucun territoire pour y établir un Etat viable et
territorialement contigu digne de ce nom. Certains, dont
l’auteur de ces lignes, pensent que c’est déjà trop tard.
Lorsqu’Abbas s’adresse à un public palestinien, il exprime son
mécontentement vis-à-vis d’Israël et prévient qu’il pourrait se
retirer des discussions avec Israël négociées par les
Etats-Unis.
Il n’est pas très difficile de diagnostiquer la duplicité et
l’incohérence d’Abbas. Le chef de l’AP ne peut pas déplaire à
Washington, pour des raisons évidentes.
La manne financière dont dépend l’entité déformée de Ramallah
vient de Washington. De plus, Abbas réalise qu’il suffirait qu’Obama
ou le congrès états-unien, les deux sous contrôle juif, toussent
pour qu’un séisme financier et économique se produise
immédiatement à Ramallah et que des milliers de fonctionnaires
perdent leurs boulots et leurs salaires. C’est ainsi que
finissent les régimes stupides et en faillite qui se sont
laissés prendre en otage par des pays étrangers, parce que qui
paie le bal mène la danse.
Abbas affirme souvent que ce n’est pas le cas de son autorité
mais il ne faut pas le croire.
Abbas, comme les autres despotes du monde arabe, aimerait
beaucoup conserver un semblant de légitimité populaire. C’est ce
qu’il fait en prétendant qu’il est toujours fidèle aux
constantes nationales palestiniennes alors qu’en fait, il
cherche à les détruire, sciemment ou non, en mentant au public
et en anesthésiant les masses palestiniennes.
Ces dernières années, beaucoup ont accordé à Abbas le bénéfice
du doute, citant l’énorme pression internationale à laquelle il
est soumis, ainsi que la faiblesse phénoménale qui écrase le
monde arabe.
Il y a toutefois des choses qu’on ne peut justifier en aucun
cas, mais Abbas ne semble pas faire la différence.
Il continue à baisser les plafonds nationaux palestiniens en
permettant à Israël de gagner toujours plus de temps pour
construire toujours plus de colonies. Et lorsqu’on lui demande
de faire une démarche qui s’avère trop embarrassante ou trop
scandaleuse, comme reprendre les pourparlers de paix en
l’absence du gel de l’expansion coloniale par Israël, Abbas se
précipite au Caire ou à Amman ou à Riad pour supplier les
dirigeants arabes de le sauver. Le lendemain, il réapparaît à
Ramallah pour dire aux masses palestiniennes en colère que «
je ne peux pas refuser de demander leur avis à nos dirigeants
arabes frères. »
Dans un passé pas si lointain, les dirigeants arabes nous ont
donné des conseils vraiment fraternels. Ils nous ont exhortés à
refuser les desseins des sionistes et à résister à leur
agression. Cependant, depuis des années maintenant, le seul
conseil arabe que nous avons reçu de la plupart des capitales
arabes est un message démoralisant nous demandant de nous rendre
à Israël et de céder tous ou la plupart de nos droits légitimes,
dont le droit à la liberté et à l’indépendance.
En bref, les régimes arabes nous disent « soyez heureux et ne
vous inquiétez pas. » En d’autres termes, ces régimes sont
un handicap, pas un atout dans la lutte pour la libération de
notre pays des chaînes du sionisme.
Je ne sais pas exactement pourquoi Abbas se conduit comme il le
fait. Est-il sénile ? N’a-t-il pas pleinement conscience de ce
qu’il fait ? Fait-il aveuglément confiance à Barack Obama,
l’homme que la seule idée de critiquer l’insolence et
l’arrogance israéliennes fait trembler ?
D’accord, la lâcheté est un phénomène aussi naturel que le
courage, la sagesse, et autres attributs, bons ou mauvais. Il
est toutefois illogique de confier la cause palestinienne à un
homme qui est incapable et inapte à piloter le bateau national
vers la rive de la sûreté.
Comme le défunt dirigeant palestinien Yasser Arafat, Abbas
refuse de regarder la réalité en face. Il est aussi en train de
devenir de plus en plus itinérant, préférant être loin du
théâtre des événements. Il préfère aussi n’écouter que lui-même
et quand on le confronte à des nouvelles ou des points de vue
qu’il n’aime pas entendre, il s’énerve et demande qu’on se
taise.
A plusieurs reprises, Abbas a attaqué à juste titre le style de
gouvernance de Yasser Arafat. Il pensait que la deuxième
intifada était un désastre pour les Palestiniens. Toutefois, au
lieu de suggérer une approche plus sage, Abbas en est arrivé de
fait à la conclusion que se soumettre à Israël était la
meilleure alternative, sans considérer qu’Israël est un
crocodile perfide, plus vous lui donnez de la viande, et plus il
en réclame.
Les derniers gestes d’Abbas et de ses conseillers envers Israël
ne sont pas seulement scandaleux d’un point de vue de la dignité
palestinienne. Ils sont aussi désastreux d’un point de vue
politique.
Finalement, afficher de la faiblesse et compromettre la dignité
de notre peuple n’obligeront pas Israël à nous rendre nos droits
usurpés.
Aujourd’hui, la cause palestinienne est à la croisée des
chemins, les Etats-Unis semblant ne vouloir ni ne pouvoir faire
pression sur le régime sioniste pour mettre fin à l’occupation
de 1967.
Je ne suis pas un prophète du malheur. Il est toutefois
difficile de croire que les Etats-Unis seront capables de forcer
Israël à revenir aux frontières de 1967 alors qu’ils
n’obtiennent pas du régime sioniste qu’il prolonge un gel de la
colonisation partiel et insignifiant de quelques mois.
Quant à ce que la direction palestinienne devrait faire en face
de l’insolence sioniste et la connivence états-unienne avec
elle, cela ne devrait pas être trop compliquée. Qu’Abbas, dont
le mandat a expiré depuis longtemps, démissionne et se retire
dignement.
Source :
Palestine Info
Traduction : MR pour ISM
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Publié le 30 septembre 2010 avec l'aimable autorisation d'ISM.
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