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Les graines du désastre
Khaled Amayreh

" L’Autorité palestinienne dominée par le Fatah et le gouvernement dirigé par le Hamas continuent à échanger des accusations, se reprochant l’un et l’autre d’empêcher la formation d’un gouvernement national d’unité, avec en toile de fond le blocus international impitoyable imposé à l’économie palestinienne par les Etats-Unis et Israël."

Beaucoup de Palestiniens avaient espéré que le nouveau gouvernement parviendrait à alléger les sanctions -- décrétées par Israël, les Etats-Unis et l’Union européenne à la suite de la victoire électorale du Hamas au début de l’année -- qui ont eu pour effet de paralyser les services publiques et de placer 65 à 70 % des familles palestiniennes, selon les estimations, sous le risque de pénuries alimentaires. Mais les prévisions selon lesquelles un nouveau gouvernement pouvait être mis en place sont maintenant revues à la baisse, face aux contentieux non résolus sur la question de la reconnaissance ou non d’Israël.

Récemment, durant la visite du président Mahmoud Abbas aux Etats-Unis où il a rencontré le président Bush qui l’a qualifié « d’homme de paix », Abbas promit à ses interlocuteurs que tout futur gouvernement d’unité nationale reconnaîtrait Israël, mettrait fin « à la violence » et accepterait tous les anciens accords signés entre l’Autorité palestinienne et Israël, appliquant ainsi les conditions avancées par le Quartet (Etats-Unis, Russie, Nations Unies et Europe) pour mettre fin au boycott.

Les remarques faites par Abbas concernant l’orientation du prochain gouvernement d’unité nationale dans lequel le Hamas serait un partenaire égal, sinon dominant, ont fait réagir le gouvernement basé à Gaza, amenant le Premier ministre Ismaïl Haniyeh à refuser d’être partie prenante de tout gouvernement reconnaissant Israël.

Haniyeh rappela à Abbas que cette question ne se trouvait dans aucun des accords négociés ce mois-ci [septembre] entre le Fatah et le Hamas, insistant sur le fait que c’était le Document des Prisonniers qui était l’ultime référence dans les efforts déployés pour former un gouvernement d’union.

Le Hamas, qui est avant tout une organisation religieuse, n’a jamais accepté de reconnaître explicitement et formellement Israël, bien que des dirigeants du Hamas aient fait savoir à de nombreuses occasions qu’ils étaient disposés à reconnaître des accords qui implicitement reconnaissaient Israël. Cette stratégie a pour but de permettre d’affirmer que le mouvement [Hamas] a résisté aux pressions américaines et israéliennes, au contraire de son rival le Fatah.

Les remarques intransigeantes d’Haniyeh ont été faites alors qu’Abbas était en réunion avec les représentants du Quartet à New-York. Ceux-ci déclarèrent au Président palestinien qu’ils seraient disposés à traiter avec un gouvernement d’unité nationale, même avec le Hamas, mettant Abbas dans une position inconfortable suite aux déclarations faites par Haniyeh. Abbas a ensuite déclaré que les efforts pour former un gouvernement avec le Hamas risquaient une fin fatale.

Abbas s’est aussi estimé blessé par les remarques d’Atef Odwan, le ministre palestinien pour les Réfugiés, qui a critiqué le Président pour n’avoir pas versé les salaires des employés qui sont en grande difficulté, avant le mois du Ramadan qui a débuté le 24 septembre.

Odwan a fait savoir que l’Autorité palestinienne bloquait « des centaines de millions de dollars » venant de pays Arabes, insinuant qu’Abbas et d’autres responsables du Fatah ne distribuaient pas ces fonds pour tenter d’exercer un chantage sur le gouvernement. Le Fatah a rejeté ces accusations, les qualifiant de « désinformation empoisonnée ».

Mais pendant ce temps le Hamas conteste que les pourparlers avec le Fatah soient face à « une échéance fatale ». Le porte-parole du gouvernement, Ghazi Hamas, a affirmé à Al-Ahram Weekly que « le gouvernement restait engagé dans le projet de former un gouvernement d’unité nationale aussitôt que possible ».

« Je pense que si toutes les parties font preuve de bonne volonté, tous les problèmes en suspens peuvent trouver une solution dans la semaine. »

Cela semble être une prévision optimiste que de vouloir former un gouvernement qui doit réconclier l’irréconciliable en répondre aux exigences de l’Occident tout en évitant d’aliéner pour le Hamas son soutien populaire qui rejette l’idée d’une reconnaissance d’Israël sans rien obtenir en retour.

Une majorité des Palestiniens restent opposés à ce que le Hamas reconnaissent Israël, pour des raisons d’ordre religieux et d’ordre idéologique, mais aussi parce qu’Israël n’a montré aucune disposition à reconnaître un Etat palestinien viable sur tous les territoires occupés en 1967. Israël a aussi constamment rejeté le droit au retour des réfugiés palestiniens dans leurs habitations d’origine dans ce qui est aujourd’hui Israël. Le rapatriement ou l’indemnisation des réfugiés est une question-clé du Document des Prisonniers sur lequel sera basé tout gouvernement d’unité nationale.

Un autre élément militant contre la reconnaissance d’Israël par le Hamas est le soupçon très répandu qu’Israël utilise cette question uniquement comme moyen de propagande, ce qui est confirmé par la façon dont Israël a traité l’Autorité palestinienne durant les années du processus d’Oslo (1994 à 2000). Bien que l’ancien responsable palestinien, Yasser Arafat, ait formellement reconnu Israël et ait accepté de faire modifier la Charte nationale palestinienne qui appelait à la destruction de l’Etat hébreu, les gouvernements israéliens qui se sont succédés ont poursuivi leur politique d’implantation des colonies en Cisjordanie, tuant dans l’œuf toute perspective de mise en place d’un Etat viable et sur un espace territorial contigu.

Le Hamas est persuadé qu’Israël et les Etats-Unis tentent de miner la crédibilité du mouvement vis-à-vis de sa base en les forçant à suivre les pas du Fatah et à adopter la voie d’Oslo qui a conduit à encore plus d’implantations juives et au gigantesque Mur d’Apartheid qui a transformé les centres de population palestinienne en Cisjordanie en camps de détention.

Maintenant le Hamas doit négocier avec les problèmes pressants auxquels fait face la société palestinienne : la crise économique étouffante, la pauvreté, et même la menace de la famine suite au blocus financier imposé par les Etats-Unis et Israël. Le gouvernement a été dans l’incapacité de verser les salaires de plus de 160 000 employés civils, dont les professeurs d’école qui sont maintenant en grève pour la quatrième semaine consécutive. Il y existe une autre perspective encore plus désastreuse : Abbas, sous la pression de certains cercles pro-américains du Fatah, pourrait dissoudre le Conseil législatif dominé par le Hamas et former un gouvernement national d’urgence. Et cela, beaucoup de gens en conviennent, nous rapprocherait d’un bain de sang entre le Fatah et le Hamas. Le seul gagnant dans un tel conflit serait Israël.

Khaled Amayreh
28 septembre 2006 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet ouvrage à :
http://weekly.ahram.org.eg/2006/814...
Traduction : Claude Zurbach

 

 


Source : CCIPPP
http://www.protection-palestine.org/article.php3?id_article=3729


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