|
L'EXPRESSIONDZ.COM
Une
première entre Washington et Téhéran
Karim Mohsen
Photo L'Expression
29 mai 2007 Quoique
symbolique, cette première entre les deux pays constitue un pas
initial dans la bonne direction. Américains
et Iraniens se sont, enfin, assis face à face à la même table
pour discuter de la situation (dramatique) prévalant en Irak représentés
par leurs ambassadeurs respectifs à Baghdad, Ryan Crocker et
Hassan Kazemi. La réunion a eu lieu dans la résidence du Premier
ministre irakien, Nouri Al-Maliki, dans la Zone verte fortifiée
de Baghdad. Un représentant de l’Irak, Mouaffak Al-Roubaï,
assistait à la réunion. Peu avant son ouverture, le Premier
ministre irakien a déclaré qu’il «espère que cette réunion
sera le début d’un nouveau chapitre et un pas important pour la
région» ajoutant: «J’espère qu’elle aura pour résultat
une compréhension mutuelle et sera suivie d’autres réunions
pour résoudre les problèmes actuels.» Certes, aucune percée
spectaculaire n’était attendue de la rencontre d’hier mais,
au-delà de l’Irak, cette entrevue a, néanmoins, brisé quelque
part l’ignorance mutuelle entretenue entre les deux pays depuis
près de trois décennies. Assurément, le thème de ces
discussions, qui ont duré quatre heures selon l’ambassadeur américain,
a été strictement circonscrit à l’Irak. Il n’en reste pas
moins, cependant, que c’est toujours le premier pas qui compte
pour deux pays qui s’ignoraient ostensiblement depuis l’avènement
de la République islamique, en 1979, ponctué par la prise
d’otages à l’ambassade américaine à Téhéran et la rupture
des relations diplomatiques, en 1980. Tout cela a rompu les ponts
entre deux pays qui ont, longtemps, marché la main dans la main
à l’époque du Shah d’Iran, Mohamed Réza Pahlavi. En réalité,
le contentieux entre Washington et Téhéran est très lourd et
n’a cessé, depuis la Révolution islamique, de se compliquer
avec en pole position l’affaire du nucléaire iranien, les
Etats-Unis accusant l’Iran de vouloir, sous couvert de nucléaire
civil, fabriquer une bombe atomique. Washington accuse également
l’Iran de fournir des armements aux résistants irakiens et
d’entraîner les phalanges chiites. Ce que Téhéran a toujours
démenti, que ce soit le nucléaire ou l’Irak.
Aussi, la rencontre d’hier -même si les intéressés l’ont
minimisée- centrée uniquement sur l’Irak, constituait
cependant une ouverture appréciable tant il est vrai que seules
des rencontres directes entre adversaires peuvent cerner les
points de friction et voir comment les résoudre de manière
idoine.
De fait, cela aurait été déraisonnable d’attendre du nouveau
de cette rencontre, mais l’important restait que ces deux grands
pays se rencontrent après s’être ignorés durant plus de 27
ans.
Ce premier contact s’est déroulé dans de bonnes conditions
selon l’ambassadeur américain, Ryan Crocker, qui a indiqué à
la presse au sortir de la réunion: «Comme vous le savez, les
délégations américaine et iranienne se sont rencontrées pour
des discussions qui ont duré quatre heures au total. Je
qualifierai l’atmosphère des discussions de professionnelle».
«Les Iraniens et nous-mêmes avons énoncé les principes qui
guident nos politiques respectives en Irak», a encore dit
l’ambassadeur américain. Son homologue iranien, Hassan Kazemi,
n’a fait pour sa part aucun commentaire en laissant, sans doute,
la primeur aux dirigeants iraniens. M.Crocker a ajouté: «Il y
a eu des vues conformes, notamment sur le soutien à un Irak démocratique,
sûr, stable et fédéral, qui contrôle sa propre sécurité et
en paix avec ses voisins.» L’ambassadeur américain a
encore dit avoir fait part aux Iraniens du «scepticisme (américain)
sur leur comportement en Irak, comme le soutien à des milices
combattant les forces de sécurité américaines et irakiennes, le
fait que les explosifs utilisés par ces groupes viennent d’Iran».
M.Crocker a encore indiqué que les «Iraniens n’ont pas répondu
directement à cela». Toutefois, la veille de la rencontre,
le chef de la diplomatie iranienne, Manouchehr Mottaki, a de
nouveau demandé aux Etats-Unis de changer de politique et
d’accepter la «réalité du terrain», rapportait, hier,
l’agence iranienne Irna. «Si l’autre partie (Etats-Unis) a
une réelle volonté politique, accepte la réalité du terrain et
révise ses politiques passées en Irak, ces discussions peuvent
être couronnées de succès», a indiqué M.Mottaki. En fait,
sans surprise, il n’y eu aucune avancée sur les points de
litigieux entre Américains et Iraniens, mais le fait même que
les Etats-Unis et l’Iran se soient directement rencontrés est
en soi une bonne chose, mais, à l’évidence, beaucoup reste à
faire pour transformer ce premier contact et lui donner des suites. Publié avec l'aimable autorisation de l'Expression
|