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L'EXPRESSIONDZ.COM
CONFÉRENCE
D’ANNAPOLIS SUR LE PROCHE-ORIENT
Pour quels objectifs ?
Karim Mohsen 22 novembre 2007 Trop
d’inconnues entourent une réunion peu susceptible d’apporter
du nouveau à un dossier en stand-by depuis six décennies. Washington
a enfin levé une partie du voile sur la «conférence»
internationale sur le Proche-Orient qu’il compte organiser le 17
novembre à Annapolis, près de la capitale états-unienne. Mais,
à l’exception des pays invités à la réunion, peu
d’informations ont été lâchées du côté de la
Maison-Blanche et département d’Etat, encore qu’on peut
toujours se demander sur quels critères tel pays est invité, tel
autre ne l’est pas, ou que tel organisme sera président alors
que d’autres brilleront par leur absence.
Mais le plus important dans le cas de figure du contentieux israélo-palestinien
est encore de savoir sur quelles bases est organisée la réunion
et quels objectifs lui sont-ils assignés. Serait-ce une conférence
de la continuité qui prendra en compte les résultats de précédentes
rencontres sur le contentieux palestino-israélien, ou
l’administration Bush après sept ans de silence, veut-elle
marquer le coup en débloquant effectivement un dossier qui
s’est perdu dans les méandres de l’exclusivisme israélien?
Et en fait, c’est cela la question fondamentale, ne pas y répondre
ne serait qu’un nouveau coup d’épée dans l‘eau sans
incidence sur le statu quo qui paralyse toute avancée vers la création
de l’Etat palestinien indépendant.
Or, à
quelques jours de l’ouverture de la conférence d’Annapolis,
le ministre israélien de la Défense, Ehoud Barak, a confirmé
que les constructions et l’expansion des colonies juives, en
Cisjordanie, se poursuivront. Alors, il faut savoir comment les
Etats-Unis qui s’interdisent de faire pression sur leur allié
israélien comptent assurer le succès d’une réunion déjà
plombée par les rodomontades israéliennes avant même que la réunion
ait commencé. Il y a deux ans, dans un grand tapage médiatique,
le président américain, George W.Bush, faisait état de sa «vision»
de deux Etats (Israël et Palestine) cohabitant en paix, dont il
prévoyait la mise en application à «l’horizon 2005».
On sait ce qu’il est advenu de cette promesse qui n‘a
finalement engagé que ceux qui y ont cru. La solution au problème
israélo-palestinien est à la fois complexe et commode. Commode
en ce sens que si tous les pays et organisations concernés
avaient agi de concert pour faire, d’abord et avant tout,
appliquer par Israël les résolutions 242 de 1967 et 338 de 1973,
du Conseil de sécurité de l’ONU, c’est-à-dire le retrait
d’Israël des territoires arabes occupés en 1967 (palestinien,
syrien et libanais) il n’y aurait pas eu cet imbroglio qui a
contribué à mettre le dossier palestinien en attente.
Compliqué du fait que l’Etat hébreu entretient à dessein
depuis plus de quarante ans la confusion autour de ses frontières
qui, en fait, n’existent pas et sont changeantes au gré des
expansions des colonies juives de peuplement. Dès lors, comment
Israël peut-il discuter de paix quand il met tant d’obstacles
à son avènement? Et puis ce qui inquiète, par ailleurs, c’est
le black-out observé par les organisateurs de la conférence sur
ses contenus et objectifs.
Ces dernières années de telles réunions ont été uniquement axées
sur la sécurité de l’Etat hébreu avec à peine des mentions
ici ou là de l’occupation des territoires palestiniens,
notamment, laquelle occupation constitue le principal obstacle à
tout processus de paix qui se veut sérieux et se donne les moyens
d’atteindre ses objectifs.
L’administration Bush, organisatrice de l’événement,
s’est-elle donné les moyens de dépasser les sempiternels problèmes
de la sécurité d’Israël pour aborder le problème de fond qui
demeure la création de l’Etat de Palestine, son futur statut,
ses frontières, sa capitale entre autres conditions sine qua non,
non seulement pour arriver à une paix équitable entre
Palestiniens et Israéliens, mais aussi sans doute, surtout pour
assurer cette «sécurité» de l’Etat hébreu qu’Israël
a toujours mis en avant sans faire de son côté l’effort nécessaire
et indispensable pour débloquer la situation au Proche-Orient. Si
les Américains ont convoqué cette conférence pour aborder de
front tous ces problèmes et singulièrement les blocages érigés
par Israël, il y aurait alors un espoir d’ouverture, dans le
cas contraire, ce ne serait qu’une perte de temps et d’argent
pour tout le monde.
Il est de fait reconnu que tant que les grandes puissances (toutes
détentrices du droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU)
ne se seront pas clairement prononcées sur le droit des
Palestiniens d’ériger leur Etat indépendant, qu’elles ne
mettent pas Israël devant ses responsabilités dans le
prolongement de l’imbroglio proche-oriental, la rencontre d’Annapolis,
loin de servir la paix, n’aura, au final, donné qu’un peu
plus de temps à l’Etat hébreu tout en compliquant davantage
l’érection de l’Etat palestinien, auquel tous se disent
favorables, y compris les Etats-Unis, mais ne font rien pour que
cet espoir des Palestiniens puisse se concrétiser rapidement. Et
telle qu’elle est partie, la réunion d’Annapolis semble
porteuse de tout ce que l’on veut, sauf de cet espoir auquel
s’accroche depuis des décennies le peuple palestinien. Droits de
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Publié le 22 novembre avec l'aimable autorisation de l'Expression
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