Affaires stratégiques
Sombres perspectives
Kader A. Abderrahim
Vendredi 26 novembre 2010
Au cours des deux premières années de son mandat, Barack Obama a
donné trop de gages à ceux qui l’ont porté au pouvoir - les
milieux d’affaires, Wall Street, ou le lobby
militaro-industriel -, pour espérer pouvoir reconquérir les
classes moyennes ou les ouvriers qui lui permettraient d’assurer
sa réélection. Les Démocrates ont ainsi, à l’issue des élections
générales de mi-mandat, perdu la majorité à la Chambre des
Représentants, même s’ils conservent une majorité fragile au
Sénat.
La situation économique ne s’améliore pas et de nombreux
observateurs et économistes n’escomptent aucune amélioration à
court terme.
L’avenir est sombre et le locataire de la Maison Blanche le sait
mieux que personne lui qui, au lendemain du scrutin des mid-terms,
est parti pour une tournée en Asie de dix jours, manière de
signifier qu’il a des ressources pour continuer à s’occuper des
affaires du monde. En effet, c’est le seul terrain sur lequel le
Président américain peut tenter de redonner un peu de lustre à
son administration. Mais, même dans ce domaine, ses marges de
manœuvre se trouvent limitées par la cuisante défaite électorale
qu’il vient de subir.
A propos de l’Iran, les Républicains vont désormais chercher à
faire de la surenchère pour provoquer Barack Obama sur un
dossier dans lequel il a, depuis le début de son mandat,
privilégié la diplomatie.
Sur le Proche-Orient, malgré une volonté affichée de relancer
les discussions entre Israéliens et Palestiniens, il est peu
probable que l’actuel gouvernement de Benyamin Netanyahu se
montre conciliant. Au contraire, il va tout faire pour entraver
cette démarche. Il peut compter sur le soutien affiché des
Républicains et des ultra-conservateurs du Tea Party. La
secrétaire d’Etat Hillary Clinton, pourtant peu suspecte de
sympathie envers les Palestiniens, n’a pas obtenu du chef du
gouvernement israélien un prolongement du moratoire sur le gel
des colonies de peuplement en Cisjordanie. Cette énième
rebuffade sonne comme un camouflet personnel envers le Président
des Etats-Unis.
Ainsi, même sur le terrain diplomatique, son autorité est
contestée, qui plus est par son allié le plus proche dans la
région, et sa crédibilité en sort affaiblie.
Un article du New York Times du 5 octobre dernier, ignoré
en grande partie par la presse internationale, rapporte que
l’Administration Obama, en échange d’un nouveau gel des colonies
de seulement 90 jours dans les Territoires occupés « a offert
des armes importantes, son soutien à une présence israélienne à
long terme en Cisjordanie, et la promesse par Washington
d’utiliser son droit de veto contre toute résolution critique
d’Israël au Conseil de Sécurité de l’ONU… » Daniel Kurtzer,
ancien ambassadeur en Israël de Bill Clinton a déclaré au New
York Times que « c’est un ensemble d’engagements
extraordinaires sans contrepartie pour les Etats-Unis ».
Il semble que ce soit Dennis Ross, un faucon chargé du
Moyen-Orient au National Security Council - ayant servi
indifféremment les administrations républicaines et démocrates -
qui ait inspiré cette démarche. Ce partisan de longue date d’une
action militaire contre l’Iran conseille Barack Obama sur le
Moyen-Orient. Il pourrait voir ses desseins se réaliser grâce au
duo Netanyahu/Liebermann.
Kader A. Abderrahim, chercheur associé à
l’IRIS, Professeur à l’Université de Californie et Maître de
Conférences à l’IEP-Paris
Tous les droits des auteurs des Œuvres protégées reproduites et
communiquées sur ce site, sont réservés.
Publié le 27 novembre 2010 avec l'aimable autorisation de l'IRIS.
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