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Monde
L'implicite de la
crise kirghize
Le nouveau réalisme russe face au pragmatisme d'Obama
Jean Géronimo
Mercredi 28 juillet 2010
‘’La longévité et la
stabilité de la suprématie américaine sur le monde dépendent
entièrement de la façon dont ils manipuleront ou sauront
satisfaire les principaux acteurs géostratégiques présents sur
l'échiquier eurasien et dont ils parviendront à gérer les pivots
géopolitiques clés de cette région’’. Zbigniew
Brzezinski.
Le
Grand échiquier
(2000, p. 250)
A l’issue de la crise politique provoquée
par le renversement du président K. Bakiev, on a pu un moment
redouté le pire pour l’avenir du Kirghizstan. Car à ce coup
d’Etat plus ou moins manipulé de l’extérieur et potentiellement
porteur d’instabilité politique interne, ont succédé des
troubles inter-ethniques particulièrement sanglants et à terme,
porteurs d’instabilités externes - en particulier en périphérie
post-soviétique. Face à cet enchaînement de violences ethniques,
le président russe Dimitri Medvedev
a déclaré, le 15 juin 2010,
que la situation au Kirghizistan était devenue ‘’intolérable’’.
Dans son
essence, cette crise est politiquement
non neutre en termes
de restructuration des
rapports de force
sur l’ancien espace soviétique et notamment, de redéfinition du
rôle de la Russie dans sa zone d’intérêt historique.
Aujourd’hui, cette dernière tend à abandonner
l’interventionnisme systématique - à dominante idéologique - qui
la caractérisait sous la période soviétique, au profit d’une
attitude plus prudente et responsable, privilégiant ses intérêts
nationaux mais s’efforçant, dans le même temps, de préserver les
grands équilibres politiques de la région.
Cette
orientation plus réaliste
de sa politique extérieure a conduit Moscou à rejeter toute
action unilatérale dans le règlement de la crise kirghize et
au-delà, à agir prioritairement dans le cadre des structures de
sécurité collective instaurées, sous son impulsion, sur l’espace
post-soviétique. Mais en définitive, le comportement russe
semble étroitement lié aux enjeux réels - plus ou moins cachés -
de la crise kirghize. Car, à terme, cette crise pourrait
remettre en cause la présence américaine soucieuse de se
maintenir en Asie centrale mais contrainte aujourd’hui, à un
certain pragmatisme pour défendre ses intérêts économiques et
son nouveau statut dans la région comme
puissance alternative
à la Russie.
Dans cet axe,
Washington cherche à maintenir le
statu-quo politique
en Asie centrale – au moyen d’une étroite coopération, voire
d’un soutien des régimes en place – dans l’optique d’y
stabiliser sa zone d’influence et in fine, préserver son accès
aux ressources énergétiques. Et cela, d’autant plus qu’à une
échelle plus globale intégrant l’Eurasie post-communiste, la
puissance américaine - sur la base du levier otanien - serait
désormais, selon l’éminent conseiller du président Obama,
Zbigniew Brzezinski (2004, p. 7), ‘’l’ultime
garant de la stabilité internationale’’[i].
En ce sens, il
s’agira dans le cadre de cette étude d’analyser
l’implicite de cette
crise.
Avenir incertain
Le caractère
critique de cette crise eurasienne s’explique par son double
impact. Dans un premier temps, elle tend en effet à
redistribuer les
cartes des Etats présents en Asie centrale et au delà, à
modifier les règles du jeu en zone post-soviétique, au profit
d’une Russie renforcée et de retour dans son espace historique.
Cette dernière, selon Brzezinski (2008, p. 208) chercherait
aujourd’hui à ‘’instaurer
un nouvel arrangement qui reviendrait à isoler l’Asie centrale
du reste du monde (…)’’[ii].
Dans un second temps, cette modification des règles tend à
accroitre les risques de déstabilisation et de contagion
révolutionnaire en Asie centrale, comme l’a rappelé le 29 juin
2010 le président kazakh,
Noursoultan Nazarbaïev, dans un discours alarmiste à
Astana, lors d’une conférence de
l’OSCE[iii].
Désormais, un degré élevé
d’incertitude caractérise donc le devenir de cette vaste
région.
Jusque là et depuis la disparition de
l’URSS le 25 décembre 1991, ces règles ont été imposées par une
puissance américaine avide de profiter de sa victoire éclatante
de la Guerre froide et de la faiblesse temporaire de la Russie
post-soviétique, dans le but
d’accélérer son recul
dans sa proche périphérie – c'est-à-dire, dans son ancienne zone
de domination impériale. Car la ‘’fin de l’histoire’’ issue de
la chute de l’Union soviétique, reconnait Brzezinski (2008, p.
24), a conféré aux américains un nouveau statut impérial et une
arrogance dans leur certitude de pouvoir ‘’désormais
fixer les règles du jeu’’[iv]
– et au-delà, d’instrumentaliser les nouvelles règles
internationales de la guerre. Mais surtout, selon la stratégie
de déstabilisation patiemment mise en œuvre par Z. Brzezinski et
parfaitement résumée dans son ouvrage majeur ‘’Le Grand
Echiquier’’, il s’agit d’empêcher toute velléité russe de
reconstruire son ancien Empire[v].
Dans ce but, Brzezinski prône une politique centrée sur
l’émancipation des
anciennes républiques de l’URSS de la tutelle russe –
principalement en zones caucasienne et centre-asiatique. Selon
lui, cette contrainte oblige l’administration américaine à ‘’garantir
l’indépendance des Etats post-soviétiques de la région’’ (Brzezinski,
2004, p. 92) – dont, naturellement, celle du Kirghizstan. Mais
plus globalement, il s’agit de freiner, voire de bloquer
l’émergence sur l’espace eurasien d’une nouvelle
puissance majeure, potentiellement menaçante pour
l’hégémonie américaine.
Cette orientation apparait clairement dés
1992, dans la conclusion de deux rapports du Pentagone,
précisant que le maintien de l’hégémonie américaine née de la
guerre du Golfe et de l’implosion du bloc soviétique implique de
‘’convaincre d’éventuels
rivaux qu’ils n’ont pas besoin d’aspirer à jouer un plus grand
rôle’’ – et que, dans le cas contraire, Washington serait
contraint de les
‘’dissuader’’[vi].
Le plus troublant est que cette aspiration américaine au
‘’premier rôle’’ sur le continent eurasien s’est maintenue
jusqu’à aujourd’hui, sous des formes certes moins agressives
avec l’administration Obama, qui a fait de l’Afghanistan - et
donc de manière indirecte, en raison d’inter-actions
stratégiques, du Kirghizstan - une des
priorités de sa
politique étrangère.
Ainsi, dans la vision de Brzezinski, l’Asie
centrale serait la pièce maîtresse d’une véritable
partie d’échecs
menée à l’échelle de l’Eurasie et en cela, elle transforme le
Kirghizstan en une variable clé du Grand échiquier. Car en
définitive, la main mise sur le Kirghizstan permettrait à
Washington de mieux
contrôler l’évolution géopolitique future de l’espace
post-communiste et plus particulièrement, le comportement d’une
Russie revancharde.
Une
zone stratégique
Dans la mesure où le Kirghizstan est au
cœur d’une zone centre-asiatique stratégique et convoitée par
les puissances américaine, chinoise et russe - voire européenne
- cette crise prend une dimension particulière. Car, en dehors
de son immense potentiel énergétique, l’Asie centrale apparaît
comme un levier fondamental dans l’optique du contrôle du
continent eurasien,
centre névralgique du nouveau monde, selon Brzezinski. Sans
ambages, ce dernier a rappelé l’intérêt politique évident de
cette région pour la stratégie américaine de long terme, en
matière de sécurité énergétique et de contournement de la Russie
– via des circuits alternatifs :
‘’A un certain moment,
probablement pas si lointain, des oléoducs et des gazoducs
allant de l’Asie centrale à l’océan Indien en passant par
l’Afghanistan et le Pakistan deviendront réalisables. Voilà de
bonnes choses à faire.’’ (Brzezinski, 2008, p. 199). Depuis
la fin de la Guerre froide, ce statut stratégique de l’Asie
centrale au sein de la sphère eurasienne ne cesse de se
renforcer, tout en restant une source de tensions croissantes
entre russes et américains. Aujourd’hui, Washington va jusqu’à
contester la légitimité de la domination russe dans cette
région, nuisible selon elle pour son développement de long
terme.
La Russie, affirme Brzezinski (2008, p.
208), ‘’devra admettre
qu’elle ne peut contrôler indéfiniment cet immense territoire,
au sous-sol potentiellement aussi riche, sans faire partie d’un
ensemble plus vaste. Et cet ensemble est, par essence, la
communauté euro-atlantique’’. A l’amorce de la décennie
2010, l’espace eurasien représente environ 75 % de la population
mondiale, 60 % du produit national mondial et 75 % des
ressources énergétiques de la planète[vii].
Considérée par Brzezinski (2000, p. 249) comme
‘’la scène centrale de la
planète’’, l’Eurasie se présente désormais comme le moteur
politique et économique du développement mondial. Dans l’optique
d’y verrouiller la domination politico-militaire américaine,
l’extension de l’Otan - et de sa zone de responsabilité
eurasienne - devient pour Brzezinski (2004, p. 296) un point
incontournable : ‘’le
champ d’action stratégique de l’Alliance atlantique est appelé à
s’élargir à l’ensemble eurasien’’ - d’où l’émergence d’une
véritable fonction politique de l’Otan.
Sur un plan historique, l’Asie centrale -
comme entité eurasienne - fait partie de la sphère d’influence
russe, partiellement structurée sous le soviétisme. Cela a été
récemment confirmé par l’ancien premier ministre russe
(septembre 1998 - mai 1999), E. Primakov :
‘’La
Russie a des intérêts évidents par rapport à ces pays (de l’Asie
centrale : jg), qui ont appartenu à l'Union soviétique. Il
existe des relations fortes entre les peuples, une histoire
commune, un ancien espace économique unifié (…)’’[viii].
En ce
sens, on peut parler du maintien d’une forte culture soviétique
en Asie centrale, contribuant in fine à renforcer l’unité, donc
la stabilité de cette région. Or, dans la mesure où la ligne
Brzezinski vise à introduire le ‘’pluralisme géopolitique’’ dans
cette région - dont le Kirghizstan, depuis la révolution
‘’colorée’’ de 2005, ne serait qu’une parfaite illustration -
elle remet en cause le rôle unitaire et régulateur de cette
culture héritée du soviétisme. Car, dans son essence, cette
stratégie pluraliste tend à éroder le lourd monolithisme russe,
perçu comme le levier de sa domination politique et pour cette
raison, considéré comme néfaste par le célèbre stratège
américain. Par ce biais, la ligne anti-russe de Brzezinski est
un facteur accélérateur de crise.
Dans le cadre de cette lutte pour la
domination régionale, le Kirghizstan acquiert donc une
indéniable dimension géopolitique et cela, d’autant plus qu’il
abrite deux bases militaires majeures des Etats américain et
russe – reflétant, en quelque sorte, une forme d’équilibre
post-guerre-froide des puissances. Et, en définitive, sa
position au cœur des itinéraires stratégiques de la région en
fait un
Etat-pivot
incontournable sur l’Echiquier eurasien. Cela explique, depuis
la disparition de l’URSS, la politique bienveillante de
Washington à l’égard du Kirghizstan, dans le but de s’en faire
un allié solide et de l’utiliser comme
tête de pont pour
s’implanter durablement dans la région. Dans ce schéma, on peut
expliquer la première révolution libérale (‘’des tulipes’’) -
qui a amené K. Bakiev au pouvoir en 2005 – comme une tentative
de contrôle
américaine d’une ancienne république soviétique, visant de facto
à déstabiliser l’autorité russe et à remettre en cause son
influence en Asie centrale. Sur ce point, on rappellera le rôle
décisif des ONG contrôlées (via leur financement) par Washington
dans le déclenchement de ces supposées révolutions spontanées
d’inspiration libérale et en ce sens, il semble logique que le
Kirghizstan soit caractérisé par une densité d’ONG anormalement
élevée – déjà en 2005, 8000 ONG théoriquement
kirghizes mais réellement
étrangères, dans la
mesure où elles sont de
facto contrôlées par le pouvoir américain[ix].
En dernière instance, on rappellera la contribution déterminante
de ces ONG dans la promotion de la ‘’démocratie’’ et par ce
biais, dans la réussite des premières révolutions colorées en
Géorgie (2003), en Ukraine (2004) et au Kirghizstan (2005) –
dont une conséquence majeure a été d’ébrécher l’autorité russe
(et ses intérêts) en Asie centrale.
De ce point de vue, on peut comprendre les
critiques sans cesse réitérées de V. Poutine à l’égard de
certaines ONG au comportement douteux et financées de
l’étranger, utilisées par Washington comme moyens
d’ingérence dans la
vie politique interne des Etats de la zone post-communiste et
au-delà, comme catalyseurs des révolutions libérales. Par leur
intermédiaire, l’immuable Brzezinski a été particulièrement
actif en Tchétchénie – via son ‘’Comité américain pour la paix
en Tchétchénie’’ (American Committee for Peace in Chechnya),
installé dans les locaux de Freedom House (!) et en fait,
destiné au soutien informel des indépendantistes tchéchènes.
Ironie de l’histoire, c’est justement une seconde révolution -
début avril 2010 - qui a renversé Bakiev dont le régime a été
accusé de dérive autoritaire et de corruption généralisée.
La
position russe
Aujourd’hui, une question majeure concerne
la pertinence d’une
intervention militaire russe pour - définitivement - stabiliser
le pays et par ce biais, éviter une déstabilisation plus globale
de la zone centre-asiatique. Dans les années 90, la Russie était
déjà intervenue dans la région pour calmer les tensions
ethno-nationalistes mais très vite, elle s’est laissée enfermée
dans un conflit sanglant et surtout, elle a été accusée par les
belligérants de nourrir la discorde pour justifier son action
militaire. L’administration russe ne veut plus revivre un tel
cauchemar.
Dans le contexte actuel de la retombée des
tensions au Kirghizstan, l’hypothèse sur l’éventualité d’une
action russe doit tenir compte de trois paramètres. D’abord
Moscou a, jusqu’à présent, refusé d’intervenir en raison du
‘’syndrome géorgien’’ de l’été 2008 et de l’hostilité de
l’opinion publique internationale qualifiant alors la réponse
russe à l’agression de l’armée géorgienne de
‘’disproportionnée’’. Lors de sa visite du 5 juillet 2010 à
Tbilissi, la secrétaire d’Etat américaine, H. Clinton a de
nouveau condamné ‘’l'invasion
et l'occupation de la Géorgie’’ par l’armée russe[x].
Ensuite, le Kirghizstan se situe dans l’espace sécuritaire
théoriquement couvert par l’organisation politico-militaire de
l’OTSC, ce qui incitera probablement Moscou - le cas échéant - à
organiser une action dans un cadre collectif impliquant l’accord
des autres Etats de la région, issus des ex-républiques de
l’URSS. Enfin, Moscou doit tenir compte des intérêts des Etats
kazakh, ouzbek et tadjik dans la mesure où le Kirghizstan se
trouve dans leur espace d’influence politique et comporte
d’importantes minorités ethniques provenant de ces derniers –
d’où le problème actuel des réfugiés ouzbeks (15 % de la
population kirghize), contraints de fuir les massacres ethniques[xi].
De ce point de vue, en créant
artificiellement de nombreuses minorités ethniques disséminées à
l’échelle de l’URSS,
l’héritage stalinien du tracé irrationnel des frontières des
républiques soviétiques pèse encore très lourd aujourd’hui. Même
si, par la suite, en vertu des valeurs égalitaristes du
socialisme, la position officielle du PCUS a été d’imposer une
politique de tolérance multi-ethnique dans la totalité de
l’Empire soviétique, ‘’paradis des peuples’’. Dans ses grandes
lignes, ce tracé arbitraire de l’époque stalinienne est donc
responsable de la montée des problèmes ethniques en Asie
centrale et des tensions nationalistes, souvent meurtrières, qui
lui sont étroitement associées. Ces tensions ethno-nationalistes
ont d’ailleurs précipité la fin de l’URSS, comme l’avait annoncé
de manière prophétique à la fin des années 70, H.C. d’Encausse
dans son célèbre ouvrage ‘’L’Empire éclaté’’[xii].
Et de ce fait, cette grave erreur du
Vojd (guide) a été la
condition permissive d’une forte
ethnicisation des
crises politiques sur l’ancien espace communiste – dont la
tragédie kirghize ne serait, finalement, qu’un sous-produit
logique.
Loin d’être spontanés et malheureusement
transformés en véritables pogroms, les affrontements
inter-ethniques semblent avoir été guidés par une main
extérieure, dont certains mouvements extrémistes internationaux.
Cette hypothèse a été confirmée le 1/07/2010 par
Nikolaï Bordiouja, secrétaire
général de l’OTSC :
‘’Nous avons des preuves que les événements à Och ont été
planifiés et exécutés par des membres d'organisations
internationales extrémistes’’. Selon N. Bordiouja, ces
derniers auraient pris une part majeure
‘’dans les attaques
contre des habitants kirghizes et les ouzbèkes, ainsi que dans
des crimes religieux’’[xiii].
Une telle configuration renforce, dans un futur proche, les
risques d’extension de la crise kirghize à la périphérie
post-soviétique – et dans ce cas, elle ferait le jeu d’une
puissance américaine désireuse de recouvrir ses positions
récemment perdues (principalement l’Ukraine, voire
l’Ouzbékistan) au profit de la Russie. Au cœur du Grand
échiquier, tous les coups sont permis.
Ainsi, ce qui rend la position russe
particulièrement délicate est que le Kirghizstan - désormais
intégré à la zone d’intérêt américaine - se trouve à la fois
dans sa ‘’zone d’influence’’ traditionnelle héritée de l’ère
soviétique et dans la ‘’zone de responsabilité’’ de l’OTSC,
organisation politico-militaire dirigée par elle, mais dont les
autres membres redoutent l’influence excessive de Moscou en son
sein. Celle-ci est en effet suspectée de vouloir reproduire son
diktat de la période
soviétique, voire d’instrumentaliser la crise kirghize en vue de
renforcer son leadership dans la Communauté des Etats
indépendants (CEI) issue de l’implosion de l’URSS. Et un facteur
aggravant de la paralysie de cette organisation
politico-militaire eurasienne est d’une part, la faiblesse de
ses moyens militaires (dont la Russie - suivie du Kazakhstan -
est de loin, le plus gros contributeur) et d’autre part, son
incapacité à gérer des conflits internes à un Etat-membre –
l’OTSC étant plutôt préparée à assurer une sécurité collective
contre toute menace extérieure concernant un Etat de
l’organisation. Mais globalement, toute intervention extérieure
- sous leadership russe, puissance régionale dominante - devra
être obligatoirement couverte du
vernis de la
légitimité de l’OTSC (associée à l’ONU), jusqu’à présent frappée
d’une inquiétante passivité.
Finalement, dans le cadre de la réunion du
14 juin 2010 de l’OTSC, Nicolaï Patrouchev, président du Conseil
de sécurité russe, a déclaré que les Etats-membres de
l’organisation eurasienne ‘’n’ont
pas exclu l’usage éventuel de tous moyens à la disposition de
l’Organisation, en fonction de l’évolution de la situation au
Kirghizstan.’’[xiv]
Et un peu plus tard, le
8 juillet 2010, le chef de la diplomaite kirghize, Rouslan.
Kazakbaïev a annoncé que l’OTSC avait décidé d’accorder une aide
militaire et technique au Kirghizstan - dont
‘’un grand nombre
d’unités de matériel de guerre’’ - pour renforcer la
sécurité dans le sud en proie à de vives tensions ethniques[xv].
Mais cette prise de conscience est, sans doute, venue un peu
trop tard.
Le
syndrome afghan
A cela, on doit ajouter la crainte des
dirigeants russes de retomber dans une sorte de ‘’piège
afghan’’, lié au début des années 80 à l’enlisement de l’armée
rouge dans un conflit
périphérique (encore) planifié de l’étranger. En décembre
1979, la puissance soviétique fut en effet ‘’incitée’’ à
intervenir à la demande du gouvernement de Kaboul, à la suite de
l’initiative américaine de former et d’armer la guérilla
anti-communiste (dont les fameux talibans) en vue de
déstabiliser le régime afghan pro-soviétique. Selon la douteuse
idée de Zbigniew Brzezinski, l’administration américaine cherche
à l’époque à jouer la carte des ‘’excités islamistes’’ – selon
ses propres termes –
contre la ‘’dictature communiste’’ alliée de l’URSS et de son
‘’axe du mal’’. La nécessité de protéger le pouvoir en place,
contre la menace d’un coup d’Etat insidieusement encouragé par
Washington, justifiera le maintien de l’armée rouge jusqu’en
janvier 1989. Pour reprendre l’expression de Brzezinski, il
s’agit alors de donner à la Russie soviétique
‘’sa guerre du Vietnam’’[xvi].
L’objectif sous-jacent à cette initiative
américaine est d’épuiser l’économie de l’URSS exsangue à la fin
des années 70 mais aussi, dans le même temps, d’éroder dans une
sale guerre sa légitimité
idéologique comme ‘’avant-garde du socialisme avancé’’[xvii].
Mais une autre raison de cette intervention russe, répondant à
une logique sécuritaire, était – déjà –
d’éviter la déstabilisation de l’Asie centrale, région
particulièrement vulnérable sur le plan politique. Car
historiquement, la Russie y a joué un rôle de
verrou sécuritaire –
certes, associé à une forme de paternalisme politiquement
orienté. En conséquence, négliger ce paramètre serait pour
Washington une erreur très grave et au moins, un comportement
impardonnable. Et au-delà, cela traduirait un
déficit
d’intelligence stratégique des responsables de la ligne
extérieure américaine pour comprendre réellement le monde russe
et notamment, la
psychologie particulière de ses dirigeants politiques.
Depuis la désastreuse guerre d’Afghanistan
(au moins, 15000 morts soviétiques au combat[xviii]),
la Russie post-soviétique redoute à nouveau d’être piégée dans
un conflit meurtrier, politiquement et économiquement coûteux –
sans parler de la dimension humaine. D’autant plus qu’un tel
conflit nuirait à son
image internationale et risquerait, en définitive, d’épuiser
son économie en phase de redressement mais considérablement
fragilisée par la récente crise mondiale – avec une chute du PIB
de 8 % en 2009. Or l’objectif avoué du président Medvedev est de
moderniser l’économie russe sur la base d’un partenariat
renforcé avec l’Occident, principalement avec l’Union
européenne. Sur ce point on peut d’ailleurs rappeler que le
projet russo-européen ‘’Partenariat
pour la modernisation’’ a été au centre du sommet Russie-UE des
31 mai et 1 juin 2010. Dans son essence, cet objectif
contraint la liberté d’action de la Russie et surtout l’oblige,
au moins en apparence, à respecter les
règles
internationales occidentalisées et à géométrie variable de ‘’non
ingérence’’ – fondées sur les normes de souveraineté
étatique/intégrité territoriale. Or ces règles sont le plus
souvent arbitrairement imposées - et politiquement manipulées -
par la gouvernance mondiale libérale, comme on l’a vu dans le
cas de l’indépendance illégale du Kossovo, en violation des
principes onusiens (principalement, la résolution 1244 du
Conseil de sécurité de l’ONU sur l’intégrité territoriale de la
République serbe). Mais le plus inquiétant est que le Kossovo
espère aujourd’hui intégrer l’Otan, toujours perçue par Moscou
comme un résidu de la Guerre froide et surtout, comme une
organisation structurellement
anti-russe.
Dans ce cadre, on peut comprendre les
hésitations de l’Etat russe, héritier politique de l’URSS, car
toute intervention solitaire de sa part serait perçue par
l’Occident dans la continuité de l’unilatéralisme soviétique et
de ses aspirations impériales – voire comme une forme de
réactivation de la
Guerre froide. Une telle configuration exposerait la Russie à
des sanctions économiques - du type embargo - pouvant freiner
son développement technologique (comme ce fut le cas du temps de
l’URSS, avec le ‘’filtrage’’ américain des exportations
occidentales des technologies sensibles vers l’Union
soviétique). Cette hypothèse est d’autant plus plausible que
certains nouveaux membres de l’UE issus de l’Europe de l’Est
manifestent une hostilité permanente - quasi instinctive - à
l’égard de Moscou et pour cette raison, sont à l’affut du
moindre prétexte pour l’isoler. Dans un passé récent, la Pologne
et la République tchèque ont été au sein de l’Union européenne
les plus fervents soutiens d’une politique
anti-russe et
privilégiant les intérêts américains (notamment, dans la mise en
œuvre du premier projet anti-missiles américain, suspecté d’être
dirigé contre la Russie). Dans ce schéma, toute intervention
serait suicidaire pour une Russie désireuse de s’intégrer à
l’ordre économique mondial - via, notamment, son adhésion à
l’OMC (jusque là, consciemment freinée par Washington) - dans le
but de profiter du commerce international et d’optimiser son
modèle de croissance. Pour justifier sa non-intervention au
Kirghizstan, Moscou peut donc, avec une certaine légitimité,
avancer le motif politiquement correct d’un ‘’conflit interne’’
– illustrant, en cela, le nouveau réalisme russe.
Ainsi, dans la mesure où il s’agit d’une
‘’affaire interne’’, une action militaire de Moscou serait
perçue comme une ingérence politique dans un Etat théoriquement
souverain : ‘’Il
s'agit d'un conflit intérieur, et la Russie ne voit pour le
moment pas de conditions qui lui permettraient de prendre part à
son règlement’’[xix]
a déclaré la porte-parole du président russe Natalia Timakova,
dans la première phase du conflit. Et surtout, cette
intervention pourrait provoquer un conflit régional comme
première pierre d’une escalade incontrôlable et in fine,
génératrice d’une crise plus
globale. Comme l’a
fort justement souligné E. Primakov, sur la base d’expériences
douloureuses issues de la période soviétique mais concernant
aujourd’hui également le Caucase Nord :
‘’On ne pourra rien
résoudre par des moyens militaires (…).’’[xx]
Les leçons de l’histoire semblent avoir porté.
A
qui profite la crise ?
Dans ce contexte particulier, on peut se
demander qui a intérêt à accélérer la déstabilisation du pays
pour, dans une phase ultérieure, en récolter les fruits. A
priori, toute aggravation - ou réactivation - de la crise
kirghize peut précipiter et justifier une intervention militaire
extérieure, tant du coté russe que du coté américain. Dans cet
axe, une radicalisation de la crise pourrait donc être
instrumentalisée par
les deux puissances en vue d’une reprise en main musclée de la
région et par ce biais, y renforcer leur leadership. Autrement
dit, dans le cadre de la lutte d’influence - certes atténuée
sous l’administration Obama - entre les deux anciens ennemis de
la Guerre froide, cette crise pourrait être détournée à des fins
politiques.
Mais, dans le même temps, cette instabilité
politique croissante de la région pourrait faire le jeu des
partisans de l’ancien président Bakiev, des mouvements
nationalistes et des extrémismes religieux (voire des
organisations mafieuses liées à l’économie de la drogue[xxi]).
La plupart de ces hypothèses ont d’ailleurs été reprises, le 29
juin, par le président kazakh
Nazarbaïev:
‘’En principe, (ces troubles, ndlr) affaiblissent le front de la
lutte contre le terrorisme international et l'extrémisme, dont
la ligne de front passe dans l'Afghanistan voisin. Le chaos et
la déstabilisation dans la région profitent aux trafiquants de
drogue ainsi qu’aux vendeurs d'armes et de personnes’’[xxii]
L’ensemble de ces groupes anti-gouvernementaux auraient un
intérêt objectif à
manipuler les troubles inter-ethniques et à réorienter la
colère du peuple kirghiz contre le pouvoir en place, dans le but
ultime de le renverser – ou au moins, en multipliant les
micro-conflits, fragiliser sa politique répressive et réduire
son impact sur leurs intérêts.
En définitive, cette instrumentalisation
des mouvements ethno-nationalistes tend à s’inscrire comme une
pratique courante dans l’espace post-soviétique. Et elle fut
d’ailleurs couramment utilisée par l’ancienne administration
G.W. Bush, dans l’optique d’affaiblir le pouvoir russe et de le
déstabiliser sur ses appuis périphériques, via la
compression de sa
sphère d’influence – notamment en Ex-Yougoslavie, en Tchétchénie
et en Géorgie et, plus globalement, dans la région du Caucase
considérée par le pouvoir central russe comme une véritable
poudrière. Or, comme l’a rappelé Alexandre Khloponine,
vice-premier ministre et représentant plénipotentiaire du
président russe dans la région fédérale du Caucase du Nord, le
Caucase est ‘’une région
stratégique pour la Russie’’[xxiii].
Cela a
renforcé la détermination de V. Poutine à rejeter toute forme
d’ingérence dans les affaires intérieures russes et au-delà, à
ne tolérer ‘’aucune
atteinte à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de la
Russie’’[xxiv].
De manière implicite, le premier ministre russe vise les excès
passés de l’ingérence américaine en zone post-soviétique – et
dans le même temps, il cherche à montrer que la Russie a repris,
de manière générale, le contrôle de son ‘’pré-carré’’ (dont fait
partie le Kirghizstan). Cette inflexion radicale de la politique
russe, centrée sur la défense de ses intérêts nationaux élargis
à sa proche périphérie, a été illustrée de manière spectaculaire
par son intervention décisive en Géorgie en août 2008 – qui
contraste avec son impuissance passée lors de la crise serbe de
la fin des années 90, exclusivement gérée par la surpuissante
Otan au profit des intérêts américains. De manière indéniable,
Moscou a retenu la leçon
A
la croisée des chemins
Dans ses grandes lignes, l’enjeu implicite
de la crise kirghize est la capacité de Moscou à retrouver son
leadership régional et sa crédibilité politique - via la
réactivation de son rôle de gendarme -
au détriment de la
puissance américaine. Autrement dit, il s’agit désormais pour
Moscou de trouver des sources
alternatives de
légitimité à sa domination historique en périphérie
post-soviétique, tout en préservant ses relations avec
l’Occident – réalisme économique oblige. De ce point de vue, la
crise kirghize lui offre une réelle opportunité de renforcer sa
présence dans sa zone d’intérêts vitaux. D’autant plus qu’elle
apparait aux yeux des belligérants, notamment pour le
gouvernement intérimaire kirghiz, comme la
seule puissance
réellement capable de mettre de l’ordre dans la région – dans la
continuité du soviétisme. Et, en dernière instance, la volonté
russe de relancer son leadership politique sur l’espace de la
CEI dépendra, de beaucoup, de sa capacité à remettre le
Kirghizstan ‘’sur le droit chemin’’ et par ce biais, à retrouver
une certaine aura régionale.
Mais le temps presse, car après
l’instauration récente d’une ‘’république parlementaire’’ au
Kirghizstan, dont Moscou met en doute la viabilité, le premier
défi pour la nouvelle république sera sa capacité à réintroduire
la
légitimité de
l’Etat central, considérablement érodée depuis le déclenchement
- et la gestion douteuse - de la crise. Cela a conduit le
Président Medvedev à lancer, le 28 juin 2010 un avertissement
solennel : ‘’Dans la
situation actuelle, il existe tout un tas de scénarios pour le
Kirghizistan, y compris le plus désagréable, conduisant à
l'effondrement de l'Etat’’[xxv]
Car, à terme, cette désagrégation de
l’Etat-central pourrait devenir le catalyseur de l’implosion des
grands équilibres en Eurasie post-communiste
– au risque, finalement, de déstabiliser le Grand échiquier.
[i] Brzezinski Z. (2004) :
‘’Le Vrai Choix’’, éd. Odile Jacob.
[ii] Brzezinski Z. /
Scowcroft B. (2008) : ‘’L’Amérique face au monde’’, éd.
Pearson.
[iv]
Brzezinski (2008, p. 24) admet en particulier que
‘’(…) ces
nouvelles règles nous permettent de décider quand et
comment entamer des guerres, comment les
instrumentaliser ou les prévoir’’.
[v]
Brzezinski Z. (2000) : ‘’Le
Grand échiquier – L’Amérique et le reste du monde’’, éd.
Hachette (1° éd. : Bayard, 1997).
[vi]
http://www.monde-diplomatique.fr/2008/09/HALIMI/16245
: ‘’Retour russe’’, S. Halimi,
Le Monde
diplomatique, sept. 2008. Voir aussi
‘’Washington et la maîtrise du monde’’, Paul-Marie de La
Gorce, Le Monde diplomatique, avril 1992. Dans un
de deux rapports, il est explicitement précisé que la
cible prioritaire des menaces américaines est la Russie,
considérée comme l’‘’unique
puissance au monde qui puisse détruire les Etats-Unis’’.
[xi] Pour rappel, dans
la nuit du 10 au 11 juin 2010, des affrontements armés
ont éclaté à Och entre la population kirghize et la
minorité ouzbèque de la ville. Les troubles
interethniques se sont poursuivis pendant une semaine,
conduisant les autorités à décréter l'état d'urgence à
Och et à Djalal-Abad. Selon les informations
officielles, les violences ont fait 275 morts, mais le
bilan pourrait être beaucoup plus lourd
(approximativement évalué à 2000 morts). Selon l’OMC,
ces émeutes auraient affecté directement ou
indirectement 1 million de personnes (300000 réfugiés et
700000 déplacés à l’intérieur). Sources :
http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2010/06/18/97001-20100618FILWWW00628-2000-morts-au-kirghizstan-presidence.php
: ‘’Deux mille morts au Kirghizstan’’, Présidence,
Dépêche AFP, Le Figaro.fr, 18/06/2010.
[xii] D’Encausse H.C.
(1978): ‘’L'Empire
éclaté’’, Paris, éd. Flammarion.
[xvii]
Depuis la décennie 60, l’économie soviétique souffre
d’un déclin structurel de sa productivité qui,
progressivement, l’amène vers le taux de croissance zéro
au début des années 80. Brzezinski le sait parfaitement
comme il sait que l’URSS ne pourra pas financer
durablement une guerre dévoreuse de ressources et qui,
de ce fait, comprime l’investissement dans la sphère de
l’économie civile. Conformément à la thèse de Jacques
Sapir, l’URSS est avant tout une économie
mobilisée
(via le plan central)
et militarisée en fonction d’un objectif politique
précis (traduit en priorités économiques) – en quelque
sorte, une véritable ‘’économie de guerre’’. Réf. :
Sapir J. (1990) : ‘’L'économie mobilisée - Essai sur les
économies de type soviétique’’, éd. la Découverte.
[xviii]
Entre 1979 et 1989, 620 000
Soviétiques ont servi dans la guerre d’Afghanistan. Le
bilan officiel s’élève à 14 453 morts, 53 754 blessés et
415 932 malades. Mais des statisticiens militaires
russes estiment que le bilan réel est plus proche de 26
000 morts, pour la seule 40e armée ! Ils ont aussi perdu
118 avions de combat, 333 hélicoptères, 147 chars, 1 314
blindés de transport, 11 369 camions… Du coté de la
population afghane, le nombre de morts s’élèverait entre
1 et 1,5 millions.
Sources :
http://www.valeursactuelles.com/actualit%C3%A9s/monde/le%C3%A7ons-russes-pour-l%E2%80%99otan.html:
‘’Afghanistan : leçons russes pour l’Otan’’, F. Pons,
11/03/2010.
[xx] Primakov, 15/06/2010,
op. cit.
[xxi] Toute déstabilisation
du pays risque de freiner la lutte anti-drogue menée par
les américains en Afghanistan (premier producteur
mondial d’opium), d’autant plus que cela perturberait le
fonctionnement de la base de Manas, centre de transit
incontournable vers ce pays. Mais plus globalement, sous
l’impulsion de la Russie fortement touchée par ce fléau
- 80 tonnes de stupéfiants y sont ‘’importés’’ chaque
année d’Afghanistan – l’OTSC cherche en Asie centrale à
combattre le problème de la drogue et de l’économie
parallèle/mafieuse qui lui est associée. Or
l’incertitude croissante au Kirghizstan complique cette
action collective anti-drogue de l’OTSC (tout en
détournant des ressources précieuses) et en cela,
avantage de manière objective les structures mafieuses
implantées sur l’espace centre-asiatique. Et il faut
rappeler que l’une des principales routes de
l’exportation de la drogue passe au sud du Kirghizstan
(à Osh et à Djalal-Abad), là où ont eu lieu les
affrontements inter-ethniques.
‘’La
région d'Och représente une sorte d'embouchure par
laquelle les stupéfiants se propagent dans toute l'Asie
centrale. Cette région est une plaque tournante du
trafic de drogue’’
a déclaré le directeur du Service russe de contrôle des
stupéfiants (FSKN), Viktor Ivanov. Pour combattre le
trafic d’héroïne provenant d’Afghanistan, Moscou serait
désireuse d’implanter de nouvelles bases militaires dans
les Etats limitrophes du Kirghizstan, du Tadjikistan et
du Kazakhstan. Pour l’ensemble de ces
raisons et dans
la mesure où il est au centre de la lutte d’influence
entre russes et américains pour le contrôle de l’Asie
centrale, le Kirghizstan doit être considéré comme un
pion stratégique
de l’Echiquier eurasien.
Sources :
http://fr.rian.ru/world/20100624/186958378.html :
‘’Kirghizstan : Moscou entend implanter une base
militaire pour combattre le trafic d’héroïne’’, V.
Ivanov, 24/06/2010.
[xxii]
Nazarbaïev,
29/06/2010, op. cit.
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