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The Palestine Chronicle
De l'influence d'Israël à Westminster
Janine Roberts *
Photo Palestine Chronicle
24 mai 2008
http://www.palestinechronicle.com/view_article_details.php?id=13821
Nous autres, les Britanniques, nous ne sommes pas comme les
Américains : nous ne tolèrerions en aucun cas d’avoir des
lobbyistes israéliens supervisant nos hommes politiques comme
cela se produit à Washington, qui, partant monopolisent le
pouvoir. C’est qu’ils risqueraient de gauchir nos positions en
matière de politique extérieure ! L’influence d’Israël, à
Washington, est bien établie. Elle s’exerce à la fois via de
puissantes organisations ouvertement juives de Washington et, de
plus en plus, via des associations de chrétiens sionistes.
A Jérusalem, il y a une quinzaine de jours, 600 citoyens
américains ont célébré l’anniversaire d’Israël, au nom d’un
puissant groupe américain de lobbying pro-israélien revendiquant
de représenter 40 millions de chrétiens et s’intitulant ‘Christians
United for Israel’, sous la houlette du Révérend milliardaire
John Hagee – chef de l’église texane et PDG d’une chaîne de
télévision ‘chrétienne’ largement diffusée. Leur organisation
est calquée sur l’American Israel Public Affairs Committee (Aipac),
dont le congrès, l’an dernier, a réuni quelque 6 000
participants à Washington.
Ces « Chrétiens » étaient venu clamer qu’Israël doit posséder la
totalité de Jérusalem – et, après avoir parcouru la rue de Jaffa
en agitant des drapeaux américains et israéliens, une centaine
d’entre eux se sont rendus, le 3 avril, dans la grande colonie
israélienne d’Ariel pour y participer à une réception égayée par
un spectacle de jeunes filles déguisées en vaches ( !),
organisée par le maire de cette colonie, en remerciement pour
les millions de dollars offerts pour la construction d’un
« vaste complexe de sports et de loisirs », portant le nom du
Révérend, en lettres immenses, sur son fronton.
Hagee a déclaré : « Je suis très heureux de me trouver ici, à
Ariel, ce soir, dans ce morceau d’Amérique en Judée-Samarie ! ».
Ensuite, lors d’une réception à Jérusalem avec la participation
de Benjamin Netanyahu, chef du Likoud et ami intime d’Hagee, ils
ont annoncé, le 9 avril, de nouveaux dons, pour un montant de 6
millions de dollars, à diverses causes israéliennes.
Le pasteur a déclaré : « Donner une partie seulement (voire,
encore pire, la totalité) de Jérusalem aux Palestiniens, cela
reviendrait à les offrir sur un plateau d’argent aux Talibans ».
La conférence de son organisation a attiré plus de 4 250
participants à Washington, l’an dernier. Le clou fut une
« apparition-surprise » du sénateur John McCain, soutenu par
Hagee, le candidat républicain aux élections présidentielles.
Voici son entrée en matière : « Dur, dur, de faire le boulot du
Seigneur dans la ville de Satan ! » Son allocution a été
ponctuée par sept ovations debout.
Voici la position adoptée par Barak Obama, sous la pression du
lobby sioniste : « Personne n’a souffert davantage que le peuple
palestinien de la non-reconnaissance d’Israël par le leadership
palestinien… » Hillary Clinton est allée encore plus loin. Elle
en appelle à un « Jérusalem uni en tant que capitale d’Israël »,
ce qui fait d’elle, définitivement, la grande favorite des
sionistes. Depuis 2004. Obama a reçu 93 700 dollars de l’Aipac,
tandis qu’Hillary, elle, empochait 349 73 dollars…
Voici toutefois une nouvelle plus réjouissante : un jour avant
la visite de Hagee à la colonie d’Ariel, le rabbin Eric Yoffie,
président de l’Union for Reform Judaism, la principale
organisation juive des Etats-Unis, comptant plus d’un million et
demi d’adhérents, a dénoncé Hagee et ses ouailles pour
extrémisme religieux.
Mais rien de tel ne s’est jamais produit ici, en Angleterre ?
Vous me suivez ?
Au contraire ; par certains côtés, le lobby sioniste, dans notre
pays, a eu encore bien plus de succès – non seulement
historiquement, en obtenant la Déclaration Balfour, mais en
particulier, dans les toutes dernières années. Aux Etats-Unis,
il y a treize juifs au Sénat et trente juifs à la Chambre des
Représentants, alors qu’au Royaume-Uni, avec une communauté
juive vingt fois plus petite, il y a beaucoup plus de juifs au
Parlement. Il y en a 18 à la Chambre des Communes, et il y en a
41 à la Chambre des Lords. C’est la plus haute représentation
juive en Occident, et cette « réussite » est due, pour partie, à
la supervision de Tony Blair.
Avant l’invention du New Labour, le parti travailliste penchait
bien plus du côté des Palestiniens. Jon Mendelsohn, de
l’association des amis travaillistes d’Israël (Labour Friends of
Israel) a expliqué la manière dont ce changement s’est opéré :
« Blair a attaqué l’anti-israélisme indéniable au sein du parti
travailliste. L’ancien parti travailliste (Old Labour) avait une
politique du genre cowboys-et-Indiens ; il sélectionnait des
chiens battus pour les soutenir. Mais ce milieu a énormément
changé. Le sionisme est omniprésent, dans le New Labour. La
présence de Blair aux réunions des Amis travaillistes d’Israël
est devenue automatique ».
Une des premières choses que fit Blair, après son élection en
tant que député, fut d’adhérer à Labour Friends of Israel. Mais
le changement majeur ne se produisit qu’après qu’il eut accédé
au contrôle du parti travailliste. Pour mener à bien ses projets
politiques, il lui fallait briser l’influence financière des
syndicats. Pour ce faire, il avait besoin d’un allié disposant
de ressources financières très importantes.
En 1994, un de ses collègues et amis, Eldred Tabachnik (Queen’s
Coroner), ancien président du Board of Deputies of British Jews
[l’équivalent du Consistoire israélite français en
Grande-Bretagne], lui présenta Michael Levy, un magnat de la
musique pop et un financeur des causes juives et israéliennes,
membre du panel mondial des gouverneurs de l’Agence juive
(Jewish Agency World Board of Governors), et l’un des membres
fondateurs de l’Holocaust Educational Trust. Cela s’est passé
lors d’un dîner de gala offert par le diplomate israélien Gideon
Meir.
Peu après, Blair fut invité au palais et sur les terrains de
tennis de Levy. D’après Andrew Porter de la revue The Business,
Levy avait exprimé son désir « de collecter des fonds très
importants pour le parti (travailliste) » s’il y avait un
« accord tacite selon lequel le parti travailliste ne serait
plus jamais anti-israélien, tant que Blair serait à sa tête ».
Résultat des courses : Lévy dirigea le Bureau de Financement du
Président du Labour, qui finança la campagne de Blair lors des
élections législatives de 1997. De fait, c’est Levy qui a rendu
possible la formation du Nouveau parti travailliste. Il en fut
immédiatement remercié par son élévation à la pairie ; ce fut
aussi le cas de certains autres donateurs. Levy s’est affiché en
tant que « sioniste international de première importance », et
il n’a cessé, depuis lors, de saluer le « soutien solide et
sincère de Blair à l’Etat d’Israël ».
Mais Blair avait besoin d’un robinet à fric intarissable pour
réduire l’influence des syndicats. Et, semble-t-il, il devait
cacher la source de ses financements, de peur qu’elle ne soit
controversée. Un des personnages les plus connus de
l’association des amis travaillistes d’Israël est David
Abrahams, un agent immobilier juif. Le président de la
fédération sioniste, Eric Moonman, s’en porte garant : « Je
connais bien David, et j’ai voyagé avec lui à de nombreuses
occasions. » Abrahams prit donc en charge en partie la tache
consistant à financer secrètement le New Labour. Il a donné plus
de 650 000 livres au parti, par l’intermédiaire de quatre autres
personnes – une initiative reconnue illégale par le Premier
ministre Gordon Brown, mais qui risque fort de n’avoir aucune
conséquence légale.
Généralement, Abrahams explique qu’il voulait rester dans
l’anonymat, en sa qualité de « personne privée ». Mais il en a
dit bien davantage au British Jewish Chronicle : il a déclaré à
cette revue juive qu’il finançait secrètement le parti
travailliste car il ne voulait pas qu’un lien soit établi entre
l’ « argent juif » et le parti travailliste, car il pensait que
cela inciterait les gens à soupçonner quelque complot juif.
Au début, les responsables du parti travailliste nièrent toute
connaissance de ces méthodes secrètes, mais des preuves ont
émergé, depuis lors, selon lesquelles Abrahams était, à
l’époque, en contact étroit avec le conseiller électoral du
premier ministre Gordon Brown, Jon Mendelssohn, qui se trouve
être l’ex-président de l’association de lobbying Labour Friends
of Israel [Les Amis travaillistes d’Israël]. D’autres membres
juifs de cette association y injectaient de l’argent. Lord
Sainsbury offrit un million de livres. Levy, en 2001, avait
récolté 15 millions de livres. Ainsi, le lobby israélien aida le
parti travailliste à briser le pouvoir des syndicats, en échange
d’un remodelage total du paysage politique britannique, dans
l’intérêt d’Israël.
De manière très étonnante, les ayant découverts, la presse
traita ces dons secrets avec des gants. Les journalistes furent
très rares à demander ce que le lobby israélien espérait retirer
de tels dons, aussi massifs ? Aucun ne demanda, à ma
connaissance, si c’était Tony Blair qui avait voulu que ces dons
soient maintenus secrets – et, si tel était le cas, pourquoi ?
Très peu d’entre eux spéculèrent sur les implications de ces
dons en matière de politique étrangère. Comme nous le savons
aujourd’hui, l’Irak n’a jamais, à aucun moment, représenté une
menace quelconque pour le Royaume-Uni. En revanche, ce pays
représentait une menace potentielle – pour Israël ! Blair disait
à ses publics juifs : « Un Irak stable, ce sera une excellente
nouvelle, pour Israël. » Il s’abstint, de même, de faire quoi
que ce soit pour exiger la cessation des combats, tandis
qu’Israël pilonnait le Liban.
Levy devint notre « émissaire spécial » au Moyen-Orient, en
dépit d’un très sérieux conflit d’intérêts. Il était supposé
négocier de manière impartiale avec les Palestiniens et les
Israéliens, mais il s’était comporté en collecteur de fonds pour
l’ancien premier ministre israélien Ehud Barak, ainsi qu’un
agent du lobbying israélien au Royaume-Uni. Il a une maison et
un bureau en Israël, et se qualifie lui-même de « sioniste
international »…
Un placard publicitaire du parti travailliste, publié dans
Jewish Chronicle, vantait le fait que depuis 1997, le chiffre
record de 57 députés travaillistes s’étaient rendus en Israël,
pour la plupart en compagnie (et financés par) l’association des
Amis travaillistes d’Israël, « faisant gonfler le nombre des
parlementaires déterminés à assurer un équilibre au sujet du
Moyen-Orient à la Chambre des communes. Davantage de députés
travaillistes se sont rendus en Israël que de députés des autres
partis. » L’encart vantait également le fait que le Terrorism
Act de 2000 – en faveur duquel l’association des amis
travaillistes d’Israël a fait un lobbying intense – « interdit
les organisations terroristes comme le Hamas, le Hezbollah et le
Jihad islamique palestinien », toutes formations ennemies
d’Israël, bien plus que du Royaume-Uni !...
Gordon Brown
Sur le plan personnel, Gordon est davantage encore immergé dans
le sionisme que Blair. C’est quelque chose avec quoi il a
grandi, dans sa jeunesse. Il a déclaré, lors d’un rassemblement
récent : « Je suis fier d’appartenir aux Amis travaillistes
d’Israël depuis plus de trente ans. Mon père allait passer
chaque année plusieurs semaines en Israël ; il était président
du Comité Israël de l’Eglise écossaise. Il allait en Israël,
rencontrer des gens, deux fois par an et ce, durant plus de
vingt ans. »
Dans un discours, Brown a déclaré : « J’ai grandi avec des
diapos et un vieux projecteur ; toutes ces photographies qu’il
avait ramenées, sur l’histoire d’Israël, avec des livres sur
Israël, et j’ai appris, très jeune, et directement de la part de
mon père, les luttes, les sacrifices et les succès du nouvel
Etat d’Israël et du peuple israélien. Aussi, je veux simplement
vous dire, à vous qui êtes aussi des amis d’Israël, que j’ai été
élevé dans la compréhension très forte que l’avenir d’Israël
n’est pas important seulement pour Israël lui-même, mais que cet
avenir importe au monde entier. Et je continuerai à faire, tant
pour défendre Israël que… »
Il a également déclaré : « J’ai grandi en étant fortement
impressionné par les souffrances et le courage du peuple juif,
dans la conscience du grand succès qu’ils ont remporté en créant
l’Etat d’Israël, et impressionné, plus que tout, par la
détermination à lutter contre les discriminations, sous toutes
leurs formes, d’où qu’elle provienne. »
Un des premiers actes de Gordon Brown, après son accession au
poste de Premier ministre, fut d’accepter une nomination en tant
que Patron du Fonds National Juif, fondé en 1901. Le
gouvernement israélien a vendu à ce Fonds les terres confisquées
aux réfugiés palestiniens – après quoi il a rendu ces terres
disponibles uniquement pour les juifs afin qu’ils s’y
installent. Il a planté des forêts à la place des oliviers
déracinés d’anciens villages palestiniens détruits.
Actuellement, ce fonds possède environ 14 % du territoire
israélien.
Brown annonça alors que deux enfants dans chaque lycée
britannique se verrait payer le voyage jusqu’au camp de la mort
d’Auschwitz. En raison de cette décision, le Holocaust
Educational Trust l’a honoré. Il a soutenu, par ailleurs, des
projets économiques en Cisjordanie, recommandés par le Trust
Portland, du financier Sir Ronald Cohen.
Mais c’est les nominations auxquelles a procédé Brown, qui sont
particulièrement préoccupantes. Il a garanti la poursuite du
financement juif du New Labour en nommant Mendelssohn, de
l’association des Amis travaillistes d’Israël en tant que
financeur en chef, en vue des prochaines élections. Il a
également nommé un ancien ambassadeur de Grande-Bretagne en
Israël, Simon McDonald, en qualité de premier conseiller
ès-politique étrangère. Israël a exprimé sa satisfaction, après
ce choix, disant que McDonald est un « véritable ami d’Israël »…
Il a aussi nommé James Purnell, secrétaire de Labour Friends of
Israel de 2002 à 2004 secrétaire d’Etat à la culture, aux médias
et au sport, lui donnant l’ascendant sur la BBC [British
Broadcasting Corporation] et d’ailleurs, aussi, sur l’ensemble
des médias britannique. Dans une lettre publiée dans Prospect en
décembre 2004, Purnell disait : « D’aucuns tentent de faire
d’Israël le méchant intégral, le nouveau régime paria voué à
remplacer l’Afrique du Sud de l’ère de l’apartheid… Quand
certaines personnes parlent d’Israël comme d’un pays ayant
entièrement tort, je me demande pourquoi. La seule réponse que
je puisse trouver, c’est qu’il y a quelque chose de profondément
ancré dans notre mémoire historique, qui fait que nous sommes
enclins à accuser les juifs. » (en 2008, Brown a chargé Purnell
des retraites !). Gordon Brown a confié à Jim Murphy, secrétaire
des Labour Friends of Israel de 2000 à 2002 la fonction de
ministre d’Etat pour l’Europe, avec la tutelle sur le service
international de la BBC [BBC World Service], ainsi que sur le
British Council [équivalent, en Angleterre, de l’Alliance
française, ndt]. Plus inquiétant encore : son nouveau ministre
pour le Moyen-Orient est Kim Howells, un ancien président de
Labour Friends of Israel. Quant à l’actuel président de cette
association de lobbying, c’est David Mencer, un ancien
volontaire dans les Forces Israéliennes de Défense…
Labour Friends of Israel [LFI] bourgeonne actuellement à
l’intérieur de la Chambre des Communes, et cette association est
considérée comme un tremplin assuré vers le succès pour des
aspirants politiciens. Les réceptions organisées par ce lobby
peuvent habituellement se vanter d’une assistance brillante,
avec des hôtes tels Gordon Brown, l’ambassadeur d’Israël et le
vice-ministre israélien de la défense. Lors des congrès du parti
travailliste, le Premier ministre assiste à la réunion du LFI,
ainsi que bon nombre des membres du cabinet. Une assistance d’un
niveau aussi élevé est quelque chose de suffisamment rare,
surtout s’agissant de réunions en marge du congrès lui-même,
pour être relevé.
Le Smith Institute, qui définit la politique du parti
travailliste, est désormais quasi totalement sous l’influence du
lobby israélien. Son président est Lord Haskel, qui est
également membre du conseil exécutif parlementaire du LFI. Le
conseil d’administration du Smith Institute compte parmi ses
membres la Baroness Meta Ramsay, officier du MI-6 de longue
date, qui est présidente pour la Chambre des Lords du LFI, et
Tony Blair est, bien entendu, aujourd’hui, l’envoyé spécial du
Quartette au Moyen-Orient…
Tous ces hauts personnages surveillent activement les médias, et
ils s’efforcent d’éradiquer toute critique visant Israël. Ainsi,
une référence qu’aurait faite un ambassadeur de France lors d’un
dîner organisé par Conrad Black à « un petit pays de merde » a
immédiatement entraîné l’envoi d’un courrier du LFI exigeant que
l’ambassadeur soit viré. De même ils alimentent en permanence un
dossier à l’encontre de Ken Livingstone [l’ex-maire de Londres,
jusqu’à il y a peu… ndt]
Yasmin Alibhai-Brown semble la seule journaliste consensuelle à
avoir osé poser des questions au LFI. Dans un article intitulé
« De tels lobbyistes et leur influence dans les coulisses
devraient nous inquiéter », publié le 3 décembre 2007, elle
écrivait :
« Pardonnez-moi pour cette question. Je ne devrais peut-être pas
la poser ? Pour avoir une vie tranquille, certaines choses, vous
apprend-on, doivent être tues. Suis-je nerveuse ? Oh oui, alors,
et pas qu’un peu ! Mais ces questions ne seront pas laissées de
côté. Elles me turlupinent depuis que la querelle des donateurs
du parti travailliste a éclaté, la semaine dernière. Ces
questions, c’est en toute bonne foi que je les pose, ici. Je
n’ai pas du tout envie de m’attirer la colère de Moïse et
j’entends d’ici les accusations d’antisémitisme, parce que j’ose
poser la question : « Quelqu’un peut-il m’expliquer quel est, au
juste, le rôle de Labour Friends of Israel dans notre vie
politique ? Et puis, par la même occasion : quel est le rôle de
l’association-jumelle, Conservative Friends of Israel (CFI) ?
« Dans une démocratie ouverte, nous sommes fondés à faire de
telles enquêtes – de fait, c’est même un devoir. David Abrahams,
l’étrange homme de l’ombre au centre du maelstrom des dons au
parti travailliste, fut jadis M. Gros Bonnet au LFI ; il en va
de même de John Mendelssohn, le collecteur de fonds astucieux
choisi par Gordon Brown pour récolter des « ressources
électorales » afin de financer la prochaine victoire
travailliste. Quant à Lord Levy, c’est, lui aussi, un membre clé
du LFI.
« Nous avons assisté à l’enquête policière tortueuse sur
l’affaire des Pairs (Lords), durant l’enquête « gros sous
/contre/ honneurs », mais il n’y a jamais, au grand jamais, eu
le moindre examen du lien entre Levy et le LFI ni de la manière
dont cela a pu conduire à ce que Tony Blair, son partenaire au
tennis, lui attribue la prestigieuse position d’envoyé spécial
au Moyen-Orient.
« Mendelssohn est un sioniste fanatique et un lobbyiste infâme,
il est décrit par Jewish Chronicle comme « un des courtiers ès
pouvoir les mieux introduits ». Aussi pouvons-nous supposer que
le LFI joue un rôle dans la détermination de notre politique
étrangère au Moyen-Orient – le baril de poudre le plus
inflammable dans le monde, aujourd’hui.
« Et cela n’est ni exact, ni correct. Le LFI ne peut, par
définition, qu’être partisan. Sa raison d’être est de présenter
la vision officielle israélienne des choses ; il ne saurait être
nuancé, ni attentionné vis-à-vis de « l’ennemi ». J’irais
jusqu’à suggérer que l’abjecte performance de Tony Blair durant
l’agression israélienne contre le Liban [en juillet 2006, ndt]
fut, pour partie, le résultat des relations spéciales qu’il
entretenait avec le LFI. Il est étonnant que nous ayons laissé
ce dernier proliférer dans les corridors du pouvoir et y infuser
l’air méphitique qui y souffle. Cette corruption n’a ni odeur,
ni couleur. Elle est mortelle, et il faut y mettre un terme, à
la source. »
Un succès récent des Amis Travaillistes d’Israël [Labour Friends
of Israel – LFI]
Ils ont fait un lobby intensif et efficace auprès du
gouvernement britannique et de l’Union européenne pour obtenir
une suspension de toute aide financière à la bande de Gaza tant
que le gouvernement Hamas légalement élu restera au pouvoir.
Ainsi, ils partagent la responsabilité, avec Israël, des
conditions de vie atroces et misérables dans la bande de Gaza, y
compris des morts d’enfants auxquels on empêche l’accès
aux hôpitaux israéliens, alors que les hôpitaux de Gaza sont
totalement à court de fournitures médicales, en raison des
sanctions.
Le LFI a chapitré le parti :
« Le manifeste électoral du Hamas est plus modéré que sa charte,
en ceci qu’il n’en appelle pas explicitement à la destruction de
l’Etat d’Israël. Mais il n’en préconise non moins la poursuite
de la lutte armée, et il ne propose rien d’autre qu’une ‘hudna’
(trêve) de longue durée en échange contre un retrait d’Israël
jusqu’aux frontières de 1967 et la création d’un Etat
palestinien dont Jérusalem serait la capitale. Israël est
toléré, comme une réalité malheureuse, mais son droit à exister
en tant qu’Etat juif n’est pas reconnu. Ce refus de reconnaître
la légitimité d’Israël ou tout accord signé avec ce pays par
l’OLP, et leur insistance à poursuivre la lutte armée, rend bien
difficile d’imaginer qu’un gouvernement Hamas soit, à l’avenir,
un partenaire en vue de négociations de paix, non seulement avec
Israël, mais aux yeux de la communauté internationale. Par
conséquent, les Etats-Unis, le Quartette et l’Union européenne,
tout en saluant le processus démocratique en Palestine, ont tous
averti contre le fait que sans renonciation au terrorisme et
sans reconnaissance d’Israël, il ne saurait y avoir de
négociations avec un gouvernement Hamas. La possibilité
d’inciter le Hamas à changer de position dépend, dans une large
mesure, de la cohésion de notre front, uni dans la communauté
internationale.
« Recommandation du LFI… pour une économie qui dépend si
lourdement de l’aide étrangère – de l’ordre de 1 milliard de
dollars, annuellement, provenant de pays donateurs, plus 55
millions de dollars chaque mois de taxes collectées par Israël –
la suppression de l’aide exercerait une pression intense sur le
gouvernement Hamas, qui a refusé de modifier sa politique.
« Toutefois, dans la pratique, la communauté internationale et
Israël ne peuvent arrêter complètement le transfert d’argent,
car cela pourrait précipiter l’économie palestinienne, de la
crise humanitaire dont elle souffre actuellement, vers une
catastrophe de grande ampleur. »
Et les conservateurs ?
Le directeur politique de Conservative Friends of Israel affirme
qu’avec plus de 2 000 membres et sympathisants enregistrés,
ainsi que 80 % des députés conservateurs, ils représentent
aujourd’hui le groupe affilié le plus important au sein du
parti. Ils envoient six délégations annuellement en Israël –
payées par l’association. Ils exercent un lobbying intensif –
comprenant la fourniture de notes de synthèse à Brown. Ils sont
en contact permanent avec l’ambassade d’Israël à Londres.
Leur site ouèbe est hystériquement anti-Hezbollah, et ils
exercent en permanence une surveillance attentive de tous les
nouveaux candidats à la députation. « Au sein du parti
conservateur, nous soutenons activement des candidats, en
particulier dans des circonscriptions ‘marginales’. Notre
programme de prospection de candidats parlementaires fournit des
notes hebdomadaires, des manifestations avec des orateurs, et
une chance de prendre part à des délégations en Israël. Nos
adhérents apportent un soutien financier là où cela est
important. »
Robert Halfon est directeur politique de l’association
Conservative Friends of Israël [CFI], et il a été mis sur la
voie rapide pour se représenter à Harlow, aux prochaines
élections.
Le député Hon David Cameron, membre du parti conservateur, a
déclaré : « Je suis fier d’être non seulement un conservateur,
mais un conservateur ami d’Israël ; et je suis fier du rôle clé
que joue le CFI au sein de notre parti. » Sa récente visite en
Israël a commencé par un vol de deux heures en hélico Black Hawk
en compagnie du ministre israélien de la défense afin de
découvrir les frontières du pays.
Le Dr Liam Fox (député), Secrétaire à la défense dans le cabinet
de l’ombre, a déclaré : « les ennemis d’Israël sont nos ennemis,
et c’est une bataille dans laquelle nous devons rester ensemble,
sinon nous serions tous vaincus, si nous étions divisés ». Il
n’a pas mentionné que depuis 2000 il y a eu quatre fois plus de
Palestiniens tués que d’Israéliens, et dix fois plus d’enfants
palestiniens que d’enfants israéliens (Chiffres de l’association
israélienne T-Tselem).
Les Démocrates Libéraux
Eux aussi, ils ont un groupe parlementaire d’Amis d’Israël, dont
le site ouèbe est d’un pro-sionisme indécent – beaucoup plus
encore, de fait, que celui du groupe travailliste. Celui des
démocrates libéraux fut le premier de ces groupes d’amitié avec
Israël à avoir été constitué. Il affiche, comme objectif
premier, celui « d’influencer la politique moyen-orientale du
parti afin qu’il accorde une priorité élevée aux droits d’Israël
à la sécurité et à la paix. »
L’association affirme aussi, de manière ahurissante, que
l’ « occupation » israélienne de la Cisjordanie serait un
« mythe », de même que serait « mythique » la création du
problème des réfugiés par l’expulsion de chez eux des
Palestiniens, par les juifs.
Les Chrétiens Amis d’Israël (Royaume-Uni)
Il s’agit d’une organisation internationale présente dans
quelque vingt pays. Au Royaume-Uni, elle a des liens
particulièrement étroits avec le TFI [Tory Friends of Israel, ou
CFI : Conservative Friends of Israel], ce qui l’aide à garnir sa
stalle lors des réunions de ce parti, et ce qui l’aide,
notamment, à s’assurer que les futurs parlementaires Tory seront
sélectionnés, pour partie, en raison de leur soutien à Israël.
Il organise fréquemment des visites en Israël. Un de ces voyages
récents, en bus, a réussi le tour de force de contourner la
Cisjordanie – à l’exception, bien entendu, de Jérusalem et de
Bethléem !
Ils affirment être un « ministère poursuivant deux objectifs.
Nous voulons : 1) servir Israël grâce à notre soutien pratique
et moral ; 2) servir l’Eglise au moyen de cours et de documents
au sujet de l’amour de Dieu et de ses intentions pour Israël,
ainsi que sur les racines hébraïques de notre foi (chrétienne).
Ainsi, cette association enseigne l’hébreu, prie en hébreu et
utilise beaucoup d’éléments directement empruntés au judaïsme
dans son rituel.
Sur son site ouèbe, elle enseigne que :
« L’Empire britannique a disparu parce qu’il avait cessé d’être
l’ami du peuple juif, étant même devenu son ennemi, utilisant sa
marine et ses forces aériennes pour tenter d’empêcher des
survivants rescapés de l’Holocauste d’atteindre la Terre
sainte. »
Deux commentaires sur les associations-mères, aux Etats-Unis
Nancy Roman,
directeur du Council on Foreign Relations’ Washington
programme :
« Pour partie, ce qui est en train de se passer, c’est que la
communauté évangélique des Etats-Unis est de plus en plus
engagée dans le processus politique. Alors que l’église
conseillait aux gens de ne pas s’engager dans la politique,
beaucoup d’églises, aujourd’hui, recommandent le contraire…
C’est important, et cela aura une influence énorme sur la
politique étrangère, à moyen et long termes. »
Michelle Goldbert,
auteur de l’ouvrage Kingdom Coming: The Rise of Christian
Nationalism [Le Royaume est proche : L’émergence d’un
nationalisme chrétien], dit, quant à elle, que « le sionisme
chrétien est responsable du soutien américain à certaines des
positions israéliennes les plus irrédentistes », y compris
l’expansion des colonies israéliennes dans les territoires
occupés, soulignant la forte influence des chrétiens
évangéliques dans la détermination de la politique étrangère des
Etats-Unis au Moyen-Orient. Elle affirme que l’influence de ce
mouvement est encore plus importante que celle du lobby juif,
l’American Israel Public Affairs Committee (Aipac).
« L’influence de Hagee consiste à faire en sorte que le public
américain soutienne la position totalement unilatérale et
belliqueusement pro-israélienne du gouvernement. Ces
associations ont bien plus d’influence que l’Aipac, ou que
l’ainsi dénommé lobby israélien. »
Mais il ne faudrait pas oublier l’Union européenne !
Benita Ferrero Waldner, commissaire européenne aux relations
extérieures, a indiqué qu’elle est plus encline à nouer des
liens particulièrement étroits avec Israël qu’avec pratiquement
tous les autres pays du bassin méditerranéen. Non contente de
faire remarquer qu’Israël est « plus proche de l’Union
européenne qu’il ne l’a jamais encore été jusqu’ici », elle a
dit qu’un « groupe de réflexion » est en train d’étudier la
manière dont les relations entre les deux partenaires pourraient
être promues à un « statut véritablement spécial ». Alors que
des organismes en bonne et due forme ont été mis sur pied pour
traiter les questions des violations des droits de l’homme, en
Jordanie et au Maroc, seul un « groupe de travail » informel
étudie de telles questions, dans le cas d’Israël. Israël est
généralement traité comme si ce pays faisait partie de l’Union
européenne, en dépit du fait qu’il n’en est pas membre – il en
va, en la matière, exactement de même que dans les domaines du
Foot et du concours de l’Eurovision – mais sa constitution
fondée sur la religion l’empêche d’adhérer
Les Palestiniens ont payé très très cher l’ascension du New
Labour (Nouveau Parti Travailliste), et il est assurément plus
que temps de renverser cette tendance.
Traduit
de l’anglais par Marcel Charbonnier
[* Les enquêtes de
Janine Roberts ont été largement publiées dans les
principaux quotidiens australiens, ainsi que dans The
Independent et The Financial Times, au Royaume-Uni. Son film
d’investigation « The Diamond Empire » [L’Empire des
diamants] a été diffusé par la chaîne de télévision
Frontline WGBH, aux Etats-Unis, et par la BBC. Ses
investigations ont été pour partie menées en Israël.]
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