Opinion
Le sionisme : une
idéologie à l'agonie
Jacob Cohen
Jacob
Cohen
Dimanche 25 août 2013
Si j’écris cette chronique
aujourd’hui – alors que j’ai cette
conviction depuis longtemps – c’est
parce que les autorités sionistes
viennent de prendre une mesure a
priori banale mais lourde de
significations, sur leur état
d’esprit et sur leur vision de la
coexistence avec les Arabes.
Ces autorités vont recruter 500
propagandistes pour montrer le « bon
visage » d’Israël, lutter contre sa
délégitimation, et inverser ce large
mouvement de boycott qui prend des
dimensions inquiétantes.
La France fait évidemment partie des
cibles prioritaires.
Pour les plus jeunes qui n’ont pas
connu la « belle époque » du
sionisme triomphant, ils auront du
mal à comprendre ce besoin de
propagande. Le régime sioniste,
jusqu’à il y a une vingtaine
d’années, n’avait pratiquement pas à
en faire. Il était adulé, glorifié,
mythifié, admiré, envié, cité en
exemple.
Un petit rappel. En juin 1967, à la
veille de lancer sa guerre
d’agression qui lui a permis de
multiplier son territoire par 10,
une guerre minutieusement préparée
pendant des années grâce à leurs
réseaux d’espions en Egypte et en
Syrie, Israël avait reçu le soutien
de centaines de milliers de
Français, dont celui de Jean-Paul
Sartre et de Serge Gainsbourg (Eh
oui ! ils se retourneraient dans
leur tombe aujourd’hui !), mobilisés
pour empêcher cette petite
« démocratie socialiste,
progressiste et humaniste » d’être
rayée de la carte. Des brigades
internationales commençaient à être
formées pour aller le soutenir.
Comme pour l’Espagne républicaine.
Et pendant les 10 années qui avaient
suivi cette guerre, et alors que
l’armée d’occupation sioniste
nettoyait ethniquement la
Cisjordanie et le Golan (100 000
Palestiniens chassés de Jérusalem en
quelques semaines) et imposait son
ordre implacable sur les populations
occupées, des dizaines de milliers
de jeunes européens allaient
travailler bénévolement dans les
kibboutzim, souvent pendant une
année, pour s’imprégner de
« l’humanisme sioniste ».
Cela relève presque de la
science-fiction.
Ah! c'était l'âge d'or du sionisme!
Imaginez! Rika Zaraï chantait à la
télévision française dans son
uniforme de Tsahal. Et tout le monde
trouvait cela merveilleusement
touchant.
C'était l'époque des "sabras" que
Paris-Match glorifiait à longueur de
numéros. Ce nouvel homme juif né en
Israël, d'apparence dure mais si
tendre à l'intérieur, au regard
clair, intrépide et généreux,
puissant et humaniste, un combattant
hors pair, idéaliste et audacieux.
Sa valeur était de 1 contre 1000
Arabes sur le marché des
prisonniers.
C'était l'époque où un Lanzmann
pouvait réaliser un film sobrement
intitulé "TSAHAL", avec l’argent
public, distribué et diffusé le plus
normalement du monde, à la gloire de
cette armée unique au monde, la plus
« éthique », l'émanation d'un peuple
héroïque, le concentré de la morale
et du courage. Et cela 6 ans après
la guerre de juin 67 et alors que la
soldatesque sioniste expulsait,
rasait des maisons, torturait,
arrêtait, humiliait, prenait des
otages, comme n'importe quelle armée
d'occupation.
C'était l'époque où un Finkelkraut
pouvait sans remords se déclarer
humaniste et progressiste, remercier
la France pour sa générosité,
appeler à la coexistence de tous, y
compris les musulmans. Il n'avait
rien à craindre pour sa patrie de
cœur.
C'était l'époque où le mot Israël
suscitait la sympathie et
l'admiration, où l'Etat sioniste
semblait installé pour l'éternité,
même dans ses nouveaux territoires
légitimement conquis. Nul besoin
d'invoquer la Shoa ou
l'antisémitisme. D'ailleurs on en
parlait si peu. Les faux prétextes
viendront plus tard.
L’imprégnation sioniste de la
société française suivait son
bonhomme de chemin, dans une
harmonie lénifiante, comme dans un
tableau de Renoir.
Et puis, patatras ! Une nouvelle
génération est arrivée que ne
croyait plus à ces belles légendes.
L’information a percé les écrans de
la censure judéo-sioniste et de
leurs complices attitrés, des goyim
musulmans ou chrétiens comptant sur
l’influence légendaire du Lobby et
ses retombées, médiatiques et
financières.
Et surtout la réalité de
l’occupation était tout simplement
là, dans toute sa dureté, son
injustice, ses crimes, son racisme,
son apartheid et ses ratonnades.
Panique à bord. Comment ? La
divinité sioniste se retrouve
ébranlée, contestée, critiquée,
boycottée, méprisée, délégitimée ?
On a « redécouvert » la Shoa et on
en a fait une espèce de sacralité
intouchable censée attendrir le cœur
et la raison des incroyants, en les
prenant en main de préférence dès
leur entrée au collège. La tentative
de les prendre à la crèche avait
hélas échoué. Il y aurait trop à
dire, comme pour l’exploitation à
outrance de « l’antisémitisme ».
Mais gare au risque de saturation et
de l’effet bomerang.
Ce qui ébranle cette armada de type
mafieux à la double allégeance, le
portefeuille en France et le cœur en
Israël, c’est que malgré la toile
d’araignée dans laquelle elle
étouffe et prend en otage tous les
champs de la société, Israël est de
plus en plus détesté. Mais pas
uniquement par les musulmans comme
veulent nous le faire croire
désespérément Finkelkraut et ses
acolytes. Songez aux sondages
commandés par la Commission
européenne et que celle-ci cache
honteusement parce qu’ils sont
terriblement hostiles au seul « Etat
juif et démocratique ». Défense de
ricaner.
Et pourtant, les serviteurs d’Israël
ne relâchent pas la pression. Les
Patrick Cohen, les Lanzmann, les
Elkabbach, les Adler, les Bruel, les
Finkelkraut, les Cyril Hanouna, les
Yvan Attal, les Patrick Timsit, les
Lévy (Maurice pour la pub et
Elisabeth pour l’animation de la
meute) etc. etc. (il
en faudrait 10 pages pour les
citer tous), chapeautés par le grand
manitou des réseaux, le contrôleur
d’Arte, le proprio de Libé, le
sous-marin du Mossad en Libye,
l’empereur de l’édition et du
cinéma, le gourou de Canal +, le mec
qui donne envie de gerber à des
millions de gens rien qu’en le
regardant.
Ils surveillent et sanctionnent.
Trois rédacteurs en chef de RFI
limogés pour déviance idéologique à
l’égard d’Israël. Eyal Sivan qui
avait eu le tort de réaliser « ROUTE
181 » n’a plus jamais trouvé de
financements en France. Une anecdote
qui montre la servilité empressée
des médias au Lobby : Un artiste
engagé avait participé récemment au
Grand Journal de Canal +. Il portait
un t-shirt avec écrit dessus « Free
Palestine ». On l’a constamment
filmé en plan serré pour que le
slogan n’apparaisse jamais à
l’écran. Le réalisateur devait avoir
des sueurs froides. L’ombre
tutélaire de BHL plane sur les
médias, vigilante, menaçante et
vindicative. Leur message ? « Ils »
ont suffisamment de puissance et
d’influence pour abattre n’importe
qui.
Sans compter la classe politique
française, presque dans son entier,
qui se presse au dîner du CRIF, en
courbant l’échine, tout sourire,
pour recevoir qui des félicitations,
qui des admonestations, mais des
injonctions et des instructions pour
tous. Ah ! Valls criant son sionisme
une kippa blanche sur la tête ! A
quand sa conversion pleine et
entière à la religion du peuple
élu ?
Je reviens à l’information du début.
Le
recrutement des 500 propagandistes
payés par le contribuable nous
renseigne sur un point capital.
Israël se conduit au fond comme
n'importe quel Etat colonial.
Puissant et arrogant, méprisant la
population indigène, pourquoi
accorderait-il à cette populace
soumise et humiliée une souveraineté
étatique? Même un protectorat-banthoustan
dont la pauvre "Autorité"
palestinienne se contenterait à
condition de sauver les apparences
semble trop pour la 5e puissance
nucléaire du monde.
Ivres de
gloire et de conquêtes, et malgré
les avertissements de leurs alliés
et de personnalités israéliennes
lucides et effrayées, les sionistes
ne peuvent même pas imaginer que le
désamour du monde à leur égard a
quelque chose à voir avec
l'occupation et la domination. Ils
veulent continuer à croire qu’on ne
les « comprend » pas.
Pour
montrer l’aspect dérisoire et
pathétique de ces soubresauts
médiatiques, je fais un parallèle.
Imaginez la France en 1956-57, en
pleine guerre d’Algérie, faisant
venir la grande équipe de l’époque,
le Real Madrid, grâce aux soutiens
des financiers et des gouvernements
(ce dont les sionistes ne manquent
pas) jouer à Alger avec de jeunes
français et algériens « pour
favoriser la paix entre les 2
peuples ». C’est ce que vient de
réaliser Netanyahou. Mais combien de
fois peut-il nous faire le coup ? Et
imaginez que la France d’alors ait
recruté 500 propagandistes pour
expliquer au monde qu’elle veut la
« paix » en poursuivant la
colonisation en Algérie.
Le
propre d’une entreprise coloniale
est de foncer comme un train fou
contre le mur de sa propre
annihilation. Le sionisme ne peut
que poursuivre dans cette voie. Dans
une agonie violente, longue et
désespérante.
Jacob Cohen
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