Opinion
Prince of Persia
(Conférence prononcée à
l'Université de Teramo, Italie, en mai 2010)
Israel Shamir
Israel Shamir
Mercredi 9 juin 2010
Le lobby judéo-sioniste
est en train de perdre son pouvoir inouï, et il s’avance à grand
pas vers la défaite.
Souvent, les films américains sont des
sortes d’oracles annonçant la politique future du pays. Dans les
films, on a bombardé Dune avant qu’ils ne bombardent Tora Bora,
la queue a agité le chien avant qu’ils n’attaquent
la Serbie. Et l’on a vu
s’écrouler les tours de la Grosse Pomme sur les écrans avant que
les vrais gratte-ciels ne s’effondrent pour de vrai.
Alors, le nouveau film d’Hollywood
Prince of Persia
est-il, lui aussi, un avant-goût d’un changement à venir ?
Manifestement, oui.
« Désolés d’avoir attaqué votre pays ! Nous
allons retirer nos troupes et vous dédommager immédiatement !
Nous sommes partis en guerre parce qu’on nous avait trompés au
sujet de votre prétendu programme d’armes de destruction
massive » : aux oreilles d’un Irakien, ces propos du Prince de
Perse sonnent comme une répétition en costume de quelque chose
d’hélas bien trop réel.
Il faut savoir que, dans ce film, le bobard
des armes de destruction massive a été alimenté par un néocon
chauve aux traits juifs, le frère du Roi, ambitionnant de
s’emparer du pouvoir et d’utiliser secrètement les assassins du
camp des méchants, au look (comme par hasard) très israélien. Le
Prince, né dans un bidonville et élevé à ce rang par le Roi pour
ses seuls mérites arrête la guerre, fait la paix avec l’ennemi
et nous rappelle, quant à lui, Obama…
Y a-t-il quelque chose dans l’air ? Y
a-t-il des signes tangibles qui annonceraient un formidable
retournement ? Des paquebots ne sauraient être stoppés dans
l’instant, nous instruit l’Almanach Nautique. Il peut leur
falloir jusqu’à quinze kilomètres pour s’arrêter, avec les
hélices en rotation contraire à la vitesse maximale. De gros
navires peuvent avoir besoin de quinze à trente kilomètres pour
faire demi-tour. Vous imaginez bien que ce qui est vrai pour les
supertankers et les porte-avions vaut tout autant pour le plus
gros de tous les navires, à savoir les Etats-Unis d’Amérique.
Lors de l’accession au pouvoir d’Obama, le
Lobby avait une influence impressionnante sur l’Amérique, une
influence que certains experts qualifiaient de contrôle absolu.
Le Lobby était intimement connecté avec l’establishment de la
droite israélienne. Ses racines plongeaient profondément dans
les coffres de Wall Street. Ses doigts d’agile marionnettiste
orchestraient les médias américains. L’Europe vivait dans la
crainte constante des juifs.
Et voici qu’en une année, à-peine, le Lobby
a perdu l’essentiel de son pouvoir :
Le Premier ministre israélien Netanyahu a
été humilié publiquement et renvoyé chez lui par la porte de
derrière de la Maison Blanche avec un coup de pied au c.l ;
Le Président Obama a publié un appel sans
précédent à Israël, l’exhortant à adhérer au TNP (traité de
non-prolifération nucléaire) ;
Les Etats-Unis ont
accepté les demandes de pression sur Israël à propos de son
programme nucléaire que les Arabes sollicitaient d’eux.
Un document historique secret révélant la
tentative déployée par Israël afin de vendre des bombes
nucléaires au régime d’apartheid sud-africain a été publié par
le quotidien britannique The Guardian ;
L’on a entendu des menaces selon lesquelles
les Etats-Unis cesseraient d’imposer leur veto à toute
résolution anti-israélienne au Conseil de sécurité de l’Onu.
Les juifs sont
extrêmement mécontents d’Obama, car celui-ci, dans son
discours d’intronisation, a mentionné les musulmans avant les
juifs, « Nous sommes une nation de chrétiens et de musulmans, de
juifs et d’hindouiste – sans oublié les agnostiques », avait-il
dit.
Il semble que le Président Obama soit
quelqu’un de sang-froid, qui sait quand il convient d’aller de
l’avant et quand il est bon d’attendre. Il a probablement appris
à ferrer les gros poissons. Mine de rien, il est en train de
détricoter la base financière du Lobby.
L’affaire Madoff a porté un coup douloureux
à l’escarcelle du Lobby. Ce criminel gérait en effet les fonds
de nombre d’organisations juives. Pour des raisons mystérieuses,
il a reconnu son crime, et les dominos tombent les uns après les
autres. Aussi chenu et vénérable soit-il, l’American Jewish
Congress est dans le rouge, ainsi que nombre d’instances de
moindre envergure et d’individus.
Pour des raisons obscures, on a laissé
s’écrouler la banque Lehman Brothers, dont la faillite provoqua
la crise économique mondiale que nous connaissons. Or, Lehman
Brothers était une éminente institution juive, c’était même, de
fait, une sorte de réincarnation de la célèbre banque Kuhn &
Loeb. Elle s’est effondrée : une telle faillite n’aurait pas pu
se produire sans la bénédiction de l’administration Obama.
Actuellement, l’on assiste à une attaque
persistante et intense contre Goldman-Sachs, une des banques
familiales les plus importantes et des plus influentes. Le
quotidien israélien Haaretz a comparé cette banque à une
institution dont la liste des partenaires pourrait être
confondue avec celle des donateurs d’une synagogue : il n’y a
rien que des juifs. Aujourd’hui, paraissent quotidiennement des
articles sur les méfaits et les crimes de Goldman-Sach aux
Etats-Unis et ailleurs. Goldman-Sachs peut être jugé, condamné,
démantelé et ses responsables poursuivis. Si cette banque
s’effondrait, comme cela est fort possible, le Lobby se
retrouverait dans un monde impitoyable et inhospitalier. Obama
est intimement lié à Goldman-Sachs, cet organisme qui a infiltré
toutes les structures du pouvoir. Mais manifestement il n’a pas
l’intention de se fouler pour aller lui porter secours.
En Israël existe le sentiment que la
débâche de Dubaï aurait été mise en scène par Obama. Les
services de sécurité israéliens se sont ramassés une sacrée
raclée, dans ce pays. Ils avaient planifié un coup minable et
sans problème : l’assassinat d’un responsable du Hamas. Mais ce
crime a donné à Dubaï l’opportunité de passer dehors nombre
d’espions israéliens, qui se servaient manifestement de la ville
commerçante par excellence du Golfe persique à la manière d’un
QG avancé dans la préparation d’une action contre l’Iran. En
effet, à partir de Dubaï, il est possible d’entrer en Iran sans
même que les passeports soient contrôlés. Des dizaines d’espions
israéliens n’étaient pas là-bas à seule fin de tuer un homme du
Hamas ; ils étaient sur la piste d’un gibier autrement
important.
Reste que non seulement ces espions
israéliens ont été passés dehors, mais le modus operandi des
services israéliens consistant à cloner en gros des passeports
européens et américains a été rendu public, par la même
occasion. Après le Royaume-Uni, l’Australie a expulsé un
‘diplomate’ israélien représentant le Mossad. En France, où les
sionistes étaient au summum de leur puissance, l’on assiste à de
profonds changements. Le Président Sarkozy (en dépit de ses
origines juives) a exprimé son exaspération vis-à-vis d’Israël.
Un des écrivains politistes les plus connus de France, Regis
Debré, a publié un livre critiquant la communauté juive
française en raison de son soutien à Israël. Au Royaume-Uni, un
homme politique qui n’a jamais cessé de critiquer Israël est
devenu vice-Premier ministre.
Dans la vieille controverse du Chien et de
la Queue, le Chien a décidé de dégrader la Queue, tandis que les
tentatives pathétiques déployées par la Queue afin de donner ses
ordres au Chien ont failli lamentablement, et certes pas faute
d’avoir essayé. Apparemment, quelque part à l’intérieur de
l’establishment américain, il a été décidé que les intérêts
impériaux des Etats-Unis ne sont pas merveilleusement bien
servis par Israël et que, de surcroît, l’establishment juif est
devenu trop exigeant et trop putassier pour que cela puisse
durer. Il a donc été décidé que le voyou juif devait être dressé
et, dressé, il le sera !
Je doute que le rêve rose des Israéliens, à
savoir attaquer l’Iran, pourra se matérialiser désormais. Les
chances contre une telle initiative sont de l’ordre de 80 contre
20. Toutefois, nous bénéficierons d’une alerte météo : si Mme
Tsipi Livni entre au gouvernement, et si oui, le moment où elle
le fera, la probabilité montera à 50:50. Israël ne s’est jamais
lancé dans une guerre sans bénéficier d’un soutien substantiel
de la gauche, et la présence de M. Ehud Barak ne saurait
suffire.
Dresser, ça n’est pas briser. C’est un
Président Obama prudent qui a envoyé des signaux indiquant qu’il
n’est pas enquête d’une guerre totale avec la juiverie
organisée. Il a rencontré Elie Wiesel et il l’a réconforté. Il a
invité d’autres dirigeants juifs à la Maison Blanche – et en
même temps, il a permis à Israël de recevoir une correction
magistrale. Obama est retors, pensent certains observateurs en
Israël ; il est en train de jouer à un sale petit jeu consistant
à embrasser d’un bras, tout en repoussant de l’autre.
Il semble que nous nous acheminions vers un
changement climatique : au minimum la plus vieille génération de
dirigeants israéliens – conservateurs, belliqueux, agressifs,
soupçonneux – cèdera la place à une nouvelle génération, celle
des Dan Axelrod, Rahm Emmanuel, de l’appel J-street et consorts.
Il est encore trop tôt pour déterminer s’il s’agira d’un
changement de style ou d’un changement de contenu – mais le
style, c’est le contenu, aussi. Aujourd’hui, les critiques du
ouèbe soulignaient les origines sionistes de Rahm Emmanuel, mais
sa dernière visite en Israël fut mouvementée : des Israéliens
l’ont hué et l’on traité de, je vous le donne en mille (what
else ?) : « antisémite ».
Bien sûr, cela ne suffira pas à beaucoup de
nos amis. Les gens ont commencé à déverser leur déception d’Obama
durant les vingt-quatre heures ayant suivi son intronisation.
« De quoi ? De quoi ; qu’est-ce que j’apprends : toute une
journée s’est écoulée et les troupes américaines sont encore en
Irak ? Et Israël continue à bénéficier des aides américaines ?
Et on renfloue les banques ? »
Toutefois, il fallait s’y attendre. Les Etats-Unis étaient
totalement programmés pour aller dans une certaine direction :
même si Obama avait l’intention d’en changer, cela allait
nécessairement prendre pas mal de temps…
Traduit de l’anglais par Marcel
Charbonnier
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