Tribune
L'arrêt de la
colonisation passe par les actes
Hind Khoury
Hind Khoury - Photo JPC AFPS Lille
Jeudi 23 juillet 2009
Mercredi 22 Juillet 09, le gouvernement Français a publié une
autre déclaration officielle qui appelle a l’arrêt immédiat de
la colonisation Israélienne dans les Territoires Palestiniens
Occupés en 1967.
Cette déclaration correspond à une réalité
indéniable et je partage ce constat.
Dans cet esprit je voudrai faire connaître mon opinion pour
avancer une solution positive sur cette question, dont l’article
suivant.
A
maintes reprises, le Président Nicolas Sarkozy a appelé au gel
de la colonisation israélienne dans les territoires occupés
palestiniens. A l’occasion de son discours prononçé devant la
Knesset le 23 juin 2008, le Président de la République française
a déclaré qu’‘il ne peut y avoir de paix sans l'arrêt de la
colonisation’. L’arrêt de la colonisation israélienne en
territoire palestinien constitue un premier pas vers la paix.
Après près de 42 années de colonisation des territoires occupés,
alors que la viabilité du futur Etat palestinien est aujourd’hui
en péril, les condamnations officielles et les résolutions des
Nations unies demeurent malheureusement sans effet. Avec près de
500 000 colons résidant aujourd’hui en Cisjordanie, dont 185 000
au sein et aux environs de Jérusalem Est, la situation est
devenue insoutenable. Il y a bien longtemps que
les mots ne suffisent
plus. Pour sauvegarder la perspective d’une solution de paix
basée sur deux Etats, il serait important que la France comme
l’Union Européenne se saisissent de ce problème crucial et
relèvent le défi. L’urgence justifierait une action sur trois
fronts.
Il
convient d’abord de constater que l’explosion de la colonisation
doit beaucoup aux avantages économiques octroyés aux colons.
Selon un sondage de
‘La Paix Maintenant’, la grande organisation pacifiste
israélienne, 77%
des colons (en Cisjordanie, Jérusalem non compris) ont choisi
d’habiter en Cisjordanie pour des raisons liées au ‘mode de vie’
proposé. Le plus souvent, ces colons s’installent en territoire
palestinien parce que l’Etat d’Israël leur offre des logements
de qualité à bas prix agrémentés d’incitations financières. La
construction d'infrastructures et la mise à disposition de
services à l'usage exclusif des colons entravent le
fonctionnement normal des villes et villages palestiniens. Ce
sont l’existence de ces colonies qui justifient largement les
restrictions à la libre circulation des Palestiniens imposées
par Israël, et matérialisées par les
checks points et le
Mur de Séparation. A force de destructions de maisons et de
confiscations de terres, mes compatriotes viennent grossir
chaque jour les agglomérations palestiniennes existantes, et
déjà surpeuplées. Enfin, l’extension des colonies et la main
mise des autorités israéliennes sur les ressources naturelles
palestiniennes limitent les sources de revenu à la disposition
des Palestiniens. Elles privent des centaines de milliers
d’entre eux des moyens de mener une vie décente.
La
responsabilité israélienne est centrale. On ne peut cependant
passer sous silence le comportement de nombreuses sociétés
étrangères, qui finalement contribue au développement
démographique et économique de ces colonies en Cisjordanie.
Notamment, Certaines entreprises françaises, répondant à une
commande israélienne, achèvent de construire un tramway à
Jérusalem-Est occupé. Cette ligne de tramway ne sert pas le
bien-être des palestiniens mais vise à
connecter les colonies israéliennes au centre de
Jérusalem. Cette construction atomise un peu plus le tissu
socio-économique palestinien tout en consolidant la mainmise
d’Israël sur Jérusalem.
Sans
doute est-il nécessaire de rappeler que le transfert d’une
population étrangère sur une terre occupée est prohibé par la
quatrième convention de Genève du 12 août 1949, dont le Conseil
de sécurité des Nations unies a maintes fois réaffirmé la
validité. La résolution 465 du 1er mars 1980, affirme notamment
que : « Toutes les mesures prises par Israël pour modifier le
caractère physique, la composition démographique, la structure
institutionnelle ou le statut des territoires palestiniens (...)
y compris Jérusalem (...) n’ont aucune valeur en droit. »
Les Etats doivent donc « ne fournir à Israël aucune
assistance qui serait utilisée spécifiquement pour les colonies
de peuplement ». Aussi, est-il devenu aujourd’hui
indispensable que la France prenne les mesures adéquates afin
d’empêcher ses entreprises et ses nationaux d’agir illégalement
dans les territoires occupés palestiniens.
Second
terrain qu’il convient de couvrir : mettre fin à l’importation
de biens produits dans les colonies. Au sein de l’UE, la France
figure parmi les premiers importateurs de produits israéliens.
Parmi ceux-ci, nombreux sont les produits qui proviennent en
réalité de colonies situées en Cisjordanie. Ainsi, des sociétés
israéliennes implantées dans les colonies s’enrichissent
injustement en exploitant la terre et l’eau
illégalement soustraites
aux Palestiniens, ressources qui devraient normalement permettre
le développement économique palestinien. L’UE et Israël
disposent d’un arrangement qui prévoit que ces biens ne
bénéficient pas de l’accord de libre-échange qui les lie. Mais
comment peut-on accepter que ces biens, produits sur un
territoire usurpé en violation du droit international, puissent
même continuer à entrer sur le marché européen?
L’UE
jouit déjà d’une relation étroite avec Israël. Elle peut dès à
présent utiliser son influence auprès de son partenaire afin
d’obtenir qu’il se conforme à ses demandes répétées de geler la
colonisation. Il est grand temps d’adopter une nouvelle
approche : Israël, comme n’importe quel Etat agissant en
violation du Droit international, doit comprendre que de tels
agissements ont un coût.
Seules
des mesures concrètes prises par les grandes puissances et
notamment l’Etat français et l’UE peuvent mettre fin au
morcellement continu des territoires qui torpille les dernières
chances de paix entre Israël et le peuple palestinien. L’UE
soutient ces territoires occupés à hauteur de 500 millions
d’euros par an. Tout comme il relève de sa responsabilité de
vérifier que cet argent sert directement la cause de la paix, il
est de son droit de s’assurer que cet investissement n’est pas
sabordé par la politique de “fait accompli"
menée par Israël en territoire palestinien. Agir sur le front
des colonies, après des décennies de condamnations
infructueuses, ce n’est pas favoriser un camp ou l’autre.
Joindre les actes à la parole c’est au contraire sauver les
derniers espoirs de paix sur la base de la cohabitation de deux
Etats.
Hind
Khoury
Déléguée Générale de Palestine en France
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