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Opinion
L'alibi
Hedy Belhassine
Photo: RIA Novosti
Mercredi 9 mars 2011
Hier matin à France Inter, le chroniqueur pose la question qui
fâche : et si Kadhafi restait ? Ça m’a gâché ma journée.
Impossible de faire la sieste. J’ai ressassé le scénario
hallucinant que voici:
Forte des soutiens syriens, russes, touaregs, zaghawas bantous
et autres, la gravure de mode libyenne ressuscite sur les
cendres de feu son peuple. A court de munitions la résistance
est étouffée dans son sang. Les ONG affluent. La communauté
internationale se mobilise et s’interpose. No fly zone aux
Mirages. La Libye est mise aux enchères. La Chine et la Corée
font monter la cote. Les prix flambent, les puits du désert
aussi. La Tunisie réquisitionne les hôtels pour y loger les
blessés. Le désastre métastase.
Ecœuré, le Monde Arabe en masse rejoint « la base » d’Oussama et
lance une fatwa déclarant patrimoine de l’humanité gratuit
toutes les réserves de pétrole maudit.
La presse du soir anglo-saxonne prolonge mon cauchemar.
Elle révèle que la guerre de Tripolitaine est programmée. Les
Awacs , vautours de mauvais présages tournent déjà. Mais la
guerre de Libye ne serait qu’un alibi de stratège, un leurre, un
faux-nez. Les Anglais s’attendent à un soulèvement de l’Arabie
Saoudite ce vendredi ; alors lundi le baril sera à 300$ et le
plein à 300€. Je songe à brader ma voiture contre une bonne
paire de chaussures, acheter une vache, quelques poules, planter
des patates sur mon lopin de terre normand…J’ai passé une
mauvaise nuit.
Aujourd’hui c’était la journée de la femme.
A Londres, une quinzaine de braves nourrices se retrouvent au
chômage car les autorités ont interdit la vente de la crème
glacée au lait maternel.
A Djeddah en Arabie, à la foire du livre, une écrivaine
iranienne a été contrainte sous les invectives de couvrir son
voile persan d’où s’échappait une mèche avec un hijab saoudien
plus décent.
En Ukraine l’infirmière particulière de Kadhafi a retrouvé sa
famille après avoir passé neuf ans au service de la médicale
libido du Guide illuminé, elle écrit ses mémoires.
A Tunis où une centaine de femmes pourraient prétendre au Nobel,
le pourtant bourguibiste premier ministre Sidi Béji tarde à les
appeler aux affaires du pays. A Moscou comme dans toute la
Russie, pour célébrer sa mère, sa compagne, sa sœur, sa voisine,
on lui porte des fleurs. Ceux qui ont les moyens vont applaudir
la troupe de godiches emplumées du Lido en tournée au Bolchoï.
Enfin à Paris où la journée n’était pas fériée les sondés ont
désigné une femme en tête du premier tour. Mais personne n’a
applaudi la perspective d’une dame à l’Elysée.
Le
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