Tunisie
Les Tunisiens
veulent faire tomber Ennahdha
Hassane Zerrouky
Photo:
D.R.
Jeudi 24 octobre 2013
Quelques heures avant le début
du dialogue national entre le pouvoir et
l’opposition, plusieurs milliers de
manifestants ont exigé la démission du
gouvernement d’Ali Larayedh et son
remplacement par un exécutif neutre.
«Comme cela a été fait pour Ben Ali,
vous pourrez aussi nous crier “dégage”
si nous ne respectons pas le délai d’une
année », lançait, au lendemain des
élections du 23 octobre 2011, le
dirigeant d’Ennahdha (parti islamiste au
pouvoir) Habib Ellouze, dont les propos
figurent sur une vidéo tournant en
boucle sur la toile. Hier, justement, à
l’occasion du deuxième anniversaire de
l’élection de cette Assemblée
constituante et du début du « dialogue
national » entre Ennahdha et
l’opposition, il y avait plusieurs
milliers de personnes rassemblées avenue
Bourguiba, scandant « Dégage », « Ennahdha
tombera aujourd’hui », ou encore
« Gouvernement de traîtres
démissionne ! » avant de se diriger
ensuite vers la Casbah, siège du
gouvernement, où ils ont exigé la
démission de l’exécutif du premier
ministre, Ali Larayedh, et son
remplacement par un gouvernement non
partisan comme stipulé dans la feuille
de route parrainée par la centrale
syndicale UGTT, l’Utica (patronat), la
LTDH (droits de l’homme) et le Conseil
des avocats, et signée par Ennahdha.
Même le Syndicat national des cadres des
mosquées – ça ne s’invente pas –, qui a
organisé hier une « prière des morts
pour le défunt gouvernement Ennah
dha »,
est de la partie, et ce, afin de
« mettre fin au mouvement de
wahhabisation rampante des mosquées en
Tunisie, facilitée par le laxisme sinon
la complicité du ministre des Affaires
religieuses, Noureddine Khademi » ! En
revanche, les Ligues de protection de la
révolution (LPR), affiliées au parti
Ennahdha et dont l’opposition réclame la
dissolution, promettant « un jour noir »
à l’opposition, ont finalement annulé
leur manifestation devant se dérouler le
même jour, avenue Bourguiba.
L’affrontement tant craint par les
démocrates n’a pas eu lieu.
Pour de nombreux Tunisiens, Ennahdha et
ses deux alliés au pouvoir – le Congrès
pour la République (CPR, du président
Marzouki) et Ettakatol
(social-démocrate) – sont rendus
responsables de l’impasse
politico-institutionnelle, de la
dégradation sécuritaire (assassinat de
deux opposants, menaces de mort à
l’endroit de nombreux dirigeants de
gauche, attaques terroristes) ainsi que
de la détérioration sociale et
économique que connaît le pays. De ce
fait, la légitimité électorale dont se
prévalent ces trois partis pour se
maintenir au pouvoir s’est
considérablement érodée en deux ans.
Leur cote de popularité est en baisse.
En cas d’élections, le parti islamiste
(30 %) est devancé par son rival Nida
Tounès (33,9 %, centre gauche). En
mauvaise posture, ce gouvernement, qui
s’est réuni en session
« extraordinaire » avant l’ouverture du
dialogue national, était censé annoncer
sa démission hier en fin d’après-midi et
laisser la place à un exécutif neutre
d’ici trois semaines…
© Journal
L'Humanité
Publié le 25 octobre 2013 avec l'aimable
autorisation de
L'Humanité
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