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Cette Lady partagée entre la Reine et la Tribu
Gilad Atzmon
on Palestinethinktank.com, 3 décembre 2008
http://palestinethinktank.com/...
Bien que je passe en revue quotidiennement la presse israélienne
et l’activisme juif, je dois reconnaître quen presque à chaque
fois, je tombe sur une info inédite et rafraîchissante
concernant mes ex-coreligionnaires.
Ne voilà-t-il pas qu’hier, j’ai appris
l’existence d’une association, l’IAJLJ, International
Association of Jewish Lawyers and Jurists (Association
internationale des avocats et des juristes juifs). Le fait
qu’une assoc’ porte ce nom ne m’a absolument pas surpris. Depuis
le temps, je suis habitué à ce concept des organisations et des
associations « les juifs, avant tout ». Finalement, cela ne
devrait pas nous surprendre en quoi que ce soit. Israël, comme
nous le savons, est l’Etat des « seuls juifs ». De plus, les
rares opposants israéliens à se faire entendre à l’intérieur du
monde juif ont tendance, pour quelque raison, à opérer eux-mêmes
de la même manière racialement orientée et politiquement
exclusiviste juive, il suffit de voir les intitulés des
associations du type « Juifs pour la Paix », « Juifs pour la
Justice en Palestine », « Voix Indépendante Juive », etc, etc.
Apparemment, les juifs contemporains sont
extrêmement nombreux à insister sur le maintien d’une forme de
ségrégation qui leur permette d’opérer idéologiquement,
intellectuellement et spirituellement, à l’intérieur d’un
circuit racialement clos ou ethniquement orienté. J’aurais
tendance à être d’accord avec l’idée que, dans le cadre du
discours démocratique progressiste, c’est là quelque chose que
nous devons accepter, et même approuver. L’ethos du
multiculturalisme maintient que des gens appartenant à divers
groupes ethniques sont les bienvenus lorsqu’ils désirent
célébrer leurs symptômes politiquement, idéologiquement et
spirituellement dans un isolement total des autres.
Pour autant, autant nous pouvons approuver
n’importe quelle forme de ségrégation ethnique, spirituelle ou
religieuse, certaines des organisations essentiellement juives
ont la prétention de maintenir un « agenda universel », tout en
luttant pour « les droits de l’homme ». Une question, évidente,
doit être posée ici : si l’universalisme est bien ce qu’ils
affirment mordicus pratiquer ou promouvoir, pourquoi donc le
font-ils en cercle fermé ? Pourquoi le pratiquent-ils au sein de
cellules racialement orientées ? Si l’humanisme est
effectivement ce qu’ils recherchent, pourquoi ne se joignent-ils
pas, tout simplement, au reste de l’humanité, afin de le faire ?
Il semble que le cas de l’IAJLJ nous
permette d’avoir un aperçu nouveau sur l’idéologie tribale et
sur les manœuvres politiques juives. Voici [Here]
ce que cette association dit, à son propre sujet :
« L’Association Internationale des Avocats et Juristes
Juifs s’efforce de promouvoir les droits humains où que ce soit,
y compris la prévention de crimes de guerre, le châtiment de
criminels de guerre, l’interdiction des armes de destruction
massive et une coopération internationale fondée sur l’état de
droit et sur la mise en application honnête et équitable des
traités et des conventions internationaux. »
Force est bien de reconnaître que cela
aurait pu aboutir à une initiative juive particulièrement
bienvenue. Lorsqu’on a, présents à l’esprit, le blocus
dévastateur contre Gaza et la condamnation à la famine de
millions de Palestiniens, des experts juristes juifs
s’« efforçant de promouvoir les droits de l’homme, y compris la
prévention de crimes de guerre », c’est exactement ce dont nous
avons besoin. Il est essentiel d’avoir des humanistes
éthiquement orientés, qui sont prêts à s’élever contre la
violation de la Quatrième Convention de Genève par Israël, en
matière de protection de la population civile.
Mais cette association ne s’en tient pas
là : elle va plus loin, recherchant « le châtiment de criminels
de guerre et l’interdiction des armes de destruction massive ».
« C’est rien moins qu’idéal », je me pense en moi-même, tout ce
dont nous avons réellement besoin, afin de traîner devant un
tribunal les criminels de guerre
Shimon Peres/a>, Ariel
Sharon, Ehud
Barak, Shaul
Mofaz,Dan
Halutz,, et bien d’autres encore , c’est de juifs soucieux
d’éthique. Comme si cela ne suffisait pas, considérant le refus
de l’Etat juif de signer le Traité de Non-prolifération
Nucléaire, on pourrait affirmer que l’Association Internationale
des Avocats et des Juristes Juifs a énormément de ménage à
faire, chez elle.
Vous savez quoi ? Je vais vous dire un
truc : rien de tout cela n’arrivera jamais. Nos « avocats et
juristes juifs internationaux » ne sont pas réellement
intéressés à la « poursuite » des « droits humains » universels,
comme un lecteur inattentif pourrait l’imaginer. Ils sont, de
fait, bien plus intéressés à rechercher un type particulier de
droits, appartenant à une espèce particulière et unique, d’être
humain. Voici [Here]
ce que dit l’Association des Avocats et juristes juifs, au sujet
de leur engagement on ne peut davantage spécifique :
« L’Association est spécialement engagée
sur des questions figurant à l’agenda des juifs, et elle œuvre à
lutter contre le racisme, la xénophobie, l’antisémitisme, le
négationnisme de l’Holocauste et la négation de l’Etat
d’Israël. »
Manifestement, il n’est nul besoin d’être
un génie pour relever les failles inhérentes au paragraphe qui
précède.
1 – Si l’IAJLJ est « engagée » dans des
questions qui figurent à l’ « agenda du peuple juif », cela peut
tout aussi bien impliquer que des questions qui concernent le
peuple juif diffèrent de questions concernant les gens, de
manière générale. Autrement dit, nos éminents universitaires
juristes internationaux ont trouvé le moyen d’approuver le
statut juridique unique qui est celui du peuple juif parmi
toutes les autres nations. Et comme si cela ne suffisait encore
pas, les experts juristes juifs admettent, par légèreté ou
tout-à-fait consciemment, qu’ils sont engagés dans les combats
du peuple juif, plutôt que dans des luttes qui concernent
l’humanité, de manière générale.
2 – Il est également très intéressant
d’apprendre, de la part de l’IAJLJ, que le « peuple juif » a un
« agenda ». Il serait génial d’apprendre aussi ce qu’est cet
agenda, et où il est décidé et mis en forme ? Est-ce à la
Knesset, est-ce au sein du Cabinet ministériel israélien, ou
bien alors, peut-être, est-ce dans un des établissements
financiers de Wall Street ?
3 – Si les juristes de l’IAJLJ sont bien,
de fait, engagés dans la lutte contre le ‘racisme’ et la
‘xénophobie’, comme ils l’affirment, comment se fait-il
qu’eux-mêmes dirigent une association racialement orientée ?
Juste pour savoir : un avocat palestinien installé à Londres
peut-il adhérer à leur association internationale juive ? Et
supposons qu’une telle adhésion soit possible, pourquoi un
juriste Gentil intègrerait-il une association essentiellement
intéressées à des questions ayant trait aux juifs et à leur
soi-disant « agenda » ?
4 – Non seulement l’IAJLJ lutte contre ceux
qui nient le droit à l’existence d’Israël, apparemment, cette
association s’est « juré de combattre toute négation d’Israël ».
Autrement dit, nos juristes juifs suprêmement internationaux
doivent réellement penser que l’Etat juif est au-dessus de toute
critique. Ils sont manifestement déterminés à lutter contre ceux
qui le combattent. Je dois reconnaître que c’est là une des
manifestations les plus crues du sionisme militant que je n’aie
jamais rencontrée. C’est une forme d’intimation du silence
politique qui coexiste, dans une contradiction absolue, avec les
valeurs prônées par la pensée progressiste occidentale. Je dois
admettre qu’il est légèrement amusant de découvrir qu’une équipe
d’éminents juristes internationaux juifs ont trouvé le moyen de
rédiger un document aussi mal fagoté, qui ne peut être
interprété autrement que comme une forme sévère d’intolérance,
prête à verser dans l’extrémisme.
Toutefois, la question que nous devons nous
poser est de savoir si des gens qui sont membres ou qui sont
liés à une association aussi ouvertement raciste peuvent
appartenir au système judiciaire occidental ? Quelqu’un qui est
membre d’une association telle celle-là peut-il un jour être
juge, dans l’un quelconque des pays occidentaux ? Apparemment,
la réponse est : oui ! Comme je l’apprends grâce au Herald
Tribune [The
Herald], la première magistrate de l’Ecosse, Lady Cosgrove a
été récemment innocentée d’allégations de parti-pris découlant
de son appartenance, précisément, à l’association internationale
de juristes juifs qui nous occupe.
Cela se passait en 2004 ; Lady Cosgrove
était la juge de cassation qui confirma la décision du Scottish
Home Department (ministère de l’Intérieur écossais) de refuser à
Mme Fatima Helu le statut de réfugiés politique au Royaume-Uni.
Mme Fatima Helu est une Palestinienne qui a survécu aux
massacres de Sabra et Chatila, au Liban, en 1982. Apparemment,
Mme Helu faisait partie du groupe qui tenta, en 2002, de faire
mettre en examen l’ancien Premier ministre israélien Ariel
Sharon par la Cour Internationale de La Haye, en raison de son
implication probable dans le massacre.
Apparemment, on peut à bon droit arguer du
fait que Lady Cosgrove, en raison de son association avec cette
fameuse association juive, s’était jurée de « combattre » Mme
Fatima Helu, une dame Palestinienne qui, ouvertement, « nie
Israël », ainsi que l’un de ses criminels de guerre les plus
notoires, j’ai nommé Ariel Sharon.
De même, on pourrait arguer qu’étant donné
son affiliation avec une association sioniste internationale,
Lady Cosgrove aurait dû se désister et éviter d’avoir à juger le
dossier d’une militante de l’OLP et d’une rescapée d’un massacre
largement associé à Sharon.
Les avocats de Mme Helu tentèrent de faire
appel contre l’arrêt, au motif que Lady Cosgrove n’était pas un
observateur impartial, en raison de son appartenance à l’IAJLJ.
L’appel citait des discours de dirigeants de l’IAJLJ, ainsi que
des articles publiés dans des revues trimestrielles qui
critiquaient vertement les tentatives déployées par des
Palestiniens d’ester devant des tribunaux internationaux contre
Israël, comme preuves du parti-pris vraisemblable de Lady
Cosgrove.
Toutefois, les allégations formulées à
l’encontre de Lady Cosgrove furent rejetées, au mois de
novembre, par Lord Nimmo Smith, qui a entendu les plaignants en
compagnie de Lord Kingarth et de Lord Kirkwood. L’argumentation
avancée par ce Lord s’avéra fascinant :
« Nous ne voyons aucune raison », déclaré
Lord Smith, « de supposer que l’un quelconque des juges à
l’esprit indépendant de la Cour de Cassation – ayant prêté
serment et étant tout à fait capable de se former sa propre
opinion – ait pu être influencé de cette manière. »
Lord Nimmo a peut-être raison. Il est
manifestement hors de notre portée de savoir par quel processus
mental Lady Cosgrove est effectivement passée en se décidant,
dans ce dossier. Toutefois, étant donné la vision que Lord Smith
a du serment judiciaire, nous sommes fondés à supposer que Lady
Cosgrove a eu à choisir entre un jurement judiciaire universel,
dans lequel elle a juré à la Reine [swore
to the queen] « de rendre justice à toutes les conditions de
citoyens, suivant les lois et les usages de ce Royaume, sans
peur ni faveur, sans affection ni mauvaise volonté » et son
engagement, dans le cadre de son adhésion à l’IAJLJ, « envers
des questions figurant à l’agenda du peuple juif ».
Comment Lady Cosgrove a-t-elle réussi à
combler le fossé entre le « rendre la justice à toutes les
conditions de citoyens » et son « engagement » envers l’IAJLJ en
matière de primauté des « Questions Juives », c’est sans doute
un miracle. Comment ces Lords distingués ont-ils réussi à ne pas
apercevoir un conflit d’intérêts manifestes entre « tous les
citoyens » et « un groupe bien particulier de citoyens » est une
question très particulière, mais tout-à-fait compréhensible.
Très longtemps, j’ai eu peur de le dire. Le fossé entre
l’humanisme et les intérêts sionistes locaux et mondiaux est en
train de devenir incomblable. Il est sans doute temps, pour les
humanistes, parmi nous, d’insister sur le fait que les personnes
nommées dans des fonctions judiciaires doivent être exempts de
toute affiliation politique tribale. Cela épargnerait à nos
distingués Lords d’être incapables de voir la contradiction
flagrante qu’il y a entre le tribal et l’universel. Nous ferions
bien de nous orienter dans cette direction, et le plus vite
possible, nous devons le faire pour le bénéfice de l’humanité,
mais aussi pour celui de juifs tellement nombreux qui n’ont
strictement rien à voir avec les crimes que l’on commet en leur
nom.
Traduit de l’anglais par Marcel
Charbonnier/span>
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