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Jerusalem Post

Les destins du nationalisme palestinien et du sionisme sont inextricablement liés
Gershon Baskin


Si le but ultime du sionisme est de créer un havre de paix pour le peuple juif, alors la principale limite à cet idéal est le conflit permanent avec le monde arabe en général et les Palestiniens en particulier. L’avenir du peuple juif en Terre d’Israël n’avait jusqu’ici jamais été aussi inextricablement lié aux aspirations nationales du peuple palestinien. Le temps presse pour chacun. Mais il en reste encore assez pour parvenir à un accord qui sauvera chaque mouvement national de la destruction mutuelle. NdT
 
Jerusalem Post, 30 juin 2008

Quand j’avais 14 ans, ma famille déménagea d’un quartier majoritairement juif de Long Island (New York), vers un autre qui ne l’était absolument pas. Le pourcentage d’élèves juifs dans ma classe chuta d’environ 80% à quelque 5%. Ce fut pour moi un bouleversement spectaculaire.

Comme font tous les minoritaires du monde, je cherchai à me raccrocher à tout qui peut assurer un sentiment de sécurité et d’appartenance. Durant mes premières semaines dans ma nouvelle école, je trouvai un ami qui rentrait d’Israël. Sa famille se préparait à accomplir son aliya [1]. Il m’informa qu’il avait fondé dans notre ville une section du mouvement de jeunesse sioniste Jeune Judée. Il m’invita à le rejoindre. L’année suivante, je fus élu membre de l’exécutif régional du mouvement. Durant ma dernière année d’études secondaires, j’en fus le président pour la région de Long Island.

Je passai l’année suivante en Israël pour suivre un cours de formation de Jeune Judée. Durant cette année, j’eus la confirmation qu’Israël était ma maison. Après avoir décroché ma licence aux Etats-Unis (sur insistance de mes parents), je retournai en Israël. Je devins citoyen israélien.

A Jeune Judée, l’éducation sioniste que je reçus et que je transmis à bien d’autres après moi affirmait que ce déménagement vers Israël entraînait un changement qualitatif dans votre conception du monde. C’était bien plus qu’un changement d’adresse. En d’autres termes, émigrer vers Israël devait revêtir une signification très vaste. Devenir Israélien voulait dire contribuer de manière positive, d’une manière ou d’une autre, au développement de l’Etat d’Israël et du peuple juif. Alors, comme encore aujourd’hui, je compris que le défi le plus pressant et le plus irrésistible pour l’Etat d’Israël était/est de trouver une voie pour conclure la paix avec nos voisins arabes. C’est ce à quoi j’ai consacré les 30 dernières années de ma vie.

Si le but ultime du sionisme est de créer un havre de paix pour le peuple juif, un endroit où développer notre propre Etat et notre propre société, notre culture et notre héritage, où prospérer et nous surpasser, alors la principale limite à cet idéal est le conflit permanent avec le monde arabe en général et les Palestiniens en particulier.

Je crois que la lutte pour le sionisme ne fut jamais conçue comme conflit israélo-arabe. Notre transformation historique en tant que peuple grâce au sionisme fut altérée en cours de route par l’échec du monde arabe à accepter l’Etat juif dans la région. Les incessantes guerres israélo-arabes façonnèrent notre lutte pour notre identité dans notre propre Etat. Beaucoup de notre identité actuelle est souillée par notre incapacité à ce jour, malgré nos tentatives, à construire une paix durable avec nos voisins.

Le principal conflit interne actuel au sein même de l’Etat d’Israël concerne la nature de nos relations avec nos voisins palestiniens. Même le second conflit interne le plus urgent - celui qui oppose Juifs religieux et Juifs laïques - se centre dans une grande mesure sur notre relation à la Terre d’Israël et sur ce que ceci entraîne quant au contrôle des territoires palestiniens. Pour beaucoup d’Israéliens, le contrôle des territoires relève de problèmes de sécurité. Pour beaucoup d’autres c’est avant tout une affaire religieuse liée à la promesse de Dieu au peuple juif. C’est une question de foi. Elle ne peut être débattue sur un plan rationnel.

Sur la sécurité, notre évaluation finale relative aux Palestiniens consiste à savoir jusqu’à quel point ils sont vraiment intéressés et engagés à conclure la paix avec Israël. Avec la question de « vouloir » la paix se pose celle d’en être capables. L’évaluation implique la manière dont nous percevons l’acceptation palestinienne du droit d’Israël à exister. Les Palestiniens éprouvent toujours de grandes difficultés à reconnaître ce droit, dans la mesure où nous désirons définir Israël comme l’Etat du peuple juif. D’autre part, l’écrasante majorité des Palestiniens, en ce compris la quasi-totalité de la direction de l’OLP, se sont complètement résignés à l’existence d’Israël comme fait irréversible. Ils sont prêts à l’accepter dans le cadre d’un accord de paix négocié.

Il n’existe aucun doute quant à la détermination et à la capacité des Palestiniens à réprimer le terrorisme et les attaques contre Israël. Ils en ont fourni la preuve. Ils n’agissent pas ainsi par amour pour Israël. Mais l’Autorité palestinienne en Cisjordanie comprend pleinement que le terrorisme et les attaques contre Israël contrecarrent ses propres intérêts nationaux, lesquels consistent à réaliser ses aspirations à construire un Etat palestinien. Le peuple palestinien désire que la communauté internationale accepte son Etat comme membre à part entière. Ils affichent leur sens des responsabilités à ce sujet, tant envers eux-mêmes qu’envers la communauté internationale. C’est pourquoi celle-ci a accepté de doter l’Autorité palestinienne de 250 millions de dollars supplémentaires destinés aux services de sécurité palestiniens, au système judiciaire ainsi qu’à l’érection de prisons en Cisjordanie. Au-delà de ce que les Palestiniens accomplissent pour eux-mêmes, la sécurité d’Israël sera toujours assurée et garantie par Israël lui-même. Une coopération et une coordination positives entre les services de sécurité de chaque camp fournira la meilleure garantie de sécurité à long terme pour chaque peuple.

Relever la dimension sécuritaire des relations israélo-palestiniennes nous force à saisir les limites et la fragilité de la réalité actuelle. Jusqu’à un certain point, c’est la question de « la poule et l’œuf ». Les Palestiniens s’activeront à empêcher des attaques contre Israël tant qu’un processus de paix négocié offrira l’espoir d’un accord. Les Palestiniens relanceront leur lutte, en ce compris la lutte armée, s’ils perçoivent que l’occupation perdure sans fin et que ne s’établit aucun Etat palestinien aux côtés d’Israël. Pour ceux des Israéliens prêts à consentir à des concessions territoriales aux Palestiniens si elles assurent leur sécurité, il est important de comprendre la relation dynamique entre sécurité et territoire. Persister à garder sous contrôle des territoires considérés par les Palestiniens comme leur futur Etat aura pour résultat d’amoindrir la performance palestinienne dans le domaine de la sécurité. A cet égard, le concept sioniste selon lequel ériger des implantations améliore la sécurité est complètement faux. Perpétuer l’existence et l’expansion des implantations [juives] en terres palestiniennes met directement en danger la sécurité de l’Etat d’Israël et des Israéliens.

Par définition, faire la paix c’est prendre des risques. Il faut évaluer ces risques sur base des intérêts et des perceptions de la menace. Le risque majeur qui pèse aujourd’hui sur la pérennité de l’entreprise sioniste réside en notre éventuelle incapacité à nous extraire nous-mêmes de l’occupation. Le temps nous est compté quant à la viabilité et à la faisabilité de créer un Etat palestinien aux côtés d’Israël. L’avenir du peuple juif en Terre d’Israël n’avait jusqu’ici jamais été aussi inextricablement lié aux aspirations du peuple palestinien. L’accomplissement des aspirations nationales du peuple palestinien est ce qui permettra l’accomplissement ultime des aspirations nationales juives. Notre sécurité est leur sécurité. Leur sécurité est la nôtre. Le temps presse pour chacun de nous. Mais il en reste encore assez pour parvenir à un accord qui sauvera chaque mouvement national de la destruction mutuelle.

Gershon Baskin est co-directeur israélien de l’IPCRI-Israel/Palestine Center for Research and Information

[1] Aliya : émigration, littéralement « montée », en Israël. NdT.

Traduction Kol Shalom

Publié le 8 juillet 2008 avec l'aimable autorisation de Kol Shalom.



Source : Kol Shalom
http://www.shalomarchav.be/...


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