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Jerusalem Post
Israël
: le nouveau Monsieur Non
Gershon Baskin
[En 1967, les Etats arabes, réunis à Khartoum,
proclamaient les fameux trois "non" : non à la paix
avec Israël, non à la reconnaissance d'Israël, non à toute négociation
avec Israël. Depuis, la situation a bien changé. Et aujourd'hui,
c'est Israël qui apparaît comme celui qui dit : "Non".
Et en posant des conditions préalables à la reprise de négociations,
Israël doit comprendre qu'alors, elles devront être réciproques]
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Jerusalem Post, 10 octobre 2006
Trad. : Gérard pour La Paix Maintenant
Naguère, la politique de la main tendue pour la paix était une
constante de tous les gouvernements israéliens. Les premiers
ministres israéliens ont toujours souligné qu'Israël voulait la
paix avec tous ses voisins, et était prêt à parler avec eux,
n'importe quand et n'importe où. C'était une position
confortable quand nous savions que de l'autre côté, nous nous
heurtions à un refus. Il était confortable de nous présenter
comme le bon qui veut la paix, alors que c'étaient nos voisins
qui disaient "Non". Nous n'avions pas à poser de
conditions préalables. Israël déclarait son souhait de parler
de paix quand le "danger" de faire la paix était loin
au-delà de l'horizon. Mais les choses ont changé.
Aujourd'hui, Israël pose à ses voisins toute une liste de
conditions préalables avant d'accepter de s'asseoir avec eux à
la table des négociations. Les Syriens doivent fermer les bureaux
du Hamas et du Jihad islamique, ils doivent fermer hermétiquement
leur frontière avec l'Irak et empêcher la livraison d'armes au
Hezbollah. Le Hamas doit reconnaître Israël, renoncer au
terrorisme et accepter les accords passés déjà signés.
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas doit démontrer
sa capacité à gouverner en affrontant le Hamas et il doit
commencer à appliquer les mesures de la Feuille de route
relatives à la sécurité, sinon, il n'est pas un partenaire.
Ces conditions préalables ne font que fermer la porte au dialogue
et présenter Israël comme un pays qui ne souhaite pas véritablement
la paix : c'est ainsi qu'Israël est perçu aujourd'hui presque
partout dans le monde. Etrange situation où le monde arabe est
perçu comme le côté qui recherche la paix, alors qu'Israël est
perçu comme celui qui cherche à l'éviter. Même la Ligue arabe
a pris l'initiative d'un débat au Conseil de sécurité des
Nations Unies sur son plan de paix, alors qu'Israël et les
Etats-Unis ont tenté d'empêcher ce débat. Des journaux israéliens
ont parlé de l'offensive de paix de la Ligue arabe. Où est
l'offensive de paix d'Israël?
Le comportement d'Israël pendant et après la guerre du Liban est
perçu dans le monde comme une surévaluation de l'usage de la
force et une sous-évaluation de l'usage de la diplomatie. La
politique d'Israël, qui a continué sa politique
d'expansion des colonies, rejetée par l'ensemble de la communauté
internationale, ne contrevient pas seulement aux principes de la
Feuille de route : elle est perçue par la communauté
internationale comme un message qui affirme qu'Israël ne quittera
jamais les territoires occupés.
D'autres politiques, comme les bouclages continuels de territoires
palestiniens et des frontières, le non paiement des recettes
fiscales et douanières qui appartiennent au peuple palestinien,
contribuent elles aussi à l'image d'Israël, celle d'une brute régionale,
dénuée non seulement de
toute compassion humaine, mais aussi de toute sagesse politique.
La communauté internationale n'a aucune sympathie pour le Hamas,
mais même les tristes événements qui se déroulent
quotidiennement à Ramallah et à Gaza sont, pour une part, considérés
dans le monde comme le résultat du rejet perpétuel par Israël
d'une vraie paix avec les Palestiniens.
Les experts affirment que depuis au moins un an, le président
syrien Bachar Assad supplie Israël de le laisser reprendre le
Golan par le moyen de la négociation. Bien sûr, Assad nous a
aussi menacés de faire la guerre si nous ne répondions pas à
ses offres de paix. Mais souvenons-nous qu'Anouar Sadate a fait
exactement la même chose en 1972 pour le Sinaï. Si nous avions
alors
réagi positivement, la guerre de Kippour aurait pu être évitée
avec son cortège de plus de 2.400 morts israéliens.
Il semble qu'Israël hésite, ou ne souhaite pas, répondre, peut-être
parce que la peur de la paix est plus forte que la peur de la
guerre. Il est vrai que la paix a déçu Israël. La paix avec l'Egypte
n'a jamais été une paix chaleureuse. Nous savons que les
touristes israéliens ne sont pas vraiment les bienvenus ni même
peut-être très en sécurité, aussi bien au Caire qu'à Amman. Même
pendant les "bonnes années" du processus de paix avec
les Palestiniens, les Israéliens avaient peur de pénétrer dans
les territoires palestiniens. Mais une paix froide vaut mieux
qu'une guerre, même froide, et globalement, la situation d'Israël,
stratégique et sécuritaire, à l'intérieur comme à l'extérieur,
serait bien plus sûre dans une paix avec ses voisins que dans un
conflit perpétuel avec eux.
Il est possible que la paix ne soit pas possible immédiatement,
ni avec les Palestiniens, ni avec la Syrie. Certains dirigeants
palestiniens se mettent maintenant, eux aussi, à réclamer
qu'Israël soit rayé de la carte, d'autres parlent de ne jamais
faire la paix avec Israël. Mais ces déclarations sont rejetées
par la plus grande partie de la communauté internationale, et
Israël ne doit pas répondre dans le même style. Israël doit
constamment déclarer son souhait d'accepter, par principe, toute
initiative dont l'issue serait la fin des conflits israélo-arabes
et qui assurerait la sécurité d'Israël.
La seule condition préalable pour se parler doit être
l'acceptation de l'autre côté de s'asseoir à la table des négociations
sans tirer. Tout le reste est négociable. Il faut comprendre que,
si conditions préalables il y a, elles sont réciproques. Si Israël
exige la reconnaissance, il doit lui
aussi accorder la reconnaissance. Même de hauts dirigeants du
Hamas ont déclaré qu'ils seraient prêts à reconnaître Israël,
mais qu'Israël devait d'abord préciser de quel Israël il s'agit
(dans quelles frontières) et qu'Israël devait aussi reconnaître
la Palestine.
Si Israël pose comme condition préalable la renonciation à la
violence et la fin des agressions, alors, il doit se comporter de
même. Beaucoup de monde, au sein de la communauté
internationale, considère les assassinats ciblés comme du
terrorisme d'Etat. Tuer des civils avec des bombes et des
roquettes tirées par l'aviation israélienne ne paraît pas très
différent, dans de
nombreuses parties du monde, des explosions de bus dans les rues
israéliennes. Le résultat est le même, même si les motivations
sont différentes.
Il est de l'intérêt d'Israël de rechercher sincèrement la
paix. Cela doit constituer sa première ligne directrice stratégique
et politique. Et cette recherche de la paix doit se traduire par
une politique qui envoie un message clair à nos voisins et au
monde. Cette politique a le pouvoir de changer le cours de notre
vie, de nous éloigner des conflits et de l'insécurité, et de
nous rapprocher de la paix, de la coopération régionale et de
bien plus de sécurité.
* Gershon Baskin est le co-directeur israélien de l¹IPCRI,
Israel/Palestine Center for Research and Information. www.ipcri.org
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