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Ramadan : un travail à plein temps
Floriane Leclerc


La Mosquée de Paris

Vendredi 21 août 2009

Le Ramadan commence et durant quatre semaines, concilier emploi et foi est un casse-tête pour beaucoup de pratiquants. Enquête.

Cette année, comme tous les ans, une majorité des cinq millions de musulmans de France s’apprête à célébrer le Ramadan, quatrième pilier de l’Islam. Une pratique qui progresse. Selon un sondage CSA-La Vie de 2006, dans l’Hexagone, près de 9 musulmans sur 10 respectent les prescriptions de ce mois saint alors qu’ils ne sont que 49% à se rendre à la mosquée. Dans le but de se purifier, ils ne mangeront ni ne boiront rien de l’aube au crépuscule. Mais cette année, la période de jeûne risque d’être particulièrement difficile. Les jours à ralonge, l’interdiction de boire même sous 27°… durcissent encore l’épreuve. Surtout lorsqu’on travaille ! Car les fidèles doivent exercer normalement leur activité professionnelle durant ce mois, selon le Coran.

Pourtant, nombreux sont ceux qui, comme Amary Mourad, agent de sécurité chez Adventis, pensent que "plus l’épreuve est dure, plus cela permet de tester et conforter sa foi". Celui-ci se veut pragmatique : "Au bout de 2 ou 3 jours, l’organisme s’habitue". D’autant plus que transformer l’achoura (le repas pris à l’aube) en véritable petit-déjeuner peut permette de tenir plus facilement jusqu’au soir.

Surtout, le jeûne a vocation à être joyeux, il doit être accepté comme un bienfait, et non comme une contrainte. La règle est d’ailleurs qu’en aucun cas celui-ci ne doit mettre en danger la santé de la personne qui le pratique. Ainsi, un membre du syndicat Force ouvrière de la RATP confie que ses collègues musulmans, exerçant une fonction difficilement compatible avec l’observation stricte du jeûne (chauffeurs de bus, métro…), s’octroient tout de même le droit de boire quand le corps semble atteindre ses limites. Autant pour préserver leur santé que la sécurité des passager, car le corps fatigué, la vigilance est en berne. Le tout est d’observer les règles le mieux possible, pas de tomber dans les extrêmes. Le ramadan se veut avant tout une période de recueillement et d’empathie : au-delà de sa dimension purificatrice, le jeûne est aussi l’occasion de partager la situation des indigents, l’intention prime sur les actes. "Le problème de la compatibilité ramadan-travail n’a jamais été réellement soulevé" reprend le syndicaliste. "Aucune réclamation concernant des aménagement d’horaires n’a d’ailleurs été formulée" ajoute-t-il. Il est aussi vrai que la plupart des musulmans désirent continuer à travailler durant ces quatre semaines particulières.

"Quand on bouge, les journées passent plus vite"

Il est 9h à la grande horloge de la gare Saint Lazare, comme tous les jours, Hamid Kachab pousse son chariot de lavage devant lui. Agent d’entretien chez Challancin, son métier ne semble lui poser aucun problème pour observer le jeûne. Au contraire, il se réjouit de la situation : "Quand on bouge, les journées passent plus vite" et permettent d’oublier la faim" confie-t-il. "Je travaille 7h par jour, et c’est pareil pendant le ramadan". Et puisqu’il finit à 14 h, il sera largement prêt pour honorer l’unique mais gargantuesque repas de la journée, vers 23h. "Ma femme ne travaille que le matin, elle prépare le dîner l’après-midi, on a pensé à tout !" ajoute-t-il, l’oeil malicieux.

Cependant, le jeûne ne paraît pas aussi simple pour tout le monde. Chez Quick, il arrive que les employés travaillent jusqu’à deux heures du matin. Selon Jean-Yves, assistant, aucun aménagement n’est prévu dans les plannings. Il concède cependant qu’"à l’heure de couper le jeûne, on laisse les gens manger". Le code du travail ne prévoyant rien concernant le ramadan, les salariés peuvent donc uniquement compter sur l’empathie de la direction et de leurs collègues.

Stéphanie, vendeuse pour la chaîne de restauration rapide "Pomme de Pain", n’est pas musulmane et justifie l’absence de mesures exceptionelles pour les pratiquants par l’injustice que celles-ci induiraient vis-à-vis des autres salariés. A propos de ces derniers, elle déclare : "Le directeur, en faisant les plannings, essaie de les ménager, mais il ne peut pas non plus trop les favoriser". Elle s’empresse d’ajouter : "C’est compréhensible ! 4 semaines c’est long, et si on ne leur donne que des ouvertures de magasin, les heures les plus tranquilles, c’est injuste pour les autres. Cela dit, on essaie de les soulager le plus possible". Solidarité oui, favoritisme non !

Cisso Kho, employée de la chaîne "La Croissanterie" s’est pour sa part résignée : "Les responsables, ça sert même à rien de leur en parler, ils s’en foutent complètement". "Tout est question d’habitude", résume la jeune femme en sortant les pains au chocolats du four, même le fait de travailler dans la restauration alors que l’on est à la diète semble-t-il.

"J’essaie d’être encore plus productif pendant le ramadan"

Mais l’habitude cache souvent de la volonté et un minimum d’organisation. Sur le forum de discussion Yabiladi.com, Srnit écrit : "J’essaie de ne pas modifier mes horaires. Au contraire, j’essaie d’être encore plus productif pendant le ramadan, histoire de faire taire la vieille idée, ventre vide travaille moins bien". Pour certains, tout se résume effectivement à une bonne planification journalière quand c’est possible.

"Je m’organise pour solder dès le matin, tant que les connections cérébrales circulent, le plus gros des tâches, les appels importants avec les gros clients ou encore les réunions. L’après -midi, je fais des trucs qui nécessitent moins de concentration, j’abats les tâches automatiques", explique ainsi Samia. Agded, elle, regrette que son entreprise ne lui permette pas d’aménager son planning comme elle l’entend : "Nous, au travail, on n’a pas le droit de faire des journées continues. Toutes les demandes sont systématiquement refusées et impossible de partir tôt même si on est venu plus tôt. Alors, généralement, à la pause de midi je me repose pendant que les autres mangent parfois devant moi".

Selon le code du travail, un salarié peut demander un jour de congé pour une fête religieuse mais ne peut réclamer d’aménagement de son contrat pour ce motif. Rien n’oblige une entreprise à adapter ses horaires aux croyances de ses employés.

"C’est plus difficile à gérer pour une femme"

Travailler pendant le ramadan, force est de constater que nombreux le font, avec le sourire ou non. Mais certains préfèrent également poser leurs congés. Patience en fait partie : "Personnellement, je préfère ne pas travailler pendant le ramadan, comme ça je peux faire mes prières à l’heure, faire la harira (soupe nationale) au moins tous les 2 jours… Je pense que c’est plus difficile à gérer pour une femme".

Car ce sont elles qui se chargent de préparer le repas du soir. Or, si l’on associe toujours Ramadan à un temps de prière et de jeûne, on oublie trop souvent que c’est aussi une période de fête et de repas copieux. Au crépuscule, la harira rompt le jeûne, suivie des tajines, méchouis, couscous, pâtisseries, dattes… traditionnels. Mais comment préparer les festivités pour les amis et la famille rassemblés pour l’occasion lorsque l’on travaille ?

Au Maroc, en Tunisie, en Algérie…, pays où l’Islam est prépondérant, les entreprises comme l’administration ont prévu des horaires réduits afin de ne pas entraver le bon déroulement de la célébration, mais dans les pays occidentaux, rien n’est prévu et les musulmans doivent faire preuve de débrouillardise. Mira nous révèle sa recette : pour ne pas être débordée, elle fait de la chorba pour 3 jours.

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© Journal L'Humanité
Publié le 21 août 2009 avec l'aimable autorisation de
L'Humanité



Source : Le web de l'Humanité
http://www.humanite.fr/...


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