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Opinion
La quartet a peur du
lendemain
Fadwa Nassar
Jeudi 10 février 2011
Personne, ou très peu de gens, à part les Palestiniens
eux-mêmes, n’a prêté attention à la dernière déclaration du
Quartet en ce qui concerne la Palestine. Il est vrai que la
révolution populaire en Egypte et ses répercussions sur le
monde, et surtout la région, a focalisé l’attention des médias
et des peuples du monde. C’est d’ailleurs pour cela que le
communiqué du Quartet, passé presque inaperçu, et rédigé suite à
la réunion de Munich, a exprimé un alignement très net en faveur
de l’Etat sioniste et de ses ambitions sur la Palestine, par
crainte des retombées des événements en Egypte.
Réuni à Munich en présence de la ministre américaine des AE,
Hilary Clinton, du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki Moon, de
la responsable de la politique étrangère de l’Union européenne,
Kathreen Ashton et du ministre russe des AE, Sergei Lavrov, le
Quartet n’a pas jugé bon de masquer son alignement sur la
politique sioniste et y est allé tout droit : il a tout
simplement demandé la reprise des négociations entre l’Etat
sioniste et l’Autorité palestinienne, pour parvenir à une « paix
globale entre l’Etat juif et les Etats arabes », faisant presque
porter la responsabilité de leur gel à la partie arabe,
notamment l’Autorité palestinienne.
Le communiqué du Quartet a évité de réclamer à l’Etat sioniste
le gel de la colonisation ou de lui faire porter la
responsabilité de l’arrêt des négociations, se contentant de «
regretter » qu’il n’ait pas prolongé le gel de la colonisation
après septembre 2010. Il est cependant clair que le communiqué
du Quartet porte la marque de l’affolement dû à la révolution
populaire en Egypte. Pour le Quartet, qui est extrêmement pressé
et craint de voir basculer toute la région, il faut rapidement
asseoir les bases d’une « paix » entre l’Etat sioniste et « ses
» voisins arabes.
« Les membres du Quartet ont étudié les répercussions des
événements (en Egypte) sur la paix arabo-israélienne, et se sont
mis d’accord pour mener d’autres discussions car cela a une
importance capitale », dit le communiqué. Il exhorte «
énergiquement les parties, sur cette base, à surmonter les
obstacles actuels qui empêchent le processus de paix ». Il
proclame que son objectif est l’instauration de « la paix entre
les Israéliens et les Palestiniens », mais aussi entre « Israël
et le monde arabe en général », pour éviter de graves événements
dans la région.
Il est cependant étonnant que pour ce faire, le Quartet n’ait
pas jugé bon de prendre en considération l’attitude de
l’Autorité palestinienne et de soutenir ses efforts, en vue de
lui redonner un peu de notoriété auprès du peuple palestinien,
en faisant un simple geste de pression sur l’Etat sioniste.
L’Autorité palestinienne, qui est en train de perdre un de ses
plus importants alliés dans la région, le régime de Moubarak-Soleyman,
a vivement critiqué d’ailleurs le communiqué du Quartet, le
trouvant très en-deçà de son attente. Yassir Abd Rabbo,
secrétaire du comité exécutif de l’OLP, a même accusé Tony
Blair, l’ancien premier ministre britannique et envoyé spécial
du Quartet, en le rendant responsable de ce communiqué
désastreux pour l’Autorité Palestinienne. Quant à Saeb Urayqat,
« grand négociateur » de l’Autorité, il a considéré que le
communiqué du Quartet était décevant, et qu’il aurait mieux
fallu, dans les circonstances présentes (la révolution
égyptienne), qu’il exerce des pressions sur l’Etat sioniste «
qui représente le seul danger réel sur la sécurité au
Moyen-Orient ».
Il est vrai que l’Autorité Palestinienne, après ce communiqué,
aura du mal à convaincre le peuple palestinien en Cisjordanie,
qu’elle doit se soumettre à une communauté internationale qui
refuse d’utiliser ses deux yeux pour regarder. Alors que la
judaïsation de la ville d’al-Qods se poursuit à un rythme
effréné, et que les soldats de l’occupation poursuivent toujours
leurs agressions contre les manifestations hebdomadaires qui se
déroulent en Cisjordanie contre le mur, alors que l’intérieur
palestinien de 48 est menacé dans sa présence même dans sa
patrie, alors que la bande de Gaza est toujours sous blocus et
qu’une jeune fillette vient de mourir, faute de soins, à cause
du blocus meurtrier, le Quartet a considéré que la sécurité de
l’Etat sioniste primait sur toute chose. Il a cependant jugé
que, pour la forme, il fallait associer l’Autorité palestinienne
à ce jeu macabre, consistant à tuer le peuple palestinien, à
petit feu, par des mains palestiniennes.
Quoiqu’il en soit, le communiqué du Quartet a été dénoncé par
l’ensemble des forces palestiniennes, y compris l’Autorité,
peut-être pas dans des termes vigoureux, mais juste pour
exprimer sa déception. Il reste à savoir si l’Autorité, ou le
Fateh surtout, pourra enfin se débarrasser de cet épouvantail
qui s’appelle communauté internationale, briser les chaînes avec
lesquelles il s’est lié depuis les accords d’Oslo, pour
rejoindre les autres formations de la résistance et participer
activement à la lutte contre l’occupant.
La révolution égyptienne, après la publication par la chaîne Al-Jazeera
des documents confidentiels des négociations qui accusent
l’Autorité palestinienne d’avoir bradé le pays aux sionistes, a
mis l’Autorité palestinienne dans une situation des plus
critiques. D’une part, les sionistes poursuivent leurs actes
provocateurs, tuant, expulsant et judaïsant le pays, d’autre
part les Etats-Unis et le Quartet semblent, à moins d’être
complices, impuissants à freiner l’ardeur coloniale des
premiers. Du côté arabe, le rôle égyptien complice des
Etats-Unis et des sionistes, qui représentait le principal
soutien à l’Autorité palestinienne, est bel et bien achevé. Ni
l’Arabie saoudite, ni la Jordanie, ne peuvent assurer ce rôle
protecteur au bradage du pays.
L’Autorité palestinienne de Ramallah réalise désormais que le
vent a tourné et ce ne sont pas les accusations portées contre «
des puissances régionales qui soutiennent Israël » (Iran, Qatar
entre autres) qui vont l’aider à remonter la pente. Seule une
attitude ferme et un attachement aux droits constants du peuple
palestinien peuvent lui permettre d’affronter la colonie
sioniste, en commençant d’abord par la libération de tous les
combattants et militants de la résistance, en cessant la
collaboration avec les forces sécuritaires de l’Etat sioniste,
faussement appelée « coordination sécuritaire » et en instaurant
un climat permettant au peuple en Cisjordanie de reprendre le
soulèvement contre l’occupation.
Article publié sur Résistance islamique au Liban
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