Mercredi 4 février 2009
Le journaliste vedette vénézuélien, Ernesto Villegas, raconte
son incrédulité face aux propos tenus par Thierry Meyssan, en
novembre 2008, sur la plateau de Telesur… et sa stupéfaction
devant des événements récents qui confirment les analyses du
politologue français.
En novembre dernier de passage à Caracas
à l’occasion du Salon international du livre, l’écrivain
français Thierry Meyssan, auteur du best-seller mondial
L’Effroyable imposture. Aucun avion ne s’est écrasé sur le
Pentagone où il réfute avec des données terrifiantes la
thèse officielle des attentats du 11 septembre 2001 et sur
lequel le journaliste Carlos Sicilia a basé des dizaines de
programmes TV avant qu’on ne l’obligea, à force de menaces, à se
taire.
Jusqu’à ce que l’interview que j’ai réalisé de Thierry
Meyssan pour Telesur soit diffusée par cette chaîne —qui l’a
programmée le 19 janvier 2009, à la veille de l’investiture de
Barack Obama—, je n’ai rien voulu écrire sur ce sujet par
respect pour le droit de primeur qui revenait logiquement à
l’antenne dirigée par Andrés Izarra.
Je me suis pincé pour ne pas le faire, et par chance je ne
l’ai pas fait. Parce que avec el temps qui passe, les nouveaux
éléments qui ont surgi —vous vous ferez votre propre opinion—
ont crédité d’une plus grande vraisemblance la version de
Thierry Meyssan sur ce qui se cache derrière l’arrivée du
premier descendant d’africains à la Maison-Blanche.
Je confesse l’avoir écouté au départ avec un certain
scepticisme. Peut-être en me souvenant des réserves manifesté il
y a quelques années face aux théories conspiratives par
l’universitaire états-unien Peter Kornbluh, directeur du
National Security Archives à l’université George Washington, et
auteur de révélations sur les crimes de Pinochet notamment et
les attentats terroristes des États-Unis contre Cuba. Un
progressiste que je respecte.
Cependant les faits —ils sont têtus— ont suscité en moi une
résonnance des propos de Thierry Meyssan, comme un cri d’alerte,
durant toutes ces semaines. Et cela, sans pouvoir le rapporter
publiquement. Sur deux plateaux, Meyssan m’a dit —en novembre—
que le 18 décembre 2006 un coup d’État s’était produit dans les
coulisses du pouvoir US. Oui, c’est ainsi qu’il l’a dit. Un coup
d’État. Son unique expression visible, selon le Français, fut le
discret départ de Donald Rusmfeld et son remplacement par Robert
Gates au Pentagone.
Gates, ancien directeur de la CIA, membre du Parti
républicain, serait arrivé là sur les épaules des militaires
gringos pour devenir une sorte « d’homme fort » du régime, dans
le plus pur style latino-américain, comme un président à la
place du président.
Pourquoi ? Les militaires ont réagi de cette manière à la
menace contre leurs intérêts corporatistes que faisait peser la
politique de Bush appliquée par Rumsfeld pour mener à bien
l’occupation de l’Irak. L’emploi de mercenaires, connus comme
des « contractants », à la place des soldats professionnels a
été une bonne affaire d’un point de vue économique, atténuant le
gigantesque coût de la guerre, mais il a créé un précédent
négatif pour les militaires de carrières qui se sont vus à terme
en danger d’extinction.
Meyssan explique que les mercenaires perçoivent un salaire
nettement supérieur à la solde des troupes régulières, mais au
final elles coûtent moins cher au Trésor états-unien. Si un
mercenaire est blessé, son contrat est terminé. Si le blessé est
un soldat professionnel, il faut s’en occuper, voire lui verser
une pension.
Idéale d’un point de vue économique, la politique de
privatisation de la guerre a fini par dresser l’establishment
gouvernemental contre la caste militaire ; une tension, qui
selon Meyssan, a été résolue, comme je l’ai indiqué, en imposant
à Bush la nomination de Gates et le démantèlement progressif de
cette politique.
L’écrivain français soutient qu’il ne s’agit pas seulement
d’un changement de têtes, mais d’un véritable coup d’État qui a
déplacé la réalité du pouvoir de la Maison-Blanche vers le
groupe de militaires qui entoure Robert Gates, à un moment où
l’hégémonie économique, politique et militaire de ce pays sur le
reste du monde se trouve menacée par la grave crise dans lequel
le capitalisme est entré sans perspective de sortie.
Une plaisanterie latino dit qu’il ne peut y avoir de coup
d’État à Washington parce que c’est la seule capitale du
continent américain où il n’y a as d’ambassade des États-Unis
[pour l’organiser Ndt.]. Même à La Havane, il y a une Section
des intérêts états-uniens qui fonctionne.
Cette image m’a fait considérer les conclusions de Thierry
Meyssan comme de possibles exagérations.
Mais quand Barack Obama, avant son investiture, à peine un
mois après avoir gagné l’élection, a annoncé, le 1er décembre
2008 qu’il laisserait Robert gates encore un an à la tête du
secrétariat à la Défense, les propos du Français ont cessé de me
paraître exagérés.
L’impression que j’avais eu a été complètement dissipée quand
j’ai lu, stupéfait, que Robert Gates serait le seul membre du
cabinet qui n’assisterait pas à la prestation de serment à
Washington.
Pourquoi ? Bush, en accord avec Obama, l’a désigné comme
« administrateur », une formule qui en a fait le troisième homme
dans la ligne de succession du pouvoir. « Si l’on tue le
président Obama et le vice-président Biden, Robert Gates
assumera le Pouvoir », ont indiqué les agences de presse comme
s’il s’agissait d’un détail anodin, habituel lors d’une
passation de pouvoir à Washington.
Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi, ça me
hérisse. Thierry Meyssan aurait-il raison ? Obama est-il un
président prisonnier de Robert Gates et de ses généraux ?
Ont-ils déjà préparé son cercueil ? Ou devra-t-il leur obéir
pour sauver sa peau ? Des exagérations ? Les prochains jours
nous fourniront des éclaircissements.
Ernesto Villegas Poljak, journaliste
politique vénézuélien