Proche-Orient
Les dessous du
nouveau round de négociations
Djamel Bouatta
Le
secrétaire d'Etat US John Kerry (à g.)
accueille Martin Indyk pour le lancement
du grand braquage des droits
palestiniens, à Washington, le 29
juillet 2013 (EPA)
Samedi 3 août 2013
Les Palestiniens ont de quoi
être pessimistes quant à la reprise des
négociations avec Israël. Même Mahmoud
Abbas n’y a consenti que forcé par les
Etats-Unis et lâché complètement par les
Arabes.
Le président de l’Autorité palestinienne
sait au fond de lui-même qu’il va encore
droit dans le mur et, d’ailleurs, il
s’est bien gardé de faire preuve de tout
optimisme. Retour sur ce plan américain
qui porte la griffe d’Obama.
Officiellement, c’est un nouveau
processus de paix basé sur trois axes :
politique, économique et sécuritaire. Sa
vrai teneur a fini par être éventée,
passée l’euphorie de la photo de famille
à Washington autour du secrétaire d’état
américain, qui aura fait six voyages
dans la région pour amener Israéliens et
Palestiniens à s’asseoir autour de lui.
L’axe politique était le retour des
pourparlers pour également marquer celui
de la politique américaine dans la
région, mise à mal par les printemps
arabes et leur issues incertaines, par
la crise syrienne qui a remis sur le
tapis régional la place de la Russie et
par le nouveau visage de l’Iran, dont
les contours se dessinent avec le
président réformateur qui prend ses
fonctions cette semaine. L’axe
sécuritaire qui découle du précédent
sera laissé à la discrétion du
Pentagone, en étroite collaboration avec
les hauts dirigeants militaires
israéliens. Comme d’habitude mais en
plus important, dès lors que les
États-Unis ont découvert qu’ils
bénéficient de moins d’oreilles
complaisantes dans la région.
Et l’axe économique signifierait
beaucoup plus d’aide à l’Autorité
palestinienne. Jusque-là rien de
nouveau, sauf que ces axes sont battus
en brèche par Netanyahu qui avait en
personne arrêté le cirque des
pourparlers, indiquant à ses parrains de
Washington que l’idée qu’un État
palestinien doit être créé au sein de la
“Terre d’Israël” a atteint une impasse
et que la chose la plus importante pour
cette “Terre d’Israël”, c’est de
“construire”, et “construire”, et
“construire” des colonies juives.
Il ne s’en est pas privé en doublant les
expropriations des terres de la
Cisjordanie, qui atteignent aujourd’hui
55%. Le nombre de colons israéliens en
1993, lorsque l’OLP a signé les accords
d’Oslo avec Israël, était d’environ 200
000, et aujourd’hui il est de plus de
600 000 en Cisjordanie et à Jérusalem.
Des chiffres qui, d’où qu’on les
analyse, font de la création d’un État
indépendant et souverain dans l’enclave
de Gaza et la Cisjordanie une
impossibilité.
Dann Dannon, le ministre de la Défense
et cadre dirigeant du parti Likoud de
Netanyahu, a déclaré, au moment de la
reprise des négociations, qu’Israël
devrait déclarer la souveraineté sur les
colonies juives et les zones vides de la
Cisjordanie, et que le sort des “blocs”
palestiniens doit être “fixé dans un
accord avec la Jordanie”. Netanyahu et
Dannon insistent sur le fait qu’il ne
peut y avoir une solution à deux États
sans qu’Israël ne conserve le “contrôle
militaire de la vallée du Jourdain” !
Une exigence avec le refus de restituer
Jérusalem-Est que même ses
interlocuteurs palestiniens à l’échine
souple, comme Mahmoud Abbas et Saëb
Erakat, le négociateur en chef de ce
dernier, pourraient accepter. Alors
pourquoi donc John Kerry a-t-il mis tout
le poids de son pays pour obtenir les
deux parties dans une autre série de
négociations qui sont très susceptibles
d’être non seulement improductives, mais
contre-productives, en attisant la
colère des Palestiniens par leur échec,
avec au bout l’inévitable troisième
Intifada ?
La réponse est plus simple que ne le
laisse apparaître la question complexe
et inextricable. Obama, otage des
lobbies juifs américains et des faucons
du Pentagone, a besoin qu’Israël et
l’Autorité palestinienne entament des
négociations rien que pour la forme,
avant que l’Assemblée générale des
Nations unies ne se réunisse en
septembre afin qu’il lui soit épargné un
autre grand embarras sur la question
d’un État palestinien lors de la
prochaine Assemblée générale. La relance
du processus de paix sponsorisé que par
les États-Unis pourra étouffer dans
l’œuf les critiques à la fois contre
Israël et les États-Unis à l’Assemblée
générale concernant l’absence de progrès
vers un État palestinien, qui a obtenu
le statut d’observateur en automne 2012.
Obama, dont l’étoile ne brille plus ni
chez lui et encore moins à l’étranger,
surtout pas auprès des communautés
musulmanes, ne veut pas courir le risque
d’un opprobre international et le
recours à son droit de veto au Conseil
de sécurité qu’il a de tant fois utilisé
pour empêcher des résolutions critiques
à l’égard d’Israël.
A ce jeu, tôt ou tard, la conflagration
éclatera de nouveau dans la région et
ses conséquences seront extrêmement
néfastes pour les États-Unis et d’autres
puissances occidentales qui y ont
d’importants intérêts stratégiques et
économiques. Les éphémères printemps
arabes ne sont pas parvenus à absoudre
les partisans d’Israël. Au contraire.
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Publié le 4 août 2013 2013 avec
l'aimable autorisation de Liberté
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