Opinion
Obama en visite en
Israël :
Disparition définitive de la Palestine
originelle
Chems
Eddine Chitour
Samedi 23 mars 2013
«Il y a deux fous
dans tout marché: l'un qui ne demande
pas assez, et l'autre qui demande trop.»
Proverbe
américain
Obama s'est rendu en Israël où il a
rencontré les autorités du pays. Pour
lui, la cause palestinienne et sa
résolution sont de la responsabilité
unique d'Israël, des citations en hébreu
pour s'assurer les bonnes grâces de
Netanyahu:
«Au premier jour de sa visite au
Proche-Orient, le président américain a
multiplié mercredi les déclarations
visant à rassurer une opinion
israélienne méfiante. A peine le pied
posé sur le sol de Tel-Aviv mercredi, le
président américain a lancé en hébreu:
´´C'est bon de revenir en Israël´´.
Outre l'effort linguistique, toujours
appréciable, il a rappelé que ce n'était
pas son premier séjour dans le pays.
´´Notre alliance est éternelle´´, a
assuré Obama, ajoutant que les
Etats-Unis étaient ´´fiers d'être le
plus fort allié d'Israël´´. Barack
Obama, qui a appelé à sept reprises
Benjamin Netanyahu par son surnom
´´Bibi´´, a annoncé que les Etats-Unis
et Israël allaient ´´ouvrir des
discussions´´ pour prolonger l'aide
militaire américaine au-delà de 2017.
Les deux hommes ont ensuite inspecté le
système antimissile Iron Dome, financé
par les Etats-Unis.» (1)
Lors du discours d'accueil, le Premier
ministre Netanyahu a clairement défini
les priorités d'Israël, à savoir,
l'Iran, la Syrie et la Palestine selon
sa vision. Ecoutons-le: «Monsieur le
Président, vous avez dit clairement que
vous êtes déterminé à empêcher l'Iran de
développer des armes nucléaires. (..)
Malgré nos efforts conjoints et votre
grand succès dans la mobilisation de la
communauté internationale, la diplomatie
et les sanctions jusqu'à présent n'ont
pas arrêté le programme nucléaire
iranien. Et comme vous le savez, mon
avis est que pour stopper le programme
nucléaire iranien, la diplomatie et les
sanctions doivent être complétées par
une menace claire et crédible d'action
militaire. (...) Le peuple juif,
seulement il y a deux générations, était
un peuple impuissant et sans défense
contre ceux qui ont cherché à nous
détruire. Aujourd'hui, nous avons le
droit et la capacité de nous défendre.
Comme vous l'avez dit plus tôt,
aujourd'hui, l'essence même de l'Etat
d'Israël, l'essence de la renaissance de
l'Etat juif, est la réalisation du rêve
séculaire du peuple juif: d'être maîtres
de notre destin dans notre propre État,
et je pense que c'est quelque chose de
merveilleux que nous chérissons. C'est
l'essence même de cet Etat. (...) J'ai
donc hâte de continuer à travailler avec
vous pour régler ce qui est une menace
existentielle pour Israël, et une grande
menace pour la paix et la sécurité dans
le monde.»(2)
«Monsieur le Président, nous avons
discuté aujourd'hui de la situation en
Syrie. Nous partageons l'objectif de
voir un pays stable et pacifique en
Syrie sortir du carnage auquel nous
avons assisté au cours des deux
dernières années. Nous partageons
également la volonté d'empêcher
l'arsenal meurtrier de la Syrie de
tomber dans les mains de terroristes.
(...) Enfin, Monsieur le Président,
votre visite nous a donné l'occasion
d'essayer de trouver un moyen de faire
progresser la paix entre Israéliens et
Palestiniens. (...) Alors, laissez-moi
être clair: Israël reste pleinement
attaché à la paix et à la solution à
deux Etats pour deux peuples. Nous
tendons la main dans la paix et l'amitié
au peuple palestinien. (...)
Asseyons-nous autour de la table de
négociation. Mettons de côté toutes les
conditions. Laissez-nous travailler
ensemble pour réaliser le compromis
historique qui mettra fin à notre
conflit une fois pour toutes.»(2)
Le discours
d'Obama à Jérusalem
Dans son discours, à Jérusalem, la
symbolique est importante car il permet
de faire référence au discours du Caire
-mal perçu en Israël- pour les Arabes,
le président américain Barack Obama a
appelé jeudi la communauté
internationale à déclarer le mouvement
chiite libanais Hezbollah une
organisation ´´terroriste´´, ´´Chaque
pays qui reconnaît la valeur de la
justice doit désigner le Hezbollah pour
ce qu'il est: une organisation
terroriste.» (3)
«Le président américain a déployé à
Jérusalem tout son talent d'orateur pour
gagner le coeur des Israéliens. (...)
Point culminant d'un voyage pensé et
conçu comme une opération de charme vers
les Israéliens, son discours de
Jérusalem était avant tout destiné à
rassurer et conforter son auditoire.
(...) Le lien «indestructible» entre
Israël et les États-Unis, mantra de sa
visite, a été longuement développé par
le président américain. L'ordre des
priorités évoquées par Obama était aussi
destiné à rassurer les Israéliens:
sécurité, paix, et prospérité.»
«Énumérant toutes les menaces qui pèsent
sur Israël, depuis les roquettes du
Hamas jusqu'à l'arme nucléaire
iranienne, en passant par les missiles
du Hezbollah et les armes chimiques
syriennes, Obama s'est fait l'écho de la
vision sécuritaire israélienne, selon
laquelle il n'existe pas de partenaire
pour la paix: «Vous vivez dans une
région où beaucoup de vos voisins
refusent votre droit à l'existence», a
dit Obama à son auditoire, «et c'est
pourquoi la sécurité du peuple juif en
Israël est aussi importante», a-t-il
continué, avant de lancer sous les
applaudissements: «Israël ne disparaîtra
pas!». (...) » (3)
« Vous avez fait des propositions
crédibles aux Palestiniens à Annapolis.
Vous vous êtes retirés de Ghaza et du
Sud-Liban, et n'avez obtenu que du
terrorisme et des roquettes. Vous avez
tendu la main de l'amitié et trop
souvent été confrontés à l'hideuse
réalité de l'antisémitisme... Vous avez
tous les droits d'être sceptiques», a
dit Obama. «Il peut être tentant de
mettre de côté les frustrations et les
sacrifices qui accompagnent la recherche
de la paix», a-t-il aussi ajouté,
expliquant que lui-même aurait plutôt
intérêt à «mettre ce sujet de côté, et
soutenir tout ce que décide Israël.C'est
à vous de décider dans quel type de
démocratie vous voulez vivre», a insisté
le président américain, «et
rappelez-vous qu'en prenant cette
décision, vous définirez l'avenir de vos
relations avec les Palestiniens, mais
aussi le futur d'Israël. (...) Israël
est le pays le plus puissant de la
région. Israël a le soutien du pays le
plus puissant de la région... C'est à
vous d'écrire le nouveau chapitre dans
l'histoire de cette grande nation!»
Obama semble surtout avoir remis aux
Israéliens la responsabilité du
processus de paix.»(3)
Obama en «visite
touristique» en Israël
Avec son franc-parler coutumier, le
rédacteur en Chef du New York
Times,Thomas Friedmann explique pourquoi
la visite d'Obama est un non-événement
au vue de la géopolitique actuelle du
Moyen-Orient. Nous lisons: «(...) Sachez
que le président Obama se rendra en
Israël cette semaine. (...) Sans tambour
ni trompette, l'incontournable question
du conflit israélo-palestinien s'est vue
reléguée au rang de simple hobby pour
les diplomates américains. Et comme
c'est le cas pour tout hobby -qu'il
s'agisse de fabriquer des modèles
réduits d'avion ou de tricoter des pulls
-, il y a des jours où l'on s'y attelle
et d'autres pas. Cela dépend de votre
humeur et peu importe quand le pull sera
fini. Le conflit israélo-palestinien a
occupé le président au début de son
premier mandat. Puis, il s'est retrouvé
coincé lorsque les deux parties en
présence ont rejeté ses propositions, et
dès lors, il a décidé d'adopter une
attitude -parfaitement rationnelle à mon
avis -de négligence désinvolte. Et
presque personne n'a rien remarqué.»(4)
Thomas Friedman énumère ensuite les
causes de cette désaffection, pour lui,
c'est aux Chinois et aux Indiens pauvres
en pétrole de se démener pour convaincre
Israël et éviter du fait de leur
dépendance une guerre au Moyen-Orient:
«Si le conflit au Moyen-Orient n'est
plus qu'un hobby pour les Américains,
c'est essentiellement à cause de
changements structurels, notamment la
fin de la Guerre froide. Il fut un temps
où l'on redoutait vraiment qu'une guerre
israélo-arabe ne débouche sur un conflit
plus large entre grandes puissances. Ce
scénario paraît improbable aujourd'hui.
La découverte, en outre, d'immenses
réserves pétrolières et gazières aux
Etats-Unis, au Canada et au Mexique a
fait de l'Amérique du Nord la nouvelle
Arabie Saoudite. Dès lors, pourquoi
s'accrocher au vieux royaume pétrolier?
Mais même si les Etats-Unis continuent
d'importer du pétrole du Moyen-Orient,
nous ne risquons plus d'être confrontés
à une pénurie aux stations-service suite
à un embargo arabe en réaction à un
événement dans la région. Pour l'Inde et
la Chine, la situation est différente.
Pour ces puissances, le Moyen-Orient est
un ancien hobby devenu nécessité car
elles sont largement dépendantes du gaz
et du pétrole de cette région. Si
quelqu'un devait aujourd'hui se charger
de faire avancer le processus de paix
entre Israël et les pays arabes, ce sont
les ministres des Affaires étrangères
chinois et indiens.»(4)
L'auteur conclut en citant la
colonisation qui bloque toute évolution:
«Les Etats-Unis n'ont jamais eu aussi
peu besoin de faire la paix entre
Israéliens et Palestiniens, les
obstacles n'ont jamais été aussi
nombreux: près de 300.000 colons
israéliens vivent aujourd'hui en
Cisjordanie (...) Barack Obama pourrait
être le premier président américain à se
rendre en Israël comme simple touriste.
Est-ce une bonne nouvelle pour Israël?
Non. Le statu quo actuel est peut-être
tolérable pour l'Etat hébreu, mais il
reste malsain. Son maintien implique en
effet la poursuite de la colonisation et
l'annexion tacite de la Cisjordanie par
Israël ». (4)
Le lent
abandon de la cause palestinienne
Barack Obama a lentement abandonné les
convictions favorables aux Palestiniens
qu'il affichait avant d'entrer à la
Maison-Blanche et au début de son
premier mandat.
«De fait, estime Jonathan Baker, les
Palestiniens n'attendent pas grand-chose
de sa visite ce 21 mars. Pour ce qui est
d'Israël, le président américain a bien
fait savoir que son pays placerait la
sécurité israélienne au centre de toutes
les discussions qu'il aurait sur le
conflit. (...) Il suffit de prendre en
considération le temps que le président
passera de chaque côté de la barrière de
séparation. Une cinquantaine d'heures en
Israël, Quatre heures en tout et pour
tout en Palestine. En 2007, alors qu'il
était encore sénateur, il a déclaré
devant un groupe de démocrates de
l'Iowa: ´´Personne ne souffre davantage
que les Palestiniens.´´ Quand il a été
élu pour son premier mandat, il a
déclenché la colère d'Israël en
réclamant un gel de la colonisation, une
proposition qui impliquait que, pour
lui, les colonies étaient le principal
obstacle à la paix. (...) Puis,
lentement, mais sûrement, comme une
vieille peinture qui s'écaille, il a
abandonné l'une après l'autre ces
positions acceptables. Il n'appelle plus
à un gel de la colonisation, son pays
s'est opposé à un projet de résolution
du Conseil de sécurité de l'ONU sur
l'octroi du statut d'Etat à la Palestine
et a rejeté une résolution de
l'Assemblée générale sur le même sujet
en novembre dernier. Il ne manque jamais
d'évoquer le ´´lien spécial´´ des
Etats-Unis avec Israël ni leur soutien
indéfectible à ce pays.» (5)
Faut-il dissoudre l'Autorité
palestinienne? Yossi Beilin en est
convaincu. Alain Gresh qui rapporte ses
propos le présente: «Il a été l'un des
artisans de la négociation de ce qui
devait s'appeler les Accords d'Oslo.
Yossi Beilin fut aussi le signataire,
avec Yasser Abdel Rabbo, des Accords de
Genève d'octobre 2003, qui proposaient
une solution au conflit. La lettre qu'il
vient d'envoyer à Mahmoud Abbas est
d'autant plus significative. Il appelle
le président palestinien à «end this
farce» (Foreign Policy, 4 avril 2012) -
mettre un terme à cette farce des
négociations.(..) Dissoudre l'Autorité
palestinienne et donner le contrôle des
affaires quotidiennes à Israël serait
une initiative que personne ne pourrait
ignorer. (6)
Pour sa part, Ami Ayalon, ancien
directeur du Shin Bet, le service de
renseignements israélien, donne ses
conseils à Obama. Promoteur d'un plan de
paix israélo-palestinien il propose
qu'Israël se retire des territoires
occupés. Il déclare: «(...) Nous
comprenons aujourd'hui que le maintien
du statu quo risque de nous entraîner
dans l'abîme et nous sommes conscients
des douloureuses concessions que nous
devrons faire pour nous en éloigner. Il
faut qu'on nous montre clairement que le
chemin sera long et ardu, mais que nous
nous préparons un avenir meilleur en
l'empruntant. (...)le président
américain devrait clairement adhérer aux
principes suivants: deux Etats-nations
seront établis sur la base des
frontières de 1967 pour accueillir les
deux peuples; des échanges de territoire
équivalents seront organisés pour
permettre aux blocs de colonies [en
Cisjordanie] de demeurer sous
souveraineté israélienne; Jérusalem sera
une ville ouverte, capitale des deux
Etats; les quartiers arabes seront
placés sous souveraineté palestinienne
et les quartiers juifs, sous
souveraineté israélienne; un régime
spécial sera mis en place pour
l'administration et la garde des Lieux
Saints; l'Etat palestinien sera
démilitarisé et la communauté
internationale garantira sa sécurité;
les réfugiés palestiniens seront
autorisés à revenir sur le territoire
palestinien ou à émigrer vers des pays
tiers et se verront offrir un
dédommagement; toutes les parties
devront signer une déclaration de fin de
conflit. (7)
En appelant ´´les Palestiniens à
reconnaître qu'Israël (serait) un Etat
juif´´ et les Israéliens qu'´´une
Palestine indépendante (devait) être
viable´´ Obama va au-devant des
espérances des Israëliens. Pour rappel,
Obama réinsère ´´Jérusalem capitale
d'Israël´´ dans le programme démocrate
en septembre 2012. De plus, accepter qu'Isräel
soit un Etat juif, c'est à terme reposer
le problème des arabes israéliens
-chrétiens et musulmans- qui n'auraient
plus vocation à vivre dans un Etat
aseptisé, un Etat «élu». Nous serons
alors en présence d'une autre Nekba pour
ces Arabes israéliens. C'est de notre
point de vue un discours de prudence qui
n'apporte rien au contraire, il conforte
Israël dans sa vision du «Grand Israël».
Pour rappel encore, la déclaration de
Riyadh proposait la reconnaissance
d'Israël et posait comme seule condition
l'application des résolutions de l'ONU,
notamment celles du 22 novembre 1967. Il
est vrai que la gabegie règne de l'autre
côté palestinien, d'ailleurs, le
quotidien israélien Yediot Aharonot a
demandé au président américain de ne pas
se rendre dans les Territoires
palestiniens, dirigés par un autocrate
corrompu et où manuels scolaires et
émissions de télévision perpétuent les
clichés antisémites. Les aides versées
par les Etats-Unis et par d'autres pays
au gouvernement Abbas, tant qu'il se
déclare en faveur de la paix, lui
permettent de se maintenir en place
artificiellement.
On le voit, le monde occidental laisse
la bride sur le cou à Israël qui
poursuit son chemin, la disparition
inexorable du peuple palestinien en tant
que nation. Il restera des confettis de
territoires non viables Un siècle de
combat se solde par la disparition d'une
utopie. Peut-être qu'il faille revenir à
la solution à un Etat avec des citoyens
juifs chrétiens et musulmans et autres
avec une égale dignité.
1. http://dafina.net/gazette/article/lop%C3%
A9ration-s%C3%A9duction-dobama-en-isra%C3%ABl
2
http://jssnews.com/2013/03/21/discours-integral-et-en-francais-de-benyamin-netanyahu-devant-barack-obama-20032013/
3.
http://www.lefigaro.fr/international/2013
/03/21/01003-20130321ARTFIG00700-le-plaidoyer-d-obama-pour-la-paix.php
4. Thomas Friedman
http://www.courrierinternational.com/article/2013/03/20/obama-en-visite-touristique-en-israel
5. Jonathan Baker
http://www.courrierinternational.com/article/2013/03/21/avec-obama-les-espoirs-restent-limites
6. Alain Gresh - Le Monde diplomatique.
Yossi Beilin: En finir avec «la farce»
des négociations de paix Le Monde.fr
16/04/2012
7 Ami Ayalon
http://www.courrierinternational.com/article/2013/03/14/conseils-pour-obama
Professeur Chems Eddine Chitour
Ecole Polytechnique enp-edu.dz
Publié le 23 mars 2013 avec l'aimable
autorisation de l'auteur
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