La Voix de la Russie
L'Iran, le Hamas
et le Hezbollah désunis
sur la menace israélienne
Boris Pavlichtchev
Mahmud al-Zahar
- Photo: EPA
Jeudi 13 septembre
2012 Il y a quelques années, l’Iran
réservait un accueil chaleureux au
chef du mouvement radical
palestinien Hamas dans la bande de
Gaza, Mahmoud al-Zahar. Mais
maintenant, il est reçu avec une
certaine froideur, malgré le sourire
et l’étreinte du président Mahmoud
Ahmadinejad. La délégation d’al-Zahar
est arrivée à Téhéran après une
rencontre avec Hassan Nasrallah, le
chef des chiites du Hezbollah à
Beyrouth.
Al-Zahar a affirmé
qu’en cas d'attaque israélienne,
Téhéran ne resterait pas sans
réaction. Israël se heurtera à la
résistance coordonnée d'un front uni
comprenant l'Iran, le Hamas et le
Hezbollah. Un homme serait prêt à
assumer le rôle de coordonnateur. Il
s’agit du chef adjoint de la branche
militaire du Hamas, Marwan Issa, qui
s'est rendu à Téhéran avec Al-Zahar.
En effet, il existe des divergences
sur le conflit en Syrie, a rappelé
le chef des extrémistes. Certains
prennent leurs distances vis-à-vis
de Bachar Al-Assad, certains prônent
le renforcement des relations avec
les monarchies du Golfe. Mais toutes
ces nuances n’empêchent pas la
création de « forces de résistances
islamique » unies, alors que la
région se trouve au bord de la
guerre.
Cependant,
Ahmadinejad et son entourage
politique sont restés indifférents
face à cette idée tentante, à
première vue. Ils ne croient pas en
un « front uni » , explique le
professeur du Département des études
orientales de l’Institut d’Etat des
relations internationales de Moscou
(MGIMO) Sergueï Droujilovski.
«
Je ne pense pas qu’une coordination
aura lieu, et comment imaginer
techniquement cette coordination ?
La frappe sera massive, et dirigée
principalement contre les terminaux
électroniques, les réseaux de
communication, notamment la fibre
optique. Je ne pense pas qu’il y
aura une frappe coordonnée. Ils vont
agir chacun séparément et à leurs
risques et périls ».
Hamas, même s’il est
représenté par des sunnites, n’est
qu’une copie de l’Iran chiite, son
avant-poste. Alors pourquoi Téhéran,
ne miserait-il pas sur Hamas dans
les moments difficiles ? Surtout que
son autre allié, Bachar al-Assad, se
trouve actuellement dans une
situation difficile ? La période
d'euphorie au sujet de la création
d'un front anti-israélien uni est
déjà révolue en Iran, explique le
président de l’Institut de
Moyen-Orient Evgueni Satanovski.
«
Il s'est avéré que le Hamas possède
des capacités très limitées pour
influencer Israël. Pour détruire
toute la puissance militaire du
Hamas dans la bande de Gaza, une
division israélienne, accompagnée
des services de renseignement et de
l’aviation auraient suffi. C’est
exactement ce qu’a montré la guerre
de Gaza des années 2008-2009.
L’allié était faible, divisé en
factions, et dépendant d'Israël et
de l'Egypte. Et tout cela, sachant
qu'Israël est l’ennemi mortel de
l'Iran. En conséquence, la fiabilité
du Hamas en tant qu’allié a
sensiblement baissé aux yeux de
Téhéran, ce qui a été démontré par
ses dirigeants ».
L'expert attire
l'attention sur la situation dans la
bande de Gaza, contrôlée par le
Hamas. Le nouveau président égyptien
Mohammed Morsi a repris le contrôle
de la frontière de l'Egypte avec la
bande de Gaza, après avoir bloqué
les tunnels, par lesquels
s’effectuait la contrebande. Ce qui
a affaibli les militants du Hamas,
qui assuraient leur train de vie
quotidien principalement grâce à
cette contrebande. Et ils ne peuvent
pas redresser l’économie de la
région, tout comme donner du travail
aux 50 000 Palestiniens qui étaient
employés dans les colonies juives
avant leur retrait de la bande de
Gaza.
«
Le fait de présenter le Hamas comme
un atout dans les relations avec
l’Iran a pour objectif obtenir de
l’argent de Téhéran »,
poursuit Evgueny Satanovski. «
Mais l'Iran, en raison de la crise
et des coûts de l’aide accordée à la
Syrie, ne mettra pas la main au
porte-monnaie, car il ne juge pas
cela utile. En conséquence,
l’accueil que Mahmoud al-Zahar a
reçu à Téhéran correspond
entièrement aux possibilités du
Hamas ».
Les Iraniens ne sont
pas susceptibles de pardonner au
dirigeant du Hamas Khaled Mechaal le
rapprochement avec le Qatar et la
rupture complète des relations avec
Bachar al-Assad. Récemment, Gaza a
reçu en cadeau de la part du
gouvernement du Qatar la somme de
200 millions de dollars. Cet argent
a vite disparu sur son territoire.
Et l’aide de Téhéran s’est alors
complètement arrêtée. A la place du
Hamas, l’Iran aide un autre groupe
dans la région : le Djihad
islamique. Actuellement, les
djihadistes sont beaucoup mieux
armés que les membres du Hamas.
Si la guerre avec
l’Iran est inévitable, quelle
attitude adopteront alors le Hamas
et le Hezbollah ? L'expert admet
qu'ils pourraient frapper l’Israël
par l’arrière. Certes, cela serait
une décision suicidaire, parce
qu'Israël pourrait commencer à
détruire physiquement leurs
dirigeants. Cheikh Nasrallah, Khaled
Mechaal, Mahmoud al-Zahar et Ismaël
Haniyeh, les dirigeants du Hezbollah
au Liban et du Hamas dans la bande de
Gaza, n'ont pas oublié qu'en 2004 des
missiles israéliens ont tué le fondateur
du Hamas Cheikh Ahmed Yassine. Et ils ne
ressemblent pas aux kamikazes, qui sont
prêts à se sacrifier pour le salut de
l’Iran, conclut l’expert.
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