De ferventes manifestations de soutien aux
habitants de la bande de Gaza se succèdent, en Turquie (sur les
pancartes : « Les
diplomates sionistes : dehors ! » «Non, le
peuple palestinien n’est pas seul ! »).
on BBC News, 17 février 2009
http://news.bbc.co.uk/2/hi/middle_east/7895485.stm?lss
Lors d’une réunion, ce week-end, à
Istanbul, deux-cents théologiens et clercs musulmans ont
rencontré de hauts responsables du Hamas afin de mettre au point
une nouvelle guerre sainte (jihâd) focalisée sur la bande de
Gaza.
Bill Law, de la BBC, était le seul
journaliste occidental présent. Dans une salle (d’un hôtel
proche de l’aéroport Atatürk d’Istanbul) bondée de cheikhs
musulmans sunnites conservateurs et de chercheurs en théologie,
les orateurs qui se sont succédé à la tribune ont lancé des
appels à la guerre sainte, contre Israël et en soutien au Hamas.
Le choix de la Turquie, pour ce conclave,
était hautement significatif : les Arabes de la ligne dure
tenaient à montrer ainsi qu’ils tenaient à mettre de côté leurs
différends historiques avec les Turcs.
Comme l’a résumé un des organisateurs de la
conférence : « Durant les cent années écoulées, nos relations
ont été généralement tendues. Mais la Palestine nous a
réconciliés… »
Beaucoup de délégués ont exprimé leur haute
appréciation de la protestation du Premier ministre turc Recep
Tayyip Erdoğan, qui (comme on le sait) a claqué la porte (au nez
de Peres) lors d’un débat consacré à la situation de Gaza lors
du sommet mondial de Davos (Suisse), il y a une quinzaine de
jours.
« En aplanissant nos différents, Gaza nous
donne de la force…
La Palestineest un théâtre d’opérations légitime pour le jihâd ».
Mohsen al-Awajy, théologien saoudien
La conférence, baptisée « Campagne
anti-agression planétaire » a également donné du peps à des
clercs sunnites préoccupés par la montée en puissance du
Hezbollah, ce mouvement shiite soutenu par l’Iran, qui s’est
hissé à la prééminence internationale durant sa propre guerre
avec Israël, en juillet 2006.
« Gaza est un cadeau », m’a dit le
théologien saoudien Mohsen al-Awajy. A l’instar d’autres
délégués à la conférence, il a qualifié la guerre de Gaza de
« victoire » pour les Palestiniens, de manière insistante.
« Gaza », a-t-il poursuivi, « nous donne de
la force ; Gaza aplanit nos différends. Nous sommes tous unis,
aujourd’hui, dans un seul front contre le sionisme ».
Lors de débats à huis clos, à la suite des
sessions, les délégués se sont concentrés sur la création d’un
« troisième front jihâdiste » - les deux premiers fronts étant
ceux de l’Afghanistan et de l’Irak. L’intensité de l’agression
militaire israélienne a « réveillé tous les musulmans », a
affirmé M. Awajy.
« La Palestine est un théâtre d’opérations
légitime pour le jihâd (la guerre sainte) », a-t-il ajouté.
La
voie vers la libération
Mohammad Nazzal, un haut dirigeant du Hamas
basé à Damas, a mis les gouvernements arabes au défi d’ « ouvrir
leurs frontières et de permettre aux combattants de venir [à
Gaza] ».
Des délégués de tous les pays du
Moyen-Orient, ainsi que de Somalie, du Soudan, du Pakistan et de
l’Indonésie, ont applaudi tandis que M. Mohammad Nazzal levait
un doigt (vers le ciel), en déclarant : « Il n’y aura jamais
aucun accord avec Israël… seules, les armes sont en mesure
d’imposer le respect ».
M. Nazzal a donné ce conseil à son
auditoire : « Ne soyez pas effrayés par les pertes humaines ».
Les vingt-trois jours de bombardements
israéliens incessants sur la bande de Gaza, qui ont causé la
mort de 1 300 personnes, très majoritairement des civils, dont
près de 300 enfants, n’étaient que « le commencement » de la
lutte, a dit M. azzal.
Suscitant la joie de l’assistance, un autre
orateur a relevé que durant la guerre, deux fois plus de bébés
étaient nés que les sionistes n’en avaient assassinés.
Chaque mort [tombés durant ce calvaire
palestinien] était la mort d’un martyr pour la libération.
Pour les cheikhs de la ligne dure, ce fut
une occasion de souligner ce qu’ils considèrent être un gouffre
croissant entre les régimes « arabes », réticents à soutenir le
Hamas, et les peuples de la région, qui, affirment-ils,
soutiennent le Hamas en qui ils voient des héros menant un
combat contre une adversité (apparemment) écrasante.
Mais il y a plus important : cette
conférence a été un véritable coup de maître, pour le Hamas,
auquel on a promis des armes, de l’argent, et des combattants.
Demeure pendante la question de savoir si
une telle rhétorique va (ou pourra) se traduire en action
concrète. Israël maintient un blocus hermétique contre la bande
de Gaza, où le Hamas exerce un contrôle
de facto, et les
autres frontières d’Israël sont tout aussi lourdement gardées.
Mais cette déclaration d’intention des sunnites radicaux ne
laisse pas de représenter de nouveaux défis, non seulement pour
les gesticulations israélo-occidentales en vue de sortir du
chapeau un « accord de paix », mais aussi pour les régimes
(dits) « arabes »…
TTraduit de l’anglais par Marcel Charbonnier