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Washington et
Moscou, parviendront-ils finalement au redémarrage ?
Andreï Fediachine
Photo: RIA Novosti
Mercredi 14 octobre 2009 Notre "redémarrage" avec les
Etats-Unis s'effectue tout de même très lentement. La récente
visite de la Secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton à
Moscou en est une illustration éloquente. D'ailleurs, c'était sa
première visite en Russie en sa qualité de chef de la diplomatie
et, en fait, elle n'a apporté rien de foncièrement nouveau.
Comme cela a été déclaré, les négociations sur un nouveau
traité START se poursuivent et les parties espèrent même
conclure une sorte de nouvel accord cadre sur la réduction des
ogives nucléaires stratégiques vers le 5 décembre prochain, date
de l'expiration du traité START-1. Compte tenu des problèmes de
la concertation sur le nombre de vecteurs de chaque partie, on a
peine à y croire. Bien que, d'autre part, il ne reste pas
beaucoup de choses à concerter et, si les Américains sont prêts
à accepter les propositions russes (environ 500 vecteurs de part
et d'autre), le traité peut effectivement être techniquement
rédigé.
Dans chaque visite des Américains à Moscou, l'essentiel est
toujours non pas ce qu'ils ont apporté, mais ce qu'ils n'ont pas
pris avec eux. Sous George W. Bush et sa Secrétaire d'Etat
Condoleezza Rice, ce "panier" était toujours plus qu'à moitié
vide. Sous Obama et Hillary Clinton, il est "rempli" un peu plus
qu'à moitié. Certes, c'est un progrès par rapport à l'époque
Bush, mais c'est insuffisant pour tomber dans une "euphorie de
redémarrage".
Clinton n'a pas apporté l'essentiel : les projets plus ou
moins précis d'Obama de remplacer le bouclier antimissile de
Bush en Pologne et en République tchèque par le bouclier d'Obama
en Europe du Sud, de l'Est et du Nord. Il est vrai que même le
Pentagone n'a pas une idée claire de ces projets, en
reconnaissant qu'ils doivent être étudiés et concrétisés. En
échange de ces projets qui ne sont pas encore réalisés, qui sont
incompréhensibles et qui n'ont pas encore été expliqués à Moscou
du point de vue géostratégique, les Etats-Unis souhaitent déjà
recevoir du Kremlin des concessions importantes sur le deuxième
sujet important de l'agenda de nos rapports : les sanctions à
l'encontre de l'Iran et de son programme nucléaire.
Pour la Russie, accepter ces sanctions signifie anéantir ses
contacts économiques et commerciaux assez larges avec l'Iran et,
ce qui peut être encore plus dangereux, avoir des ayatollahs
indignés dans le Sud, dans la région proche de la "zone
musulmane" de la Russie. Certains ont tort de douter que l'Iran
musulman puisse exercer une influence sur les républiques
musulmanes de la Russie. La Chine, dont les contacts commerciaux
avec l'Iran sont bien plus vastes que ceux de la Russie, se
prononce toujours fermement contre les sanctions.
La réponse de Sergueï Lavrov, au cours de la conférence de
presse commune avec Hillary Clinton, à la question ayant trait à
la défense antimissile donne à penser qu'on cache de nouveau
quelque chose à Moscou. Sergueï Lavrov a déclaré que les
nouveaux projets de Washington concernant la défense antimissile
n'étaient pas les idées communes des Etats-Unis et de la Russie,
mais qu'ils avaient été élaborés bel et bien par des experts de
l'administration du président américain Barack Obama.
En général, de nombreux experts estiment maintenant que le
nouveau système de défense antimissile américaine en Europe n'a
de sens que dans le seul cas où Israël porterait tout de même un
coup préventif aux sites nucléaires iraniens. On ne voudrait
certes pas faire des prévisions apocalyptiques, mais, compte
tenu du caractère ardent de ceux qui détiennent le pouvoir en
Iran, il n'est pas exclu qu'il puisse, en réponse , lancer ses
missiles dans toutes les directions.
Le vice-ministre israélien de la Défense Efraïm Sneh a haussé
les mises concernant les sanctions contre l'Iran, en déclarant
qu'Israël pourrait soumettre les usines nucléaires de l'Iran à
Qom, pas loin de Téhéran, aux bombardements aériens après Noël,
c'est-à-dire après le 25 décembre.
La réponse des Iraniens a été bien prévisible. Mojtaba Zolnur,
représentante d'Ali Khomenei dans la Garde révolutionnaire de
l'Iran, a déjà affirmé après la déclaration du vice-ministre
israélien : "Si ne serait-ce qu'un seul missile américain ou
sioniste tombe sur notre pays, avant que la poussière se dépose,
les missiles iraniens détruiront le coeur d'Israël".
Toutes ces déclarations sont naturellement faites en vue de
faire pression diplomatique sur Téhéran, la Russie et la Chine.
La menace de la punition israélienne de Téhéran pour sa bombe
devrait amener la Russie et la Chine à prendre des sanctions,
sinon � Mais Moscou et Pékin sont certains que les moyens
diplomatiques sont loin d'être épuisés.
En principe, notre approche du problème nucléaire de la Corée
du Nord est semblable à celle des Etats-Unis, nous intensifions
notre coopération sur l'Afghanistan. Le corridor nécessaire pour
faire parvenir les cargaisons militaires en Afghanistan via la
Russie s'élargira. En outre, Moscou insiste sur son accès à la
recherche des moyens de régler le problème afghan dans le cadre
de l'Otan, et elle l'aura probablement. A en juger par la visite
d'Hillary Clinton, l'Iran et le bouclier antimissile restent les
principaux problèmes dans nos rapports. L'essentiel est de
savoir combien cela durera. Nous nous trouvons en état de
"semi-redémarrage" déjà depuis 8 mois qui ont suivi son annonce
en mars. Bien entendu, cela ne peut durer longtemps.
En fin de compte, la patience d'une des parties viendra à
bout. Pour l'instant, il semble que le "redémarrage" né, si l'on
s'en souvient, avec une faute linguistique (en mars dernier,
Hillary Clinton a offert à Sergueï Lavrov le fameux bouton
symbolique avec l'inscription "redémarrage") ne s'
apprête nullement à en devenir une correction active.
Parfois, il semble même que Washington interprète ce terme
autrement que la Russie et qu'il attend de Moscou non pas le
"redémarrage", mais une "nouvelle orientation".
Ce texte n'engage que la responsabilité de l'auteur.
© 2008 RIA Novosti
Publié le 15 octobre 2009
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