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Mohammed Fadalallah s'adresse aux
musulmans français
Alain Gresh
1er juillet 2008 Un des
principaux dignitaires chiites au Liban, l’ayatollah Mohammed
Fadalallah (considéré comme une référence religieuse par le
Hezbollah, mais qui garde une autonomie vis-à-vis de cette
organisation et vis-à-vis du pouvoir iranien), s’est adressé aux
« six millions de musulmans français » dans un texte non
daté reproduit le site de l’agence de presse nationale libanaise
le 29 juin 2008.
Son discours fait référence aux élections au Conseil français
du culte musulman qui se sont déroulées le mois dernier, aux
divisions au sein des communautés musulmanes, et insiste sur
l’importance de l’existence d’un cadre légal d’expression des
musulmans de France. Il dénonce les ingérences Etats étrangers
musulmans en France (sans les nommer).
« Premièrement, les intérêts des musulmans doivent être
fixés par les musulmans eux-mêmes, et pas par un Etat étranger.
Car aussi important que soit l’intérêt de ces Etats pour les
problèmes des musulmans, l’ingérence ne peut conduire – et c’est
ce qui est arrivé – à des divisions douloureuses qui paralysent
la communauté musulmane et la détourne des questions
principales. Cela favorise l’infiltration de nombre de forces et
de personnes qui font du tort aux intérêts des musulmans
français. C’est pourquoi les fractions conscientes et sincères
de la communauté musulmane de France doivent s’efforcer par tous
les moyens de surmonter les répercussions des fortes dissensions
dans les organismes qui représentent les musulmans, car ces
dissensions menacent les intérêts de la communauté et conduit à
des conflits internes, au moment où le besoin d’unité est
crucial, notamment face à la féroce offensive contre l’islam en
Europe. »
« Deuxièmement, les musulmans français doivent agir en
conformité avec leur citoyenneté française et vivre pleinement
comme les autres citoyens français, tout en affirmant leur
identité islamique. Il n’y a pas de contradiction entre les deux
sphères, sinon dans l’esprit de certaines personnes. Aussi, les
préoccupations et les problèmes des musulmans français sont
inséparables des préoccupations et des problèmes des Français.
Leurs problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels
sont presque les même. Il faut donc accorder à ces problèmes de
l’importance et proposer des solutions conformément au principe
que les musulmans sont des citoyens français et qu’ils sont
concernés au même titre que leurs compatriotes par les mêmes
problèmes. C’est pour quoi ils doivent définir leurs
revendications comme des revendications qui servent les intérêts
du peuple français et mettre en avant leur appartenance à la
communauté nationale. Ils doivent aussi s’ouvrir, d’un point de
vue musulman et humaniste aux causes musulmanes et humaines en
dehors de la France. »
« A partir de ces prémices, c’est le devoir des musulmans
français de participer effectivement à influer non seulement sur
la politique intérieure, mais aussi sur la formulation de la
politique générale extérieure et pousser à ce que l’activité de
la France reflète la profondeur de ses valeurs humanistes,
notamment la liberté et la justice pour les nations, valeurs
qu’a défendues la Révolution française. »
« Nous appelons les musulmans français à trouver une
formule appropriée qui leur permette de jouer un rôle influent
dans la politique française, fondée sur le respect des lois
françaises. Cela est juste et légal. Près de 6 millions de
personnes ne peuvent rester sur les bas côtés de la France, car
cela créerait des problèmes inutiles. »
« En conclusion, dans ce contexte nous ne nous plaçons pas
d’un point de vue confessionnel, nous ne voulons pas provoquer
les sentiments des gens, et nous gardons à l’esprit que la
France est catholique dans son coeur, en dépit de ses
déclarations sur la laïcité. Ce qui nous préoccupe, c’est la
question de l’égalité des droits et des devoirs. Nous sommes
tristes des conditions difficiles que connaît la communauté
musulmane du fait de la propagande sioniste qui, sans aucune
entrave, déforme l’image des musulmans et complique ainsi leurs
problèmes. Les musulmans ont été injustement accusés d’être
engagés dans la violence et parfois dans le terrorisme, d’être
arriérés et d’être des sauvages pour les autres, malgré le fait
que, du fait de son nombre, ils sont la deuxième communauté
(religieuse) de la France. Alors que nous appelons le
gouvernement à prendre ses responsabilités en la matière, nous
appelons de manière similaire les musulmans à corriger l’image
qu’on donne d’eux en montrant autant que possible les
particularités de leur identité culturelle, civilisationelle et
humaniste. »
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