Opinion
La priorité de
Morsi
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 16 septembre
2012
Chaque jour
qui passe confirme le rôle instrumental
des Frères musulmans, au service de
recolonisation de la région. Empêtré
jusqu'au cou dans une profonde crise,
économique, sociale, politique, le
président égyptien, Mohamed Morsi,
contre toute attente, ne rate aucune
occasion de montrer sa priorité de
l'heure, qui est celle des pays de
l'OTAN : travailler à l'effondrement de
l'Etat syrien. Après avoir fait taire
les télévisions syrienne sur Nilesat,
pour laisser le champ libre à Aljazeera,
Alarabiya et consorts, il vient de
déclarer qu'il était d'accord avec le
président de la commission européenne
qui a déclaré que "Assad ne mérite pas
de rester président de la Syrie". Morsi
invite le Syrien à "tirer les leçons de
l'histoire récente". Suggérant qu'il
fait partie de cette histoire récente.
Alors que ceux qu'il courtise et pour
qui il fait tout ce qu'il faut en termes
de compromission et de servilité, ne lui
rendent pas la pa-reille ; il en est,
aussi bien, du maître adulé, le Potus
Barack Obama, que de l'un de ses
subalternes, Laurent Fabius, le ministre
français des affaires étrangères. Le
premier, sans le moindre égard
diplomatique, considère que l'Egypte
n'était pas un allié et y va de ses
mises en garde. Il constate, du haut de
sa puissance, qu'il y a "un nouveau
gouvernement qui tente de trouver sa
voie", tout en menaçant qu’il se posera
un "un vrai gros problème" s'il "ne
prend pas ses responsabilités". Vient
ensuite l'outrecuidance de Fabius qui
dit qu'il dira à Morsi: "La France aide
au développement des libertés mais en
même temps, il faut marquer les lignes
rouges : respect des droits de la
personne humaine, des femmes, de la
vie". Morsi n'en a cure, le peut-il ? Le
veut-il ? Il n'avalera même pas sa
dignité, puisqu'il devrait en avoir une
pour que cela soit possible. Il accepte
ce qui n'est pas un affront, de son
point de vue de candidat à l'allégeance
reconnue, difficile à obtenir. Il
baissera les yeux, arborera son éclat de
rire à la commande, acquiescera autant
qu'il sera nécessaire, devancera
l'appel. Pourvu qu'il soit un jour dans
les bonnes grâces occidentales. Et avec
ce profil, il serait en voie de faire
revenir l'Egypte dans l'échiquier de la
région. C'est, en tous les cas, ce qu'il
déclare, à qui veut l'entendre et croire
qu'avec la situation dans laquelle se
débat l'Egypte, il soit possible d'avoir
autant de prétention. A moins de jouer
au dernier violon, derrière les
monarques, et si la baguette du chef
d'orchestre veut bien l'activer. C'est
bien le rôle qui a dû lui être imparti,
qui fera reculer son pays encore plus au
fond de la scène régionale, avec en
contrepartie la promesse d'un soutien,
toutefois conditionné, au maintien des
Frères contre le bouillonnement de la
rue égyptienne qui enfle. La partie sera
d'autant plus serrée si c'est l'autre
face du pouvoir étatsunien qui
s'installe à la Maison Blanche. Mitt
Romney, le candidat républicain, croit
que "l'Egypte doit comprendre qu'elle
doit honorer son traité de paix avec
Israël". On n'en saura pas plus. Les
détails seront donnés, en privé, au
Frère qui sera, certainement, aux ordres
et qui dévoilera sans doute le degré de
soumission qui lie la confrérie aux
décideurs de Washington.
Article publié sur
Les Débats
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