Opinion
Turpitudes d'un
dirigeant «provisoire»
Ahmed
Halfaoui
Béji Caïd
Essebsi
Mardi 6
septembre 2011
Dommage
qu'aucune enquête ne sera faite auprès
des citoyens ordinaires, pour nous
éclairer sur ce qu'ils pensent des
déclarations de leurs dirigeants et
accessoirement des journalistes à la
plume choyée par les «grands médias». Il
n'y en aura pas, parce que ceux qui
enquêtent d'habitude, pour un oui
ou pour un non, n'ont pas envie que cela
se sache. Il y a deux ou
trois jours les Tunisiens ont dû écouter
interloqués leur Premier ministre
provisoire, M. Béji Caïd Essebsi,
s'extasier devant la «révolution»
de l'OTAN en Libye. Ils ont dû constater
qu'ils n'ont pas sa lucidité, ni sa
perspicacité. Il est d'abord satisfait.
Cela le regarde. Ensuite, il a un
jugement que même ses interlocuteurs du
CNT/OTAN, ni l'OTAN, ni personne n'ont
pu avoir. Il y va tout de go et parle de
la «victoire» qui «ne peut être
remportée par quiconque, dans les mêmes
conditions et dans un délai relativement
court».Le vis-à-vis a dû comprendre que
le vieux monsieur se payait sa tête en
voulant trop en faire. Du moins, c'est
ce que n'importe quel individu, dans sa
situation, aurait dû penser. Mais,
concrètement, BCE voulait expressément
forcer le trait, allant au-delà de
l'obséquiosité, quand on ne lui en
demandait pas tant. Lui qui, en
principe, n'est là que pour garder la
maison, le temps que la souveraineté
populaire décide de qui va décider de ce
que doit faire l'Etat tunisien. Passons.
Parce qu'il y a autre chose de bien plus
important, touchant à la vie d'une
population qui attend patiemment que les
investisseurs et autres hommes
d'affaires, promis par BCE, viennent
«soutenir la révolution». Sur ce plan le
Premier ministre d'un temps a plastronné
durant des mois, visitant les «grands de
ce monde», engrangeant les promesses,
insultant les «extrémistes» et faisant
croire que les problèmes étaient partis
avec M’BAZA, quand ces problèmes
s'aggravaient parce que leurs causes
n'ont jamais été visitées. Comme si
M’BAZA était le système à lui tout seul.
Dans ce cas, il doit recevoir des
lauriers puisque depuis sa déchéance, la
Tunisie, à ce qu'on dit, perd 30.000
emplois par mois et que 25% de la
population vit en dessous du seuil de
pauvreté, alors que sous son règne ils
n'étaient que seulement 4%. BCE répond
que ce sont les révolutionnaires (lui
parle de contre révolutionnaires) qui
font peur aux investisseurs
internationaux. Ceux-ci préférant des
lieux plus cléments pour leurs profits.
Entendre par là que le système Ben Ali,
qu'on ne cite pas, avait du bon, donc
doit être recyclé. Paix sociale absolue,
pas de grèves, pas de revendications,
pas de syndicats, liberté totale des
entreprises et le tour est joué. Tout ce
contre quoi les jeunes sont sortis se
révolter. BCE se garde bien d'ouvrir un
débat sur la chose et envoie, à chaque
fois que nécessaire, la troupe répondre
aux citoyens mécontents, quitte à
allonger la liste des morts. C'est qu'il
n'est pas question d'ouvrir d'autres
alternatives que celle qui a été
programmée, malgré le fait que l'argent
ait désormais peur de s'investir, malgré
l'impasse qui se dessine, malgré le fait
que basculent, dans l'extrême précarité,
des Tunisiens de plus en plus nombreux.
Article publié sur
Les Débats
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