Al-Quds Al-Arabi
Des
milliards pour liquider la résistance
Abd-el-Bari Atwan
19/12/2007
Al-Quds
Al-Arabi
Les pays donateurs qui ont participé à la conférence de
Paris la veille, ont promis d’apporter à l’Autorité
Palestinienne des aides financières qui s’élèvent à sept
milliards et demi de dollars. Soit deux milliards de plus que ce
qu’elle réclamait dans un élan de générosité qui suscite
beaucoup de doutes, et soulève des points d’interrogation sur
ces aides et sur le prix qu’aura à payer le peuple palestinien
en échange.
Il n’y a pas d’objection sur une offre d’argent à
l’autorité du Président Mahmoud Abbas à Ramallah, à
condition que ce ne soit pas un pot de vin en échange des
concessions sur des droits immuables du peuple palestinien, ou le
début d’une incursion d’envergure des chars israéliens dans
la bande de Gaza pour y commettre de nouveaux massacres sous prétexte
de liquider l’autorité de Hamas ou de stopper le tir des
roquettes contre Sdérot.
Israël sera le grand bénéficiaire de cet argent que ce soit
directement ou indirectement. Car il contrôle de facto la
Cisjordanie et il encercle la bande de Gaza. Et ces deux régions
forment un marché prospère pour ses marchandises et sa
production. Par conséquent, toute amélioration économique dans
ces régions signifie plus de consommation et plus d’importation
de ces produits. De plus, ceci implique que les pays donateurs
sont en train d’affranchir l’état d’Israël de ses devoirs
en tant que pays occupant responsable directement de la population
et des territoires sous son contrôle, selon la quatrième
convention de Genève à propos des prisonniers de guerre, une
responsabilité qui inclut d’assurer des services publics, la sécurité
et du travail.
Ces aides financières iront au Président Abbas et pur
financer un plan élaboré par son premier ministre Salam Fayyad
qui a été désigné pour une période provisoire et
exceptionnelle, et voilà qu’il devient un premier ministre
permanent, voire plus puissant et plus influent que le président
de l’autorité vu ses solides relations avec l’administration
américaine, les états européens et les organisations financières
internationales.
Le plan de M. Fayyad qu’il a présenté à la conférence des
pays donateurs et qui a porté le nom du développement et de la réforme,
ce plan vise la réalisation de quatre objectifs principaux qui
sont la gouvernance bien guidée, le développement social (la
santé, l’enseignement et les affaires sociales), le soutien du
secteur privé et finalement la reconstruction des infrastructures
de l’économie palestinienne.
La gouvernance bien guidée signifie l’établissement de l’état
d’institutions sur des fondements démocratiques et l’élargissement
du cercle de participation au pouvoir. Mais nous ne pensons pas
que les pratiques du gouvernement de Ramallah concrétisent ces
ambitions. Car M. Fayyad est devenue une institution par soi-même
bien qu’il ne représente qu’un groupe de deux membres parmi
cent trente cinq membres de l’assemblée législative
palestinienne, et son gouvernement n’a même pas été agréé
par cette assemblée ni pas aucune autre institution sauf le Président
Abbas et l’administration américaine, si on veut bien considérer
cette dernière comme ainsi [comme une institution palestinienne].
Et comment cette gouvernance pourrait être bien guidée alors
qu’elle ignore complètement la bande de Gaza qui représente
tout de même le tiers de la population totale de l’intérieur
[de la Palestine], et elle désigne les habitants de cette bande
comme des Gazaouites tandis qu’elle considère les habitants de
la Cisjordanie comme de vrais citoyens palestiniens, ce qui est
une discrimination sans précédent dans l’histoire de peuple
palestinien et de sa lutte ?
Dans tous les états du monde, le gouvernement retient les
salaires des fonctionnaires qui s’absentent ou qui font grève,
sauf le gouvernement de M. Fayyad qui fait exactement le
contraire. Car il paye les salaires des fonctionnaires qui restent
chez eux et ne vont pas faire leur travail dans les services de
l’Autorité dans la bande de Gaza, et tout fonctionnaire qui va
à son bureau ou qui laisse pousser sa barbe voit sa paye immédiatement
coupée par ce gouvernement, même si ce fonctionnaire fait partie
de Fatah. Où elle est la bonne gouvernance dans ces pratiques ?
Et ce qui est remarquable c’est que le plan de M. Fayyad
demandait des pays donateurs de réserver un montant de quatre
cents millions dollars pour le programme de la gouvernance bien
guidée contre cinq cents millions dollars pour les programmes
sociaux comme l’enseignement, la santé et les services
essentiels.
Même si on suppose que ce gigantesque pot de vin n’est pas
miné et ne contient aucune condition, comment va-t-il donner ses
fruits en relevant l’économie palestinienne de sa chute
actuelle sous les contraintes imposées par l’Autorité
Palestinienne sur les Palestiniens et leurs mouvements en
Cisjordanie, comme la présence des cinq cents barrières et les
cent trente colonies sauvages autres que les colonies « légales »
établies par le gouvernement israélien ?
Cet argent sera réservé à un groupe très limité parmi les
baleines du secteur privé et quelques-uns qui rodent autour du
bureau du Président Abbas et qui profite de son pouvoir. Mais les
autres du peuple palestinien ne verront leurs conditions changer,
car ne reste pour eux que les miettes.
Cet argent est attribué théoriquement pour la Cisjordanie et
la bande de Gaza, et nous avons entendu M. Abbas parler avec
beaucoup d’émotion du blocage de la bande, et Mlle Condoleezza
Rice a failli pleurer durant son discours en parlant de la
souffrance des ses habitants, mais aucun parmi les deux ne nous a
pas dit comment il va faire dans les circonstances actuelles de
cette bande, et comment on va lui envoyer l’argent dans la présence
du gouvernement du mouvement Hamas qui est rejeté, et par les américains
et les israéliens et par Abbas ?
Deux scénarii sont possibles pour sortir de ce piège qui
s’appelle la bande de Gaza. Le premier est de recommencer le
dialogue entre l’autorité de M. Abbas et l’autorité de M.
Ismaïl Haniyeh à Gaza en vue d’aboutir à un accord de réconciliation
et à un retour de solidarité entre les territoires occupés sous
un gouvernement d’unité nationale forte. Et le deuxième
c’est une incursion israélienne d’envergure dont Ehud Barak,
son metteur en scène, pense qu’elle lui permettra de détruire
Hamas et les autres brigades de résistance, et de rendre la bande
à l’autorité de Ramallah sur un plateau de sang.
Le premier scénario, c.-à-d. le retour au dialogue est complètement
exclu, car Israël a laissé à Abbas le choix entre le dialogue
soit avec lui ou avec Hamas, il a alors choisi le premier et a
complètement tourné le dos au deuxième, et il a mis tous ses œufs
dans le panier de la conférence d’Annapolis et les négociations
qui en seront issues, dans l’espoir de parvenir à l’état
palestinien qu’il veut, quel que soit sa forme et son image. Par
conséquent le scénario de l’incursion d’envergure est le
plus probable, d’ailleurs Barak a déjà menacé la veille
qu’il mettrait fin à la question de tir de roquette de la bande
de Gaza d’une manière définitive.
Les quarante milliards que les gouvernements égyptiens
successifs ont obtenus après les accords de Camp David, à raison
de deux milliards dollars annuellement, étaient le prix pour
isoler l’Egypte et le détacher militairement de la question
palestinienne. Les milliards que vont obtenir le Président Abbas
et son premier ministre Salam Fayyad sont eux aussi en échange de
l’abandon du droit de retour et de la grande partie de Jérusalem
occupée, et l’acceptation des grandes colonies israéliennes
qui l’entourent.
Nous retenons notre souffle, car ce qui se passe actuellement
fait partie des accords secrets, et n’est qu’une application
des études détaillées réalisées préalablement avec un
financement occidental en vue d’introduction à la solution des
deux états, la dernière de ses études étant celle préparée
par le groupe d’AIX et qui décrit avec un détail lassant
comment appliquer ses accords sur le terrain. Cette étude a été
réalisée par deux équipes, l’une israélienne sous la
responsabilité du professeur Arye Arnon de l’université de Ben
Gourion et l’autre palestinienne sous la responsabilité de Saeb
Bamya, secrétaire du ministère de l’économie de l’autorité
palestinienne, et sous la présidence du professeur Gilbert
Benhayoun de l’université Paul Cézanne. Ce groupe a été
financé par le ministère des affaires étrangères français.
Nous avons le rapport de ce groupe sous les mains, et il
contient des détails effrayants sur l’annulation du droit de
retour en le considérant non pratique. Il prévoit huit milliards
dollars pour installer et dédommager les réfugiés. Encore une
fois, nous disons que c’est une générosité américaine et
européenne minée si ce n’est empoisonné. Et il se peut que ce
soit un acompte contre l’abandon à priori de tout ce qui reste
de la Palestine et des fondements nationaux immuables.
http://www.alquds.co.uk/index.asp?fname=2007\12\12-19\17z34.htm&storytitle=ffمليارات%20لتصفية
%20المقاومةfff
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