24.11.05
Un
intérêt suspect :
Le conflit Israël Palestine est souvent interrogé sur la manière
dont il monopolise les esprits et les activités en Europe et dans
le monde. Cette interrogation est en général chargée d’une réponse
implicite qui consiste à montrer qu’il s’agit là d’une
focalisation anormale sur un conflit parmi d’autres parfois bien
plus sanglants, et qui révèle le mauvais esprit caché derrière
cette focalisation, celui de l’antisémite ravi de pouvoir
apporter la preuve que « les juifs font encore parler d’eux et dérangent
la planète ».
A cette accusation les militants pour les droits des Palestiniens
essaient de répondre le plus souvent en évoquant le caractère
universel de la lutte du peuple palestinien pour ses droits.
Mais ceux là même qui s’interrogent sur la surcharge
d’implication ont fait de ce conflit leur bataille personnelle, ne
devraient-ils pas aussi bien s’interroger sur leur propre
investissement ?
- De quoi vous mêlez-vous avec tant d’intérêt pourquoi vous intéressez
vous tant à eux/ nous ? Semblent-ils dire. Et il est clair que la
remarque ramène ses auteurs vers leur identification à l’une des
parties : votre intérêt est suspect parce qu’il fait lien avec
une part de nous même que vous remettez aussi en question dans vos
critiques à Israël.
On notera de plus que cette remarque renvoie à l’évidence à une
partie des Juifs de France, tant il est clair que les Arabes (1) eux
ne sont pas dérangés par l’intérêt porté à cette région du
monde en France. Sans doute cela révèle-t-il, la part importante
et croissante de l’opinion française qui juge ce conflit et
condamne l’attitude d’Israël et exprime a minima une compassion
au sort des Palestiniens même si elle exprime aussi réserves ou
critiques sur les attentats contre des civils israéliens.
- Laissez-les /nous régler çà entre eux /nous ! semble aussi
contenir cette interrogation. Une bien hypocrite affirmation car «
les » représente dans ce cas, Israël, la Palestine et aussi les
Etats-Unis, partenaire quasi naturel, et concrètement le
gouvernement Bush totalement aligné sur les intérêts israéliens.
Dire cela signifie donc en fait : laissez se jouer le rapport de
force inégal d’aujourd’hui, (parce qu’il est en notre faveur)
et n’intervenez surtout pas, parce que vous risqueriez de le rééquilibrer.
Ce « nous » comporte aussi le risque d’ériger en adversaire ici
un « nous » arabe identifié aux Palestiniens, il constitue en
quelque sorte son ennemi local. Il faudrait en déduire au
contraire, l’urgence absolue pour l’Europe d’intervenir, en
conformité avec son opinion majoritaire d’ailleurs, dans le sens
du rééquilibrage des forces en vue d’une négociation fertile.
Outre le fait que dans le monde d’aujourd’hui « ouvert » et «
couvert » par le réseau de connections tous azimuts de la
globalisation, une telle remarque semble ridicule et indique une
tentative de repli de fermeture, elle est lourde d’un irrationnel
dont il est peut-être urgent de tenter d’analyser la teneur.
Deux évènements survenus l’été 2004 en France ont révélé
cet irrationnel et les fantasmes en circulation autour de ce conflit
:
Une jeune femme porte plainte pour avoir été violemment agressée
parce que juive dans un RER de la banlieue parisienne, un homme
affirme qu’un incendie volontaire et antisémite a détruit le
centre social juif dans lequel il travaillait, à Paris. Dans les
deux cas il s’agit d’affabulations bientôt révélées par la
police, mais entre temps toute la classe politique s’est empressée
sur les lieux, dans les media et auprès de la « communauté »
juive de France. Un ministre israélien de passage à Paris
participe au sein du gouvernement français à l’expression
nationale d’indignation. Ces deux incidents montrent au moins, une
certaine conscience chez leurs auteurs de la présence (2) de
l’antisémitisme en France, de son impact médiatique et
politique, et surtout des possibilités de manipulation dont il est
chargé.
Antisémitisme : le lien
Le sionisme se présente paradoxalement et surtout à retardement
comme la possible normalité pour un peuple anormal –cette option
relève plutôt des conditions de l’émergence de l’idéologie
sioniste dans le contexte du 19e siècle et de ses solutions
nationales. Mais alors que l’histoire du sionisme et d’Israël
ne devrait être que celle d’une partie des juifs qui ont choisi
-ou subi – (pour ceux d’entre eux à qui cette solution était
la seule qui s’offrait en 48, et ceux du monde arabe qui ont été
poussé à l’exil à cause du sionisme justement) cette voie, le
sionisme maintient et cultive ses liens avec les juifs du reste du
monde. Essentiellement parce qu’il s’offre comme le refuge de
tous ceux qui y seraient poussés par le danger de l’ antisémitisme,
mais aussi parce que le prix de cette « assurance sur la vie »
qu’il revendique en échange est sa centralité dans toute la vie
juive de ce qu’il considère n’être qu’une diaspora mondiale.
Israël se présente à travers le sionisme qui le fonde comme
recours permanent ou dernier de tous les juifs du monde, mais aussi
comme dépendant de leur soutien inconditionnel et attaché à eux
dans un lien indéfectible.
Toute la volonté de normalisation ou normalité-enfin-acquise
affichée par le sionisme est ainsi minée, ruinée par ce lien
permanent et immuable qu’il établit entre juif et israélien.
Enfin si ce lien devait se desserrer, il serait utile de rappeler la
menace antisémite qui fonde le sionisme.
(Ari Shavit le premier, dans un éditorial d’octobre 2000 du
Haaretz, au lendemain de l’échec de Camp David, reprenant à son
compte la rhétorique de Barak et son équipe sur l’intégrale
responsabilité de l’échec incombant aux Palestiniens, enchaîne
ainsi le sort d’Israël à celui des juifs du monde: Le problème
n’est pas , dit-il en substance, comme nous le pensions, le
contentieux israélo palestinien et l’occupation, mais ce qu’il
appelle le « destin juif » qu’il décrit comme une guerre éternelle
de survie devant la menace de destruction dans un monde qui a
toujours refusé notre existence) L’écho de cette argumentation,
reprise par bien d’autres, est reçu de plein fouet ici, en
Europe. Et s’il est vrai qu’Israël peut être détruit cela
signifie que tout juif dans le monde perd ce que lui offrait le
sionisme et ne cesse d’ailleurs de lui offrir, par la voix de
Sharon chaque année, depuis 4 ans: un refuge contre l’ « antisémitisme
sauvage » (Sharon août 2004).
L’antisémitisme réel et ou fantasmé renforce ce lien qui
voudrait faire d’Israël la métropole de repli de tous les juifs
du monde en danger. Pour cette raison il agit dans notre société
comme un puissant allié de la politique de Sharon. Plus il est présent
plus il renforce la nécessité de soutenir la politique d’Israël
quelle qu’elle soit, et ce faisant il renforce la colère des
adversaires de cette politique, empêchés de parler sous la menace
de l’opprobre, et que l’on incrimine alors d’autant plus
facilement d’antisémitisme justement. Un lien donc qui ressemble
à ces menottes des polices modernes qui se resserrent d’autant
plus que l’on essaie de s’en défaire. Plus on parle d’antisémitisme
plus il devient difficile de critiquer Israël, c’est exactement
la raison pour laquelle on en parle. On en arrive de phrases en
phrases, à partir de Cukierman qui aligne les « verts bruns rouge
», jusqu’à Rufin qui définit dans son rapport un «
antisionisme radical » comme une nouvelle forme d’antisémitisme
et va même (il est revenu sur ses propos depuis) jusqu’à
demander la pénalisation de certaines critiques d’Israël qu’il
juge antisémites.
Articulée sur la centralité d’Israël dans la vie des juifs du
monde, telle que définie par le sionisme, la menace de l’antisémitisme
pèse aujourd’hui du plomb sur toute analyse politique de
l’action d’Israël contre les Palestiniens, relégués de ce
fait au second plan de leur tragédie aux yeux du monde politique
soucieux de ne pas risquer lui aussi de payer le prix de
l’amalgame. Ce dernier, tout préoccupé à cela, ne cesse de
donner des garanties publiques aux juifs de France et à Israël,
n’hésitant pas à dissocier radicalement l’antisémitisme du
racisme, comme si cela risquait de lui faire perdre ses caractéristiques
singulières, alors que le reste des racismes confondus, lui
n’aurait pas de caractères propres historiques idéologiques
propres. (cf. à nouveau le rapport Rufin)
La timidité de réactions politiques et médiatiques aux exactions
de groupuscules juifs d’extrême droite, la mise en exergue dans
les discours politiques actuels de « l’antisémitisme en
particulier » -comme disent Sarkozy, ou Luc Ferry- quant à sa désignation,
quant à sa répression, quant à sa prévention, quant à la commémoration
du crime nazi même dans un harcèlement médiatique - général il
est vrai, voir Tsunami - achèvent d’isoler le Juif dans la
conscience collective, comme être à part historiquement, et
victime potentiellement permanente. Assignés à cette place, au cœur
de la république qui les défend contre un antisémitisme venu
cette fois de « l’extérieur » les Juifs sont devenus otages de
la politique de Sharon, et citoyens « protégés » par la république.
Un bien curieux statut.
Qui ose alors critiquer la politique Israélienne? Et comment s’y
prendre pour pouvoir le faire dans un tel contexte?
Côté arabe :
Au lien Israël/ Juifs du monde entier entretenu par le sionisme au
moyen de l’antisémitisme, qui élargit le front du conflit,
correspond une identification croissante des Arabes avec la
Palestine (plus que l’Irak on le notera parce que plus ancien,
plus axé sur une injustice générale, globale même, faite aux
Palestiniens, sur l’ensemble des droits internationaux, nationaux,
civiques et individuels).
D’ailleurs la situation des Arabes dans le monde se globalise elle
aussi. Depuis les deux tours américaines à l’Afghanistan (où
dit-on s’entraînaient des musulmans du monde entier y compris
français d’origine arabe) puis l’Irak, bientôt peut-être l’Iran
assimilé au monde arabe, par le biais du chiisme politique, en
passant par l’Espagne, et l’implication de Marocains, et « les
banlieues » des métropoles européennes, ils sont vécus comme
menaçants partout. Etre ou sembler arabe dans un quelconque aéroport
du monde occidental n’est pas facile. Le monde arabo musulman de
la planète supporte des accusations graves de menaces terroristes
sur l’occident, de non démocratie d’arriération culturelle et
religieuse, il trouve peu de grâce aux yeux de l’occident. La
globalisation de ce regard globalise en retour les identités et les
identifications à tous les niveaux de conscience dans les sociétés.
On pourrait même dire pour répondre à la première question qui
fonde ces remarques : on s’intéresse au conflit israélo
palestinien avec cette intensité ici (en Europe, et partout dans le
monde) parce qu’il est appréhendé par le monde d’aujourd’hui
qui est celui de la globalisation, et qui comme tel favorise développe
et établit toutes les interconnexions possibles, délocalise aussi
les éléments du conflit, comme il procède avec la production
industrielle, par la division internationale du travail. Qui
fabrique les chaussures de sport d’aujourd’hui ? Difficile à
dire, avec des ingénieurs américains, de producteurs sud américains
et africains des monteurs philippins etc.… Comme l’éclatement
des fronts de la production, les fronts du conflit s’étendent et
se divisent sur la planète, et des fronts se constituent en France
en Europe et ailleurs, par la connexion sionisme antisémitisme
d’une part, et de l’autre la globalisation de la menace arabe
dans l’idéologie du « clash des civilisations » qui est celle
du gouvernement américain.
Les Arabes eux, placés dans ces fantasmes comme l’ennemi éradicateur
là-bas, sont constitués ici, à travers ceux qui s’identifient
aux Palestiniens, en réplique, en double de cet ennemi. Victimes du
racisme et de discriminations bien plus constantes et violentes, ils
sont de surcroît perçus comme agresseurs, là bas comme «
terroristes palestiniens », ici comme « jeunes des banlieues ».
Des avertissements à peine voilés leur sont adressés, ils ont intérêt
à rester à leur place eux aussi, dans leurs quartiers délaissés
par l’ultra libéralisme , les patrouilles de sécurité tournent,
et on montre ses papiers, et pour ce qui se passe à Gaza: halte à
l’antisémitisme. Réclamer la justice relève de l’insulte
antisémite, parler des droits des palestiniens, évoquer le droit
des réfugiés inscrit dans toutes les conventions internationales
dont certaines signées par Israël relève à coup sûr de la
provocation.
La dégradation du discours de la gauche traditionnelle (socialiste
notamment) traversé par la désignation des arabes comme dangereux,
l’Axe du mal, terroristes et intégristes potentiels, voire menace
pour la république laïque, et par l’utilisation de l’antisémitisme
pour paralyser la critique du sionisme et de sa politique actuelle,
qui a repositionné ou conforté les juifs de France au cœur de
l’occident, a atteint des proportions inédites. Les notions de
justice, d’égalité, de droit international, de sanctions
internationales ont disparu des discours et des actes d’au moins
une partie de cette gauche, et confortent de ce fait les positions
des tenants du clash des civilisations.
On assiste le plus souvent à des mises en symétries imbéciles et
meurtrières. les discours de personnalités connues véhiculent
tant d’impuissance à énoncer les vérités premières :
l’occupation doit cesser, la colonisation des TOP aussi, les
droits des Palestiniens sont remis en question et bafoués… par
peur de paraître antisémite ou même simplement d’avoir à se défendre
de l’être ! Et cette impuissance s’associe tragiquement à
l’incapacité de tenir des positions claires et de gauche sur le
terrain social. Ainsi tout le discours politique de gauche se trouve
discrédité aux yeux de ceux qui en attendent soutien et réponses.
Ceux-là vivent un fort sentiment d’abandon et d’injustice sur
le terrain social qui se croise, se connecte, avec les mêmes
sentiments concernant la Palestine, et ils se retrouvent du coup
ostracisés, radicalisés de fait.
Une véritable french connexion est donc rendue possible par
l’importance numérique de deux « communautés » liées au
conflit par des identifications particulières : parce que le
sionisme est l’expression d’une présence occidentale au cœur
du moyen orient, qui montre qu’elle s’y impose par la force et
le rejet des indigènes, ce point de conflit constitue l’un des
fronts de la guerre globale du clash des civilisation. Derrière
Israël se rangent les tenants de cette vision du monde, les Arabes
se sentent dans le camp des indigènes, on ne s’en étonnera pas.
En France le conflit réveille en outre et plus généralement le
passé colonial dans le Maghreb et son achèvement par une guerre
qui ramène en métropole des Français d’Algérie, peu
compatissants en général aux douleurs du monde arabe, et des juifs
d’Algérie devenus français par le décret Crémieux ce qui les
chasse de leur patrie d’avant même l’islam, et les coupe de
leur histoire judéo arabe. Le retour en Métropole prend en ce qui
les concerne un sens pour le moins figuré. La situation ambivalente
dans laquelle ils ont été placés par les intérêts coloniaux
s’est parfois perpétuée dans une rancœur elle aussi très
ambivalente. Là aussi des identifications violentes se sont parfois
développées avec les colons des territoires occupés palestiniens,
et l’on peut être sidéré de voir certains jeunes juifs français,
porteurs de cet héritage complexe, entrer dans l’armée israélienne
comme on a vu des familles souvent du sud-est de la France aller
s’installer dans des colonies de Gaza ou de Cisjordanie.
Le dernier avatar de l’assimilation antisémitisme / antisionisme,
réside dans le fait elle est porteuse d’antisémitisme, en cela même
qu’elle positionne les détracteurs de la politique sioniste au
Moyen Orient comme antisémites en France (et ailleurs dans le
monde). Si l’immense majorité de ces détracteurs résiste à cet
amalgame dangereux, et réagit avec indignation à l’infâmante
accusation d’antisémitisme, une frange marginale parfois fragile
parce qu’elle-même marginalisée socialement peut alors
rencontrer le véritable antisémitisme, tapi dans l’ombre et en
quête de proies faciles. Cet antisémitisme là, ancien, européen,
cherche lui aussi une cause - connexion à laquelle se raccorder, en
parasite afin de diffuser son venin.
Au bout d’une colère fondée, in-entendue non prise en compte,
qui ne parvient à faire écho ni sur le politique, ni sur le
social, injustement réduite au silence, se trouve parfois la main
tendue de négationnistes nostalgiques, qui transmutent colère et
profond sentiment d’injustice en ressentiment violent contre les
juifs associés à Israël. On les retrouve ces derniers temps dans
certaines manifestations, ou leur tactique est simple : se montrer
paraître dans une manifestation pour la Palestine, ou contre les
galas tenus récemment à Paris pour récolter des fonds pour
l’armée israélienne ou pour achever les appropriations de terres
réalisées par le KKL sous couvert d’écologie (sic !). Cette
simple apparition suffit à faire diversion, elle déclenche immédiatement
la colère des manifestants qui refusent leur présence parce
qu’ils refusent le racisme antisémite, qu’il ait droit de cité,
comme aucun autre, où que ce soit et en particulier sur le terrain
de la Palestine.
Les négationnistes sont alors entourés de petits groupes qui les
protègent en reprenant leurs arguments : Pourquoi refuser la présence
de ces valeureux soutiens à la Palestine, en fait les « chasseurs
d’antisémites » seraient des sionistes déguisés (surtout quand
ils sont juifs) qui infiltrent ( !) le mouvement de soutien à la
Palestine en ramenant l’éternel argument de l’antisémitisme
pour nous empêcher de critiquer Israël.
Le mécanisme est vicieux, mais il faut le démonter : Qui ramène
alors du terrain de la Palestine vers le terrain de l’antisémitisme
?
L’immense majorité des militants, venus manifester pour la
Palestine refusent d’associer ce combat juste des Palestiniens
pour leur libération et leur indépendance à toute forme de
racisme. Ils exigent un terrain solidaire, et respectueux des
valeurs universelles que porte ce combat.
Les négationnistes eux viennent miner le terrain en le contaminant
par un amalgame qu’ils posent en miroir du premier : à
antisioniste= antisémite, ils opposent : sioniste= sémite, tout
juif est donc par essence un sioniste, en passant par une équivalence
intermédiaire qu’ils insufflent à l’aide de leur tactique sur
le terrain : lutte contre le racisme antisémite= pro sionisme. Qui
donc cherche à ramener au discours ethnique et religieux, à éloigner
du champ politique, ceux qui cherchent à nettoyer le terrain du
travail militant de tout racisme, ou ceux qui l’y introduisent
avec une perfidie redoutable ?
Lutter contre l’amalgame antisionisme = antisémitisme, est donc
l’un des pivots de la lutte pour la Palestine, ce qui pouvait paraître
ridicule et insensé est devenu incontournable en France.
Lutter contre le racisme sous toutes ses formes est un impératif éthique
et pragmatique dans ce combat, afin qu’il reste ce qu’il est un
combat politique. Il est à noter que les associations
palestiniennes en France et les partenaires palestiniens des
territoires occupés ou d’Israël soutiennent avec force cette
position et refusent tout amalgame entre critique d’Israël et
antisémitisme.
Refuser l’assignation à résidence pour les Juifs au cœur d’un
système ultra libéral qui défendrait l’axe du bien occidental
(cf. l’utilisation ad nauseum du concept de civilisation judéo-chrétienne)
aussi bien que celle des Arabes dans les périphéries sociales livrées
à la tentation intégriste et terroriste de l’axe du mal, devient
une urgence pour toute la société française.
Contre l’idéologie dominante du clivage et de la séparation, se
sont constitués des collectifs judéo arabes et groupes de réflexion
et de formation militante communes sur la base du respect des droits
et de l’égalité dans plusieurs ville de France, et ces groupes
tendent à se développer sous l’impulsion souvent c’est à
remarquer d’associations arabes qui elles aussi craignent le repli
et la fermeture au champ politique. L’UJFP est bien entendu partie
prenante de ce développement auquel elle participe. (3)
Travailler à la construction d’un militantisme, informé,
citoyen, politique, anticolonialiste, et fondé sur la nécessité
du respect des droits civiques, de la justice et de l’égalité,
du droit international qui s’est développé après 1945 en réaction
aux horreurs de la seconde guerre mondiale, est un enjeu majeur
aujourd’hui, pour la résolution du conflit israélo-palestinien
aussi bien que pour une évolution positive de la société française.
(1) Je choisis de placer sous la dénomination générique « Arabes
», les Français d’origine arabe, les Arabes résidents en
France, les « issus de l’immigration » « les beurs »… désignant
ainsi la façon dont est envisagée une population diverse par les
regards et analyses portés sur elle.
(2) j’entends par ce mot, outre les faits antisémites réels, ses
occurrences dans le discours : à titre d’exemple, la recherche
sur le site du journal Le Monde des articles comportant le mot antisémitisme
sur les douze derniers mois ouvre 500 entrées.
( 3) A ce titre la tournée du trio : Dominique Vidal, Leïla
Shahid, Michel Warschawski dans les périphéries françaises, pour
expliquer, infomer, débattre, participe totalement de ce travail.
Michèle Sibony
Vice Présidente de l’UJFP
|