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Tsahal

Tsahal ou le mythe de « l’armée la plus morale du monde »
Silvia Cattori 

19 janvier 2007 

En Israël les gens sont généralement très fiers de leur armée. Les autorités israéliennes se sont toujours attachées à la présenter comme quelque chose de pur, de noble, d’unique. Et d’aller répéter que c’est « l’armée la plus morale du monde ».

Tsahal (Force de défense israélienne) n’est pas une armée de défense, comme son nom l’indique, mais une armée offensive, xénophobe, responsable de la plus vaste épuration ethnique et de la plus longue occupation militaire du monde moderne.

Créée en mai 1948, avec la participation des organisations terroristes Haganah, Lehi, Irgoun, Tsahal est une armée offensive au service de l’idéologie raciste du Grand Israël. Ses premiers faits d’armes et de sauvagerie ont été de planifier et d’exécuter les massacres ainsi que la destruction des villes et villages qui devaient pousser les Palestiniens à l’exode et aboutir à leur déportation pour édifier, en lieu et place, un Etat réservé « exclusivement aux juifs ». Cette purification ethnique, qui a vidé la Palestine des trois quarts de sa population autochtone et l’a rayée de la carte, est cyniquement qualifiée de guerre d’indépendance par les Israéliens. Une guerre coloniale, et une épuration ethnique, qui n’ont jamais cessé.

C’est cette terreur organisée -institutionnalisée par des centaines de lois racistes et de mesures d’apartheid dites de « séparation »- qui réglemente tout le quotidien des Palestiniens de façon à les maintenir sous la domination et sous le contrôle total de l’armée israélienne, qui a permis à Israël d’imposer sa « suprématie juive »

L’armée israélienne a le droit de tout faire. Se servir d’un arsenal militaire, conçu pour affronter des armées modernes aguerries, contre des civils complètement démunis, femmes et enfants y compris. « Israël a le droit de se défendre » est le leitmotiv des autorités israéliennes quand les protestations de l’opinion le mettent en question. Le problème est que ce « droit de se défendre » qu’Israël revendique, est à sens unique, exclusif, comme tout ce qui a trait à son projet d’expansion coloniale. Dans les années 80, les soldats de Tsahal visaient les jambes des enfants, en 90 les bras, dès 2000 la poitrine et la tête. « Israël a le droit de se défendre » rétorquent lâchement les « grands » de ce monde quand la vue de ces massacres odieux révulse les citoyens. Autrement dit, l’armée israélienne a le droit de massacrer des peuples en toute impunité. Or, même les enfants peuvent comprendre que, quand Israël envoie des bataillons de soldats et de chars tirer avec des canons de guerre sur des populations mises en situation d’infériorité et dans l’incapacité de riposter, ce n’est pas pour « se défendre », bien évidemment, mais pour avilir, humilier, exterminer, et signifier à ces Arabes qui s’obstinent à rester, malgré la dureté, sur le peu de terre qu’il leur reste, que c’est Israël le maître.

En 2006, les soldats israéliens ont ôté la vie à 742 Palestiniens, (dont 145 enfants), en ont blessé 3’735 et enlevés 5’671 autres, dont 360 enfants. 210 Palestiniens ont été tués dans des assassinats ciblés. Durant la même période, les Palestiniens ont ôté la vie à 23 Israéliens et enlevé un soldat, en tout et pour tout.(1)

La politique de « défense » de l’Etat d’’Israël est ni plus ni moins du « terrorisme d’Etat ». Avec ses escadrons de la mort (Forces spéciales) qui débarquent par surprise dans la vie précaire des villageois palestiniens et ne laissent que cadavres et douleurs derrière eux, avec ses agents secrets qui fomentent des attentats terroristes -qu’ils attribuent ensuite aux Arabes-, avec plus de 600'000 soldats et réservistes qui, une fois dans les zones occupées, ne connaissent que le langage du meurtre et de l’humiliation,(Israéliens ou double nationaux d’origine russe, polonaise, moldave, américaine, française, etc) Tsahal n’est donc pas cette entité auréolée de vertus que présentent les journalistes asservis à Israël. Mais une armée exclusive, barbare.

Pour ces populations arabes occupées par des forces étrangères, c’est une chose humiliante que de voir ces troufions venus du dehors tourner leurs armes et leur haine contre eux, et de s’entendre dire que la Palestine leur appartient, que « cette terre, c’est Dieu qui la leur a donnée ». Il y a un racisme latent en Israël qui s’exprime du reste ouvertement ; un refus majoritaire de considérer les voisins arabes comme des êtres dignes d’être traités humainement, en égaux.

L’idée de se sacrifier pour l’Etat d’Israël est très ancrée dans l’esprit de ces Israéliens qui ont « grandi dans le berceau du sionisme». Il n’y a pas une famille israélienne qui ne tire bénéfice, directement ou indirectement, de l’occupation militaire. Dès l’âge de 18 ans, les filles et les garçons ont l’obligation d’accomplir 3 ans de service militaire (2 ans pour les femmes), puis un mois par année jusqu’à 50 ans.

« Notre armée est pure. Elle ne tue pas des enfants. Nous avons une conscience et des valeurs et à cause de notre morale il y a peu de victimes » disent les généraux israéliens dans le film Tsahal de Claude Lanzmann. Ainsi, comme on le constate ici, ceux qui en Israël ont les mains couvertes de sang, sont toujours montrés comme des agneaux, et l’opinion internationale est maintenue dans l’ignorance par ces cinéastes, journalistes et écrivains qui, en travestissant la réalité, se rendent complices de leurs crimes de guerre.

De quelles « valeurs morales » peut-on se prévaloir quand on envoie des soldats déguisés en Arabes exécuter, sans autre forme de procès, des Palestiniens qui ne sont ni armés ni dans une position de combat, et des avions de guerre bombarder des maisons remplies de femmes et d’enfants ? Ce qui se passe sur le terrain contredit malheureusement ces généraux à qui Claude Lanzmann a donné la parole.

Israël viole toutes les lois internationales. Il a légalisé la torture, la prise en otage des familles dont un membre est recherché, les châtiments collectifs, les arrestations et les exécutions extrajudiciaires, les réquisitions de terres, le contrôle de 80 % des ressources arabes en eaux, le bouclage des villes et des villages qui interdisent les déplacements et emprisonnent des millions de Palestiniens. Cette liste n’est pas exhaustive.

Le quotidien des Palestiniens a toujours été bouleversé par les assassinats, les dévastations, les enlèvements perpétrés par ces bataillons de soldats qui font irruption à toute heure du jour et de la nuit, envahissent leurs foyers de façon violente, massive, cassent tout, effrayent, humilient les parents en présence de leurs enfants, enlèvent les hommes ; assassinats, dévastations et enlèvements qui n’ont cessé de se multiplier et de redoubler en cruauté depuis 2000. Ce fut durant cette période, fort traumatisante pour les Palestiniens, que l’on a entendu parler de ces Israéliens, appelés « refuzniks », qui refusaient de servir en Palestine. Ce qui fit naître l’espoir que la paix puisse trouver une chance dans ce refus.

En juillet 2006, l’armée israélienne envahissait à nouveau le Liban. C’est à ce moment là que nous avons rencontré des anciens soldats connus pour avoir signé le manifeste « Courage de refuser ». En 4 ans, seuls quelques 600 Israéliens l’ont signé. Alors que leur pays était engagé dans une nouvelle guerre inhumaine, déséquilibrée, illégale, qui entraînait la mort de centaines de Libanais, il était étonnant de constater que ces refuzniks dont le refus de servir avait fait rêver des foules de gens au-dehors, étaient favorables à cette guerre horrifiante lancée par Israël. En témoignent les réponses d’Elad, 32 ans, physicien, proche des « Anarchistes contre le mur », (2) que nous avons recueillies alors qu’il attendait de partir, une bourse européenne en poche, au Centre universitaire européen en Hongrie.

- Faites-vous toujours partie du mouvement « refuzniks » ?

- J’ai signé l’appel “Courage de refuser”, mais je n’en fais plus partie. Leurs membres sont sionistes.

- Peut-on être refuznik et sioniste ?

- Naturellement ! Que veut dire le terme sioniste pour vous ? Vous pouvez être sioniste et être contre l’occupation. Le sionisme a différentes significations. Pour les Palestiniens, cela veut dire que vous brutalisez leurs terres. Donc, pour eux, tout Israélien qui soutient l’occupation est sioniste, une mauvaise personne. Mais, en Israël, le sionisme signifie quelque chose de bien. Ce terme a une signification positive. Aider une vieille dame à traverser la rue, par exemple, est qualifié comme un geste sioniste. Dans l’opinion, plus généralement parlant, le sionisme signifie qu’Israël doit être un Etat juif. Bien des gens appartenant au mouvement « Courage de refuser» se définissent comme sionistes. Je ne suis pas sioniste. Je ne pense pas que le concept d’Etat juif soit un concept juste: je pense qu’il implique le racisme à un niveau très profond.

- Que ressentez-vous, en ce moment où votre pays est à nouveau engagé dans une guerre au Liban et où vos frères rasent villes et villages ?

- Je pense que le Liban doit décider si c’est un Etat ou pas. Il y a deux armées au Liban. Une armée qui est démocratique, qui est la plus petite et la moins efficace des deux, et qui n’exerce pas sa souveraineté. Et l’armée du Hezbollah qui est, selon tous les critères, une bonne armée, mais qui ne répond pas au peuple libanais ; qui agit au nom de Nasrallah et répond à la Syrie et à l’Iran. C’est une armée de guerre. Le Hezbollah veut la guerre ; la guerre est un bon business pour le Hezbollah. Je ne pense pas que c’était au peuple libanais de payer le prix. D’un autre côté, j’ai lu qu’Israël a tué des centaines de personnes en peu de jours. C’est horrible et, moralement, il n’y a pas d’excuse à cela. Et stratégiquement cela ne sert aucun objectif. Ils ont juste détruit le Liban. Je pense que c’est ce que le Hezbollah voulait et que c’est une bonne chose pour lui.

Ici, nous avons été déconcerté de l’entendre faire sienne la propagande militaire la plus sommaire. Cet homme, que nous avions en face de nous et que nous avions souhaité rencontrer en pensant que sa façon de voir trancherait avec celle de l’Etat Major israélien, et de ses compatriotes en général, ne se démarquait pas de leurs opinions.

- A Bil’in, vous soutenez les Palestiniens que l’armée israélienne combat, et au Liban, vous soutenez l’armée israélienne ? N’est-ce pas contradictoire ?

- Oui, c’est comme cela. En fait, si je considère les choses en profondeur, quand je m’oppose à ce que fait l’armée, je le fais dans l’espoir d’avoir une vie meilleure ; je ne le fais pas pour les Palestiniens, mais pour moi-même.

- Avez-vous tué des Libanais quand vous étiez au Liban dans les années 90 ?

- J’avais 18 ans quand j’ai commencé l’armée. Après une année d’entraînement en Israël, entre 1995 et 1996 je suis allé au Sud Liban et j’en suis revenu à l’âge de 21 ans. J’ai reçu plus de coups que je n’en ai donnés. Des amis ont été tués. C’était comme à la guerre.

- Vous vous êtes battu à Cana en 1996. N’avez-vous pas envie d’en parler ?

- Oui je me trouvais à Cana lors de l’opération appelée «  Raisins de la colère ». Ce qu’ils ont fait alors était très violent mais moins violent que ce qu’ils font aujourd’hui. L’objectif de cette opération était le même que celui que poursuit l’armée israélienne aujourd’hui : en finir avec le Hezbollah et faire pression sur le gouvernement libanais pour faire taire les armes du Hezbollah.

- Votre bataillon a tiré tout en sachant qu’il y avait là des civils non armés ?

- Ils ont tirés sur le mortier. La bombe n’a pas été tirée dans le but de tuer des gens. Après une semaine de combat, le Hezbollah a installé ses mortiers près du camp de réfugiés pour tirer contre les positions israéliennes, pensant que l’armée israélienne ne tirerait pas là. Les forces israéliennes ont été touchées par le Hezbollah et elles ont demandé de pouvoir tirer contre cette position. C’est alors qu’une des bombes est tombée sur le camp des réfugiés sous protection des Nations-Unies.

- Comment pouvez-vous dire « ils ont tiré sur le mortier » alors qu’il y a eu au moins 130 réfugiés palestiniens tués et des centaines de blessés. Un bain de sang énorme ! C’étaient pourtant des femmes et des enfants et pas des combattants du Hezbollah ?

- La cible était le mortier.

- Comment peut-on tirer pour faire taire un mortier quand on sait que l’on peut tuer des femmes et des enfants ?

-L’objectif était le mortier.

Aucune émotion, aucune inflexion dans la voix. Aucune confidence, pensions-nous. Des réponses brèves, désincarnées, apprises par cœur. S’agit-il, pensions-nous, pour tous ces soldats qui ont été envoyés sur le front massacrer des civils, de ne jamais avouer un meurtre, ne jamais assumer le fait que toute opération militaire sur le terrain est une responsabilité collective, ne jamais incriminer ses camarades ?

- Vous ne semblez pas condamner cette action ?

- Non je ne blâme pas le soldat qui a tiré sur le mortier. Il a reçu une liste de numéros, il les a mis sur l’ordinateur et il a tiré. Je blâme le gouvernement israélien qui ne devait pas entrer au Liban, ni lancer cette opération, et ne devait pas se servir des populations civiles pour obtenir des buts politiques.

- C’est à ce moment là que vous avez quitté l’armée ?

- Je n’avais plus que quatre mois avant le terme quand j’ai dit que je ne voulais plus continuer.

- Et, aujourd’hui, vous êtes d’accord avec votre gouvernement qui massacre des femmes et des enfants ?

- En ce temps là, le Hezbollah se battait contre l’occupation de nos troupes. Aujourd’hui c’est différent; ce que fait le Hezbollah n’est pas légitime.

- Au moment où nous parlons, l’armée israélienne occupe et bombarde ces mêmes lieux où vous avez combattu. Que ressentez-vous ?

- Oui, je connais très bien les lieux où ils se trouvent en ce moment. J’étais là dans le village de Marjaron où il y a eu une grande bataille hier. Et à Benjel où ils sont en train de se battre.

- Vous avez signé hier le manifeste « Courage de refuser », et vous semblez être totalement d’accord aujourd’hui avec l’agression du Liban par l’armée israélienne ?

- Je ne voudrais pas être envoyé au Liban. Cela dit, la guerre n’aurait pas commencé si le Hezbollah n’avait pas kidnappé des soldats. Je pense que le Hezbollah voulait la guerre. Leur but est de tuer des civils. Israël n’aurait pas commencé si le Hezbollah n’avait pas kidnappé…

- Les informations que nous avons indiquent que les soldats israéliens enlevés par les forces du Hezbollah se trouvaient à l’intérieur du Liban ?

- Ce n’est pas ce que je sais. Ce qui est sûr est qu’ils ont été kidnappés en Israël.

- Israël a envahi le Liban, rasé des villages pour trois soldats captifs. Cela n’indique-t-il pas qu’Israël avait un plan, qu’il voulait partir en guerre et qu’il a sauté sur l’occasion ?

- Bien évidemment qu’Israël a des plans prêts. C’est ce qu’une armée fait. De toute évidence, ce qui se passe va au-delà du kidnapping de deux soldats. La décision d’aller au Liban a été basée sur le fait que, si le Hezbollah fournissait un prétexte, Israël saisirait cette occasion comme élément déclencheur pour changer les règles du jeu au Liban. La dureté de la réaction d’Israël tient à diverses raisons. L’une d’elles est qu’Israël a compris que, s’il intervient au Liban, son action doit être très dure, très efficace. On ne peut pas laisser les choses comme cela, dans une situation où il y a deux armées au Liban. Qui est le souverain ? Le Hezbollah ou le gouvernement libanais ? Par son intervention, Israël signifie au Liban qu’il n’est pas tolérable pour lui de se soumettre à une situation où le Liban n’est pas un Etat souverain. Il y a deux armées au Liban et l’une d’elles fait ce qu’elle veut alors qu’il n’y a plus d’occupation israélienne au Liban.

- J’étais récemment au Liban. Israël violait l’espace aérien jour et nuit ; et les  fermes de Sebha sont considérées par les Libanais comme occupées ?

- Sebha c’est quelques centaines de kilomètres carrés. Le Hezbollah s’en sert comme prétexte pour continuer de se battre. La guerre est un bon business pour le Hezbollah.

- Mais ne croyez-vous pas que la branche armée du Hezbollah qui défend le Liban contre l’agression israélienne mène une lutte de résistance ? N’y a-t-il pas là tout un peuple qui résiste contre son envahisseur ?

- Quelle résistance ?

- Le peuple Libanais est unanime, semble-t-il, à soutenir les forces qui mènent une lutte de résistance ?

- Résistance contre quoi ?

- Les Libanais qui se font massacrer n’ont-ils pas le droit de se défendre ? Vous soutenez bien le mouvement des « Anarchistes contre le mur » qui vont manifester chaque vendredi à Bil’in contre votre armée. Le Hezbollah au Liban résiste comme les Palestiniens résistent à Bil’in. N’est-ce pas le même combat ?

- Soutenir Bil’in c’est ce qu’il faut faire. Ce qui se passe au Liban et dans les « territoires » n’a rien en commun.

Pas un mot ne désigne les choses par leurs noms : Palestine, Palestiniens. On reste dans l’abstraction. Pas de « nous », pas de reconnaissance des responsabilités.

Les réponses d’Elad soulèvent d’autres questions. Les refuzniks n’ont-ils pas été un facteur d’équilibre à un moment où les atrocités de Tsahal risquaient par trop de retourner l’opinion ? N’ont-ils pas été un effet de marketing, de mode ? Présentés comme une « lumière d’espoir et de courage » par ceux qui, dans le camp de paix, véhiculent des illusions, n’ont-ils pas volé la place des résistants qu’Israël traite de « terroristes », et que ses F 15 exterminent avec des missiles en violation de toutes les lois internationales ? Un militant pour la justice en Palestine nous donne ici sa réponse.

« Les refuzniks sont restés un mouvement très marginal en Israël. On leur a accordé une place sans commune mesure avec leur réalité. Composé de divers groupes qui, en gros, sont d'accord sur le refus d'aller faire leur service, et leurs temps de réserve, dans les "territoires palestiniens occupés". Leurs motivations sont morales et politiques. La première phrase du manifeste fondateur du mouvement « Courage de Refuser » dit: "Nous, officiers et soldats combattants de réserve de Tsahal, qui avons grandi dans le berceau du sionisme et du sacrifice pour l'état d'Israël..." Ce n’est donc pas étonnant que des refuzniks aient résolument approuvé la guerre menée contre le Liban. Car là, ils "défendent et renforcent l'état d'Israël ! » C’est leur positionnement exclusif sur « les territoires de 67 » qui explique pourquoi les refuzniks ont bénéficié d’une grande promotion de la part des mouvements de solidarité en Europe ; ces derniers s’en sont servis pour défendre leur ligne politique et celle du camp de paix en général qui se borne à dire que « le problème est l'occupation depuis 1967 », qu’il suffit de se retirer derrière la ligne verte ».

Faire l’impasse sur ce qui s’est passé avant 1967, revient à pérenniser l’existence d’Israël comme Etat exclusivement juif sur 80 % du sol historique de la Palestine, donc à évacuer la question du droit au retour des réfugiés. Dans une situation où tout est illégal, la tentation de l’ambiguïté et du déni de l’épuration ethnique est une échappatoire humainement compréhensible. Néanmoins, tout Israélien ne peut jamais perdre de vue qu’il foule le sang des Palestiniens, qu’Israël ne peut s’imposer, comme « Etat juif exclusif », que par la force et de la brutalité; et qu’en vivant sur cette terre volée -qui contraint Israël à mener des guerres sans fin pour la garder- l’on ne peut que prolonger les souffrances des Palestiniens. La résolution 194 de l’ONU reconnaît aux réfugiés palestiniens le droit au retour sur leurs terres, même si, de facto, Israël ne l’a jamais reconnu.

Or, les réfugiés palestiniens qu’Israël a exclus, ghettoïsés, n’attendent qu’une chose : qu’on leur rende ce qu’on leur a pris. Pour eux, tout Israélien, vivant dans cet Etat qui s’est construit sur sa terre, est un colon qui viole les principes de justice et les droits humains. Il n’y a qu’une chose à faire : laisser les Palestiniens -et les Syriens expulsés hors du plateau du Golan- revenir là d’où ils ont été délogés, tout de suite. Et enfin, cesser d’accuser « d’antisémitisme » ceux qui demandent à Israël de reconnaître ses torts.

Transformer Israël en un Etat qui reconnaîtrait aux réfugiés Palestiniens leur droit à retourner chez eux, et qui accepterait de les traiter sur un pied d’égalité, dans un seul Etat, quelle que soit leur religion, ne signifierait nullement « l’anéantissement d’Israël » ni le rejet « des juifs à la mer » comme on l’entend dire parfois, mais la fin d’une forme d’Etat pratiquant la discrimination religieuse et ethnique.

Le camp de la paix (3) et le camp de la guerre ne sont pas si éloignés que cela. « Le problème en Israël est qu’entre Peace Now (La Paix maintenant) et Avigdor Lieberman, il n’y a pas, contrairement à ce qu’on dit, une si grande distance idéologique. C’est une question de tactique pour savoir comment assurer au mieux un Etat juif avec une forte majorité démographique, sinon exclusive » se désole l’historien israélien Ilan Pappe(4).

Refuser de servir dans les « territoires palestiniens occupés » - ce terme « territoires » est aussi ambigu qu’inacceptable- tout en s’attribuant le droit de rester sur cette terre volée, qui contraindra Israël à faire la guerre aux Arabes pour des siècles, n’est pas une position humainement et moralement acceptable.

Etre autorisé à aller s’établir à Tel Aviv, à Jerusalem ou à Haïfa -et être de facto éligible à la nationalité israélienne- parce que l’on est de confession juive, s’installer à demeure dans des maisons où les propriétaires, qui en ont été brutalement dépossédés, n’ont pas le droit de revenir et doivent rester à croupir dans des ghettos misérables en Cisjordanie, en Syrie, au Liban, à Gaza, est-ce normal ? Certes non. Mais rien n’est normal en Israël.

 

1)       http://www.ism-suisse.org/news/article.php?id=6027&type=communique&lesujet=Rapports  - De septembre 2000 à fin 2006, 5'150 Palestiniens ont été tués par les forces israéliennes et les colons, dont 1151 enfants. Le  nombre d’attaques israéliennes depuis le sommet de Charm-El-Sheikh en février 2005, s'élève à 70.079.

2)          « Anarchistes contre le mur » est un mouvement israélien, dont le splendide Yonatan Pollack, 25 ans, est l’initiateur, qui compte quelques douzaines de jeunes militants. Tous les vendredis ils participent -en association avec l’International Solidarity Movement palestinien (ISM)et des internationaux de passage- à la manifestation contre la construction du mur, notamment à Bil'in. Ils sont très appréciés des villageois palestiniens qui les connaissent et mènent à leur côté des actions de résistance non violente directes et, comme eux, se font brutaliser par les soldats israéliens. Tout comme le petit groupe de militants de Tayoush.

3)          Il comprend notamment : Gush Shalom (fondé en 1993 par Uri Avnery), Femmes en Noir, Bat Shalom, (Comité contre la démolition des maisons), Physicians for Human Rights. Ce camp de paix ne compte que quelques centaines de membres actifs mais il dispose dehors d’un large soutien politique et financier, de la part d’organisations juives et associations pro-palestiniennes. En France, il a le soutien, notamment, de l’Association française Palestine Solidarité (AFPS) et de l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP), dont il inspire la ligne politique : deux Etats (« chacun chez soi »), la reconnaissance que le retour des refugiés est un droit, mais qui toutefois « ne peut plus être applicable ».

4)          http://electronicintifada.net/v2/article6206.shtml

Silvia Cattori. 19 janvier 2007

 


Source : Silvia Cattori


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