The
Electronic Intifada
Le
piège de la reconnaissance d’Israël
Jonathan
Cook
14 décembre 2006
http://www.electronicintifada.net/v2.artucke6229.shtml
Le problème
auquel les dirigeants palestiniens sont confrontés, dans leur
tentatives désespérées de soulager un tant soit peu les
souffrances collectives de millions d’habitants des territoires
occupés, se résumerait en quelques mots. Tel un garnement qui
n’aurait qu’à se résoudre à prononcer le mot « désolé »
pour être autorisé à sortir de la chambre où ses parents
l’ont consigné, le gouvernement Hamas n’aurait qu’à dire
« nous reconnaissons Israël » et – sommes-nous sommés
de croire – un tsunami d’aides financières et de bonne volonté
internationales se déverserait à flots sur la Cisjordanie et la
bande de Gaza…
Telle était, tout
du moins, l’essence d’un récent discours du Premier ministre
israélien Ehud Olmert, au cours d’une visite dans le Néguev,
discours dans lequel il suggéra l’idée que son pays tendrait
une main généreuse vers les foules affamées de Gaza, à travers
les sables du désert, si – et seulement, si – le Hamas
voulait bien faire acte de contrition. « Reconnaissez-nous,
et nous sommes prêts à parler de paix », disait
l’allusion voilée mais néanmoins transparente.
Une chose est sûre :
le peuple palestinien a été puni de manière scélérate
d’avoir procédé à un choix démocratique, au début de cette
année, en élisant un gouvernement Hamas qui n’a pas l’heur
de plaire aux puissances occidentales, dont Israël :
- imposition d’un
blocus économique privant l’Autorité palestinienne des revenus
lui permettant de financer les services vitaux et de rémunérer
son personnel pléthorique ;
- des millions de
dollars de taxes dues aux Palestiniens sont illégalement gelés
par Israël, ce qui ne fait qu’exacerber la crise humanitaire ;
- un blocus
physique sur Gaza, imposé par Israël, interdit depuis lors aux
Palestiniens d’exporter leurs productions, constituées
essentiellement de produits agricoles périssables, et
d’importer des produits indispensables, dont notamment certaines
denrées alimentaires et la plupart des médicaments ;
- les frappes
militaires israéliennes ont endommagé les infrastructures
vitales de Gaza, dont les réseaux d’eau potable et d’électricité,
tout en tuant des habitants à l’aveugle ;
- enfin, des
milliers de familles sont déchirées, Israël prétextant de son
conflit avec le Hamas pour ne pas renouveler les visas des
Palestiniens détenteurs d’un passeport étranger.
La formule magique
« Nous vous reconnaissons » pourrait mettre fin à ces
souffrances. Alors, pourquoi leur Premier ministre, Ismail Haniyyéh,
a-t-il juré, la semaine dernière, qu’il ne les prononcerait
jamais, à aucun cas ? Le Hamas est-il tellement empli de
haine et de mépris pour Israël en tant qu’Etat juif qu’il
serait incapable de faire cette simple déclaration de bonne
intention ?
Il est certes très
facile d’oublier que même si les conditions se sont détériorées
considérablement dans la période récente, les problèmes des
Palestiniens n’ont pas commencé avec l’élection du Hamas.
L’occupation israélienne entre dans sa quatrième décennie, et
aucun dirigeant palestinien n’a jamais été capable
d’arracher à Israël une quelconque promesse de réelle
souveraineté et, ce, sur la totalité des territoires occupés :
ni les mukhtars, ces dirigeants locaux dans une très large mesure
complaisants, lesquels, durant des décennies, furent les seuls
représentants autorisés à parler au nom des Palestiniens après
l’expulsion de la direction nationale palestinienne ; ni
l’Autorité palestinienne sous la direction laïque de Yasser
Arafat, qui revint dans les territoires occupés au milieu des années
1990, l’OLP ayant reconnu Israël ; ni le leadership dirigé
par son successeur Mahmoud Abbas, un « modéré » qui
fut le premier à en appeler à ce que fût mis fin à l’Intifada
armée ; ni même, aujourd’hui les dirigeants du Hamas, même
s’ils en appellent depuis longtemps à une trêve [hudnah] de
longue, premier pas pour bâtir la confiance.
De même, rares
sont les Palestiniens à douter du fait qu’Israël continuerait
à renforcer son occupation
– exactement de la même manière qu’il l’a fait durant les
années dites « d’Oslo », supposées d’établissement
de la paix, au cours desquelles le nombre des colons juifs a doublé,
dans les territoires occupés – quand bien même le Hamas serait
évincé du pouvoir et même si un gouvernement d’union
nationale, ou un gouvernement de technocrates, voire même un
gouvernement Fatah pur sucre prenait sa place.
Il y a, pour Israël,
à l’obtention de cette petite concession de la part du Hamas,
un enjeu bien plus important que la plupart des observateurs ne
l’imaginent. Une déclaration de reconnaissance d’Israël par
le Hamas signifierait en effet non seulement que les conditions préalables
imposées par Israël à toute négociation seraient réunies,
mais aussi que le Hamas serait tombé tête baissée dans le même
piège qui avait été tendu, naguère, à Arafat et à son Fatah.
Ce piège a pour finalité de s’assurer du fait qu’une
quelconque solution pacifique au conflit est totalement
impossible.
Cette impossibilité,
ce piège la garantit de deux manières concomitantes :
Tout d’abord,
comme l’auront déjà compris tout du moins les observateurs
attentifs, la reconnaissance par le Hamas du « droit à
l’existence » d’Israël signifierait, de fait, que le
gouvernement palestinien abandonnerait publiquement sa propre
finalité, à savoir lutter en vue de la création d’un Etat
palestinien viable.
En effet, Israël
refuse de démarquer ses propres frontières futures, laissant
ouverte la question de savoir ce qu’il considère être
l’extension de « son existence » dont il exige du
Hamas qu’il la reconnaissance. Nous savons bien que personne, au
sein du leadership israélien, n’envisage un quelconque retour
aux frontières israéliennes antérieures à la guerre de 1967,
ni même à quelque chose d’approchant.
Sans un retrait à
l’intérieur de ces frontières antérieures à 1967 (auquel
devrait s’ajouter un injection substantielle de bonne volonté
israélienne, afin de garantir un passage absolument libre entre
la bande de Gaza et la Cisjordanie), l’émergence d’un
quelconque Etat palestinien viable est totalement impensable.
Et, bien entendu,
on pourrait attendre indéfiniment l’injection de bonne volonté
israélienne, aussi chiche puisse-t-elle être… Tous les
dirigeants israéliens ont refusé de reconnaître les
Palestiniens, d’abord en tant que peuple et, aujourd’hui, en
tant que nation. Et, avec l’hypocrisie occidentale typique dès
lors qu’il s’agit des Palestinien, personne n’a jamais suggéré
l’idée qu’il fallait qu’Israël s’engage à cette
reconnaissance.
De fait, les
gouvernements israéliens successifs se glorifient de leur refus
à étendre aux Palestiniens cette même reconnaissance qu’ils
exigent d’eux. Le premier ministre travailliste de sinistre mémoire
Golda Meir avait déclaré que les Palestiniens n’existaient
pas, ajoutant que les frontières d’Israël, en 1971, étaient déterminées
par les lieux où vivaient des juifs, et certainement pas par une
ligne tracée sur une carte. Exactement au même moment, elle
donnait l’ordre que la Ligne Verte, frontière d’Israël
jusqu’à la guerre de juin 1967, fût effacée de toutes les
cartes officielles de la région !
Ce legs a fait les
gros titres des journaux, la semaine dernière, la ministre
colombe de l’éducation nationale, Yuli Tamir, ayant suscité un
scandale en publiant un décret stipulant que la Ligne Verte
devait être réintroduite dans les manuels scolaires israéliens.
Il y eut des protestations véhémentes contre la prétendue
« idéologie d’extrême gauche » de la ministre,
organisée par des hommes politiques et des rabbins.
D’après des pédagogues
israéliens, il n’y a pratiquement aucune chance que les manuels
de géographie montrent à nouveau la Ligne Verte, laissent tomber
les références à la « Judée – Samarie » (noms
bibliques des régions composant la Cisjordanie) ou encore
comportent les noms de villes en arabe sur les cartes d’Israël.
Les éditeurs privés qui impriment ces manuels refuseraient tout
net d’encourir les surcoûts entraînés par la nécessité de réimprimer
les cartes, a indiqué le Professeur Yoram Bar-Gal, recteur de la
faculté de Géographie de l’Université de Haïfa.
Sensible au tort
que cette querelle risquait de causer à l’image internationale
d’Israël, et conscient du fait que la directive de Tamir n’a
aucune chance d’être mise un jour en application, Olmert a donné
un accord de principe à cette modification. « Rien ne
s’oppose à ce que la Ligne Verte figure sur les cartes »,
a-t-il dit. Mais dans une déclaration rendant son accord
totalement creux, il a ajouté : « Mais il faut impérativement
souligner que tant la position du gouvernement que le consensus
populaire excluent tout retour aux frontières de 1967 ».
Le deuxième élément
du piège est, de très loin, généralement beaucoup moins bien
comprise. Elle explique l’étrange formulation à laquelle
recourt Israël dans la requête qu’il adresse au Hamas. Israël
ne demande pas simplement au Hamas de « reconnaître Israël »,
il lui demande de « reconnaître le droit à l’existence
d’Israël ». La différence n’est pas simplement
d’ordre sémantique.
L’idée qu’un
Etat puisse avoir un quelconque droit n’est pas seulement
bizarre : elle est totalement étrangère au droit
international. Les personnes ont des droits, les peuples ont des
droits. Les Etats, non. Et c’est précisément là le point
crucial : quand Israël exige que son « droit à
l’existence » soit reconnu, le sous-entendu est que nous
ne parlons pas, ici, de la reconnaissance d’Israël en tant
qu’Etat nation ordinaire, mais en tant qu’Etat d’une
population spécifique : les juifs.
En exigeant la
reconnaissance de son droit à l’existence, Israël s’assure
du fait que les Palestiniens admettent la nature de l’Etat d’Israël
comme si elle était gravée dans le marbre, à savoir sa nature
d’Etat juif exclusiviste, d’Etat qui privilégie les droits
des juifs au détriment de tous les autres groupes ethniques,
religieux et nationaux vivant sur le même territoire. La question
des implications d’un tel Etat est très largement débattue,
tant par Israël que par les pays occidentaux.
Pour la plupart des
observateurs, cela signifie tout simplement qu’Israël doit
refuser le retour de millions de Palestiniens qui croupissent dans
des camps de réfugiés dans l’ensemble du Moyen-Orient et dont
les maisons, en Israël, ont été confisquées au plus grand
profit des juifs. Si on permettait à ces réfugiés palestiniens
de revenir chez eux, la majorité juive serait compromise du jour
au lendemain, et Israël ne pourrait plus se targuer d’être un
Etat juif, sauf dans la mesure où l’Afrique du Sud sous
apartheid était – officiellement – un Etat « blanc ».
Apparemment, le
Premier ministre italien Romano Prodi, fait sienne cette
conclusion, après une tournée de lobbying effectuée dans les
capitales européennes par la télégénique ministre israélienne
des Affaires étrangères, Tzipi Livni. D’après le Jerusalem
Post, Prodi dit en privé qu’Israël devrait recevoir des
garanties, de la part des Palestiniens, quant au fait que son
caractère d’Etat juif ne sera jamais remis en question…
Les responsables
israéliens trinquent à ce qu’ils considère la première
fissure dans le soutien apporté par l’Europe au droit
international et aux droits des réfugiés. « Il est
important d’obtenir que tout le monde accorde ses violons, sur
cette question », a ainsi déclaré un responsable israélien
au Jerusalem Post.
Mais en réalité,
les conséquences d’une reconnaissance d’Israël en tant qu’Etat
juif par les dirigeants palestiniens vont bien au-delà de la
seule question du devenir des réfugiés palestiniens. Dans mon
livre Blood and Religion [Sang et religion], j’ai identifié ces
conséquences terribles pour les Palestiniens des territoires
occupés et pour les Palestiniens, au nombre d’environ un
million, qui vivent à l’intérieur d’Israël en qualité de
citoyens jouissant – théoriquement – des mêmes droits que
les citoyens israéliens juifs.
Je démontre que
c’est ce besoin de pérenniser le caractère juif de l’Etat
d’Israël, à n’importe quel prix, qui est en réalité le
moteur du conflit d’Israël avec les Palestiniens. Aucune
solution ne sera possible aussi longtemps qu’Israël persistera
à privilégier les juifs au détriment d’autres groupes
ethniques en matière de citoyenneté, et à déformer les réalités
territoriales et démographiques de la région à seule fin de
s’assurer que les chiffres continuent à peser en faveur des
juifs.
Bien qu’en fin de
parcours le retour des réfugiés représente la plus grande
menace pour l’ « existence » d’Israë, Israël
est confronté à une préoccupation démographique encore bien
plus immédiate : le refus des Palestiniens vivant en
Cisjordanie de céder les parties de leur territoire qu’Israël
convoite (et qu’il ne veut connaître que sous les vocables
bibliques de Judée et Samarie).
D’ici dix ans,
les Palestiniens des territoires occupés et le million de
citoyens palestiniens vivant à l’intérieur d’Israël seront
plus nombreux que les juifs, tant ceux qui vivent en Israël que
les colons juifs en Cisjordanie.
Ce fut d’ailleurs
là une des raisons principales du « désengagement »
israélien de la bande de Gaza : Israël était en mesure de
prétendre que, même s’il continuait à occuper militairement
ce petit territoire, il n’était désormais plus responsable de
la population qui y vivait. En retirant quelques milliers de
colons de la bande de Gaza, ce ne sont pas moins de 1, 4 million
de Gazaouis qui furent effacés du panneau d’affichage des
scores démographiques…
Mais même si la
‘perte’ de Gaza a repoussé de quelques années la menace
d’une majorité palestinienne dans le grand Etat ambitionné par
Israël, elle n’a pas magiquement garanti la pérennité d’Israël
en tant qu’Etat juif. En effet, les citoyens palestiniens d’Israël,
même s’ils sont une minorité ne représentant pas plus d’un
cinquième de la population israélienne, sont potentiellement en
mesure de faire s’écrouler la totalité du château de cartes.
Durant la décennie
écoulée, ils n’ont cessé de demander qu’Israël soit réformé
et passe de son statut d’Etat juif, qui les discrimine systématiquement
et qui dénie leur identité palestinienne, à celui d’ « Etat
de tous ses citoyens », c’est-à-dire de démocratie libérale,
qui accorderait à tous ses citoyens des droits égaux, qu’ils
s’agisse de ses citoyens juifs ou de ses citoyens arabes.
Israël a qualifié
la revendication d’un Etat pour tous ses citoyens de subversion
et de trahison, car il s’est rendu compte qu’au cas où Israël
deviendrait une démocratie libérale, alors les citoyens
palestiniens pourraient à juste titre exiger :
-
le droit d’épouser des Palestinien(ne)s des territoires occupés
et de la diaspora, ce qui leur confèrerait la citoyenneté israélienne
– ce que des responsables ont qualifié de « droit de
retour par la porte de service » ;
- le droit de
ramener en Israël des parents réfugiés palestiniens, en vertu
d’un programme de Droit au Retour qui ne serait qu’un pâle
reflet de la loi, bien réelle, elle, dite « Loi du Retour »,
qui garantit à tout juif, n’importe où dans le monde, un droit
automatique à la citoyenneté israélienne.
Afin d’écarter
la première de ces menaces, Israël a adopté en 2003 une loi
raciste de manière flagrante, qui rend pratiquement impossible
aux Palestiniens de nationalité israélienne d’amener un
conjoint palestinien en Israël. Pour l’instant, ces couples
n’avaient pratiquement pas d’autre choix que demander le droit
d’asile à l’étranger, au cas où d’autres pays s’avéreraient
désireux de les accueillir.
Mais à l’instar
du désengagement de Gaza, ce texte n’est qu’une tactique
dilatoire, et certainement pas une solution au problème de l’ « existence »
d’Israël. Aussi, en coulisses, Israël continue-t-il à suggérer
des idées qui, prises ensemble, aboutiraient à l’expulsion de
larges secteurs de la population palestinienne d’Israël au-delà
de ses frontières, et à la déchéance de leurs droits
politiques de tous les « citoyens » arabes restant –
à moins qu’ils ne jurent loyauté à l’ « Etat
juif et démocratique », renonçant du même coup à leur
exigence qu’Israël se réforme lui-même afin de devenir une démocratie
progressiste.
Pour l’Etat juif,
comme ce fut le cas, il n’y a pas si longtemps, pour
l’apartheid des Blancs en Afrique du Sud, c’est la fin des
haricots. Les Israéliens en sont conscients, qui se disent :
« si nous voulons survivre, alors nous devons être à même
de faire n’importe quoi afin de nous maintenir au pouvoir, même
si cela signifie violer systématiquement les droits humains de
tous ceux que nous dominons et qui n’appartiennent pas à notre
propre groupe [ethnique] ».
En fin de compte,
les conséquences du fait de permettre à Israël de demeurer un
Etat juif seront ressenties par nous tous, où que nous vivions
sur la Planète. Et ce, non seulement en raison des retombées de
la colère persistante et croissante des mondes arabe et musulman
devant le deux poids – deux mesures perpétré par l’Occident
entre Israël et les Palestiniens.
Etant donné la
conception qui est celle d’Israël, selon laquelle la chose la
plus urgente n’est ni la paix ni un règlement régional avec
ses voisins, mais bien, en revanche, la nécessité de garantir
une majorité juive, à n’importe quel prix, afin de protéger
son « existence », Israël ne pourra qu’agir d’une
manière qui mette en danger la stabilité tant régionale que
mondiale.
Un petit avant-goût
nous en est suggéré par le rôle joué par les partisans d’Israël
à Washington dans la plaidoirie en faveur de l’invasion de l’Irak,
ainsi que, l’été dernier, par l’agression israélienne
contre le Liban. Mais elle est plus qu’évidente dans les
battements de tam-tam en préparation d’une guerre contre l’Iran…
Israël est depuis
l’origine à la tête des tentatives en vue de qualifier le régime
iranien de profondément antisémite, et de donner à voir que les
ambitions présumées qu’aurait ce pays d’acquérir des armes
nucléaires ne seraient commandées que par la seule obsession de
« rayer Israël de la carte » – une odieuse déformation
mesquine et calculée des propos du président iranien Mahmoud
Ahmadinejad.
La plupart des
observateurs ont présumé qu’Israël était sincèrement préoccupé
pour sa sécurité et par la peur d’une attaque nucléaire
contre lui, aussi improbable que soit l’idée que même les régimes
musulmans les plus fanatiques puissent s’aviser, sans être
provoqués, de lancer des armes nucléaires contre un minuscule
territoire qui renferme certains des lieux saints les plus sacrés
de l’Islam, à Jérusalem…
Mais en réalité,
il y a une autre raison pour laquelle Israël est préoccupé par
l’idée qu’un jour l’Iran puisse être doté d’armes nucléaires
– une raison qui n’a strictement rien à voir avec les notions
conventionnelles de la sécurité nationale.
Le mois passé,
Ephraim Sney, un des généraux les plus étoilés d’Israël,
qui est aujourd’hui vice-ministre de la Défense d’Olmert, a révélé
que la préoccupation première du gouvernement israélien n’était
pas la menace représentée par un Ahmadinejad lançant des
missiles nucléaires contre Israël, mais bien l’effet que la détention
par l’Iran d’armes de cette nature ne manquerait pas d’avoir
sur des juifs misant tout sur le fait qu’Israël détienne le
monopole de la menace nucléaire.
Autrement dit, le
gouvernement israélien est en train d’envisager soit sa propre
frappe préemptive contre l’Iran, soit l’idée d’inciter les
Etats-Unis à procéder eux-mêmes à une attaque de cette nature
– en dépit des conséquences terribles qu’elle aurait pour la
sécurité mondiale – au simple motif qu’un Iran devenu
« nucléaire » risquerait de faire d’Israël un
endroit moins attractif pour les juifs, conduisant à une
augmentation de l’émigration [des juifs faisant leur « yorda »,
c’est-à-dire disant bye-bye à Israël, ndt] et renversant, de
ce fait, la balance démographique en faveur des Palestiniens.
Une guerre régionale
– et éventuellement une guerre mondiale – risque d’être déclenchée
simplement afin de s’assurer que l’ « existence »
d’Israël en tant qu’Etat offrant des privilèges exclusifs
aux juifs puisse perdurer.
Dans notre propre
intérêt, à nous tous, nous devons espérer que les Palestiniens
et leur gouvernement Hamas tiendront bon, et continueront à
refuser de reconnaître « le droit à l’existence d’Israël ».
[* Jonathan Cook est écrivain et journaliste, il vit
à Nazareth, en Israël. Son livre (en anglais) Blood and Religion :
The Unmasking of the Jewish and Democratic State [Sang et religion :
Bas les masques, l’Etat « juif et démocratique » !]
est publié par Pluto Press.]
Traduit de l'anglais par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala,
le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique. Cette
traduction est en Copyleft pour tout usage non-commercial : elle
est libre de toute reproduction, à condition de respecter son intégrité
et de mentionner auteurs et sources.
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