Monsieur le Premier Ministre, Madame la
Garde des Sceaux,
C'est avec
stupéfaction et indignation que nous avons pris connaissance de
votre discours au dîner du CRIF le 3 février 2010, concernant le
boycott des produits israéliens. Nous sommes pour le moins
scandalisés que vous ayez prétendu que nous appelions au boycott
des produits casher.
Nous vous invitons à consulter la Charte
de la campagne de boycott à laquelle nous adhérons, sur le site
de la campagne BDS France ; vous pourrez lire au paragraphe 3 :
« Notre
action est éthique, citoyenne et politique. Elle s’inscrit dans
notre combat permanent contre toute forme de racisme. Elle ne
vise pas des personnes ou des groupes en raison de leur origine
ou de leur religion juive, ni leurs entreprises ou leurs
produits.
Nous faisons une
différence évidente entre un produit israélien que nous
boycottons et un produit casher produit par une entreprise non
israélienne que nous ne boycottons pas.
Ce boycott ne vise pas la société israélienne ni les individus
qui la composent en tant que tels, il vise la politique
coloniale d’occupation israélienne et ses partisans. »
Vous-même, au Parlement, Madame la Garde
des Sceaux, aviez déclaré le 20 mai 2009, dans une réponse au
député Eric Raoult à l’Assemblée Nationale :
« Depuis
le début du conflit israélo-palestinien au mois de décembre
2008, plusieurs associations de défense de la cause
palestinienne sont intervenues dans des grandes surfaces en
appelant au boycott des produits en provenance d’Israël ou de
pays supposés apporter une aide à ce pays (…). Ces opérations,
il faut bien le préciser, touchent des produits importés
d’Israël et non des produits casher ... »
Vous aviez
raison, d’autant que, même un esprit simple, peut comprendre que
le boycott des produits casher ne s'adressant par définition
qu'aux juifs pratiquants, outre qu’il serait éthiquement et
politiquement condamnable, serait particulièrement stupide et
inefficace !
Alors pourquoi ce revirement ?
Devons-nous
penser qu’il n’est que la conséquence des pressions de Daniel
Shek, l’ambassadeur d’Israël en France qui déclarait :
« Nous
encourageons les organisations à porter plainte contre les
organisateurs du boycott. Nous conduisons des activités
politiques à l’ambassade
en liaison directe
avec des ministres,
des organisations, des étudiants et des consommateurs, qui se
réveillent ».
Devons-nous penser que vous entendez
prendre faits et causes pour les thuriféraires de l’état
d’Israël ?
Devons-nous
également en déduire qu’il s’agit pour vous de préparer le
terrain pour les procureurs afin qu’ils appliquent des
qualifications totalement hors de proportion avec la nature même
de l’acte reproché, tout particulièrement dans le cas de l’« individu »,
terme méprisant utilisé à dessein pour satisfaire votre public
d’un soir. Cet individu est en fait une jeune femme révoltée,
comme nous tous, par les conditions de vie inhumaines infligées
par un état colonisateur à un peuple martyre, à l’image de ce
blocus ignoble de Gaza, qualifiable lui de crime de guerre
puisqu’il s’agit de « punir » un peuple entier, ce qui est
interdit bien évidemment par toutes les lois internationales ?
Nous revendiquons le droit de critiquer
l'état d'Israël sans être aussitôt taxés d'antisémitisme. Cet
amalgame usé jusqu'à la corde ne fonctionne plus, et, comme nous
le constatons tous les jours, aura de plus en plus un effet
boomerang, ce qui n’est que justice.
Oui, nous osons
critiquer l'état d'Israël, et comment faire autrement vis à vis
d'un état qui commet des crimes de guerre et des crimes contre
l’Humanité, affame en ce moment même des populations réfugiées à
Gaza, pratique la discrimination, vole les terres palestiniennes
en colonisant sans cesse, pratique les "attentats ciblés"
véritable terrorisme d'état (Dubaï par exemple…) et ne respecte
en rien la justice internationale… justice dont la France
devrait faire respecter les clauses.
Comment pouvez-vous défendre à ce point un état qui, seul au
monde, n’a jamais respecté aucune des résolutions de l’ONU,
viole sans cesse l’article 2 de l'accord d’association avec la
communauté européenne destiné à favoriser les exportations
israéliennes. Nous savons que bon nombre de ces produits
proviennent des trop fameuses colonies (le mot d’ailleurs se
suffit) où des ouvriers palestiniens travaillent, esclaves sur
leur propre sol, afin que les bénéfices reviennent aux colons et
à l'état d’Israël.
Mais où donc la fierté de notre pays,
souvent présenté comme patrie des droits de l’homme ?
Faites votre devoir de responsables
politiques, faites respecter le Droit International par Israël
et les citoyens n'auront pas besoin de boycotter les produits
israéliens. Le boycott a eu raison de l'apartheid en Afrique du
Sud, il se développera en France.
C'est pourquoi
nous vous demandons de revoir vos positions ; nous avons pour
nous désormais l’opinion publique. Notre détermination est
grande à dire le droit des peuples et à le faire respecter en
appelant à poursuivre les actions de boycott.
Nous cesserons dés qu’un accord de paix sera enfin scellé et que
justice sera rendue au peuple palestinien.
Justice sera faite lorsque la France, l’Europe et le Monde
auront appliqués leur propre feuille de route : la création d’un
état palestinien.
Pour le collectif 69
de soutien au peuple palestinien
Le Président
Jérôme Faÿnel