Interview
Les Etats-Unis et
la Syrie :
histoire d'une hostilité contemporaine
Thierry Meyssan
Thierry
Meyssan
Lundi 23 septembre 2013
En direct de Damas : interview
téléphonique de T. Meyssan par comaguer
(comité
comprendre et
agir contre la
guerre, Marseille).
Cette interview est la dernière partie
de l’émission sur la Syrie que
comaguer a réalisée le 11 septembre
2013 à Radio Galère (88.4 Marseille,
http://www.radiogalere.org/ , où les
points suivants venaient d’être
abordés :
1. Le passé lointain, évocation rapide :
le syriaque – empire romain – omeyyade –
empire byzantin –
la Syrie
disputée.
2. L’empire ottoman, son mode de
fonctionnement : la « grande Syrie ».
3. Le dépeçage de l’empire ottoman par
le colonialisme européen et les nœuds du
contexte actuel : Sykes–Picot, Balfour.
4. L’entre deux guerres, le mandat
français, la montée du nationalisme, sa
répression, le traité de 1936, deux
personnages : Al Atassi, Faris
al-Khoury.
5. L’indépendance et la création
d’Israël contre la position ferme de la Syrie.
6. La difficile affirmation de
l’indépendance face aux
multiples manœuvres
anglo-saxonnes directes ou indirectes et
finalement la mise à l’index par Alen
Dulles et Eisenhower comme « état pro
soviétique ».
7. L’isolement régional progressif après
le retournement de Sadate (guerre de
1973), la soumission de
la Jordanie
et le jeu dangereux de Saddam
Hussein (guerre Irak-Iran profitant
finalement à l’Occident) ; front du
refus.
8. La gestion de l’isolement après la
chute de l’URSS et la confirmation de
l’acharnement anti-syrien d’Israël et
des Etats-Unis (guerre du Liban/Hariri –
Syria Accontability Act).
Nous avons conservé dans la
transcription le style oral de la
communication téléphonique et du direct.
Comaguer :
Dans la longue histoire de la Syrie, 1991
est une année tournant. Son seul
appui diplomatique et politique :
l’URSS,
a disparu. Pour les Etats-Unis,
désormais seule puissance mondiale et
pour leur allié israélien renverser le
régime syrien, soutien
ferme et déterminé à la cause
palestinienne
et unique état
frontalier d’Israël
n’ayant pas conclu d’accord de
paix avec son voisin devient un objectif
à atteindre sans délai. Comment vont
se dérouler les deux décennies
qui séparent cette année-là de la guerre
actuelle ?
C’est la question que nous posons à
Thierry Meyssan en ligne depuis Damas.
T. Meyssan :
George Bush Père convoque
la Conférence
de Madrid (30 oct. 1991) avec son
secrétaire d’Etat James Baker, et il
oblige Israël à participer à cette
conférence pour une paix régionale qui
inclurait à la fois
la Palestine
et
la Syrie. Le
début de la conférence se passe assez
bien mais en réalité le Premier ministre
israélien de l’époque, Yitzhak Shamir,
ne veut pas négocier et la conférence va
finir par échouer.
Après ça, c’est Bill Clinton qui
va progressivement reprendre contact
avec la Syrie et essayer d’organiser lui aussi une paix
régionale. Ce qui est intéressant, c’est
que B. Clinton, à la fin de son second
mandat, était presque parvenu à
organiser la paix et là encore, c’est le
Premier ministre israélien de l’époque,
Ehud Barak, qui au dernier moment, alors
qu’il avait négocié et donné son accord
pour un traité de paix, va se retirer.
Il n’y aura donc pas de paix ; Barak va
se retirer du dossier et, à ce moment là
aussi, Hafez el Assad meurt. Ceci est
très bien raconté dans les mémoires de
B. Clinton ; il n’y a pas de doute
là-dessus : la Syrie recherchait vraiment la
paix et ce sont les Israéliens qui s’y
sont opposés. Commence ensuite le mandat
de G. Bush fils, et c’est là que les
choses se gâtent.
Juste après les attentats du 11
septembre 2011, en fait 3 jours après,
il y a une réunion de l’administration
Bush jr. à Camp David où il est décidé
qu’on attaquerait la Syrie. En fait les
Etats-Unis font un plan : ils disent on
va commencer par l’Afghanistan, on
continuera avec l’Irak, ensuite
la Libye
et
la Syrie, puis le
Soudan et
la Somalie ; et on
terminera avec l’Iran.
Ce qu’on voit aujourd’hui est
l’actualisation de ce plan ; mais Bush
jr. pensait attaquer la Syrie en même temps que le
Liban et que
la Libye, assez
rapidement. Sauf qu’il y a eu toutes
sortes de grains de sable dans la
machine.
D’abord du côté libyen, où M.
Kadhafi a négocié avec les Etats-Unis ;
il leur a abandonné ses armes chimiques
et son programme nucléaire, et a ouvert
son économie aux grandes industries.
Mais du côté syrien la réaction a été très différente.
La Syrie
s’attendait à être attaquée, et a
commencé à se préparer pour la guerre,
donc à renforcer ses alliances. Bachar
al Assad, le nouveau président
depuis 2000, a décidé de rembourser la
totalité des dettes que la Syrie avait vis-à-vis de
l’Union Soviétique puis, par conséquent,
de la Russie.
Ça c’est très important ; c’est
passé complètement inaperçu en-dehors du
pays pourtant ça a été un effort
terrible pour
la Syrie
de payer cette dette-là ; mais c’est
aussi ce qui lui permet aujourd’hui
d’être en bons termes avec
la Russie.
Les USA ont lancé toutes sortes
de pièges successifs. Dans la semaine
qui suit la chute de Bagdad (avril
2003), le Congrès étasunien a étudié et
voté le
Syria Accontability Act, qui est une
loi demandant au président des
Etats-Unis d’entrer en guerre contre
la Syrie sans avoir
besoin de le demander au Congrès ; Obama
pourrait actuellement lancer la guerre
sans avoir besoin de s’en référer au
Congrès.
En fait depuis 2003 le président
des Etats-Unis peut attaquer
la Syrie sans
conditions intérieures ; il y a eu
ensuite toute une succession de
sanctions prises pour essayer d’étouffer
l’économie syrienne.
En 2005 est survenu l’assassinat
de l’ancien Premier ministre libanais
Rafic Hariri : on a immédiatement
prétendu que cet assassinat avait été
organisé par la Syrie alors qu’on sait, par la façon dont cet
assassinat a été réalisé, qu’il ne peut
avoir été opéré que par quelques très
grandes puissances disposant de moyens
particuliers.
Le
résultat de tout ça est qu’une nouvelle
fois
la Syrie a été mise au
ban des nations, puisqu’elle a été
suspectée d’avoir assassiné Rafic
Hariri, qu’un Tribunal Spécial a été
créé par l’ONU : de fait, pour juger
Bachar al Assad.
Mais
au bout de deux ans d’enquête on s’est
rendu compte que tout le dossier était
faux, que les témoignages étaient
complètement truqués et il fallu
abandonner les accusations contre
la Syrie.
Comaguer :
au fait où il en est le Tribunal Spécial
pour le Liban aujourd’hui : il est en
sommeil ?
T. Meyssan :
Le tribunal existe toujours, d’ailleurs
il doit bientôt reprendre ses audiences,
mais maintenant il n’accuse plus
la Syrie, il accuse le
Hezbollah et quand il aura fini avec le
Hezbollah parce que les preuves seront
fausses, il accusera l’Iran et ça peut
durer autant de temps que nécessaire.
Mais
le plus important c’est que, comme
la Syrie a déjoué cette
accusation, il a fallu lancer une
nouvelle opération, créée par
la France
et
la Grande-Bretagne :
celle du printemps arabe.
Ce serait compliqué d’expliquer
là toute cette histoire mais il y a des
phénomènes très différents entre ce qui
s’est passé en Egypte et en Tunisie
d’une part et ce qui s’est passé en
Libye et en Syrie d’autre part.
Pour ce qui concerne la Syrie, s’est tenue au Caire
en Egypte au tout début de février 2011
une réunion à laquelle ont participé le
sénateur John Mac Cain (USA) mais aussi
des personnalités internationales ; pour
la France il y avait
BHL qui était là [réactions amusées dans
le studio], oui oui, en France ça n’a
jamais été publié ce que je vous raconte
là. Il y avait, pour
la Libye, Mahmoud
Jibril qui à l’époque était le n° 2 du
gouvernement de la Jamahiriya, et qui va
devenir subitement le chef de
l’opposition contre Kadhafi : Jibril
étant lui-même un Frère Musulman.
Et
il y avait quelques responsables syriens
en exil qui disposaient de bons moyens
de télévision soit à Londres, soit aux
Emirats. Et lors de cette réunion on
donne le feu vert parce que tout semble
prêt pour faire la révolution en Libye
et en Syrie ; donc des appels sont
lancés pour faire des manifestations
dans Damas mais personne ne bouge, ça
n’intéresse absolument personne.
Pendant plusieurs mois il va donc
y avoir des appels fréquents à la
révolution en Syrie mais sans que cela
ne suscite la participation populaire.
La seule chose qu’on voit c’est qu’il y
a un compte Facebook qui s’appelle
Syrian revolution 2011
qui a été créé début février, et, en 2-3
jours, on se retrouve avec 70 000
personnes sur ce compte. Or c’est
complètement impossible dans la mesure
où il n’y avait aucune manifestation à
ce moment-là.
C’est tout simplement un trucage
d’ordinateur et les vrais événements
vont commencer au moment où la question
libyenne est « réglée » ; à ce moment-là
on va faire venir en Syrie les
combattants qu’on avait en Libye. Et
tout d’un coup il y a des djihadistes
qui font leur apparition et qui
commencent à semer la terreur dans les
campagnes surtout : ils arrivent dans un
village, ils prennent des gens, ils les
coupent en morceaux et les jette sur la
place du village.
Dans la presse occidentale à ce
moment-là on dit qu’il y a d’énormes
manifestations en Syrie mais c’est faux,
ça n’a vraiment jamais existé. Lorsque
m-a p qui parlait tout à l’heure se
trouvait en Syrie en novembre 2011, on
racontait en Europe qu’il y avait de
grandes manifestations ; nous étions
avec des journalistes français, belges,
étasuniens ; il y en a qui ont voulu
aller voir et filmer les manifestations,
ils ne les ont jamais trouvées, parce
que ça n’a pas existé ; et pourtant on
envoyait des rapports[1],
et des images qu’on voyait sur Al
Jazeera, et d’autres chaînes en Europe :
ces images étaient tournées en studio
comme on peut le voir quand on regarde
très en détail[2].
Donc il y a eu une période en
Syrie où les gens étaient comme hébétés
par ce qui se passait ; en fait ils ne
comprenaient pas. La presse syrienne
était muette, elle n’adressait pas
d’informations alors qu’Al Jazeera et
d’autres disaient qu’il y avait une
révolution, des manifestations et une
répression.
Il
y a eu une sorte d’affolement et comme
les occidentaux passaient leur temps à
dire « Bachar doit partir »,
« d’ailleurs il est déjà parti » ( !)
etc., il s’est produit le phénomène
qu’on voit dans toutes sortes de pays :
quand ils sont attaqués, beaucoup de
gens se mettent en attente pour se
déclarer ensuite du côté du gagnant.
Et à ce moment-là il semblait que
l’OTAN allait attaquer
la Syrie
comme elle avait attaqué
la Libye, et que le
gouvernement allait être renversé et
qu’un gouvernement fantoche allait être
installé par les puissances
occidentales. Donc il y a eu un moment
où le soutien a manqué au gouvernement
syrien. Et il y a eu des gens qui ont
soutenu les djihadistes qui arrivaient.
Il y a toujours des collaborateurs,
partout, mais là, ceux qui ont été
recrutés venaient d’une classe
particulière qui avait beaucoup souffert
auparavant, depuis 2005 : souffert à la
fois des réformes économiques qui
avaient été mal faites et de problèmes
climatiques, de sécheresse, entraînant
de graves problèmes agricoles. Des gens
assez pauvres ont été obligés de quitter
le Nord de la Syrie, c’est essentiellement
dans le Nord que ça s’est passé ; et ces
gens sont venus grossir les banlieues de
Damas et d’Alep les deux grandes villes
du pays.
Parmi
ces gens-là –qui étaient généralement
très peu instruits- certains ont adhéré
à des sortes de sectes religieuses,
notamment les takfiristes : une secte
qui a juste un siècle d’existence, très
récente dans l’islam, prétendant que
ceux qui ne suivent pas exactement cette
voie, doivent être tués. Il y a donc des
gens qui ont rejoint cette secte, et qui
se sont mis à soutenir les djihadistes.
Mais ça, c’est quelques milliers de
personnes, guère plus que ça : sauf
qu’ils étaient armés. Et dans n’importe
quel pays si vous avez des milliers de
personnes armées ça peut faire des
dégâts énormes.
Comaguer :
surtout quand ces armes sont faciles à
trouver.
T. Meyssan :
Oui, et à l’époque c’était le Qatar qui
amenait des armes en Syrie ; et c’était
préparé depuis longtemps, ils avaient
des stocks d’armes déjà installés en
Syrie grâce à la complicité de
responsables des services secrets qui
avaient été corrompus.
Vous savez qu’en Syrie du fait de
la guerre permanente avec Israël les
services secrets avaient des pouvoirs
particuliers, importants ; et certains
en usaient et en abusaient. Quand on dit
que la Syrie était une dictature
c’est partiellement vrai et
partiellement faux ; ce qui est exact
c’est que certains services secrets se
mêlaient de ce qui ne les regardait pas
et venaient dans l’administration
décider de ceux qu’il fallait garder et
ceux qu’il fallait exclure.
Ces services se sont avérés être
tout à fait corrompus, extrêmement
incompétents, et ils n’ont pas été
capables de défendre la Syrie. Aujourd’hui
ils ont perdu les pouvoirs
extraordinaires qu’ils avaient pris. Le
pays est tout à fait démocratisé.
Comaguer :
Alors ça veut dire que ces services ont
été remplacés par des gens compétents ?
T. Meyssan :
En fait ces services secrets s’étaient
développés de manière extravagante et
aujourd’hui beaucoup de leurs
responsables ont été renvoyés ou se sont
enfuis à l’étranger ; du coup, il y a
beaucoup moins de gens dans ces services
et il ne reste que ceux qui faisaient
bien leur travail.
Le Qatar a donc amené des armes
en grande quantité mais il y avait déjà
des stocks d’armes qui étaient là ;
prévus à l’avance, et les Israéliens
étaient chargés de la distribution des
armes. C’est quelque chose qu’on
n’explique pas, ça, en Europe ; en fait
oui… ce sont toujours les Israéliens qui
distribuent les armes, sur place, parce
que les qataris avaient l’argent mais
n’avaient pas la main d’œuvre
Comaguer
:
la division du travail !
T. Meyssan
Ces groupes ont commencé à circuler et à
disposer d’un commandement centralisé
qui était sur une base en Turquie. Mais
ils avaient à l’époque un armement assez
rudimentaire, avec des moyens de
communication cryptés via satellite, et
leurs systèmes centralisés en Turquie ;
ils recevaient les instructions de
l’OTAN depuis la Turquie.
Au début on pouvait avoir
l’impression qu’il y avait des troubles
simultanément dans tout le pays ; mais
ce n’est pas vrai et si on reporte les
différents incidents sur une carte on se
rend compte qu’un jour ils sont dans une
ville, le lendemain ils sont 20kms plus
loin. C’est quelque chose d’itinérant.
Mais
il y a eu des troubles à quelques
endroits particuliers beaucoup plus
importants qu’à d’autres.
D’abord dans le Sud, à Deraa, qui
était jusque là le fief absolu du parti
Baas, le parti historique de la Syrie. Là bas des
baasistes sont passés du côté des
Israéliens, je dis israéliens parce que
la première manifestation a eu lieu à
Deraa où on a prétendu que la police
avait arrêté des enfants, torturés etc.,
tout cela est complètement faux ; en
fait à la première manifestation les
gens ont commencé le cortège, puis
brusquement ils ont reçu un ordre et
sont sortis de la ville pour aller
attaquer un bâtiment à l’extérieur de
l’agglomération : ce bâtiment était
celui où les services syriens
surveillaient ce qui se passait dans
leur territoire du Golan occupé par
Israël.
Après il y a eu un événement très
important, fin 2011 début 2012 :
l’institution de l’Etat islamique
installé à Bab Amr à Homs : des
takfiristes syriens se sont réunis,
environ 3-4000 combattants, et ont pris
possession d’un quartier, ils se sont
retranchés là-dedans et ils ont décrété
qu’ils constituaient un état islamique
indépendant. Avec notamment leur propre
tribunal, où tous les gens qui ne leur
plaisaient pas étaient condamnés à mort,
égorgés en public ; ça a été une
boucherie.
Sur place la population avait
quitté le quartier à l’exception d’une
quarantaine de familles qui soutenaient
ce mouvement takfiriste.
Finalement cet émirat est tombé et au moment où il est tombé les
gens qui étaient à l’intérieur se sont
rendus et depuis il n’y a plus, plus du
tout, de soutien syrien à ce mouvement.
Maintenant tous les combattants sont
étrangers.
Comaguer :
c’est important mais on va
malheureusement devoir
conclure l’émission. Vous récusez donc
le terme de guerre civile ?
T. Meyssan :
Oui parce que dans une guerre civile les
familles sont
divisées, s’entre-déchirent, les gens
s’entretuent.
Ici le pays est attaqué de l’extérieur, comme le Nicaragua l’a été
dans les années 80. Ce qui surprend
c’est qu’il y a une quantité énorme de
combattants qui arrivent sans cesse.
Lakhdar Brahimi, qui n’est certes pas
favorable à Bachar al Assad, a déclaré
en juin dernier qu’il y avait 40 000
combattants étrangers en Syrie. Et
40 000 c’est ce qu’il était obligé de
reconnaître ; et il parlait de
combattants vivants car il en meurt en
grande quantité tous les jours mais il y
en a d’autres qui arrivent.
Comaguer :
pour les remplacer. On dit qu’il n’y
aura peut-être pas de bombardements,
finalement, mais si les combattants
continuent à arriver…
T. Meyssan :
Tant que des combattants arrivent la
guerre dure, mais si on arrête le flux
de ces combattants c’est la paix en deux
mois ici.
Ce qui est important c’est que
les Etats-Unis au début, en 2001, quand
ils ont décidé cette guerre, avaient une
raison pour ça. A l’époque on pensait au
« pic pétrolier » et on pensait qu’il y
aurait une pénurie de ressources des
énergies fossiles dans les années
suivantes. Ce qui impliquait donc que
les Etats-Unis avaient besoin de faire
main basse sur le gaz encore inexploité
de la Syrie. Mais maintenant
le marché de l’énergie est complètement
changé puisqu’on utilise d’autres formes
de pétrole que le crude
oil, il y a le gaz de schiste etc.
Il
n’y a donc plus de raisons stratégiques
pour les Etats-Unis d’être en guerre
ici.
C’est pour ça qu’en fait ils
devraient se sortir de cette affaire
déjà depuis un bon moment.
Pour les Etats-Unis, la question
maintenant est celle de leur statut ;
ils n’ont plus aucun intérêt à cette
guerre mais s’ils se retirent la tête
basse, ils ne seront plus la grande
puissance qu’ils ont été. Et tout tourne
autour de ça ; et c’est pour ça que
l’appel sur les armes chimiques a été un
moyen élégant de les sortir de là, quand la Syrie a dit on va détruire le
stock d’armes chimiques dont on est bien
encombré parce qu’on les a pour des
raisons historiques mais elles sont
totalement inutilisables.
Quand
on dit on va les détruire, tout le monde
est content, et les Etats-Unis peuvent
partir la tête haute : c’est absolument
parfait.
[1]
Lors de ce séjour (nov. 2011),
une journaliste belge qui s’est
présentée comme free-lance et
envoyée, nous a-t-elle dit, par
une non mieux spécifiée « presse
chrétienne belge », est partie
un jour toute seule à Homs, et
nous a dit le soir qu’elle avait
circulé pendant plusieurs heures
dans la ville, en changeant
plusieurs fois de taxis – « pour
déjouer la surveillance du
régime »- en allant un peu à
l’aveuglette, à la recherche de
ces manifestations démocratiques
plus trop massives mais en tout
cas fréquentes dont parlaient
ses collègues journalistes en
Europe de l’ouest. Elle a
reconnu n’en avoir croisé aucune
et, dans une logique imparable,
nous en a conclu qu’elle n’avait
« pas été aux bons endroits »…
Aux dernières nouvelles, cette
journaliste travaillerait
maintenant pour La Vie
(ex-catholique). (m-a p.).
[2]
J’ai
assisté en juillet 2013 à la
librairie Transit à Marseille à
une réunion où, sous prétexte de
« présenter l’association Cham
collectif Syrie » (http://www.lejsd.com/index.php?s=21&r=15817
et
http://www.millebabords.org/spip.php?article23985)
les deux invitées ont parlé de
la révolution démocratique en
Syrie et de sa terrible
répression par le « régime ».
Elles ont illustré leur propos
par des extraits de vidéos des
manifestations des
« révolutionnaires démocrates ».
Or, tous les drapeaux brandis
par les manifestants dans ces
vidéos étaient les drapeaux de
la République
arabe syrienne, à 2 étoiles.
Comme j’ai fait remarquer que ça
ne pouvait être, de ce fait, que
des manifestations loyalistes et
de soutien au régime, on m’a
rétorqué sans aucune gêne
« c’est parce qu’il y avait du
vent à ces moments-là alors on
ne voit que 2 étoiles » ; comme
prévu par l’invitée, ça a fait
rire toute l’assistance (en fait
5 personnes en plus du libraire
et des deux démocrates), jusque
là horrifiée par les nombreux
détails donnés sur les atrocités
commises par le régime. Je
précise qu’il y avait parmi les
5 participants un professeur de
droit (émérite) qui a fait une
partie de sa carrière en Egypte
et est intervenu, pour soutenir
les deux intervenantes, en
disant que « Bachar est un
dictateur » ce qui semblait
clore toute discussion avec
moi ; comme je lui demandais sur
quoi il se fondait précisément
pour dire ça, il m’a répondu,
« il y a longtemps qu’on le
sait ». Apparemment, dans
l’argumentation de la séance, ça
a eu l’autorité de l’apport
scientifique et universitaire ;
et celle, indépassable, du vécu
du senti, puisque venant « de
quelqu’un qui a travaillé sur le
terrain ». Enfin pas loin. (m-a
p.).
Le
dossier Syrie
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