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Par
Fériel Berraies Guigny. Paris
France:
Grandeur ou Décadence ?
Pascal Boniface
A
l’heure ou la grandeur de la « République » française
est en question, et
à quelques mois des prochaines élections présidentielles,
Pascal BONIFACE interpelle le citoyen français, dans son dernier
ouvrage «
Lettre ouverte au future Président( e) de la République, paru
aux ( éditions Armand Colin, 01/2007). Tout un réquisitoire où
il tente de sensibiliser les « aspirants » de la
future gouvernance, à mieux comprendre la France pour mieux la positionner
dans l’échiquier international. Car il est vrai, que le blason
s’est quelque peu terni, eu égard par rapport à sa politique
européenne, mais également face aux nombreux couacs de sa
politique intérieur. Pour l’auteur, l’intérieur est
indissociable de la politique étrangère et c’est ce qui doit
motiver le choix du citoyen français. Aujourd’hui, avec la
« valse des présidentielles », certaines consciences
bien avisées se préoccupent de savoir : Qui sera celui qui
« appuiera » le bouton nucléaire ? de celui qui
sera le commandant suprême des Armées ? celui qui décidera
du destin d’une France, aujourd’hui en pleine déliquescence ?
Fériel
Berraies Guigny a
rencontré Pascal
Boniface, le directeur de l’Iris pour discuter de sa
« lettre ouverte » adressée au futur Président
de la République Française..
Entretien :
1/ Pour vous la France est en déclin,
quelles en sont les causes, selon vous ? Expliquez-nous la raison
de votre "lettre ouverte".
Je ne pense pas que la France soit
en déclin. Le débat sur le déclin de la France est un débat
extrêmement ancien que l’on peut faire remonter à la guerre de
100 ans. Avoué que c’est un déclin de long terme. Tout dépend
à quelle époque on situe le déclin, par rapport à Louis XIV,
en revanche à Napoléon 1er ? Et encore, même
dans ce cas, il faudrait être plus précis, Austerlitz ou
Waterloo ? Les victoires initiales de Louis XIV ou l’état
catastrophique dans lequel il a laissé le pays à sa mort ?
Est-ce que la France est en déclin par rapport à Juin 40, Diem
Bien Phu ou l’époque de la guerre d’Algérie ? Ce qui
est vrai par contre, c’est que le monde a extrêmement évolué,
s’est diversifié, que la puissance est diluée et qu’il faut
réinventer les moyens d’agir. La France avait pris des
initiatives fortes au cours de la guerre d’Irak, depuis, elle a
sans doute trop mis la priorité sur la réconciliation avec les
Etats-Unis, ce qui donne un aspect un peu en retrait de sa
politique internationale. L’échec du référendum sur le Traité
constitutionnel européen pèse également. Les fins de mandats
sont toujours plus difficiles car tout le monde est un peu dans
l’expectative, dans l’attente. Il peut donc y avoir un nouveau
départ en 2007. Quel que soit le (ou la) nouveau président. Mais
celui-ci ne sera pas automatique et des choix devront être faits.
Par ce livre je voudrais apporter ma contribution à ce débat.
2/Que voyez-vous se profiler,
face à ces nouvelles élections, s’agissant de la politique
arabe de France ?
Qu’appelle t-on tout d’abord
politique arabe de la France ? On sait qu’elle a beaucoup
d’adversaires, et certains la présentent comme étant une
politique dictée par des intérêts commerciaux, la France
apportant un soutien politique aux pays arabes en échange de
contrats. Rien n’est plus faux. Lorsque le Général de Gaulle
établit les bases de ce qu’on appelle la politique arabe de la
France, c’est en 1967, les pétrodollars n’existent pas et il
prend simplement des positions de principe, comme par exemple vis-à-vis
du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Il met en garde
Israël sur les dangers de l’occupation militaire. Je préfère
parler de politique à l’égard des pays arabes que de « politique
arabe ». Cette politique a fait que, très souvent, la
France a été le porte-parole de la cause palestinienne tout en
étant ferme sur la sécurité d’Israël. Certains estiment
qu’il faudrait que la France renonce à défendre le droit des
Palestiniens à avoir un Etat viable, afin de dédramatiser les
relations avec Israël ou même les Etats-Unis. Je pense que cela
ne serait ni digne, ni judicieux. Cela va-t-il continuer ?
Nicolas Sarkozy se présente comme l’ami d’Israël et pour le
moment, Ségolène Royal a envoyé des signaux contradictoires sur
le sujet. La campagne devrait peut-être permettre d’éclaircir
ce point.
3/Les Français se disent anti-américains
mais les sondages affichent qu’ils sont pro Sarkozy (qui est
pro), qu’en pensez vous ? Sont-ils vraiment intéressés par la
conjoncture internationale, comme vous le prétendez ?
Les Français ne sont pas anti-américains.
Ils aiment les Etats-Unis et le peuple américain. Mais ils sont
comme la plupart des peuples du monde, opposés à la politique étrangère
de George W. Bush. Je constate d’ailleurs que les citoyens américains
eux-mêmes en viennent aujourd’hui à une conclusion comparable
et sont très critiques vis-à-vis de la politique étrangère de
Bush. Je me méfie par ailleurs des accusations d’anti-américanisme
souvent utilisées de façon abusive pour désigner ceux qui ne
font que critiquer la politique extérieure américaine. C’est
le même phénomène que pour les accusations d’antisémitisme
portées contre ceux qui critiquent certains aspects de la
politique du gouvernement israélien. Pour revenir à votre
question Nicolas Sarkozy s’est effectivement affiché comme très
proche des Etats-Unis et même de George W. Bush, or tous les
sondages montrent que les Français préfèrent une politique
distanciée de celle que les Etats-Unis mènent actuellement.
C’est pour cela que lors de son discours d’investiture du
dimanche 14 janvier, Nicolas Sarkozy a tenu à se démarquer de
cette attitude trop pro-américaine.
4/L’Europe et le monde pensent
que la France est un pays nombrilique, se préoccupant uniquement
de sa politique intérieure, et pourtant on clame haut et fort, un
regain d’intérêt pour l’international, n’est ce pas un
paradoxe ?
Le reproche que l’on peut faire à
la France n’est pas tant le nombrilisme, elle a toujours regardé
au loin et eu une action internationale importante, mais plutôt
son arrogance et le fait de faire elle-même ce qu’elle reproche
parfois aux Américains ; ne pas tenir compte tout à fait de
l’avis des autres. Par exemple, parler de l’Europe et agir de
façon purement nationale. Je crois qu’une nouvelle génération
de dirigeants a compris les défauts et les pièges que représente
cette arrogance dans un monde globalisé. L’image est un vecteur
majeur de puissance, la France ne pourra pas réussir en étant
arrogante.
5/Vous dites que la France ne
fait plus le poids dans la guerre idéologique mondiale actuelle,
expliquez nous.
Le
grand paradoxe est que nous vivons dans un monde où le soft
power, l’image, le débat d’idées, est devenu un enjeu idéologique
majeur. La France veut jouer un rôle important dans le monde mais
elle ne s’en donne pas les moyens. Nos fondations politiques
sont très chichement dotées par rapport à leurs consœurs
allemandes. Les think-tanks sont fluets par rapport à
l’immense force de frappe des Etats-Unis. Nous n’utilisons pas
suffisamment la diplomatie parlementaire ou la coopération décentralisée.
Il y a encore trop la marque d’un pouvoir régalien. Nous devons
nous organiser pour mieux développer nos idées, si nous voulons
continuer à jouer un rôle.
Crédits :
Source : Réalités Tunisie
* Rencontre avec Pascal
BONIFACE et discussion autour de sa lettre ouverte : http://www.realites.com.tn/...
Article de presse : Courtesy
of Fériel Berraies Guigny pour F.b.g Communication. France
www.fbg-communication.com
email : fbgcommunication@yahoo.fr
Publié le 7 juin 2007 avec
l'aimable autorisation de Fériel Berraies Guigny
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