Centre Palestinien
d'Information
Interview
de Majed Al-Zir
Majed Al-Zir - Photo CPI
27 novembre 2007
Londres – CPI
A la veille de la conférence d’automne, toute
rencontre avec une personnalité palestinienne abordera
obligatoirement la conférence d’Annapolis. Celle de Majed
Al-Zir, directeur général du Centre du retour de Londres et rédacteur
en chef du magazine Al-Awda, n’en a fait une exception.
Il nous donne son point
de vue sur plusieurs sujets concernant le Moyen-Orient en général
et la cause palestinienne en particulier dont notamment les
souffrances des réfugiés palestiniens en Iraq, dans l'interview
ci-après, traduite de l'arabe et résumée par nos soins.
La
conférence d’automne
CPI :
Nous y sommes. La conférence sur le Moyen-Orient que le président
Bush a appelé à organiser est sur le point de débuter. Quel
regard portez-vous sur la participation d’une délégation
palestinienne dans le contexte actuel ?
Al-Zir :
La conférence d’automne ou d’Annapolis n’est en fait
qu’une nouvelle régression, si nous nous rendons compte qu’il
n’y a rien eu depuis l’été 2000, depuis Camp-David2. A l’époque,
le président défunt Yasser Arafat est revenu des Etats-Unis sans
rien signer. Il savait ce qui est acceptable par la Palestiniens
et ce qui ne l’est pas.
Malheureusement, après
sept ans d’énormes sacrifices palestiniens, il y en a certains
qui veulent retourner à ce Camp-David2, avec moins d’acquis,
une vraie régression. C’est inquiétant. Le peuple palestinien
regarde ce qui se passe ; il ne sera pas inerte le moment
venu.
CPI :
Pourquoi ce changement de la position officielle de l’équipe de
l’autorité palestinienne ?
Al-Zir :
C’est un changement de personnes et non de position. En effet,
après le confinement du président défunt Arafat dans son QG de
Ramallah, le pouvoir est aux mains d’une équipe qui
s’approche totalement des Israéliens et des Américains, au
moment où la maison palestinienne souffre d’un déchirement
sans précédent, un déchirement qui ne fait qu’affaiblir tout
négociateur.
CPI :
La présidence palestinienne parlait beaucoup du dossier des réfugiés,
mais maintenant, on sent qu’il y en a des concessions
fondamentales. Quelle sera la réaction des Palestiniens de l’étranger ?
Al-Zir :
Nous avons des Palestiniens qui font des cadeaux à l’occupation
israélienne. Ils ne cherchent pas à rendre aux réfugiés leur
droit au retour, mais à trouver n’importe quelle solution, tant
qu’elle satisfera le gouvernement de l’occupation.
Notre peuple
palestinien, à l’intérieur comme à l’étranger, ne laisse
pas tomber le droit au retour que personne n’a pas le droit
d’en faire une quelconque concession. C’est une ligne rouge
qu’il ne faut dépasser.
Les
positions officielle et populaire
CPI :
Comment voir cette différence entre la position populaire et la
position officielle ?
Al-Zir :
Ces gens-là ne veulent aucune participation populaire à la décision
officielle. Même le Conseil législatif, on l’a mis de côté.
Le tour du pacte national et de tous les droits historiques
palestiniens viendra.
Pire, on a fermé hermétiquement
la porte de l’Organisation de la Libération de la Palestine
(OLP), une organisation qui devrait normalement abriter tous les
Palestiniens, ou les laisser un peu participer. Et actuellement,
ils vont à Annapolis sans avoir une procuration du peuple.
Riad Mansour, qui occupe
le postede représentant de la Palestine auprès des Nations
Unies, est un exemple des plus probants de celui qui prend des
positions contre les intérêts de son peuple.
Diviser
la Palestine
CPI :
La décision de la division de la Palestine a été publiée il y
a soixante ans. Cette décision a été refusée par les
Palestiniens et les Arabes de l’époque. Plus tard, certains ont
dit que ce refus a été une erreur historique ?
Al-Zir :
Ce sont les incapables qui pensent ainsi pour une décision qui
donnait le droit à l’Autre au détriment du droit palestinien
à sa terre et à sa patrie. Soixante ans plus tard, le peuple
palestinien reste attaché à son droit et à la justice. A l’époque,
accepter ladite décision signifiait laisser la porte ouverte à
tout projet d’occupation de la Palestine. Ce n’est pas
facile de voir l’affaire hors de son contexte.
Les
réfugiés palestiniens en Iraq
CPI :
Pour la souffrance des réfugiés palestiniens en Iraq dont
surtout ceux qui l’ont quitté, comment voir leur cas, surtout
que les pays d’Amérique de Sud leur ouvrent les portes ?
Al-Zir :
C’est vrai que la déclaration du Brésil et du Chili attire
toutes les attentions… Cependant, elle n’est pas tellement étonnante,
si nous savons que les Etat-Unis conduisent un projet visant à
faire vider de tout sens le droit et le faire oublier. Comme par
enchantement, nombreux sont les pays qui offrent tous les moyens
pour attirer les Palestiniens chez eux. Les Nations Unies, pour
leur part, distribuent des imprimés aux Palestiniens d’Iraq
leur proposant de laisser tomber le droit au retour contre la
facilitation d’immigrer en un pays sûr…
CPI :
Quelle sera alors la responsabilité côté palestinien ?
Al-Zir :
En principe, le peuple palestinien et ses leaders doivent revoir
leur position sans prendre pour alibi le fait que les grandes
puissances soutiennent la position sioniste. Tout au contraire, le
problème de nos concitoyens réfugiés en Iraq doit nous pousser
à faire face au plan visant à liquider le droit au retour
palestinien.
CPI :
Concrètement, quelle sera la position à adopter ?
Al-Zir :
Nous ne pouvons qu’adopter une position palestinienne
collective, exprimée par une seule voix. Bien évidemment, aller
dans cette voie est une stratégie claire et a besoin de moyens étudiés
sur différents niveaux : politiques, diplomatiques, sociaux
et humanitaires.
Des signes forts doivent
être envoyés montrant que les réfugiés palestiniens d’Iraq
ne sont pas seuls. En Palestine, ils ont des concitoyens forts et
actifs et l’affaire n’est pas un sujet sans divergence intérieure.
Cette attente intérieure palestinienne ouvrira la voie vers une
solution arabe au lieu de ce plan poussant les Palestiniens à
partir aux confins du monde.
Notre idée d’une
solution arabe est sociale, cadrée par la Ligue Arabe et supervisée
par son secrétaire général. Concrètement, les réfugiés
palestiniens qui sont encore en Iraq, environ quinze mille
personnes, seront répartis sur plusieurs pays arabes, sans pour
autant laisser tomber le droit au retour. Il reste tout de même
un problème. Plusieurs pays ne sont pas prêts à emprunter ce
chemin.
En somme, le dossier des
réfugiés palestiniens d’Iraq est une vraie épreuve pour nous
tous. Nous insistons pour qu’il reste dans le cadre arabe. Un équilibre
entre l’attachement au droit au retour est la nécessité
d’offrir des conditions décentes pour une vie décente. C’est
un choix possible, s’il est traité sérieusement et qu’on lui
donne son cadre social.
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