Membre du comité central du Front populaire de
libération de la Palestine (FPLP), Khaled Yamani est
responsable des jeunes de cette organisation au Liban.
Quelle est la situation politique à l’intérieur
des camps de réfugiés ?
Khaled Yamani. La situation est très
dangereuse. Il commence à y avoir des scissions au sein des
Palestiniens. Le Hamas et le djihad sont contre les
négociations. Et une partie des organisations membres de
l’OLP y sont favorable, dans l’absolu. C’est le cas du
Fatah, du PPP, du Front démocratique. Nous, au FPLP, bien
que nous soyons membres de l’OLP, nous y sommes opposés. Si
nous restons dans l’Organisation de libération de la
Palestine c’est parce que, historiquement, c’est le
mouvement de la résistance et de la lutte du peuple
palestinien. L’OLP est reconnue par près de 120 pays comme
représentante du peuple palestinien. Et nous ne voulons pas
que ce mouvement disparaisse, même si nous avons des
divergences concernant notamment sa ligne politique, la
mauvaise utilisation des finances
et un problème
organisationnel qui se reflète au niveau du comité exécutif.
Divergences politiques plus divisions
interpalestiniennes… Comment cela se passe-t-il
concrètement ?
Khaled Yamani. Il y a, de fait, un
contre-pouvoir exercé par un certain nombre d’organisations
comme le Hamas, le djihad islamique et d’autres,
pro-syriennes. Elles sont proches du Hezbollah. Elles ont
des liens avec les partis libanais, à l’exception des Forces
libanaises et des Phalanges. Cette coalition, avec laquelle
nous avons des affinités, est un contre-pouvoir à l’OLP.
Mais la division palestinienne est néfaste à la lutte. Il
faut savoir qu’en 2006, le Hamas a proposé au FPLP de
participer à un gouvernement. Il nous a demandé de nous
engager à ne pas attaquer Israël pendant quinze ans. Nous
avons refusé. Nous avons demandé au Hamas de reconnaître
l’OLP comme représentante du peuple palestinien. Il a
refusé. Ce qui n’a pas empêché ce même Hamas, à la Mecque,
de passer un accord avec le Fatah et de reconnaître tous
les accords passés avec Israël… Cela a donné un certain
prestige au Hamas à ce moment-là. Mais le Hamas est en
déclin dans la rue palestinienne.
Que reprochez-vous aux orientations de Mahmoud
Abbas ?
Khaled Yamani. Le projet de Mahmoud
Abbas est trop calqué sur le projet américain. Et il y a
beaucoup de craintes que ce projet ait une influence sur le
Liban, notamment parce qu’il est accompagné par l’Arabie
saoudite, dont les intérêts au pays du Cèdre sont
importants. Ce pourrait être la fin de l’existence des camps
de réfugiés du Liban, ce qui ne veut pas dire que nous
aurions regagné notre terre. Regardez ce qui s’est passé à
Nahr el-Bared (après des affrontements très violents entre
une organisation islamiste palestinienne, le Fatah al-Islam,
et l’armée palestinienne, en 2007, le camp a été détruit –
NDLR). Il y aura ensuite une installation définitive des
Palestiniens au Liban. Il faut remarquer que la question du
droit au retour des réfugiés palestiniens est totalement
absente des négociations. Malheureusement, il y a une fin de
non-recevoir de la part de l’Autorité palestinienne. Mahmoud
Abbas est venu deux fois au Liban. À aucun moment il n’a
évoqué le droit au retour. Il n’est même pas venu nous voir
dans les camps. Il ne s’est pas rendu à Nahr el-Bared. Pour
l’instant, chaque faction palestinienne met en veilleuse ses
dissensions. La situation semble calme mais elle est
explosive. N’importe quel événement peut tout déclencher.
Entretien réalisé par P. B.