Les démocraties à l’ère du
soupçon
Jean-Philippe Walter:
« Nous sommes entrés dans une société de surveillance »
Suédois
manifestant contre la "Lex Orwell", en juillet 2008
Après sept années de campagnes visant à faire croire que les
guerres meurtrières menées contre les peuples afghan,
palestinien, irakien, libanais, étaient justifiées, les gens, en
leur grande majorité, ont compris qu’ils ont été trompés. Et
que, sous prétexte de « sécurité intérieure », ils ne sont plus
suffisamment protégés en matière de droits et libertés
fondamentales individuelles (*).
19 septembre 2008 En France il
y a eu des protestations très vives contre le fichage
politique [1],
tout comme en Suède [2].
En Suisse, petit pays hors Union européenne, le fichage
politique est interdit. Jean-Philippe Walter, Dr. en droit,
Préposé fédéral suppléant à la protection des
données [3],
n’en engage pas moins, dans cet entretien, les citoyens à rester
vigilants. La découverte que des taupes, mandatées par des
officines privées, avaient infiltré des associations
altermondialistes, à Genève et à Lausanne, a démontré qu’il peut
y avoir des activités d’espionnage qui échappent au contrôle
étatique.
Silvia
Cattori : Suite au « scandale des
fiches », en 1989, les services de renseignements suisses ont
été réformés ; les citoyens se croyaient à l’abri de possibles
dérapages. Aujourd’hui, après avoir appris que des personnes
auraient été mises sous surveillance, à Bâle et à Zurich [4],
les Suisses n’ont-ils pas raison de s’inquiéter !?
Jean-Philippe Walter :
Je comprends l’inquiétude qui est née dans l’opinion publique.
Toutefois, nos vérifications ne permettent pas de conclure à un
dérapage. Les dispositions de la loi fédérale instituant des
mesures visant au maintien de la sûreté intérieure ont été
respectées.
Silvia
Cattori : Plus de 100’000 personnes
feraient l’objet d’un fichage !?
Jean-Philippe Walter :
Je ne peux pas confirmer ce chiffre. Seul l’Office fédéral de la
police peut éventuellement donner des informations à ce propos.
Des personnes ou des organisations sont enregistrées dans le
système de traitement des données relatives à la protection de
l’Etat (ISIS) dans la mesure où ce traitement est nécessaire à
l’accomplissement des tâches légales définies dans la loi
fédérale instituant des mesures visant au maintien de la sûreté
intérieure.
Silvia Cattori :
Si ce chiffre devait se révéler exact, serait-ce là le signe
qu’il y a une collecte de données disproportionnée ?
Jean-Philippe Walter :
C’est difficile de dire si c’est disproportionné ou pas. Ce
chiffre peut paraître surprenant. Il faut savoir qu’il y a des
personnes enregistrées plusieurs fois, et pour différents
évènements prévus dans la loi fédérale sur la sûreté
intérieure : la prévention et la lutte contre la menace
terroriste, le service de renseignement prohibé, l’extrémisme
violent, la violence lors de manifestations sportives.
Silvia
Cattori : Combien de personnes
ont-elles voulu savoir si elles sont « fichées » depuis que
cette affaire de fichage a été révélée ?
Jean-Philippe Walter :
Je ne dirais pas « fiché » mais « enregistré dans la banque de
données », car cela correspond mieux à la réalité du traitement
des données tel qu’il se fait aujourd’hui par des moyens
informatiques. Le terme « fiché » n’est pas incorrect mais il
désigne plus précisément la gestion des fichiers manuels, avec
des cartes dactylographiées, tel qu’il se faisait autrefois.
Actuellement [5],
nous avons reçu environ 200 demandes. Comme la presse alémanique
a davantage parlé de cette affaire, on n’est pas surpris de
constater que la majorité des demandes proviennent de cette
partie de la Suisse.
Silvia
Cattori : Comment savoir si ce qui est
collecté est toujours conforme à la loi puisque vous ne pouvez
accéder à la banque de donnée qu’au cas par cas ?
Jean-Philippe Walter :
Comme pour toute banque de données informatique, gérée par des
administrations ou par des entreprises privées, nous n’avons pas
la possibilité de contrôler systématiquement l’ensemble des
traitements de données personnelles. Dans le cadre de la
sécurité intérieure, nous ne pouvons faire des vérifications
dans la banque de données qu’à l’occasion d’une demande d’accès.
Nous effectuons des vérifications ciblées. Nous pouvons, dans
une certaine mesure, vérifier si les entrées sont correctes ou
pas, ou si elles sont pertinentes du point de vue de la sûreté
intérieure.
Silvia
Cattori : Le Service d’analyse et de
prévention (SAP) n’est-il pas retombé dans les travers du
passé ?
Jean-Philippe Walter :
Je ne le pense pas. Depuis « l’affaire des fiches », à la fin
des années 80, le législateur a adopté une loi sur la sécurité
intérieure qui définit clairement les tâches et les compétences
des organes de sûreté. D’autre part, différents mécanismes de
contrôle ont été mis en place ; que ce soit les contrôles
internes au Département fédéral de justice et police ; que ce
soit le contrôle des Commissions de gestion du Parlement ; sans
parler des contrôles que nous sommes appelés à effectuer. En ce
qui concerne les cas bâlois, par exemple, il n’y a pas eu de
dérapage des organes fédéraux de sûreté. C’est le sentiment que
nous avons après avoir traité les demandes d’accès des personnes
concernées.
Silvia
Cattori : Y aurait-il des fichiers
ailleurs, dans les Cantons, à votre insu ?
Jean-Philippe Walter :
Il faut savoir que toutes les banques de données gérées par
l’administration fédérale doivent être annoncées et doivent
reposer sur une base légale. Là, nous n’avons aucun élément qui
nous laisserait penser qu’il y a des banques de données secrètes
qui ne seraient pas connues de nos services, et qui ne
reposeraient pas sur une base légale, dans le cadre d’activités
de lutte contre le terrorisme ou à des fins de sécurité
intérieure. En ce qui concerne les cantons, cela relève des
autorités cantonales compétentes.
Il est bien clair que des
traitements de données personnelles sont également effectués
dans le secteur privé et que, si des dérapages ne sont pas
exclus, ils ne peuvent être confirmés tant que nous n’avons pas
été confrontés à des informations précises.
Silvia
Cattori : Qu’a-t-on fait des données
récoltées dans les années 60-80 ? On parlait alors de 200
personnes considérées comme dangereuses et dont la fiche
resterait active ?
Jean-Philippe Walter :
Après la découverte du fichier géré par la police fédérale dans
les années 80, un délégué aux fiches a été nommé. Toutes les
données ont été soumises à examen et les fiches ont été sorties
du circuit. Elles se trouvent dans les Archives fédérales et
sont inaccessibles.
Il y a eu un tri qui a été
fait sous la surveillance du délégué aux fiches, nommé par le
Conseil fédéral. Certaines informations qui étaient pertinentes
pour la sécurité intérieure, et qui répondaient aux critères
légaux, ont été reprises dans la banque de données ISIS.
Bien sûr, le dérapage est
toujours possible, on ne peut jamais l’exclure totalement, il
faut être vigilant. Dans nos activités de surveillance, nous
avons déjà été amenés à constater des violations des
dispositions légales de la protection des données et avons émis
des recommandations en vue de remédier aux manquements. En ce
qui concerne les activités en matière de sécurité intérieure,
nous n’avons, sur la base de nos informations, pas lieu de
penser qu’un risque d’abus existe.
Silvia
Cattori : Avez-vous constaté un
développement de la surveillance préventive depuis les attentats
du 11 septembre 2001 ?
Jean-Philippe Walter :
Après le 11 septembre, il y a eu un certain nombre de mesures
prises dans le monde ; spécialement aux Etats-Unis, en Grande
Bretagne et dans l’Union européenne. En Suisse, la prolongation
de la conservation des données de trafic et de transaction sur
internet mise à part, il n’y a pas eu de développements
spectaculaires. Par contre, on peut dire que l’on est entré dans
ce que l’on appelle communément la « société de surveillance ».
On le voit notamment avec le foisonnement des caméras installées
aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé.
Silvia
Cattori : Les caméras ne sont-elles pas
ressenties comme moins inquiétantes qu’un fichage individuel ?
Jean-Philippe Walter :
Non, je ne le crois pas. Les techniques de surveillance sont
très diverses. Dès le moment où il y a une surveillance, il y a
collecte d’informations. Il n’y a pas de garantie qu’il n’y ait
pas de dérapage. Régulièrement, la presse se fait l’écho de
violations de la vie privée. Dans le cas des activités des
organes de sûreté, le nombre de personnes qui sont susceptibles
d’être l’objet d’un enregistrement dans le système d’information
reste relativement limité et ne peut se faire que dans les
limites légales.
Silvia
Cattori : N’avez-vous pas le sentiment
que, sous couvert de prévention, il y a une propension à
qualifier d’extrémistes des gens qui n’ont rien à voir avec
l’extrémisme ? Des dizaines de milliers de musulmans n’ont-ils
pas été séquestrés dans des prisons secrètes, torturés par les
agents de la CIA, alors que c’étaient le plus souvent des gens
ordinaires ? Du reste, nos agents ne sont-ils pas allés, en
2006, à Guantanamo interroger ces prisonniers ?
Jean-Philippe Walter :
Il n’y a effectivement pas de définition légale du terrorisme.
Toute personne a droit au respect des droits humains et à un
procès équitable où qu’il se trouve.
Silvia
Cattori : Berne n’a, apparemment, pas
respecté ces droits quand elle a autorisé des avions de la CIA à
faire escale sur son sol. Ne pensez-vous pas que les Service de
renseignement suisse, sous la pression d’autres Etats,
assimilent, eux aussi, des gens sympathisants de mouvements de
résistance contre l’occupant, comme le Hamas, au terrorisme ?
Jean-Philippe Walter :
Non, je ne le pense pas ; à moins que ces sympathisants aient
des agissements ou des comportements qui laissent supposer
qu’ils peuvent constituer un danger pour la sécurité intérieure.
Silvia
Cattori : Depuis le 11 septembre 2001,
les personnes de confession musulmane, ne vivent-elles pas une
situation des plus difficiles, en Suisse aussi, [6]
à cause des soupçons que l’on fait peser sur eux ? Ne
pensez-vous pas que des gens d’origine arabes ont été
soupçonnés, à tort, de lien avec le terrorisme en raison de leur
ethnie ou de leur foi ? La police fédérale, en 2004,
n’avait-elle pas placé une taupe dans le Centre islamique à
Genève pour espionner son directeur, M. Hani Ramadan [7] ?
Jean-Philippe Walter :
Je ne puis me prononcer ici car il y a une instruction en cours.
Je n’ai pas d’informations qui me laissent supposer qu’il y ait
eu quelque chose qui ait dysfonctionné.
Silvia
Cattori : Cette affaire reste à
éclaircir. Mais n’a-t-on pas perçu, alors, que les agents
fédéraux considéraient, a priori, des gens de confession
musulmane comme dangereux ?
Jean-Philippe Walter :
C’est votre sentiment. Les cas auxquels nous avons été
confrontés ne nous permettent pas d’arriver à une telle
conclusion. Nous n’avons jamais eu d’éléments qui nous
laisseraient supposer qu’une personne appartenant à telle
confession ait fait l’objet d’enregistrement pour appartenance à
telle ou telle religion.
Nous n’avons jamais trouvé
d’éléments laissant supposer qu’il y ait eu des surveillances
pour des raisons politiques. Les enregistrements que nous avons
vérifiés ont été faits pour des raisons liées au terrorisme ou à
l’extrémisme ; ou à des manifestations violentes. Si, par
hasard, il y a eu des informations qui ont été enregistrées de
manière disproportionnée nous avons demandé à ce qu’elles soient
corrigées.
Silvia
Cattori : Reste à savoir dans quelle
mesure, vous-mêmes, à la protection des données, prenez
suffisamment en compte le fait que, depuis le 11 septembre, il y
a eu un changement de climat et de mentalité ; climat qui
pourrait conduire les agents fédéraux à des dérives !
Jean-Philippe Walter :
Le changement de climat et de mentalité depuis le 11 septembre
est clair. Je vous l’ai dit ; nous sommes entrés dans une
société de surveillance, cela n’est pas contestable. Il y a un
risque de déséquilibre et de non respect des droits
fondamentaux. La lutte contre la criminalité et le terrorisme
est absolument nécessaire ; mais elle ne doit pas se faire au
détriment du respect des libertés et des droits fondamentaux, et
notamment du droit à la protection des données, au risque de
remettre en cause nos sociétés démocratiques.
En ce qui concerne le domaine
de la sécurité intérieure, on n’a pas actuellement constaté
d’abus de l’ordre de ce qui s’était passé lors de l’affaire des
fiches. Je crois que, de ce côté-là, les autorités sont
conscientes qu’elles ne peuvent pas dépasser certaines limites.
Il faut cependant demeurer
vigilant. La Suisse n’est pas isolée et, de par ses engagements
internationaux, notamment dans le cadre des accords
Schengen/Dublin, elle devra mettre en place des mesures dans le
cadre de la lutte contre le terrorisme et de la coopération
policière et judiciaire en matière pénale (données PNR,
passeport biométrique, etc).
C’est aussi une constante de
nos interventions que d’appeler à une certaine retenue, à une
certaine vigilance et à ce que la sécurité ne se fasse pas au
détriment des libertés individuelles. De ce côté-là, on n’est
pas du tout léger ou naïf. Je puis vous dire que nous restons
vigilants et que nous ne prenons pas tout pour du pain bénit.
Mais nos ressources sont limitées et nous ne sommes pas en
mesure d’intervenir sur tous les fronts.
La protection des données et
de la vie privée est aussi de la responsabilité des individus
qui doivent être prudents et exercer leurs droits. Les réactions
qui se sont manifestées en France à propos du système Edvige
montrent que les citoyennes et les citoyens peuvent se mobiliser
pour faire valoir leurs droits et ne pas accepter toutes ces
mesures répressives.
Silvia
Cattori : Reste aussi à savoir dans
quelle mesure les autorités politiques prennent suffisamment en
compte le fait, qu’il y a un intérêt, de la part de certains
services de renseignements étrangers, à exagérer la menace
terroriste et à instrumentaliser les peurs ?
Jean-Philippe Walter :
Cela n’a rien à voir avec la protection des données, mais il est
vrai que la lutte contre le terrorisme est devenue un argument
politique et qu’il y a des enjeux économiques.
Silvia
Cattori : Ceux qui sont en charge de la
sécurité intérieure ne sont pas forcément des stratèges avisés.
Dans les années 70-80, n’ont-ils pas fait mettre en fiche, et
selon des critères totalement aberrants, des gens qu’ils
considéraient comme dangereux par le simple fait qu’ils étaient
de « gauche ». Ne sont-ils pas, aujourd’hui, en train de faire
surveiller, selon des critères tout aussi aberrants, des gens
qu’ils considèrent comme dangereux parce qu’ils font un lien
entre terrorisme et Islam ?
Jean-Philippe Walter :
La situation est totalement différente. A l’époque de
« l’affaire des fiches », la surveillance se faisait dans un
cadre où il n’y avait pas de règles, pas de lois, aucun
contrôle. Maintenant, on a défini ce qu’il n’est pas possible de
faire. On a mis en place un certains nombres de garde-fous. Les
erreurs sont toujours possibles. Mais c’est justement par le
biais des mécanismes mis en place que l’on peut arriver à
corriger ou à éviter les erreurs. Même si après le 11 septembre
le contexte international n’est plus le même, il faut éviter de
tomber dans la paranoïa et la crainte d’un « fichage »
systématique, tout en restant vigilant et critique. Toute mesure
qui limite les droits fondamentaux et les libertés individuelles
doit être proportionnée et répondre à un intérêt légitime
prépondérant. Elle doit être précédée d’un débat public.
On peut avoir un sentiment de
surveillance. Il faut avoir des éléments concrets qui indiquent
que quelqu’un est mis sous surveillance. Il faut que les
personnes qui ont des éléments qui leur font penser qu’elles
sont surveillées s’adressent aux autorités pour demander des
justifications.
Puisque l’on est dans un
système fédéral, la première chose est de s’adresser à
l’autorité cantonale pour demander si, oui ou non, il y a mise
sous surveillance. Si des organes fédéraux sont impliqués, la
personne concernée peut s’adresser aux autorités concernées.
Pour les traitements relevant de la sûreté intérieure, elle
devra déposer une demande d’accès indirect auprès du Préposé
fédéral.
Comme je vous l’ai dit, nous
sommes entrés dans ce que l’on appelle une « société de
surveillance ». Il faut savoir que la surveillance n’est pas
seulement le fait de l’Etat. Les activités de surveillance de
l’Etat ne peuvent intervenir que dans le respect de la
légalité ; il y a des mécanismes de contrôle qui sont mis en
place, et il y a des possibilités pour les individus de faire
valoir leurs droits ou de faire intervenir des instances qui
vont défendre leurs droits. On ne peut cependant pas ignorer que
des instances privées exercent également des activités de
surveillance. Ce n’est donc pas un phénomène qui se limite aux
activités de l’Etat qui, elles, reposent sur un cadre clair. Les
risques de violation de la vie privée sont ainsi plus souvent
liés à des activités de surveillance déployées dans le secteur
privé.
Silvia
Cattori : Là où ce sont des agents de
renseignements étrangers qui espionnent des gens, ou qui
manipulent, cela échappe-t-il à tout contrôle ?
Jean-Philippe Walter :
Si des services étrangers surveillent les gens, c’est illégal.
Nous n’avons pas la possibilité d’intervenir. C’est le rôle du
Ministère public de la Confédération et du Service d’analyse et
de prévention de veiller à ce que des activités de renseignement
prohibées n’aient pas lieu sur le territoire suisse.
Silvia
Cattori : Les représentants de la
police fédérale - M. Jean-Luc Vez, (directeur de l’Office
fédéral de la police), et M. Urs von Daeniken, (chef du Service
d’analyse et de prévention) – estiment, eux, que la menace
terroriste est grande et demandent que les outils pour la
combattre soient encore renforcés [8].
Or, votre supérieur, M. Thür, chef de la protection des données,
estime que les nouvelles compétences proposées en matière de
sécurité - qui permettraient la mise sous écoute, même s’il n’y
a pas de soupçon d’une activité pénalement répréhensible - sont
« dangereuses ».
Jean-Philippe Walter :
Eux affirment, en effet, qu’il y a un risque. nous somme prêts à
les croire. Mais, jusqu’ici, nous n’avons aucun élément qui nous
paraisse justifier de nouvelles mesures. Le projet de loi en
discussion au Parlement prévoit de donner des moyens
supplémentaires aux organes de sûreté dans le cadre de leurs
activités préventives ; notamment les écoutes ou l’intrusion
dans des ordinateurs.
M. Thür estime, lui, qu’aussi
longtemps que la nécessité de ces nouvelles mesures n’a pas été
démontrée, les moyens actuels sont suffisants ; notamment les
moyens qui sont prévus dans le cadre de la poursuite pénale.
Dans le cadre de la poursuite pénale, avec l’autorisation d’un
juge, il y a déjà la possibilité de mettre les gens sous
écoutes. Mais cela se fait dans le cadre de la procédure pénale
et encadré par la justice.
Silvia
Cattori : Si, demain, je demande à
savoir si je suis « enregistrée », recevrais-je une réponse
claire et nette ?
Jean-Philippe Walter :
Toute personne peut s’adresser au Préposé fédéral à la
protection des données. Selon la procédure dite du droit d’accès
indirect, nous allons vérifier sur place le traitement dans la
banque de données. Nous vérifions si la personne qui en fait la
demande est enregistrée dans le système ISIS ; et, le cas
échéant, nous examinons toutes les inscriptions la concernant.
En règle générale, les
personnes ne peuvent pas savoir si elles sont effectivement
enregistrées et, le cas échéant, avoir connaissance du contenu
des données qui les concernent. Elles reçoivent une réponse au
libellé standard, selon laquelle aucune donnée les concernant
n’a été traitée illégalement ; ou les informant que, dans le cas
d’une éventuelle erreur dans le traitement des données, nous
avons adressé à l’Office fédéral la recommandation d’y remédier.
Exceptionnellement, s’il
n’existe pas d’autre moyen pour empêcher qu’une personne soit
lésée gravement et de manière irréparable, le Préposé peut dire
à la personne qui en fait la demande, qu’elle est enregistrée,
et lui fournir de manière appropriée des informations qui
figurent dans la banque de donnée, pour autant que cela ne
constitue pas une menace pour la sûreté intérieure et
extérieure. Mais, je le répète, ce sont des cas exceptionnels.
(*) Voir : « Jean-Claude
Paye : les populations sous surveillance », par Silvia
Cattori, Réseau Voltaire, 15 février 2008
[1]
En France, des recours ont été déposés, considérant, à juste
titre que le fichier Edvige - un système de
surveillance organisé scientifiquement, hors du contrôle des
juges et d’une autorité indépendante - était accessible à un
nombre excessif de fonctionnaires, et que l’étendue et la nature
des données était disproportionnée par rapport aux buts
recherchés. Edvige devait se substituer aux RG,
une police politique qui n’a son équivalent que dans des
dictatures.
[2]
Les Suédois protestent depuis juin contre la loi sur la
surveillance électronique qu’ils ont baptisée « Lex
Orwell ». Dès le 1er janvier 2009, l’agence d’écoutes
militaires pourra intercepter tous les courriels et appels
téléphoniques à destination et en provenance de Suède, sans
autorisation judiciaire.
[3]
Voir :
http://www.leprepose.ch Le
Préposé est nommé par le Conseil Fédéral et
non pas par l’Assemblée fédérale. Son indépendance est donc
limitée.
[4]
Voir « Entretien
avec M. Balthasar Glättli – La menace terroriste : un instrument
pour limiter les libertés ? », par
Silvia Cattori, silviacattori.net, 28 août
2008.
[5]
En 1990, lors d’un précédent scandale, 300’000 personnes avaient
demandé à connaître le contenu de leur fiche en Suisse.
[6]
Des journalistes « embarqués », par
idéologie, ou de connivence avec des officines de propagande, se
sont employés à désigner les musulmans comme une menace.
Journalistes qui s’auto proclament « spécialistes
en terrorisme », « spécialistes du Moyen
Orient », asservis aux vérités officielles, raison pour
laquelle ils ont la faveur des médias. Leurs livres et articles
témoignent contre eux. Ils apparaissent aujourd’hui pour ce
qu’ils sont véritablement : des imposteurs au service des
pouvoirs oppressifs et de la guerre.
[7]
Le service de renseignement fédéral a été vivement critiqué, en
2006, quand les Suisses ont découvert que le Centre islamique de
Genève, dirigé par M. Hani Ramadan, un intellectuel suisse de
confession musulmane, avait été infiltré par un de leurs agents.
[8]
Le projet de révision prévoit la surveillance des communications
téléphoniques, du courrier postal et électronique, ainsi que des
incursions dans la sphère privée. A ceux que ces mesures
inquiétaient, l’ancien ministre de la Justice, M. Blocher, avait
dit : « On ne fera jamais ce que fait le Mossad
israélien ».
(voir : « Pour
une police fédérale mieux armée contre le terrorisme »,
swissinfo, 4 avril 2007. Un agent du Mossad
avait été arrêté près de Berne en 1998 alors qu’il installait
des écoutes sur la ligne de téléphone d’un Suisse d’origine
libanaise).
Si on est prêt à croire que les agents
secrets suisses n’outrepassent pas certaines limites, les agents
de la CIA et du Mossad sont, eux, omniprésents pour espionner
des opposants à leur politique criminelle et alimenter la peur
par de fausses menaces d’attentats terroristes.
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