- Que s’est-il passé
dans la journée d’hier à la place Tahrir ?
Des mercenaires et des hordes de voyous, à la solde de
Moubarak, se sont attaqués aux manifestants qui étaient
rassemblés pacifiquement à la place Tahrir. Moubarak a
commis un autre crime contre un peuple. Nous avons des
preuves que les bandes d’agresseurs sont des éléments du
ministère de l’Intérieur et des officiers de la police. Le
même scénario est exécuté également à Alexandrie et à Al
Ismaïlya. Nombreux parmi ceux qui ont été arrêtés sont des
éléments des services de police.
Des réunions secrètes se sont tenues entre des responsables
du parti de Moubarak avec des officiers de la police
politique pour organiser une agression violente contre des
hommes et des femmes rassemblés pacifiquement à la place
centrale du Caire. Cette lâche attaque contre des
manifestants pacifiques est venue suite au discours de
Moubarak qui s’entête à rester au pouvoir, quitte à
massacrer tout le peuple égyptien. Moubarak fait tout pour
transformer un mouvement pacifique et démocratique en un
bain de sang.
Le monde entier a découvert un peuple qui se bat
pacifiquement et de manière civilisée contre la tyrannie,
une image que le tyran n’a pas pu supporter. Il veut que la
rue sombre dans le chaos. Il veut mettre le pays à feu et à
sang. Il donne encore une fois la preuve que c’est un homme
qui se dresse contre le peuple et contre les intérêts du
pays pour demeurer au pouvoir. Il se dévoile sous sa vraie
nature. C’est un criminel.
- Pourquoi l’armée a laissé faire, alors
qu’elle avait déclaré qu’elle est dans la rue pour protéger
les manifestants ?
Elle en porte l’entière responsabilité du massacre commis
contre des manifestants pacifiques. On a vu cette armée qui,
dès son entrée en scène, a rassuré le peuple en affirmant
que ses revendications sont légitimes. Elle vient de
commettre une grave erreur en restant spectatrice devant un
massacre. C’est une non-assistance à peuple en danger. Cette
armée, qui a été accueillie à bras ouverts pas les
manifestants, a trahi son peuple en laissant des hordes de
criminels s’attaquer à des Egyptiens qui ont montré au monde
entier qu’ils sont dignes de la démocratie et de la liberté.
Ce n’est pas normal que les attaques contre les manifestants
aient duré des heures et cette armée n’a eu ni le courage ni
l’honneur d’agir pour sauver des citoyens en danger de mort.
L’autorité de l’armée est sérieusement entamée. Elle est
plus que jamais sommée de bouger pour déposer le Président,
si elle veut sauver la face.
- Quel serait l’impact des événements d’hier
sur la suite de la contestation ?
Si Moubarak et sa bande de criminels pensent que la
révolution de la dignité est matée, ils se trompent
lourdement. Bien au contraire, les masses seront plus que
jamais galvanisées et leur détermination sera renforcée. Les
rangs des manifestants seront élargis et la mobilisation
restera intacte jusqu’à la chute du despote. Il y aura des
millions et des millions dans les rues du pays demain.
Nous avons donné un autre rendez-vous, la journée de demain,
pour une autre manifestation gigantesque. C’est tout un
peuple qui s’est soulevé contre la dictature. Pas question
de revenir en arrière. Rien ne pourra arrêter la marche du
peuple pour son autodétermination.
- Quelle est votre appréciation sur les
attitudes des capitales occidentales par rapport à ce qui se
passe en Egypte depuis plus d’une semaine maintenant ?
Franchement, on s’en fout de ce que penserait ou
dirait tel ou tel président étranger. Le peuple égyptien est
en train de faire sa révolution contre un régime despotique
qui a tout le temps bénéficié d’un soutien très actif de
l’Occident. On ne veut rien d’eux. Les puissants du moment
agissent contre des régimes mêmes démocratiques qui
n’arrangent pas leurs intérêts et se montrent très
complaisants avec les dictatures les plus cruelles car elles
sont garantes de leurs mesquins intérêts. Donc, nous sommes
à l’écoute des peuples libres épris de justice et de liberté
et non pas des classes dirigeantes, occidentales ou
orientales, qui plombent leurs oreilles de démocratie et
pactisent avec le diable.
- Des responsables occidentaux et autres
analystes disent leur crainte de voir les Frères
musulmans prendre les devants de la scène en Egypte, qu’en
dites-vous ?
Il s’agit là d’un argument désespérant de ceux qui, en
réalité, craignent de voir leur ami despote quitter le
pouvoir. Curieusement, tout le monde se focalise sur les
Frères musulmans, leur rôle et leur force dans cette
révolution de la dignité, alors que pendant plus d’une
semaine, ce sont des femmes et des hommes qui se battent
pour la démocratie et la liberté dans un pays longtemps
soumis à la terreur d’un tyran. Pourquoi ces analystes ne
s’intéressent pas aux gigantesques carrés de manifestants
formés par des jeunes, filles et garçons, chrétiens et
musulmans, rêvant tous ensemble d’un pays libre et
démocratique. La réalité égyptienne est tout autre que celle
que nous renvoient des observateurs et autres conseillers
éclairés des classes dirigeantes.