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« La construction des colonies n'a jamais cessé »
Dror Etkes


Jeudi 11 juin 2009

Ancien directeur de l’observatoire des colonies de La Paix maintenant, Dror Etkes est membre de l’association israélienne Yesh Din (« Il y a une loi »).

Vous travaillez depuis des années à suivre l’évolution de la colonisation en Cisjordanie. Quel état des lieux faites-vous ?

Dror Etkes. La construction de colonies n’a jamais cessé. Entre 1990 et 2000, la population israélienne en Cisjordanie a augmenté de 7 % à 8 % par an, du fait de la croissance naturelle et surtout de l’immigration en provenance d’Israël et de l’étranger. Le nombre d’immigrants a beaucoup baissé en 2000 avec la deuxième Intifada, et depuis 2001, la croissance est d’environ 5 % par an.

Entre 1990 et 2000, il y a eu une augmentation graduelle des constructions, puis une baisse entre 2001 et 2003-2004, avant un retour à la hausse à laquelle la construction du mur a contribué (depuis 2004, 1 500 à 2 000 logements sont construits chaque année). Non seulement le mur a de fait signifié l’annexion des colonies existantes mais il a renforcé l’idée qu’il n’y avait pas de risque de les étendre. Aujourd’hui, la moitié des colonies et deux tiers des colons vivent à l’ouest du mur.

Depuis la fin des années 1990, un phénomène nouveau est apparu : des colonies sans statut officiel israélien. Officiellement, Israël a arrêté de construire de nouvelles colonies en 1996 ! En réalité, des dizaines ont été installées depuis en violation y compris de la loi israélienne. L’idée derrière est très simple : prendre le plus de territoire possible, peu importe le nombre de personnes qui y vivent. Il s’agit de transformer la lutte démographique, qui est perdue (sur 10 habitants de Cisjordanie, 9 sont Palestiniens), en lutte pour le volume de terre contrôlé. Pour atteindre ses buts géopolitiques - marginaliser la population palestinienne, et allouer le plus de terre possible aux colonies -, Israël a consciemment sacrifié l’État de droit, abandonné le principe de la responsabilité de l’État d’appliquer la loi aux citoyens.

La société israélienne est-elle consciente de cela ?

Dror Etkes. Il y a une augmentation de la conscience, mais on est très loin de faire descendre dans la rue des centaines de personnes pour manifester contre la colonisation ! La majorité des Israéliens ignorent ce qui se passe à côté de chez eux, au-delà de la ligne verte. La société a développé des mécanismes sophistiqués pour bloquer toute connaissance de tout ce qui est lié au monde arabe, spécialement aux Palestiniens et encore plus aux pratiques d’Israël pour se maintenir en Cisjordanie. Beaucoup disent qu’ils veulent la paix mais qu’elle est impossible. C’est le plus grand obstacle au changement : le manque total de perspective.

Le nouveau gouvernement israélien vous inquiète-t-il - encore davantage ?

Dror Etkes. Non. Parce qu’au moins, on voit à qui on a affaire. S’agissant de la politique menée en Cisjordanie, il n’y a pas de différence entre le Parti travailliste et le Likoud. La pire période fut d’ailleurs celle où Ehoud Barack était premier ministre. 2000 fut l’année où il y eut le plus de constructions (4 500). Plus que tout autre, il est responsable de ce manque de perspective, de ce déroulement tragique des événements. Il était à la tête du camp de la paix, était supposé négocier et rendre la Cisjordanie aux Palestiniens. Avec le nouveau gouvernement, au moins, il n’y a aucune illusion. D’autre part, ses marges de manoeuvre sont un peu plus restreintes du fait de la pression internationale.

Qu’attendez-vous de Barack Obama ?

Dror Etkes. Je m’exprime là à titre individuel et non au nom de Yesh Din. L’histoire a montré que les États-Unis n’ont pas voulu utiliser les outils qu’ils pouvaient avoir pour faire pression sur Israël. Je suis donc sceptique. D’un autre côté, Obama est un président très populaire et essaie de réorganiser la politique américaine au Moyen-Orient. La question est : dans quelle mesure va-t-il réellement vouloir faire pression sur Israël ? Parler avec Netanyahou ne peut suffire. Il faut être plus ferme, et Obama aurait les moyens de l’être.

Yesh Din est une organisation israélienne créée en 2005 qui a pour objectif de s’opposer, sur un plan juridique, aux violations des droits de l’homme commises par les autorités israéliennes dans les territoires occupés de Cisjordanie. www.yesh-din.org

Entretien réalisé par Charlotte Bozonnet

© Journal L'Humanité
Publié le 12 juin 2009 avec l'aimable autorisation de
L'Humanité



Source : Le web de L'Humanité
http://www.humanite.fr/...


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