Intervention de
Michèle Sibony au colloque du CVPRPO
Quelques questions pour y voir plus
clair
Michèle Sibony
Jeudi 21 novembre 2019
16 novembre 2019 –
Michèle Sibony
QUELQUES QUESTIONS POUR Y VOIR PLUS
CLAIR.
L’UJFP est une
association juive née lors de la
première Intifada pour soutenir les
conditions d’une paix juste et durable
en Israël/ Palestine, Nous avons dès le
début de la deuxième Intifada été
cofondateurs du Collectif National pour
une Paix Juste entre Israéliens et
Palestiniens. Ce collectif unique en son
genre en Europe réunissait et réunit
encore près de 50 associations partis
syndicats. Nous sommes aussi membres de
la Plateforme des ONG pour la Palestine,
et aussi inscrits dans la lutte contre
le racisme en France : antisémitisme,
islamophobie bien sûr, et aussi
négrophobie rromophobie, racisme
anti-asiatique à travers des plateformes
comme celle de Rosa Parks et celle pour
un espace antiraciste respirable. Cette
précision n’est pas hors sujet, j’y
reviendrai. Nous sommes tous et toutes
ici présents concernés par le sort de la
Palestine et l’avenir des Palestiniens
comme celui des juifs israéliens qui
vivent sur le territoire de la Palestine
historique. Je voudrais ici évoquer
rapidement à travers l’évolution de
notre association les questions qui
parfois divisent le mouvement de
solidarité avec la Palestine. Divisions
qui peuvent nuire à l’avancement de la
question palestinienne en France.
Nous sommes tous et
toutes informé.es quotidiennement de ce
qui se passe dans cette région. Et nous
sommes tous et toutes membres à un titre
ou un autre du mouvement de solidarité
international qui s’intéresse à ce que
l’on appelle encore à tort le conflit
israélo-palestinien. Une appellation qui
reflète bien le point de vue occidental
sur la réalité fort différente
expérimentée dans la région.
1 - la naissance de
l’UJFP en avril 1994 inscrivait de fait
son travail dans le cadre d’Oslo,
jusqu’à la deuxième Intifada. Dans ce
cadre nous luttions pour la création
d’un état palestinien aux côtés de
l’état israélien avec Jérusalem capitale
partagée selon la formule de l’époque.
Cet horizon a changé avec l’échec d’Oslo
dès 2000. Notre association a grandi
avec la 2ème Intifada, et la question du
sionisme qui était posée dès la création
de l’association, car pour nous il n’a
jamais ni avant ni après Oslo pu être
question de deux états ethniques ou
religieux, mais de deux états s’il le
fallait , de tous leurs citoyens . En
deux mille pourtant nous nous déclarions
« non sionistes » et non
« antisionistes », parce que nombre de
nos membres considéraient que
l’appellation d’antisioniste nous
couperait définitivement de la
communauté juive, et espéraient encore
que nous puissions travailler en
relation avec cette communauté. Notre
éviction du collectif des associations
juives laïques, en raison de notre
non-sionisme, a mis un premier coup à
cette illusion. La hargne de la
communauté sioniste à notre égard, son
refus de tout débat, ses violences
verbales et parfois physiques via la
LDJ, ont achevé le travail. Nous nous
sommes rendu compte que pour être
écoutés il fallait être entendus et pour
cela que notre voix grandisse. Cela a
été le cas à plusieurs reprises, nous
avons pu le vérifier avec des lettres de
radio J qui nous étaient adressées pour
commenter nos déclarations, une lettre
du rabbinat, certains communiqués du
CRIF répondant aux nôtres ligne à ligne
sans jamais les citer bien sûr.
Nous avons parfois
été surpris de réactions négatives à
notre égard par des pans du mouvement de
solidarité nous jugeant trop radicaux.
Le sionisme n’était pas une question, la
seule question qui comptait était celle
du droit international. Celui là même
qui imposa la partition de la Palestine
mandataire, et s’est avéré depuis
impuissant (mais est-ce bien le terme
peut être faut-il dire sans volonté de)
à imposer un état Palestinien. Le
soutien du droit international
partitionniste renouvelé à la baisse
avec Oslo est en réalité un soutien à
l’existence de l’état israélien. Ceux là
même qui s’offusquent aujourd’hui de la
loi état-nation, en attribuant
uniquement à l’extrême droite
israélienne au pouvoir la responsabilité
de l’état-nation du peuple juif,
semblent avoir oublié que cet
état-nation exclusivement juif est
inscrit dans la déclaration
d’indépendance de 1948. Une partie du
mouvement de solidarité s’exprime encore
aujourd’hui contre la dérive extrême
droitière des gouvernements de ce
régime, mais semble ignorer que c’est la
gauche sioniste qui est la grande
responsable de l’installation de ce
régime colonial et de la Naqba . De 1948
à 1974, 17 gouvernements Mapaï
travaillistes se sont succédés sans
interruption, responsables d’expulsion
de massacres, de guerres, de
l’occupation et de la colonisation de
Gaza et de la Cisjordanie. La gauche
israélienne, ou ce qu’il en reste, est
restée attachée aux paramètres d’Oslo
périmés depuis plus de vingt ans et qui
sont directement responsables de la loi
état nation. Il faut reconnaître que
« deux peuples deux états » était un
slogan de la paix maintenant, hérité du
droit international, un slogan raciste
fondé sur la conception ethnique de la
nation qui s’affirme aujourd’hui. De
même le « eux chez eux , nous chez
nous », et encore le fameux et fumeux
« divorçons en paix » sans oublier que
le mur de séparation est leur idée..
Autant de slogans et d’actes qui
conduisent directement et concrètement à
l’apartheid d’aujourd’hui. Le sionisme
ne commence pas avec la loi état nation
ou plutôt le sionisme se fonde depuis
son tout début sur l’idée d’un état
nation du peuple juif, inscrite dans la
déclaration d’indépendance de l’État du
15 mai 1948.
…« C’est de plus, le droit naturel du
peuple juif d’être une nation comme les
autres nations et de devenir maître de
son destin dans son propre État
souverain.
En conséquence, nous membres du conseil
national représentant le peuple juif du
pays d’Israël et le mouvement sioniste
mondial, réunis aujourd’hui, jour de
l’expiration du mandat britannique, en
assemblée solennelle, et en vertu des
droits naturels et historiques du peuple
juif, ainsi que de la résolution de
l’Assemblée Générale des Nations Unies,
proclamons la fondation de l’état juif
dans le pays d’Israël, qui portera le
nom d’Israël ».
Qui est ce « nous »
qui institue le peuple dans cette
déclaration ? Cette déclaration dit quel
collectif constitue la nation et
transforme la société coloniale juive en
collectif national, à l’exclusion des
Palestiniens. Nous sommes en 1948 en
pleine Naqba, les Palestiniens qui
demeurent en Israël, n’auront jamais
accès à la Nationalité, tout juste à une
Citoyenneté de plus en plus limitée et
de plus en plus controversée …
Sans parler de près
de 70 lois discriminatoires, votées
depuis 1948, excluant la population
palestinienne restée sur le territoire
israélien de tous les symboles
nationaux, de la terre, etc..
Attaquer la loi
état nation est bien sûr notre devoir,
mais en la situant sans jamais l’oublier
dans le droit fil du sionisme auquel
elle appartient. Sauf à distordre
gravement la réalité. On pourrait à lire
certains textes imaginer que si demain
la gauche sioniste (mais où est-elle
passée d’ailleurs) revenait au pouvoir
les choses iraient mieux pour les
Palestiniens.. elle qui Naqba incluse
est responsable de l’annexion de
Jérusalem, de la conquête et de la
colonisation des territoires occupés de
67 des nombreux massacres à Gaza.. ..
Cette loi n’est -elle pas l’occasion
pour les mouvements de solidarités dans
le monde de questionner enfin, au delà
de toutes les mythologies et les
fabrications d’opinion imposées, la
réalité du régime qui détruit la
Palestine ? Lutter contre l’apartheid,
fruit d’une situation coloniale, n’est
ce pas d’abord lutter contre le régime
qui l’installe ? Et le dernier
gouvernement de ce régime n’est de loin
pas le seul responsable de cette mise en
place.
Le régime qui
opprimait les noirs d’Afrique du sud
s’était donné un nom : l’Apartheid. Le
régime qui détruit la Palestine s’est
donné un nom : le Sionisme. Lutter
véritablement contre l’apartheid
israélien aujourd’hui n’est ce pas enfin
l’appeler par son nom et lutter contre
le sionisme ? Mal nommer ou ne pas
nommer ce régime c’est contribuer aux
malheurs de la Palestine, pour
paraphraser Camus.
Nous sommes à la veille de l’examen par
l’assemblée nationale de l’amendement
Maillard qui vise à identifier
l’antisionisme à une forme
d’antisémitisme. Ne peut-on penser que
si depuis longtemps en France toutes les
organisations partis syndicats
fédérations d’enseignants associations
des droits de l’homme avaient eu le
courage d’appeler les choses par leur
nom, et de condamner fermement le
sionisme, la situation serait différente
aujourd’hui et aurait rendu plus
difficile une telle proposition à
l’assemblée nationale ? Il n’est pas
trop tard mais se contenter d’évoquer la
liberté d’expression, même si c’est
juste et nécessaire, ne suffira pas pour
contrer cette attaque si dangereuse pour
tout le mouvement de solidarité et
faut-il le rappeler pour la Palestine
elle-même.
Ne faudrait-t-il
pas au contraire prendre conscience et
affirmer que ce qui réveille ou provoque
l’antisémitisme dans le monde
aujourd’hui c’est le soutien accordé au
régime sioniste. Et cet antisémitisme
nourrit et renforce le sionisme.
Les soutiens du
mouvement de solidarité :
Le fait que
Netanyahu vienne de reconnaître son
inaptitude à constituer un gouvernement
et que ce soit Gantz qui remonte en
scène pour le faire ne devrait pas nous
aveugler : présenté en Europe comme
centriste ou même centre gauche, reconnu
centre droit en Israël, ce qui est
encore une litote, sur la question
sécuritaire et donc palestinienne Gantz
a sensiblement les mêmes positions que
Netanyahu. L’homme qui se vante d’avoir
ramené Gaza à l’âge de pierre en 2014,
n’a cessé de donner des cautions
anti-palestiniennes afin de répondre à
la principale accusation de Netanyahu
contre lui : celle d’une proximité
d’avec les arabes. « lo Bibi , Tibi »
c’est-à-dire : Gantz ne soutient pas
Netanyahu il soutient les arabes. La
décision de la liste arabe unie à
l’exception notable des députés de Balad,
de soutenir la candidature de Gantz
contre Netanyahu a rencontré la colère
palestinienne de Gaza et des TOP. De
fait cette décision participait de la
fragmentation de la Palestine
Le fait qu’une
partie du mouvement de solidarité
français a pu saluer cette décision de
la liste unie de soutenir la candidature
de Gantz est très problématique. Si le
mouvement de solidarité comme il
l’affirme en général apporte son soutien
à la société civile palestinienne, il
devrait en particulier veiller à ne pas
soutenir tout ce qui peut contribuer à
la principale calamité imposée aux
Palestinien : la fragmentation de leur
peuple. L’illusion d’une alliance avec
Gantz a d’ailleurs trouvé ses limites
dans le mépris affiché de Gantz à leur
égard, et encore plus aujourd’hui avec
la nouvelle attaque sur Gaza chargée de
déterminer qui dirigera le prochain
gouvernement israélien ; le plus cruel
et le plus agressif sera celui-là, et
Gantz jouera tous ses atouts comme chef
d’état major du précédant carnage en
2014.
Le mouvement de solidarité devrait aussi
favoriser tout ce qui dans la société
palestinienne peut permettre la
reconstruction d’une stratégie globale.
Il ne devrait pas s’agir d’un soutien
inconditionnel aux autorités qui n’ont
plus de légitimité des urnes
aujourd’hui, ni même celle de la rue
palestinienne, et qui placent depuis
Oslo la construction de l’état en
objectif et l’horizon national unique .
Comme le développe Joseph Massad dans
son article de 2012 « la compulsion de
partition », Oslo a transformé la lutte
de libération nationale en lutte pour la
construction d’un Etat.
Le peuple
palestinien depuis et à cause d’Oslo a
perdu sa capacité à construire une
stratégie nationale globale. Reste que
la société civile palestinienne a
construit et proposé un outil politique
le seul, capable de lutter contre cette
fragmentation, de mobiliser et d’unifier
la solidarité internationale quelle que
soit les divergences politiques.
Alors je poserai la
question suivante : celle du BDS
Pour nous, dès sa
sortie en 2005, il était évident de
soutenir l’appel au boycott
désinvestissement sanctions contre
Israël. Et nous avons participé à la
construction de la campagne BDS France
en 2009 dans laquelle nos militants
tiennent tous une place active. Nous
nous étonnons souvent des frilosités qui
se sont exprimées et s’expriment
toujours au sein du mouvement de
solidarité français sur le BDS. Boycott
seulement des colonies, réticences sur
le boycott culturel, voire refus de tout
boycott, ces réticences ont amené nombre
d’associations à ne s’opposer aux
tentatives de criminalisation ou de
l’interdiction qu’en usant de l’argument
de la liberté d’expression. On peut
imaginer qu’il aurait été bien plus
difficile aux gouvernements successifs
de céder aux pressions du lobby
israélien si nous avions eu un front uni
et déterminé soutenant expressément le
boycott des institutions de l’apartheid,
de toutes les institutions de
l’apartheid. Car c’est bien de cela
qu’il est question. Pourquoi l’appel
palestinien du BDS continue-t-il de
diviser Nos rangs et d’y susciter tant
de frilosité avec quelles conséquences,
sachant qu’il s’agit de l’outil majeur
de la résistance non armée
palestinienne ? Parler de la liberté
d’expression concernant BDS est une
façon à peine dissimulée de se défausser
sur la vraie question : le soutien franc
massif et sans réserve qui devrait être
accordé au BDS en France. La partie du
mouvement de solidarité qui défend la
liberté d’expression pour le BDS tout en
spécifiant « que l’on soit pour ou
contre » passe en fait le message
qu’elle est pas d’accord avec le BDS ,
mais défend juste le droit qu’il soit
exprimé. Très faible niveau de soutien
donc, dès lors que c’est ce point qui
est mis en avant. Cela fragilise le
mouvement du BDS en France, malgré sa
combativité, et cela réduit le niveau de
pression nécessaire sur l’UE pour
qu’elle sanctionne enfin Israël.
L’amendement Maillard dont je viens de
parler vise aussi quasi explicitement la
campagne BDS.
Cette bataille qui
se mène sans défaillance dans le camp de
nos adversaires contre la Palestine,
rencontre encore trop d’indétermination
dans notre camp.
La Partition et
l’État de Palestine
L’évolution de
notre association a accompagné la
réalité brutale de la situation du
terrain. Confiscation continue des
territoires de Cisjordanie, Blocus de
Gaza détachée de la Palestine par la
stratégie israélienne largement partagée
par les puissances occidentales,
Jérusalem consacrée capitale d’Israël
par les Etats Unis, une souveraineté
israélienne toujours plus prégnante sur
l’ensemble de la Palestine historique,
la fragmentation encore des statuts des
Palestiniens, l’ « oubli » trop fréquent
de la revendication du droit au retour
des réfugiés même dans nos rangs, tout
cela nous a conduit , avec la lecture de
nombreuses expressions palestiniennes, à
revenir sur ce qu’Oslo avait tenté
d’imposer et s’est avéré comme un
dangereux leurre. Amjad Iraqi un
chercheur palestinien cite utilement
dans un article de 2018 (Éléments d’un
récit et d’un discours palestiniens
stratégiques – Al Shabaka) les
distorsions du récit palestinien dues à
l’adoption du récit israélien.
« Jamil Hilal a identifié cinq
« fausses représentations » qui
infestent le discours dominant qui règne
aujourd’hui sur la Palestine : (1) les
droits territoriaux des Palestiniens ne
sont limités qu’à 22% de leur patrie
historique ; (2) le point de départ de
la lutte palestinienne est 1967, au lieu
de 1948 ou avant ; 3) le peuple
palestinien ne comprend que les
habitants de la Cisjordanie et de la
bande de Gaza ; (4) la solution des deux
États constitue l’avenir politique le
plus légitime et le plus viable des
Palestiniens ; et (5) que les
Palestiniens puissent développer leur
société et leurs institutions tout en
vivant sous occupation militaire. »
A cette lecture on
peut légitimement se demander si
certaines de ces « fausses
représentations » n’ont pas aussi été
adoptées par une partie du mouvement de
solidarité.
La gauche française
est trop souvent très heureuse de se
référer au droit international et au
partage de l’ONU. Ce même partage repris
par Oslo en 1993 , après un demi siècle
de destruction et de colonisation de la
Palestine qui tente de faire exister un
état sur les restes de ces cinquante
années : les territoires occupés de 67
et Gaza. Oslo auquel on continue encore
et encore de se référer est aussi un
échec, le second du droit international
partitionniste. Joseph Massad évoque ce
moment et ses conséquences dans
l’article précité : « Ce n’est pas le
rejet du plan de 1947 qui constitue
l’événement traumatique des
Palestiniens, mais bel et bien leur
acceptation de sa version tronquée en
1988. Loin d’être une névrose, le rejet
palestinien du plan de partition
reflétait une position de principe
anticolonialiste partagée par tous les
peuples colonisés »s…a compulsion de
Partition né« La partition a constitué
le critère à la base de ces projets
(coloniaux) dans tous ces contextes (le
nom même de cette stratégie en Afrique
du Sud fut "partition" ou "apartheid")
et l’arrêt de la partition est considéré
comme la seule voie vers la libération.
Sauf en Palestine où la partition est
présentée comme le moyen non pas de
renforcer le projet sioniste de
colonisation de peuplement, mais,
étonnamment, comme une voie vers la
"libération" ». Ceux qui balaient
d’un coup d’épaule méprisant la
perspective d’un état de la mer au
Jourdain avec le retour des réfugiés
palestiniens, comme une utopie,
devraient commencer par balayer devant
leur porte : la fameuse solution à deux
états vieille de 72 ans
d’expérimentation se solde par un échec
magistral, alors que celle d’un seul
état n’a jamais été tentée à ce jour.
Sans doute est-ce
aussi ce qu’exprime le peu de soutien
trouvé en Europe à la grande marche du
retour de Gaza. Ceux là encore devraient
écouter Richard Falk qui a été
rapporteur spécial des Nations Unies
pour les droits de l’homme (et ce n’est
pas un utopiste) dans son article tout
récent du 7 novembre 2019 : « Les
manœuvres de zombies de ces 20 dernières
années ou plus et le plaidoyer constant
en faveur de négociations pour une
solution à deux états depuis longtemps
moribonde doivent cesser : la seule
question qui vaille est de savoir quel
type d’État émergera – laïc ou
d’apartheid…soit un état juif pratiquant
l’apartheid, soit un état laïc,
ethniquement neutre fondé sur les droits
de l’homme et l’égalité pleine et
entière de ses différents peuples et de
leur religion. L’adoption récente de la
Loi Fondamentale du peuple juif, et le
rejet par la Knesset d’un projet de loi
affirmant l’égalité de tous les peuples
vivant en Israël, montrent clairement
qu’Israël est déterminé à réaliser la
première option… En fin de compte, la
seule question qui vaille est la
suivante : quel type d’état unique
existera dans le territoire de la
Palestine administré entre les deux
guerres mondiales par le Royaume Uni en
tant que mandataire ? Est-ce que ce sera
un état juif qui réalise le projet
sioniste, ou un état laïc fondé sur les
droits de l’homme et mû par un esprit
d’égalité ?
Et il conclut : Le contexte
diplomatique y gagnerait en clarté si le
président Mahmoud Abbas et la direction
de l’AP à Ramallah pouvaient, même
tardivement, montrer la voie en
affirmant ce nouveau réalisme. Ce
pourrait être le moyen de retrouver leur
pertinence pour le bien-être du peuple
palestinien et la véritable dynamique de
la lutte palestinienne. »
L’UJFP soutiendra
toujours le droit palestinien à
l’autodétermination , mais elle ne peut
que constater à quel niveau de
destruction de la Palestine a conduit le
droit international et sa logique de
partition qui n’a réalisé que la seule
expansion et le seul développement du
seul état existant : Israël dans une
logique de destruction et d’élimination
de la Palestine. Ce qui sous tend les
partitions dans le monde est un principe
d’inégalité (des ressources, des
individus des états constitués etc..
voir encore l’Apartheid sud africaine)
En conclusion, je
dirais que le peuple palestinien dans la
survie a besoin aujourd’hui d’amis
inconditionnels qui n’atermoient pas
autour de ce qui est pour lui vital : l
La condamnation
ferme et publique et non implicite de ce
qui est entrain de le détruire : le
sionisme.
L’adhésion ferme et
entière à ce qui le défend et le protège
aujourd’hui : le BDS entre autres.
Et parce que l’UJFP
ne dissocie pas son action dans le cadre
de la globalisation du monde qui relie
et intrique les situations, parce que
nous avons vu comment l’ idéologie
néoconservatrice a forgé des liens
maléfiques entre la résistance
palestinienne et le terrorisme
islamiste, entre le terrorisme islamiste
et les populations musulmanes françaises
notamment, parce que la situation de la
Palestine est aujourd’hui noyée dans le
Moyen Orient en fusion , nous faisons le
lien avec l’islamophobie qui se
développe en Europe et en France, avec
l’importation des méthodes de
gouvernance israéliennes, et de gestion
des populations, et nous nous impliquons
dans la défense des victimes de
l’islamophobie.
Là aussi les
atermoiements nous semblent dangereux
pour la population visée ici, qu’ils
isolent dans la revendication
antisioniste légitime, permettant
qu’elle soit stigmatisée comme
illégitime et antisémite. (Rappelons
nous que déjà en 2014 l’académie de
Poitiers considérait que l’intérêt pour
la Palestine constituait un signe de
radicalisation et ce signe s’est propagé
et répété dans nombre de listes
destinées à ce repérage. N’est-il pas
temps de construire un mouvement de
solidarité véritablement inclusif ? Nous
l’avons vu et vécu à plusieurs reprises,
les appels à manifestation ne sont pas
soutenus par un collectif national qui
craint de donner un cadre nécessaire
entre autres à des forces vives de la
population qui sont antisionistes , qui
soutiennent les Palestiniens réfugiés,
de Gaza, de Cisjordanie et d’ailleurs
comme on soutient un membre de sa
famille, parce qu’elles sont arabes et
refusent à juste titre l’injustice. Ne
pas leur offrir le cadre nécessaire à
l’expression de la solidarité c’est les
mettre en danger, les livrer en proie
aux pires forces réactionnaires et
racistes de ce pays. N’est ce pas œuvrer
ici contre le vivre ensemble et la
coexistence que l’on prétend soutenir
ailleurs ? Comment conclure sans évoquer
Gaza sous le feu israélien aujourd’hui,
et la solidarité qui devrait s’exprimer
dans la rue, et comment ne pas constater
aujourd’hui que le Collectif National ne
s’est pas encore réuni pour organiser
d’urgence la grande manifestation qui
devrait s’imposer, et la communication
nécessaire ? Encore faudrait-il cesser
enfin d’avoir peur des arabes ici pour
soutenir ceux de là bas.
Amjad Iraqi pose dans sa conclusion des
questions utiles destinées aux
Palestiniens, mais qui nous concernent
aussi et peuvent nous aider à dessiner
notre soutien et nos mobilisations :
« – Quelles
composantes et priorités d’un récit
commun peuvent être approuvées par tous
les secteurs de la société
palestinienne ?
– Les Palestiniens doivent-ils
s’entendre sur le « but final » de notre
lutte afin de construire et de maintenir
un récit unifié ?
– Comment assurer l’efficacité
stratégique de notre discours sans le
rendre étroit ou exclusif ?
– Notre discours va-t-il revenir aux
modèles traditionnels du nationalisme ou
peut-il trouver de nouveaux cadres pour
réunir les communautés palestiniennes
fragmentées ?
– Notre récit peut-il donner la priorité
à ce que nous combattons – le
colonialisme des colons israéliens et
l’apartheid – alors que notre discours
se concentre sur une vision de ce que
nous voulons – la liberté, la justice et
l’égalité ?
– Reconnaître le droit d’Israël à
exister (comme cela a été le cas dans
les accords d’Oslo) implique-t-il
l’acceptation du récit et du discours
sionistes ?
– Comment le récit et le discours
palestiniens devraient-ils aborder les
droits historiques et contemporains des
juifs israéliens dans une vision
politique future ?
Ce sont
quelques-unes des questions auxquelles
les Palestiniens mais aussi leurs alliés
doivent répondre, en partageant les
expériences et les leçons tirées
d’autres luttes. »
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