Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (76)
Photo CPI
Lundi 26 avril 2010
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage Hamas : Son histoire de l’intérieur de Dr. Azzam
Tamimi s’inscrit dans une volonté de montrer au monde la vision
du mouvement du Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le
département français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a
donc jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète,
diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
Le Hamas au
gouvernement (2)
Une démocratie
hésitante
Le 9 janvier 2005, environ deux mois après le décès de Yasser
Arafat à l’hôpital de Paris, les Palestiniens furent appelés aux
urnes pour élire un nouveau président. Le seul candidat avec une
chance réel de gagner était Mahmoud Abbas, et sa victoire vint
donc sans surprise. Le Hamas eut pour avis que les élections
étaient l’affaire du Fatah et décida de rester à l’écart. Un
certain nombre d’autres factions, qui avaient conclu que
l’exercice était futile, se joignirent aussi au boycott.
A partir du jour où Mahmoud Abbas prit ses fonctions le 15
janvier 2005, il s’engagea dans la cause de la réforme politique
et promit de combattre la corruption. Il y avait beaucoup à
faire pour mettre de l’ordre dans la maison du Fatah même. Il y
avait aussi un besoin pressant pour le Fatah d’ouvrir un
dialogue avec d’autres factions palestiniens, et notamment avec
le Hamas, qui réfléchissait dans ses rangs à l’intérieur comme à
l’extérieur de la Palestine sur sa stratégie de l’ère
post-Arafat. Une priorité était de décider s’il fallait
participer aux élections législatives que Mahmoud Abbas avait
promis de conduire le 17 juillet 2005. Le Hamas avait déjà pris
part à d’autres formes d’élections comme des syndicats
étudiants, des syndicats professionnels, et les premières
élections municipales à être tenues dans les territoires depuis
1967.
L’autorité palestinienne avait décidé de tenir des élections
municipales en trois étapes qui prendraient une année à
s’achever. Le premier tout de la première étape eut lieu le 23
décembre 2004 à Jéricho et dans vingt-cinq villages à travers la
Cisjordanie. Le Fatah remporta la majorité des sièges dans
dix-sept conseils municipaux (avec cent trente-cinq sièges au
total) alors que le Hamas remporta la majorité des sièges dans
neuf conseils (avec soixante-quinze sièges au total). Le FPLP
arriva en troisième place. Ce qui stimula le Hamas et alarme le
Fatah était le résultat du second tour de ces élections
municipales, tenues à Gaza le 27 janvier 2005. Là, le Hamas
remporta le contrôle de sept sur dix conseils municipaux
(soixante-dix-huit sièges sur cent dix-huit). Le Fatah remporta
trente sièges et le FPLP un seul, alors que neuf sièges
revinrent à des candidats indépendants.
Clairement, ces résultats encouragèrent les membres du Hamas
dans la bande de Gaza, qui devinrent très enthousiastes quant à
la participant dans les élections législatives à venir. Ils se
sentirent confiants, pendant pouvoir remporter une confortable
majorité. A l’opposé, les membres du Hamas en Cisjordanie
étaient moins favorables à l’idée, et la branche du Hamas à
Hébron n’était pas enthousiaste du tout. Les membres du Hamas à
l’intérieur des prisons exprimèrent des sentiments mitigés,
alors que les membres du Hamas à l’étranger soutenaient
prudemment la participation. Le résultat de toutes les
consultations fut soumis à la plus haute autorité, le conseil
Istishari, qui rendit la décision finale que le Hamas devait se
saisir de l’opportunité offerte par les élections et y
participer totalement.
Izzat Al-Rishiq, un membre du bureau politique du Hamas et le
chef de son comité d’élections, donna cette explication à la
décision du Hamas à participer aux élections :
« La décision du mouvement de la résistance islamique
[Hamas] de participer aux élections législatives fut atteinte
après de longues réflexions et suite à des consultations. Tous
les organes et institutions directeurs du mouvement à
l’intérieur et à l’extérieur de la Palestine furent consultés,
dont les captifs du mouvement à l’intérieur des prisons de
l’occupation sioniste. Il a été accepté que notre participation
ne devait en aucun cas faire de tort à notre engagement à
défendre les droits légitimes du peuple et à protéger le
programme de résistance comme une option stratégique jusqu’à ce
que l’occupation prenne fin. La décision était à certains égards
une réponse au sentiment populaire et au désir de notre peuple
de voir toutes les factions palestiniennes participer dans le
processus politique. Elle a aussi pris en compte le résultat de
l’évaluation du mouvement des changements radicaux qui ont eu
lieu à l’intérieur de la Palestine grâce à la résistance, à
l’intifada et aux sacrifices que notre peuple a faits durant les
années passées. Le processus de consultation a conclu que l’ère
d’Oslo était à sa fin, et que les élections législatives, qui
devaient avoir lieu en juillet 2005 mais qui sont ajournées en
janvier 2006, allaient vraisemblablement être affranchies de
manipulation ou de contraintes. C’étaient ces contraintes et le
monopole au-dessus du processus politique qui nous ont découragé
de prendre part aux élections de 1996. Notre boycott à ce moment
n’était pas idéologique. Cela ne reposait pas sur le fait que la
participation soit halal (permise) ou haram (interdite) : cela
se basait seulement sur notre propre évaluation de ce qui était
dans l’intérêt de notre cause et de notre peuple et de ce qui ne
l’était pas. Nous savions que les accords d’Oslo étaient
condamnés et que ce n’était qu’une question de temps avant que
le processus de paix entre l’autorité palestinienne et Israël ne
rentre dans une impasse et ne s’effondre. Nous avons décidé de
rester à l’écart car nous ne voulions en aucun cas soutenir
l’accord injuste. Notre participation à ce moment aurait donné
une légitimité à ce qui était, à notre avis, illégitime ».
La position du Hamas sur la démocratie et le partage du pouvoir
dans un régime non-islamique n’est pas différente de celle des
principaux groupes islamiques. Le Hamas souscrit au principe
généralement épousé par les Ikhwan, qui accepte que la
démocratie est compatible avec l’islam. Comme expliqué par Izzat
Al-Rishiq, la décision du mouvement de boycotter les élections
présidentielles de janvier 1996 et les élections législatives
ainsi que les élections présidentielles de janvier 2005 n’était
pas idéologique, mais provenait de la conviction que les
élections étaient conduites dans des circonstances qui ne
garantissaient pas la justice. Plusieurs factures contribuèrent
à augmenter la confiance du Hamas que les circonstances
politiques étaient maintenant plus favorables. Parmi elles se
trouvait l’échec total du processus de paix, la disparition de
Yasser Arafat de la scène politique et la décision unilatérale
d’Israël de mettre un terme à son occupation de la bande de
Gaza. Dans les autres facteurs, il y avait que les Palestiniens
croyaient que la résistance du Hamas et d’autres factions avait
forcé les Israéliens à sortir de Gaza, et il y avait aussi le
désordre à l’intérieur du mouvement du Fatah. Enfin, il y avait
la désillusion du public envers l’autorité palestinienne, qui
s’était produite en raison de la prévalence de la corruption et
de l’échec de l’autorité palestinienne à conduire le processus
de paix jusqu’à une conclusion. Le 12 mars 2005, un porte-parole
du Hamas annonça que le mouvement avait pris la décision de
participer aux élections.
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
Hamas: son
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