|
Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (66)
Photo CPI
Lundi 15 février 2010
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage
Hamas : Son histoire de l’intérieur
de Dr. Azzam Tamimi s’inscrit dans
une volonté de montrer au monde la vision du mouvement du
Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le département
français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a donc
jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète,
diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
Le Hamas, l’OLP et l’autorité
palestinienne (1)
L’OLP a rencontré le Hamas au début avec
une indifférence totale, puis elle a essayé de jeter le doute
sur sa fiabilité, puis elle s’est efforcée à le rabaisser et a
refusé de le reconnaître, puis elle est rentrée dans une phase
de confrontation ouverte suivie par une tentative de le
contenir.
- Khaled Meshaal
Le défunt Yasser Arafat et ses collègues du Fatah, la principale
faction de l’Organisation de Libération de la Palestine, se
battirent durement jusqu’à remporter une reconnaissance des
Arabes et du monde en général, prenant l’OLP comme “seule
représentant légitime du peuple palestinien”. Ils n’obtinrent
toutefois jamais une reconnaissance totale, car un grand nombre
de personnes parmi les Palestiniens eux-mêmes ne reconnurent
jamais l’OLP. Les islamistes palestiniens en particulier,
dirigés par les Ikhwan puis par le Hamas, refusèrent d’accepter
la revendication de l’OLP, insistant à dire que comme l’OLP
n’était pas élue par le peuple, elle n’avait pas de mandat pour
monopoliser la représentation des Palestiniens.
La décision par la Conférence du Sommet Arabe de 1974 d’accorder
un tel rôle à l’OLP fut perçue par certains Palestiniens comme
une étape quelque peu négative, dans le sens où elle dégageait
des Arabes non-palestiniens la responsabilité de libération de
la Palestine. En d’autres termes, le mouvement rétrograda
officiellement le conflit avec le projet sioniste d’un souci
pan-arabique à une question palestinienne locale, dont la
responsabilité restait entre les mains des Palestiniens
seulement. Cela signifiait que tout ce que l’OLP acceptait
serait accepté par le reste du monde arabe. Il est aussi à
souligner que l’OLP, qui fut créée par la Ligue Arabe, ne
s’affranchit jamais de l’intervention et de la manipulation de
divers gouvernements arabes, et au-dessus de tous de celles de
l’Egypte.
L’Egypte, dont l’objectif était d’être totalement libérée de
toute obligation envers la révolution palestinienne tout en
gardant son influence sur elle, contribua à assurer un consensus
arabe sur la question. Suite à la guerre de 1973 avec Israël, le
principal objectif de l’Egypte fut de négocier un traité de paix
pour mettre fin à son propre conflit avec Israël une bonne fois
pour toute. Il ne serait pas tiré par les cheveux de conjecturer
que les Egyptiens aient pu aussi jouer un rôle dans la création
du plan à dix points proposé par la direction de l’OLP environ
au même moment. Selon ce plan, qui fut officiellement adopté par
l’OLP quelque six ans plus tard, la lutte armée fut déclarée
comme étant une voie vers la libération de la Palestine, mais
pas la seule. L’OLP allait alors être ouverte à accepter un
accord négocié avec les Israéliens, avec l’objectif de
l’établissement immédiat d’un Etat palestinien sur toute partie
de la Palestine qui devenait disponible. Aussi tôt qu’au milieu
des années 1970, de nombreux membres du Fatah avaient déjà peur
que le plan à dix points soit le début du déraillement de leur
projet de libération national. Cependant, des loyalistes à l’OLP
insistèrent à dire que cela n’impliquait pas plus que la
reconnaissance de la nécessité d’une approche graduelle au
projet de libération sans concéder de droit fondamental du
peuple palestinien.
A travers les années 1970 et 1980, l’OLP subit une série de
revers, tout d’abord en Jordanie, puis au Liban. Des critiques
de l’organisation soutiennent que la plupart de ces revers
furent auto-infligés. Il n’y eut plus de différence entre la
direction de l’OLP et celle des autres régimes autoritaires
arabes de la région. En l’absence de transparence et de mesure
significative pour la rendre redevable, et comme la corruption
se répandit à travers sa hiérarchie, des animosités et des
séparations internes devinrent inévitables. Néanmoins, pendant
une grande partie de ces deux décennies, les islamistes ne
firent rien pour concurrencer les efforts de l’OLP d’exécuter
son rôle de représentant des Palestiniens sur la scène
internationale. Les efforts des islamistes se focalisaient au
lieu de cela sur la réforme sociale, en entrant notamment dans
la couche sociale qui avait jusqu’au début des années 1970
l’apanage du mouvement nationaliste laïc. Les gains effectués
par les islamistes dans les universités et dans les syndicats
éveillèrent parfois une tension entre les deux parties.
Cependant, ce n’est qu’avec l’intifada donnant au mouvement du
Haas que la direction de l’OLP sentit son autorité sérieusement
menacée. Le Hamas fut perçu comme la proposition des Ikhwan pour
supplanter l’OLP en tant que seul représentant légitime. En
effet, la propre rhétorique du Hamas le présentait comme cela.
Ses documents, du premier communiqué à la Charte, accusaient
implicitement ou explicitement la direction de l’OLP
d’abandonner ses responsabilités et de compromettre la cause.
Au début, Yasser Arafat demanda à la direction des Ikhwan
égyptiens de persuader leurs frères palestiniens de reculer. Il
déclara qu’un mouvement parallèle à l’OLP ne causerait que du
tort à la lutte et sera à l’avantage de l’ennemi. Lorsqu’il
rencontra Al-Murshiad Al-‘Amm, guide général ou président des
Ikhwan, au Caire, Arafat l’appela à persuader les islamistes
palestiniens de rejoindre le Fatah, qui selon les protestations
d’Arafat était de toute façon né grâce aux Ikhwan. En privé,
toutefois, il méprisa les islamistes palestiniens. Dans un
discours qu’Arafat a effectué lors d’un meeting de supporters du
Fatah au Yémen peu après l’émergence du Hamas, qui fut
enregistré sans qu’il ne le sache, il décrivit ses membres comme
des fourmis qui devaient se courber dans leurs trous, de peur
que lui et ses forces ne les écrasent.
Arafat invita le Hamas à faire partie de l’OLP. En avril 1990,
en sa capacité de porte-parole du Hamas, Ibrahim Ghosheh rendit
visite à Sheikh Abd Al-Hamid Al-Sa’ih, orateur du Conseil
National de la Palestine (CNP), dans son bureau à Amman, et lui
présenta une note intitulée “Notre vision du Conseil National de
la Palestine”. Dans ce document, le Hamas affirmait être prêt à
rejoindre le CNP, à condition que les membres du CNP soient
choisis par des élections. Si des élections n’étaient pas
faisables dans la pratique, le Hamas proposait qu’il lui soit
alloué pas moins de quarante pour cent de sièges du CNP, étant
donné que quarante pour cent du peuple palestinien étaient des
supporters du Hamas. L’atmosphère lors du meeting était
cordiale, et Al-Sa’ih promit de donner une réponse au Hamas. A
la base, l’OLP présenta au Hamas dix-huit sièges, qui à ce
moment-là ne dépassait pas les quatre pour cent du nombre total
de sièges du CNP, qui étaient tous remplis par nomination. Le
Hamas refusa l’offre. Yasser Arafat, qui avait normalement
l’autorité pour allouer les sièges du CNP et pour désigner ses
membres, accrut le nombre proposé au Hamas à vingt-quatre.
Toutefois, encore une fois, ceci ne réussit largement pas à
répondre à ce que le Hamas avait à l’esprit.
Au début des années 1990, en dépit des relations tendues entre
les deux parties, des représentants du Hamas rencontrèrent
Yasser Arafat à plusieurs occasions pour résoudre les questions
urgents. Un de ces meetings eut lieu au Yémen, où le sujet
discuté fut la situation à l’intérieur des prisons israéliennes
et la résolution des disputes occasionnelles qui avaient lieu
entre le Hamas et des prisonniers du Fatah. Un autre meeting eut
lieu suite à la déportation de masse d’Israël au sud Liban
d’activistes du Hamas et du Jihad Islamique. Une délégation du
Hamas dirigée par Moussa Abu Marzouq, comportant Ibrahim Ghosheh,
Imad Al-Alami et Muhammad Nazzal, partit pour Tunis pour
discuter des efforts diplomatiques pour résoudre la crise et
pour assurer le retour des déportés avec Yasser Arafat.
Hamas: son histoire de
l'intérieur (65)
Hamas: son histoire de
l'intérieur (67)
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
|