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Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (3)
Photo CPI
10 novembre
2008
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage Hamas :
Son histoire de l’intérieur de Dr. Azzam Tamimi
s’inscrit dans une volonté de montrer au monde la vision du
mouvement du Hamas et d’expliquer ainsi son développement.
Le département français du Centre Palestinien d’Information
(CPI) a donc jugé intéressant d’en présenter ici la
traduction complète, diffusée régulièrement en de nombreuses
parties.
Introduction (2)
La différence entre ce livre et la plupart des
autres écrits sur le Hamas est qu’il parle du Hamas dans un
contexte général plutôt qu’en le plaçant exclusivement dans
le contexte d’Israël. Le Hamas est une organisation d’Arabes
et de musulmans qui se trouvent être palestiniens, et qui se
voient comme étant les victimes immédiates d’un complot
tramé par un ordre mondial injuste qui crut bon de créer un
Etat juif au cœur même des territoires arabes et musulmans.
Ils voient les Israéliens comme étant les oppresseurs
directs qui les dépossédèrent et qui les persécutèrent
pendant des générations. Alors qu’elles s’occupent d’abord
de soucis locaux, les activités du Hamas ont des
conséquences et des implications régionales ainsi que
mondiales. La lutte contre Israël est un des divers éléments
qui renseigne sur la pensée du mouvement et qui fait
connaître son activisme, mais ce n’est en aucun cas le seul.
Le Hamas, qui prit ses origines chez al-Ikhwan al-Muslimun
(les Frères Musulmans), partit d’un projet social motivé par
la philanthropie et dédié à la charité.
Les Frères Musulmans sont un mouvement détesté et craint dans
certaines régions, mais aimé et soutenu par des millions
d’Arabes et admiré par plusieurs millions de musulmans autour du
monde. Il est respecté par de nombreux non-musulmans qui
l’étudièrent ou qui vinrent à le connaître correctement, soit à
travers les écrits de ses leaders, soit en leur ayant parlé
directement. Plutôt caractérisés par leurs adhérents comme un
mouvement de réforme global, les Frères Musulmans étaient à
l’origine des Egyptiens, mais ils se développèrent depuis en un
réseau mondial. L’organisation mère fut fondée en 1928 par
Hassan al-Banna (1906-1949) dans la ville égyptienne
al-Isma’iliyah, où il enseignait dans une école primaire, non
loin des quartiers généraux des forces occupantes britanniques.
Combinant des éléments de spiritualité acquis de l’association
d’al-Banna avec l’ordre soufi Hassafiyah avec les enseignements
monothéistes anciens de l’islam qu’il apprit de l’école
salafiste de Mohammed Rashid Rida (1865-1935) – un disciple et
proche associé de Muhammad Abduh (1849-1905) – le projet reçut
un grand accueil populaire. Peu après sa naissance, le mouvement
des Frères Musulmans se développa rapidement en Egypte et
au-delà. A l’intérieur de l’Egypte, il avait quatre branches en
1929, quinze en 1932, trois cents vers 1938 et plus de deux
mille en 1948. Vers 1945, il avait un demi million de membres
actifs en Egypte seulement. Entre 1946 et 1948, des branches des
Frères Musulmans furent ouvertes en Palestine, au Soudan, en
Irak et en Syrie.
Le talent d’al-Banna était manifeste dans son habileté à
présenter aux masses les entreprises des intellectuels de son
temps et à transformer en un mouvement populaire les projets
élitistes des réformistes qui le précédèrent. Il ne travaillait
pas dans les mosquées, car ceux qui fréquentaient les mosquées
n’étaient pas sa cible. Il ne travaillait pas non plus dans des
cercles culturels ou d’autres lieux de rencontres de la classe
supérieure. Son domaine d’activité se trouvait dans les cafés
populaires et dans les lieux de rencontres, où il réitérait en
des termes plus simples, plus directs, les appels à la réforme
effectués par des réformateurs du dix-neuvième siècle. Sur le
colonialisme, il transmettait la pensée de Jamal al-Din
al-Afghani (1838-1897) et de Mustafa Kamil (1874-1908). Sur
l’usure, il prenait son exemple de Muhammad Abduh et de Muhammad
Rashid Rida. Mustafa Kamil forma son opinion sur l’influence du
commerce étranger, alors que Abduh et Rida formèrent ses idées
sur le chaos intellectuel et la perte des valeurs morales. Jamal
al-Din al-Afhani et Shakib Arsalan (1869-1946) l’inspirèrent
pour sa condamnation de l’imitation aveugle de l’occident, et
Shakib Arsalan éveilla sa critique des lois instaurées par
l’homme qui échouaient à freiner le crime ou à décourager les
criminels. Muhammad Abdul était l’origine de ses pensées sur la
mauvaise gestion de l’éducation. Enfin, sur les signes de
désespoir et de perte de volonté manifestes dans la communauté
musulmane, il prit son inspiration de Arsalan et de Kamil.
Al-Banna condamna les divisions partisanes pour
l’intensification des problèmes dont souffrait déjà la
communauté en conséquence du sous-développement et du
colonialisme. Sa priorité était d’alerter le peuple d’Egypte sur
l’importance de l’unité et de la cohésion. Il avertit que tant
que la communauté était fragmentée et noyée dans les disputes,
elle ne pourrait jamais affronter la menace de l’hégémonie
coloniale. Son message n’était pas limité à l’Egypte, mais la
transcendait pour qu’il soit diffusé dans tout le monde
musulman, dont la plus grande partie était sous une occupation
étrangère à l’époque. Il tint les forces européennes pour
responsables du « démembrement de l’empire islamique et
l’annihilation de l’Etat islamique et sa suppression de la liste
des nations actives et puissantes ». Les objectifs à long terme
de son mouvement étaient d’abord de libérer le territoire
islamique de toute autorité étrangère, et d’établir ensuite un
Etat islamique sur cette terre islamique. Toutefois, aucun
objectif ne pouvait être atteint si l’on ne s’occupait pas en
premier lieu des besoins immédiats de la société. Le projet
d’al-Banna était, au-dessus de tout, un effort visant à
“réhabiliter” la communauté, en commençant par l’individu, puis
la famille, pour arriver jusqu’à la société dans son ensemble,
tout cela à travers un processus de réforme graduel.
Ces deux mêmes objectifs furent poursuivis, employant la même
méthodologie de réforme graduelle, par des branches des Frères
Musulmans à travers la région arabe, dont la Palestine, où les
Frères Musulmans palestiniens prirent racines immédiatement
après la fin de la seconde guerre mondiale. Les Frères Musulmans
palestiniens ouvrirent d’abord quelques branches locales à Gaza.
Toutefois, le 6 mai 1946, leur structure s’approcha de son
achèvement avec l’inauguration officielle du bureau central du
mouvement à Jérusalem, en la présence de dignitaires locaux,
ainsi que d’invités qui vinrent du Caire pour représenter le
mouvement mère en Egypte. La création d’Israël sur deux tiers de
la Palestine en 1948 fit séparer les Frères Musulmans
palestiniens en deux organisations. L’une était à Gaza, qui se
retrouva sous la direction militaire égyptienne, et l’autre en
Cisjordanie, qui fut annexée à la Transjordanie et devint en
temps voulu une partie du royaume hachémite de Jordanie. Ce
livre commence du moment en 1967 où l’occupation israélienne du
tiers restant de la Palestine créa une opportunité aux Frères
Musulmans de renaître et de se réunifier.
Hamas: son histoire de
l'intérieur (2)
Hamas: son histoire de
l'intérieur (4)
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
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