|
Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (41)
Photo CPI
Lundi 10 août 2009
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage
Hamas : Son histoire de l’intérieur
de Dr. Azzam Tamimi s’inscrit dans
une volonté de montrer au monde la vision du mouvement du
Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le département
français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a donc
jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète,
diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
Hors de la Jordanie (1)
Nous avons pas choisi de quitter la
Jordanie… Nous avons été déportés… Nous avons été emmenés de la
prison enchaînés directement à l’aéroport et à l’avion.
- Khaled Meshaal
Même si vous deviez m’abandonner dans les
ruelles de Bangkok, je ne mettrais pas mon nom sur un tel
communiqué humiliant.
[1]
- Ibrahim Ghosheh
Wye River
Le 23 octobre 1998, lorsque Yasser Arafat et Benjamin Netanyahu
signèrent un accord qu’ils avaient négocié neufs jours au sommet
de Wye River, le processus de paix entre l’autorité
palestinienne et Israël avait en réalité été en suspens pendant
plus d’un an et demi. Les Etats-Unis avaient servi
d’intermédiaire pour les négociations. Leur président Bill
Clinton avait assisté à plusieurs de ses cercles de négociations
et avait finalement été témoin de la signature du mémorandum,
alors que le roi Hussein de Jordanie était aussi présent. Les
discussions s’ouvrirent le 15 octobre, mais peu de progrès fut
fait jusqu’au 20 octobre. A cette étape, les obstacles
semblaient insurmontables. Yasser Arafat était sous la pression
des Américains pour accepter une série de mesures radicales pour
contenir le terrorisme palestinien, ce qui était une condition
d’Israël pour tout nouveau retrait. Craignant l’échec des
discussions, le président Clinton chercha l’assistance du roi
Hussein, qui se trouvait être aux Etats-Unis depuis juillet,
subissant un traitement chimiothérapique pour son cancer à la
clinique Mayo en Minnesota. Les Américains pensaient que le roi
pouvait « aider à convaincre les deux délégations de
l’importance de prendre les choix difficiles pour la paix ». En
fin de compte, il fut convenu que l’autorité palestinienne
allait augmenter ses efforts contre les prétendus terroristes et
confisquer les armes illégales, et retirer les termes
explicitement hostiles à l’existence d’Israël de la convention
nationale palestinienne. En échange, Israël acceptait de se
retirer d’encore treize pour cent de la Cisjordanie, de libérer
plusieurs centaines de prisonniers palestiniens, de permettre à
l’aéroport palestinien à Gaza de s’ouvrir, et de laisser les
Palestiniens se déplacer entre la Cisjordanie et la bande de
Gaza sans problème.
Les Jordaniens célébrèrent l’accord comme étant le leur,
considérant l’effort du roi Hussein comme étant fondamental pour
amener les deux parties à un accord. Lorsque le Hamas déclara
son opposition à cet accord, disant qu’il allait créer un
conflit interne entre les Palestiniens s’il appliqué, les
Jordaniens furent, sans surprise, très offensés. Le roi Hussein
fut personnellement contrarié lorsque Sheikh Ahmad Yassine, dont
il avait pris le mérite de la libération de la détention
israélienne, décrivit la signature du mémorandum de Wye River
comme étant un acte de trahison, et qu’il remarqua qu’il
coûterait aux Palestiniens plus qu’ils n’en profiteraient.
Sheikh Yassine continua par publier un avertissement disant que
toutes les nouvelles mesures contre le Hamas n’allaient
probablement restreindre que temporairement les activités de sa
branche militaire, les brigades Ezzeddine Al-Qassam.
La critique de l’accord du Hamas ne pouvait venir à un pire
moment. Les relations entre le Hamas et la Jordanie étaient déjà
sous grande tension. En outre, l’autorité palestinienne avait
mis la pression depuis quelques temps sur la Jordanie pour
intervenir contre les leaders du Hamas à Amman, qu’elle croyait
être le principal obstacle les empêchant de contenir le Hamas à
l’intérieur de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. En avril
1998, alors que Sheikh Yassine effectuait son tour dans les pays
arabes et islamiques, le roi Hussein reçut une plainte formelle,
certainement pas la première, de Yasser Arafat. Arafat attira
l’attention sur des rapports dans les médias jordaniens qui
citaient des déclarations de leaders du Hamas en Jordanie au
sujet de la querelle entre le Hamas et l’autorité palestinienne
sur l’assassinat de Muhyiddin Al-Sharif. Le roi Hussein envoya
par la suite une lettre au premier ministre Abd As-Salam Al-Majali
dans laquelle il fit référence à des « tentatives par les médias
locaux de saboter les relations entre la Jordanie et l’autorité
palestinienne ». Dans un avertissement indirection au Hamas, la
lettre du roi notait à nouveau la totale reconnaissance de la
Jordanie de l’autorité palestinienne comme seul représentant
légitime du peuple palestinien et le soutien dévoué de la
Jordanie aux aspirations nationales palestiniennes.
Après avoir signé son propre traité de paix avec Israël, la
Jordanie avait cessé de permettre aux porte-parole du Hamas en
Jordanie pour publier des communiqués au sujet de ses activités
militaires à l’intérieur de la Palestine. L’autorité
palestinienne s’était efforcée d’obtenir une interdiction
similaire sur les communiqués du Hamas touchant à ses affaires
avec l’autorité palestinienne. Durant l’affaire Muhyiddin
Al-Sharif, Arafat et ses assistants étaient en colère en raison
de ce qu’ils virent comme un refus de la Jordanie de soutenir
leur version concernant les responsables de l’assassinat
d’Al-Sharif fin mars 1998. La lettre du roi Hussein à son
premier ministre avait pour intention non seulement de faire
taire les porte-parole du Hamas en Jordanie, mais aussi de
réprimander les officiels jordaniens qui avaient plus tôt dit
que le royaume n’interférerait pas dans la politique
palestinienne interne. Apparemment, il y avait aussi l’intention
de laisser fuir le message à la presse locale, qui n’avait pas
réussi à être convaincue de la version de l’histoire de
l’autorité palestinienne.
Peu après la signature du mémorandum de Wye River, les leaders
du Hamas en Jordanie sentirent un changement marqué dans
l’attitude des autorités jordaniennes envers eux. Après
réflexion, Wye River représentait un tournant : il signalait le
début de la fin pour la présence du Hamas en Jordanie. Un signe
précurseur de ce changement eut lieu lorsque le porte-parole du
Hamas Ibrahim Ghosheh fut convoqué par le DRG pour qu’il soit
interrogé sur des remarques que la presse avait cité de lui,
qu’il aurait faites à un séminaire organisé par les Ikhwan
jordaniens dans leurs quartiers généraux à Amman. Il fut
interrogé par le sous-directeur du DRG Sa’d Khayr, qui était
furieux que Ghosheh eût critiqué l’accord de Wye River en dépit
de précédents avertissements adressés aux membres du Hamas en
Jordanie, leur demandant de ne pas faire de déclarations
publiques à son sujet. La défense de Ghosheh fut qu’il supposait
que le meeting était privé et qu’il n’était pas conscient que
des journalistes étaient présents.
Les nouveaux troubles causés aux leaders et activités du Hamas à
Amman par les autorités poussèrent Khaled Meshaal, le chef du
bureau politique du Hamas, à exprimer ses inquiétudes. Lui-même
goûtait à ces troubles lorsque le 31 octobre 1998, il fut arrêté
à la frontière jordanienne, alors qu’il se rendait à Damas. Il
fut obligé de retourner à Amman après avoir été retenu pendant
plus d’une heure, alors qu’il fut traité de façon rude et menacé
que s’il se rendait à Damas, il ne serait pas autorisé à rentrer
en Jordanie. Il avait pour intention de prendre par à un meeting
des factions palestiniennes à Damas pour discuter des
répercussions de l’accord de Wye River. Dans la même semaine,
les autorités jordaniennes empêchèrent Muhammad Nazzal, alors
représentant du Hamas en Jordanie, de quitter le pays. Il
souhaitait se rendre à Doha, où il avait été invité à prendre
part à une discussion en direction sur la chaîne de télévision
Aljazeera sur les aspects sécuritaires de l’accord de Wye River.
Dans un communiqué en novembre 1998 à l’hebdomadaire jordanien
Al-Urdun, Khaled Meshaal se plaignit que quelques membres de la
direction du Hamas en Jordanie eussent été sujets à une campagne
d’harcèlements depuis la signature du mémorandum de Wye River.
Il révéla aussi les menaces faites pour empêcher le retour de
leaders du Hamas s’ils voyageaient à l’extérieur du pays. En
décembre, Khaled Meshaal, Ibrahim Ghosheh et Moussa Abu Marzouq
furent empêchés de s’envoler pour Damas, où ils devaient
assister à une conférence majeure les 12 et 13 décembre.
Celle-ci avait été organisée pour protester contre le meeting à
Gaza prévu pour le 14 décembre, quand le président Clinton
devait s’adresser au conseil national palestinien lors d’un
meeting convenu pour abroger les articles de la charte nationale
palestinienne niant le droit d’exister à Israël.
Durant la même période, des rumeurs circulaient disant que le
bureau politique du Hamas avait décidé de transférer ses bureaux
et son équipe d’Amman à Damas. Le journal Al-Quds, qui
est publié en Cisjoradnie, cita des sources anonymes en disant
que Moussa Abu Marzouq avait déjà tenu des discussions avec des
officiels syriens à Damas qui avaient donné le feu vert pour
leur transfert. Khaled Meshaal nia qu’il eût une telle
intention. Dans un communiqué à l’hebdomadaire jordanien Al-Majd,
il dit : « Je suis un Jordanien. Je ne pense même pas à quitter
la patrie ».
[1] Ibrahim
Ghosheh, rejetant une demande du sous-directeur du DRG d’écrire
un communiqué demandant pardon au roi Abdllah de Jordanie.
Aéroport de Bangkok, 29 juin 2001.
Hamas: son histoire de
l'intérieur (40)
Hamas: son histoire de
l'intérieur (42)
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
|