Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (93)
Photo CPI
Lundi 6 septembre 2010
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage Hamas : Son histoire de l’intérieur de Dr. Azzam
Tamimi s’inscrit dans une volonté de montrer au monde la vision
du mouvement du Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le
département français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a
donc jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète,
diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
Le Hamas au
gouvernement (19)
Le document des
prisonniers
Suite à la suggestion du comité parlementaire des affaires
politiques dirigé par le Fatah, le porte-parole du Conseil
Législatif Palestinien Aziz Duwik appela à une conférence pour
discuter de la réconciliation nationale et du dialogue entre les
diverses factions palestiniennes, dont le Fatah et le Hamas,
dans l’espoir de mettre fin à l’impasse et d’apaiser la tension
montante. Le président Abbas accueillit l’idée et promit de
s’adresser à la session d’ouverture de la conférence. Sans que
Duwik et ses collègues du Hamas ne le sachent, le Fatah, qui
avait jusque-là tenté en vain d’intimider le gouvernement du
Hamas, avait conçu un plan pour la nuire.
Dans la session d’ouverture de la conférence de dialogue
nationale qui s’ensuivit, le 25 mai 2006, le président Abbas
surprit le Hamas en lui donnant un ultimatum. Soit le Hamas
parvenait à un accord avec le Fatah dans dix jours sur la base
de ce qui avait été connu sous le nom de “Document des
prisonniers”, soit il ferait face à un référendum que lancerait
le président dans quarante jours. Le “Document des prisonniers”
en dix-huit points, ou pour donner son titre complet, le
Document de réconciliation nationale des prisonniers, avait été
spécifiquement écrit pour qu’il soit soumis à la conférence de
dialogue nationale. Il portait les signatures de Marwan
Barghouti du Fatah, d’Abdul Khaliq Al-Natshah du Hamas, de
Bassam Al-Sa’di du Jihad Islamique, d’Abdul Rahim Mallouh du
Front Populaire pour la Libération de la Palestine, et de
Mustafa Badarnah du Front Démocratique pour la Libération de la
Palestine.
Le Hamas, en commun avec les autres participants à la conférence
qui n’étaient pas du Fatah, n’allait pas avoir d’objection pour
inclure le Document des prisonniers parmi les propositions à
prendre en compte, avec les nombreuses autres qui leur étaient
soumises. Cependant, ce que les leaders du Fatah voulaient était
l’adoption de ce document comme la base exclusive de dialogue
pour les Palestiniens. Il n’était pas difficile pour le Hamas de
voir à quoi menait cette proposition. Le document appelait à
l’acceptation de l’« initiative arabe » et à la soumission à la
« légitimité internationale », ainsi qu’à la reconnaissance de
l’OLP comme « seul représentant légitime du peuple
palestinien ». Toutes ces trois considérations entraînaient la
reconnaissance du droit d’Israël à exister.
Le Hamas rejeta l’ultimatum d’Abbas ainsi que sa demande
renouvelée qu’il rejoigne l’OLP. Le Hamas dit qu’il ne
considérerait de le rejoindre qu’après l’application de réformes
au sein de l’OLP, comme accepté lors des discussions du Caire de
mars 2005. Répondant à la menace d’un référendum, le
porte-parole du Hamas Sami Abu Zuhri dit : « Cette menace est
une tentative visant à mettre la pression et à imposer des
pré-conditions et une certaine politique sur le Hamas. L’idée
d’une référendum est une tentative d’éviter le choix du peuple
palestinien et le programme politique du Hamas, qui a remporté
le soutien de la majorité des Palestiniens dans les dernières
élections parlementaires ».
Les leaders du Hamas refusèrent d’accepter que ce document parle
nécessairement pour l’ensemble du mouvement simplement parce
qu’un des hauts membres emprisonnés du Hamas l’avait signé. Ils
déclarèrent que ce n’était pas de la sorte que fonctionnait le
Hamas et que cela n’était pas la façon dont il prenait des
décisions. Peu de temps s’en fallut avant que d’autres
prisonniers du Hamas dans les geôles israéliennes émettent un
communiqué pour se distancer du Document des prisonniers. Ils
écrivirent : « Ce document ne représente pas les avis de tous
les prisonniers (du Hamas). Il ne représente que ceux qui l’ont
signé. Les prisonniers du Hamas n’ont pas participé dans la
préparation de ce document et nous n’en avons été informé qu’à
travers les médias ».
Bien qu’Israël ait dit que le Document des prisonniers ne
changeait pas grand-chose, car, entre autres, il soutenait la
poursuite de la résistance, Mahmoud Abbas fit son immédiate
priorité de forcer le Hamas à l’accepter. Il est bien possible
que cette stratégie soit ce qui dérailla tout le projet de
dialogue national et de réconciliation. Finalement, la
conférence se termina sans accord. En conséquence, il n’y eut
aucune amélioration sur le terrain. Les différends
s’accentuèrent, atteignant leur sommet dans la première semaine
du moins de juin 2006. Samedi 3 juin, le Fatah déploya une
nouvelle milice dans les rues de la ville cisjordanienne de
Jénine. Plus de deux mille hommes en T-shirts noirs et bandeaux
blancs marchèrent dans la vie pour défier le Hamas, accusant le
Hamas de servir des intérêts étrangers. D’autres slogans
déclaraient que le président Abbas, en tant que leader du Fatah,
était déterminé à diriger les Palestiniens vers un accord de
paix avec Israël. Un leader local du Fatah du nom d’Atan Abu Rmeileh
dit aux miliciens : « Vous êtes là pour protéger votre peuple et
les institutions de l’autorité palestinienne. Nous sommes loyaux
envers notre peuple, non pas comme ceux qui se sont vendus à des
capitales arabes et non-arabes ». Cela faisait allusion aux
prétendus liens du Hamas avec Damas et Téhéran.
La direction du Fatah dit que la formation de la nouvelle unité,
comprenant deux mille cinq cents membres, était leur réponse à
la milice du Hamas forte de trois mille hommes que le
gouvernement avait mobilisé un mois plus tôt dans la bande de
Gaza, en défi aux objections du président Abbas. Avec trois
mille autres activistes du Fatah s’entraînant à Gaza, se
préparant pour s’y déployer, la probabilité d’un conflit
sanglant entre les deux groupes devenait plus concevable. Il y
avait d’abondantes preuves que peu d’individus au sein du Fatah
étaient prêts à reconnaître la légitimité du gouvernement dirigé
par le Hamas. Selon eux, le Hamas était un ennemi qui devait
être traité en tant que tel. Cependant, la question de savoir si
le Fatah aurait été capable d’un coup militaire contre le Hamas
restait incertaine. Non seulement il était divisé et faible,
mais ses leaders perdaient vite en crédibilité et en sympathie
populaire. Les Israéliens semblaient perdre patience et
décidèrent de faire le travail eux-mêmes.
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
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